Lors d’une interview au site chassons.com, le président de la Fédération nationale des chasseurs Willy Schraen s’est adonné à l’une de ces provocations dont il a le secret. «À un moment on va devoir finir par agir sur le chat» explique-t-il en se justifiant par le fait que selon lui il tue « bien plus d’animaux que les chasseurs ».
Dans son interview à chassons.com, Willy Schraen a suggéré que :
« Le piégeage du chat à plus de 300 mètres de toute habitation, ce serait une bonne chose »
Ce propos ne pouvait évidemment que provoquer une vague d’indignation. Suite à cela, il ne dormirait pas depuis plusieurs jours, serait sous anxiolytiques, recevant des menaces ou étant l’objet de « contrat » sur sa tête, etc. Il serait même sous protection policière, ainsi que sa famille.
Tout cela ne doit rien au hasard, mais fut savamment calculé. Willy Schraen savait très bien les réactions qu’il allait provoquer et c’est ce qui était recherché. Pour se poser en victime, pour augmenter la tension, pour attiser le feu.
Il avait d’ailleurs tout prévu : d’abord susciter l’émoi à propos des chats, puis expliquer ensuite qu’il ne s’agissait que de « chats errants revenus à l’état sauvage », qui constitueraient une menace pour la « biodiversité » et de nombreux oiseaux.
Ce faisant, il pose un véritable problème, pour apporter une solution relevant du problème. Car tant les chasseurs que le développement urbain anarchique, associé à une « consommation » d’« animaux de compagnie » anarchique, relève du déséquilibre apporté par les humains au situation naturelle.
Opposer les chats aux oiseaux est exemplaire d’une vision du monde totalement erronée. C’est pour cela que les défenseurs des animaux ne font pas cette opposition, mais combattent pour aider les oiseaux et pour chercher à améliorer la situation des chats, ceux-ci étant massivement abandonnés, la situation ayant empiré comme jamais ces dernières années.
Mais cela n’intéresse pas les chasseurs qui veulent surtout s’en prendre aux chats en en faisant les bouc-émissaires de la destruction de la vie sauvage. Ils ne sont pas là pour s’opposer à des désastres provoqués par les humains, mais pour renforcer leur propre position.
C’est un jeu tactique, de bout en bout, et d’ailleurs Willy Schraen a même finalement prétendu que les gens ont mal interprété ses propos, qu’il n’a jamais parlé de tuer les chats. De la part d’un chasseur, on a du mal à le croire. Surtout quand il parle ensuite pour se défendre… de les remettre à la SPA !
Comme on le voit, à la provocation succède la provocation ; c’est absurde et totalement infaisable de toutes manières, mais l’idée est d’en rajouter, toujours d’en rajouter.
Tout défenseur des animaux sait d’ailleurs que la réponse immédiate n’est pas la SPA, mais le mouvement en soutien aux « chats libres ». Il faut ainsi savoir que la loi du 6 janvier 1999 a donné un statut de « chats libres » aux chats errants, à condition qu’ils soient stérilisés, identifiés (tatouage avant et désormais une puce), par des bénévoles indépendants, des associations de protection animale ou des communes, qui s’engagent à les nourrir après les avoir remis où ils étaient.
Cette activité est essentielle et les gens la menant font partie de la première ligne au service des animaux. C’est un travail concret, comme celui pour les oiseaux, qui ne relève d’aucune médiatisation, d’aucun soutien ou si peu. Et réaliser une telle activité implique une rupture avec la vie quotidienne exigée par l’idéologie dominante, car culturellement cela apparaît comme totalement « bizarre ».
On a donc de la part de Willy Schraen, plutôt qu’un véritable sujet, une opération provocation savamment orchestrée. La chasse n’est pas qu’un simple « loisir » en France, elle représente un élément fondamental du dispositif réactionnaire français. Willy Schraen agit ainsi en militant, pour mobiliser toute une frange de la population réfractaire à tout changement, culturel, écologique, etc.
En ce temps de crise, alors que la société est profondément bouleversée par la situation sanitaire, les réactionnaires voient une occasion en or à saisir pour répandre leur vision du monde. S’en prendre au chat n’est ici qu’un prétexte afin de pouvoir critiquer les défenseurs de la natures et des animaux.
C’est la raison pour laquelle dans la même interview il a assumé tout une posture violente, virile, digne des mentalités les plus arriérées :
« j’aimerais bien qu’on en choppe quelques-uns quand-même », « il y a quelques coups de poing dans la gueule qui se perdent », « je comprends le chasseur aujourd’hui qui dit si j’en choppe un, il va prendre une bonne branlée ».
C’est de toute une vision du monde dont il s’agit là, celle refusant de voir les exigences historiques de l’époque, s’imaginant trouver refuge dans un passé fantasmé, avec l’attitude du gaulois « bon vivant », grande gueule et adepte du coup de point érigé art de vivre.
Willy Schraen avait exactement ce genre d’attitude et d’appel à la violence contre la mobilisation démocratique et populaire opposée à la chasse à courre. On ne sera pas étonné à ce sujet que Willy Schraen ait reçu immédiatement le plein soutien de la part de Guy Harlé d’Ophove, figure majeure de la réaction, président de la fédération des chasseurs de l’Oise, département bastion de la chasse à courre.
On a encore ici un exemple de ce qu’on doit appeler la lutte des classes. La lutte des classes authentique, pas celle imaginée par la CGT.