Démagogue assumé représentant l’aile ultra-populiste de La France Insoumise, François Ruffin abat ses cartes. Il vise désormais clairement les élections présidentielles et se présente par conséquent comme « constructif ».
François Ruffin est un être révoltant pour toute personne de gauche, car il imite le contenu de celle-ci à travers des postures et des caricatures. Il est totalement à l’extérieur du mouvement ouvrier, tout en se prétendant « populaire » ; machiavélique de bout en bout, il dénonce les puissants mais fait bien en sorte de ne pas dénoncer la chasse à courre. C’est d’autant plus grave qu’il vient de Picardie, où il y a une réelle tradition ouvrière. François Ruffin est d’autant plus connu qu’il a réalisé une OPA populiste et qu’il contribue au démantèlement des traditions ouvrières.
Il passe maintenant à la seconde étape. Le 3 juin, il sort un gros ouvrage de quasi 300 pages, Leur folie nos vies La bataille de l’après, avec comme stratégie d’appeler à l’union de la gauche et des écologistes afin de terminer « la parenthèse libérale ». Il calibre son discours en ce sens : il revendique de ne pas vouloir supprimer le marché, mais le « réguler », il appelle à un « État stratège ». Voilà de quoi rassurer.
Quant au cinéma qu’il fait actuellement au sujet de sa proposition de loi sur les femmes de ménage, que LREM a modifié et selon lui vidé de son contenu, c’est un calcul politique qui vise à lui donner un positionnement social en général, afin de gommer toute possibilité d’avoir l’image d’une liaison particulière avec la classe ouvrière. Son nouvel ouvrage est présenté d’ailleurs comme le fruit de discussions avec « des infirmières bien sûr, un ambulancier, des auxiliaires de vie, des caissières, un libraire, un cariste de chez Amazon, un ouvrier de chez Valeo, une patronne de bar-tabac, un routier à l’arrêt… »
Ce que fait François Ruffin se résume tout simplement en disant qu’il arrondit les angles. Il a réussi sa mise en orbite politique en deux temps, trois mouvements. Il s’oppose aux notables à Amiens : c’est le François Ruffin démocratique. Il profite des Picards et de Nuit Debout pour s’accorder une place dans l’orbite de La France Insoumise : c’est le François Ruffin opportuniste. Il commence ensuite à profiter de ses réseaux et des gilets jaunes pour jouer au député-reporter, c’est le François Ruffin démagogue.
Et François Ruffin ose tout. Il n’a jamais parlé d’écologie et n’a jamais osé dénoncer les chasseurs. Cela ne l’empêche pas de se présenter depuis quelques mois comme un fervent défenseur de l’écologie. Il n’a pas honte de cette escroquerie : à ses propres yeux, c’est un sauveur qui s’ajuste à ce qu’il faut.
Il sait également qu’il doit faire semblant d’être dans la lignée de la gauche s’il veut être élu. Alors il change son profil, comme on le fait sur Facebook. Voilà ce qu’il raconte sans aucune gêne dans Libération, dans ce qui consiste en une prise d’assaut :
« Vous utilisez le mot gauche mais il est en débat.
Pour moi, ça veut toujours dire quelque chose. Je suis dans le camp des partageux. C’est un fil qui part de 1789, qui traverse la Commune, qui comprend Jaurès, le Front populaire, le Conseil national de la résistance, qui embrasse les deux mai 1968, ouvrier et étudiant, et qui fait sien 1981. Qui s’arrête, en revanche, en 1983. Je peux même m’amuser à le dater : le 23 mars 1983, jour où Lionel Jospin, premier secrétaire du parti socialiste, parle d’une «parenthèse libérale». Une parenthèse que, au fond, près de quarante années plus tard, nous n’avons toujours pas refermée. Voilà mon héritage.
Et depuis l’adolescence, j’ai bien perçu la «folie» de la croissance, le délire des élevages industriels, la nécessité historique qu’est l’écologie. D’où la formule, qui me convient parfaitement : «Consommer moins et répartir mieux.» »
On est ici d’autant plus dans la mythologie pure et simple, car évidemment jamais François Ruffin adolescent au collège-lycée jésuite La Providence (comme Emmanuel Macron) n’a été un rebelle en quoi que ce soit. Il a bien gentiment fait sa maîtrise de Lettres Modernes et obtenu un diplôme du Centre de formation des journalistes, ce qui demande de rentrer dans un moule tout à fait bourgeois.
François Ruffin est une mascarade, c’est l’Emmanuel Macron de La France Insoumise. Barrer la route à ce personnage extérieur à tous les niveaux au mouvement ouvrier est incontournable.