Afin de forcer à la légalisation du cannabis, le gouvernement fait procéder à une « enquête » sur l’avis des gens.
Du 13 janvier au 28 février 2021, l’Assemblée nationale met en place une consultation en ligne, avec un questionnaire au sujet du « cannabis récréatif ». Notons immédiatement que rien que par ce terme de récréatif, même mis entre guillemets, l’Assemblée nationale tombe sous le coup de la loi en raison d’une présentation d’une drogue sous un jour favorable.
Mais il est bien loin le temps où le policier zélé, souvent obtus mais finalement avec raison, alpaguait quelqu’un pour le moindre symbole lié au cannabis sur un de ses habits. Désormais, le libéralisme libertaire du capitalisme élargit toujours davantage le champ des consommations et le cannabis fait partie des prochains terrains d’accumulation. Il l’est déjà avec les mafias, mais là il s’agit de passer à grande échelle, de proposer un loisir abrutissant de plus à la société toute entière.
Voici ce que cela donne dit dans le langage à la fois complètement hypocrite et administratif-technique de l’Assemblée nationale :
« Il s’agit, pour la mission, de dresser le bilan des politiques publiques menées en matière de prévention et de répression des trafics et usages du cannabis, de proposer un panorama des expériences étrangères de légalisation ou de dépénalisation et de contribuer à une réflexion sur l’éventuelle évolution du cadre réglementaire français relatif à cette substance. »
Les dés sont d’ailleurs tellement pipés que, dans le questionnaire, si l’on est pour la légalisation, on doit répondre à sept questions particulières, dont deux avec du texte libre, alors que si on est contre, on a deux questions seulement, dont une avec texte libre.
On aura compris qu’il s’agit de pousser à l’expression les tenants d’une légalisation et de faire passer ceux du maintien de l’interdiction pour des conservateurs bornés, dépassés, etc. Et il sera dit finalement, pour l’emporter : vous voyez, même des gens contre le cannabis considère que légaliser est la moins pire des solutions, etc.
Naturellement, il sera également expliqué que tous les partis sont d’accord là-dessus, que cela dépasse les orientations politiques, que c’est une question sociétale. Il sera ajouté comme cerise sur le gâteau les ressources fiscales et le tour sera joué.
Cependant, il y a heureusement une société qui n’a pas encore été délavée à ce point quant à la question du cannabis. Si la jeunesse des grandes villes est très favorable au cannabis, qu’elle voit comme relevant d’un mode de vie distancé et branché en même temps, le reste de la jeunesse n’y est nullement favorable. Et l’opposition au cannabis dans la société reste puissante dans un pays où les bonnes manières relèvent d’une tradition historique depuis le 17e siècle.
De plus, les Français ont assez de conscience sociale pour saisir la problématique. Tout le monde sait très bien que le cannabis est une fuite – une fuite contre l’anxiété, contre un malaise personnel et social. Il y a donc une compréhension de cette question et un refus de chercher à ostraciser. Mais accepter la légalisation en tant que telle, accepter le cannabis dans le panorama… là c’est carrément autre chose.
Reste qu’il faut une voix pour exprimer ce refus du cannabis. Et les digues sont toutes tombées à Gauche. Même Lutte Ouvrière est favorable à la dépénalisation, c’est dire ! Il faut dire que le cannabis fait partie du pack post-moderne aux côtés des LGBT, des migrants, des thèses « décoloniales », de la fascination identitaire pour la couleur de peau et les religions, etc.
Ce pack consiste en des thèses sociétales à l’anglo-saxonne pour empêcher celles de la Gauche historique de s’affirmer… mais on est en France, un pays où la lutte des classes a un grand patrimoine. Cela ne sera certainement pas aussi simple que cela pour le capitalisme qui veut faire passer dans la société son marché du cannabis. Et ce d’autant moins dans un contexte de crise où l’opération d’abrutissement des gens apparaîtra comme d’autant plus claire.