Valeurs Actuelles a publié un article romancé mettant en scène Danièle Obono et cette dernière, ainsi que ses soutiens, parle de « racisme ». C’est en fait une querelle inter-identitaire qui a encore lieu, parasitant l’opinion publique afin de l’empêcher de cerner les vrais problèmes.
Si on lit les auteurs de la négritude ou Frantz Fanon, on peut voir qu’il y a une véritable vision racialiste du monde. Les personnes à la peau « noire », qui serait une race, porteraient quelque chose de Bon et de Beau. Ils représenteraient une certaine pureté, une certaine authenticité. Ce racialisme prétend naturellement avant tout être anti-raciste, car c’est le seul moyen de mobiliser. Mais il est avant tout une idéologie inventée par des petits-bourgeois, le plus souvent des petits-bourgeois de pays colonisés ayant étudié dans les universités des pays colonialistes.
La notion de « Pakistan » a ainsi été inventé dans une université britannique, par des étudiants des Indes et le premier président indien ne parlait même pas la langue de culture « islamique » qu’il comptait imposer à tous les Pakistanais. Tout cela est bien connu de quiconque connaît l’histoire des idées et la Gauche historique a toujours combattu ces affirmations identitaires.
Valeurs Actuelles, la principale revue du camp conservateur-réactionnaire, le sait également. Et il est dans son intérêt d’assimiler la Gauche à ces identitaires. Elle a donc organisé un coup se voulant à la fois subtil et grossier. Cet été, la revue a publié des petits articles romancés autour d’une fiction : François Fillon se retrouve pendant la Révolution française, Nicolas Hulot sous Charlemagne, Didier Raoult dans une tranchée de la Première Guerre mondiale.
Pour le numéro du 27 août, ils ont pris comme personnage une députée La France Insoumise, Danièle Obono, qui est issue de la bourgeoisie gabonaise. Ils l’ont mis dans le passé dans une Afrique noire tribale contribuant à l’esclavage, confrontant son propre discours « progressiste » à la réalité barbare de l’Afrique d’alors. L’idée est bien sûr de se moquer du discours faisant de l’Afrique noire d’alors une sorte de paradis avec des gens authentiques, partageurs, etc.
Il faut dire que Danièle Obono est une cible facile. Elle est issue de « Socialisme par en bas » (SPEB), une section française du SWP britannique, qui pratique un discours communautaire-identitaire racoleur, dans une démarche universitaire typiquement anglo-saxonne. SPEB avait même tenté de faire un « bulletin des mosquées ». Elle se définit encore aujourd’hui comme lié historiquement au trotskisme, plutôt proche des indigènes, panafricaniste, afroféministe, altermondialiste, écosocialiste, etc.
Elle a d’ailleurs salué de manière « africaniste » l’acteur Chadwick Boseman, décédé suite à une maladie ; l’acteur aurait été un « ROI ». Il était la principe figure du film hollywoodien « Black Panther », régulièrement présenté comme relevant de la « fierté noire » alors qu’on y trouve dans un monde ultra-avancé technologiquement tous les clichés du noir tribal, patriarcal et ultra-hiérarchique, ayant le rythme dans la peau, tagueur, avec une sorcière guérisseuse, des hommes menant un combat à mort pour devenir chef, etc.
Bref, on l’aura compris, Danièle Obono est l’antithèse de la Gauche historique et elle est du pain béni pour Valeurs Actuelles, qui a la même vision du monde mais inversé. Dans la petite histoire, Danièle Obono est confronté à l’esclavage présentée de manière racoleuse, voire même sordide. La présentation se veut historique, mais est anti-historique par définition même, le choix fait étant de toutes façons la provocation. D’ailleurs, Danièle Obono est à la fin libéré par un membre du clergé catholique proposant même de se sacrifier pour parvenir à l’acheter pour la sortir de l’esclavage.
On peut de toutes façons considérer que de part et d’autre, c’est la démarche anti-historique qui prime. C’est logique : s’il n’y a plus d’Histoire, alors il n’y a plus de lutte des classes. C’est une reprise de la fameuse phrase de Karl Marx – « L’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’a été que l’histoire de la lutte de classes » – mais pour nier tant l’histoire que la lutte des classes. Reste la société, où les idées seraient comme sur une bourse où il faut gagner des parts de marché. Valeurs Actuelles, par son article romancé, cherche à grappiller des points, ses dénonciateurs sur Twitter tentent également de grappiller des points (d’ailleurs ils font exprès de ne pas mettre de hashtag lié à Valeurs Actuelles pour ne pas en faire la « promotion »).
Tout cela reflète indubitablement une américanisation de la société, au moins dans les batailles d’idée. Cependant, on est en France et c’est la crise. On est donc en droit de s’attendre à des choses mouvementées et tant les identitaires conservateurs que les identitaires « anti-racistes » ne pourront pas l’empêcher. Il n’y a pas de place pour de tels gens dans notre pays quand la lutte des classes reprend ses droits, car l’Histoire sait comment elle doit primer.