C’était une séquence très attendue.
Le 9 mai est pour les pays de l’ex-Union Soviétique l’équivalent du 8 mai pour nous en France, le jour de la victoire sur le nazisme ; le décalage tient à la différence de fuseau horaire lors de la reddition de l’Allemagne nazie.
Cela dit le régime ukrainien a désormais modifié la date en le 8 mai, « arrangeant » son contenu, afin de se conformer à l’idéologie des pays capitalistes occidentaux, c’est-à-dire de gommer le côté « soviétique » donc, ce qui converge avec sa propre approche de se revendiquer du nationalisme ukrainien allié au nazisme.
Rappelons qu’en Ukraine, toute valorisation de l’URSS à quelque niveau que ce soit est interdite, tout comme tout ce qui relève de l’idéologie communiste. Les monuments célébrant la résistance soviétique au nazisme sont systématiquement détruits, tout comme d’ailleurs tout ce qui a une dimension « soviétique » dans l’architecture, la décoration, etc.
Le discours de Vladimir Poutine, incontournable pour qui veut saisir les tenants et aboutissants de la guerre en Ukraine, prend bien entendu cette position à contre-pied, insistant sur le passé soviétique, présentant la Russie comme le vrai rempart multi-ethnique au nationalisme, etc.
On notera ici que les commentateurs occidentaux n’ont cessé de dire qu’il n’y aurait pas assez de troupes pour le défilé, que Vladimir Poutine déclarerait officiellement la guerre, car l’armée russe est en train d’être défaite, etc.
Le 9 mai 2022 s’est cependant tenu très exactement comme il se déroule chaque année, à tous les niveaux. Tout est très protocolaire, et c’est resté entièrement traditionnel.
Voici donc la vidéo du défilé militaire, suivi du discours de Vladimir Poutine. On notera au passage que de tels défilés militaires ont lieu dans toutes les principales villes de Russie, comme les manifestations de masse du « régiment des Immortels », où les gens défilent en tenant des pancartes avec une photographie d’un ancêtre ayant participé à la « grande guerre patriotique » contre l’Allemagne nazie et ses alliés.
On notera également absolument, à la fin de la vidéo du défilé militaire, le moment profondément intense et pathétique où le président russe Vladimir Poutine assume un air débonnaire et profondément mélancolique, typiquement russe, foncièrement russe, au moment il pose une fleur sur chaque symbole des « villes héroïques » de la grande guerre patriotique, dont Kiev et Odessa.
Citoyens russes, Chers vétérans, Camarades soldats et marins, sergents et sergents-majors, aspirants et sous-officiers, Camarades officiers, généraux et amiraux,
Je vous félicite pour le Jour de la Grande Victoire !
La défense de notre Patrie lorsque son destin était en jeu a toujours été sacrée.
C’est avec le sentiment du vrai patriotisme que la milice de [Kouzma] Minine [simple boucher qui souleva Moscou contre les Polonais au 16e siècle] et [du prince Dmtri] Pojarski [qui participa à cette lutte et devint le « Sauveur de la mère-patrie »] s’est soulevée pour la patrie, que les soldats sont passés à l’offensive sur le champ de Borodino [contre Napoléon, non loin de Moscou] et ont chassé l’ennemi de Moscou et Leningrad, Kiev et Minsk, Stalingrad et Koursk, Sébastopol et Kharkov.
Aujourd’hui, comme par le passé, vous vous battez pour notre peuple dans le Donbass, pour la sécurité de notre mère-patrie, pour la Russie.
Le 9 mai 1945 a été inscrit à jamais dans l’histoire du monde comme un triomphe du peuple soviétique uni, sa cohésion et sa puissance spirituelle, un exploit sans précédent sur les lignes de front et sur le front intérieur.
Le Jour de la Victoire est intimement cher à nous tous. Il n’y a pas de famille en Russie qui n’ait été brûlée par la Grande Guerre patriotique.
Sa mémoire ne s’efface jamais.
Ce jour-là, les enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants des héros défilent dans un flux sans fin du Régiment Immortel. Ils portent des photos des membres de leur famille, des soldats tombés qui sont restés jeunes pour toujours et des anciens combattants qui sont déjà partis.
Nous sommes fiers de la génération courageuse invaincue des vainqueurs, nous sommes fiers d’être leurs successeurs, et il est de notre devoir de préserver la mémoire de ceux qui ont vaincu le nazisme et nous ont confié la vigilance et tout pour contrecarrer l’horreur d’une autre guerre mondiale.
C’est pourquoi, malgré toutes les controverses dans les relations internationales, la Russie a toujours prôné la mise en place d’un système de sécurité égal et indivisible, indispensable à l’ensemble de la communauté internationale.
En décembre dernier, nous avons proposé de signer un traité sur les garanties de sécurité. La Russie a exhorté l’Occident à mener un dialogue honnête dans la recherche de solutions significatives et de compromis, et à tenir compte des intérêts de chacun.
En vain. Les pays de l’OTAN ne voulaient pas nous écouter, ce qui signifie qu’ils avaient des plans totalement différents. Et nous l’avons vu.
Une autre opération punitive dans le Donbass, une invasion de nos terres historiques, dont la Crimée, était ouvertement en préparation. Kiev a déclaré qu’il pourrait parvenir aux armes nucléaires. Le bloc de l’OTAN a lancé un renforcement militaire actif sur les territoires qui nous sont adjacents.
Ainsi, une menace absolument inacceptable pour nous se créait à nos frontières en montant en puissance. Tout indiquait qu’un affrontement avec les néo-nazis et les banderistes soutenus par les États-Unis et leurs sbires était inévitable.
Permettez-moi de répéter que nous avons vu l’infrastructure militaire se construire, des centaines de conseillers étrangers commencer à travailler et des équipements d’armes de pointe être régulièrement livrées en provenance des pays de l’OTAN.
La menace grandissait chaque jour.
La Russie a lancé une frappe préventive contre l’agression. C’était une décision forcée, opportune et la seule correcte. Une décision d’un pays souverain, fort et indépendant.
Les États-Unis ont commencé à revendiquer leur exceptionnalisme, en particulier après l’effondrement de l’Union soviétique, dénigrant ainsi non seulement le monde entier mais aussi leurs satellites, qui doivent faire semblant de ne rien voir et docilement le suivre.
Mais nous sommes un pays différent. La Russie a un caractère différent. Nous n’abandonnerons jamais notre amour pour notre mère-patrie, notre foi et nos valeurs traditionnelles, les coutumes de nos ancêtres et le respect de tous les peuples et cultures.
Pendant ce temps, l’Occident semble prêt à annuler ces valeurs millénaires. Une telle dégradation morale sous-tend les falsifications cyniques de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, aggravant la russophobie, célébrant les traîtres, se moquant de la mémoire des victimes et effaçant le courage de ceux qui ont remporté la Victoire dans la souffrance.
Les milices du Donbass aux côtés de l’armée russe se battent aujourd’hui sur leur terre, où les serviteurs des princes Svyatoslav et Vladimir Monomakh [tous deux grands-ducs de la Rus’ de Kiev au 10e-11e siècle], les soldats sous le commandement de Roumiantsev et Potemkine, Souvorov [tous d’immenses grandes figures militaires du 18e siècle] et Brusilov [responsable militaire durant la première guerre mondiale rejoignant l’armée rouge] ont écrasé leurs ennemis, où les héros de la Grande Guerre patriotique [le commandant du premier front ukrainien libérant Kiev et tué par les banderistes en 1944] Nikolai Vatoutine, [la grande figure des partisans anti-nazis l’Ukrainien] Sidor Kovpak et [la tireuse d’élite ukrainienne] Lyudmila Pavlichenko ont résisté jusqu’au bout.
Je m’adresse à nos forces armées et aux milices du Donbass. Vous vous battez pour notre patrie, son avenir, pour que personne n’oublie les leçons de la Seconde Guerre mondiale, pour qu’il n’y ait pas de place dans le monde pour les tortionnaires, les escadrons de la mort et les nazis.
Aujourd’hui, nous nous inclinons devant la mémoire sacrée de tous ceux qui ont perdu la vie dans la Grande Guerre patriotique, les mémoires des fils, filles, pères, mères, grands-pères, maris, épouses, frères, sœurs, parents et amis.
Nous inclinons la tête à la mémoire des martyrs d’Odessa qui ont été brûlés vifs à la Maison des syndicats en mai 2014 [par les nationalistes ukrainiens], à la mémoire des personnes âgées, des femmes et des enfants du Donbass qui ont été tués dans des bombardements atroces et barbares par des néo-nazis [de 2014 à 2022].
Nous inclinons la tête devant nos camarades combattants qui sont morts courageusement dans la juste bataille – pour la Russie.
Je déclare une minute de silence.
[Une minute de silence.]
La perte de chaque officier et soldat est douloureuse pour nous tous et une perte irrémédiable pour les familles et les amis.
Le gouvernement, les autorités régionales, les entreprises et les organismes publics feront tout pour entourer ces familles et les aider. Un soutien particulier sera apporté aux enfants des compagnons d’armes tués et blessés.
Le décret présidentiel à cet effet a été signé aujourd’hui.
Je souhaite un prompt rétablissement aux soldats et officiers blessés, et je remercie les médecins, les ambulanciers, les infirmières et le personnel des hôpitaux militaires pour leur travail désintéressé. Notre plus profonde gratitude va à vous pour avoir sauvé chaque vie, n’épargnant souvent aucune pensée pour vous-mêmes sous les bombardements sur les lignes de front.
Camarades,
Des soldats et des officiers de nombreuses régions de notre immense mère-patrie, y compris ceux qui sont directement arrivés du Donbass, de la zone de combat, se tiennent maintenant côte à côte ici, sur la Place Rouge.
Nous nous souvenons comment les ennemis de la Russie ont essayé d’utiliser des gangs terroristes internationaux contre nous, comment ils ont essayé de semer des conflits interethniques et religieux afin de nous affaiblir de l’intérieur et de nous diviser.
Ils ont complètement échoué.
Aujourd’hui, nos guerriers de différentes ethnies se battent ensemble, se protégeant mutuellement des balles et des éclats d’obus comme des frères.
C’est là que réside la puissance de la Russie, une grande puissance invincible de notre nation multiethnique unie.
Vous défendez aujourd’hui ce pour quoi vos pères, grands-pères et arrière-grands-pères se sont battus. Le bien-être et la sécurité de leur patrie étaient leur priorité absolue dans la vie.
La loyauté envers notre patrie est la principale valeur et un fondement fiable de l’indépendance de la Russie également pour nous, leurs successeurs.
Ceux qui ont écrasé le nazisme pendant la Grande Guerre patriotique nous ont montré un exemple d’héroïsme pour tous les âges. C’est la génération des vainqueurs, et nous les admirerons toujours.
Gloire à nos forces armées héroïques ! Pour la Russie ! Pour la victoire ! Hourra !
[Les soldats répondent par plusieurs « Hourras », suit l’hymne russe fondé sur le thème musical l’hymne soviétique, alors que sont tirées des salves d’artillerie par des armes d’époque, rappelant la tradition soviétique de marquer les victoires pendant la « grande guerre patriotique ».]