Une premier fait marquant en ce sens.
C’est un phénomène de la plus haute importance qui s’est déroulé le 3 septembre 2022 à Prague, capitale de la République tchèque. Il y a en effet eu une manifestation demandant la démission du gouvernement en raison de la hausse des prix et du soutien à l’OTAN, avec l’affirmation très claire du refus de participer au front soutenant la Russie. Or, le pays est idéologiquement entièrement dans les mains de la superpuissance américaine.
Le Premier ministre Petr Fiala a ainsi expliqué que la manifestation avait été faite à l’appel « des forces qui professent une orientation pro-russe, qui sont proches de positions extrêmes et qui sont contre les intérêts de la République tchèque ».
Une telle manifestation, avec au moins 70 000 personnes (selon les autorités), est donc une première réelle rupture dans ce pays, et au-delà dans tous les pays d’Europe qui sont entièrement alignés sur la superpuissance américaine et l’OTAN.
Une telle manifestation peut très bien avoir lieu demain à Vienne en Autriche ou Rome en Italie, pour prendre deux pays où la contestation est très vive, mais également à Berlin en Allemagne ou même Paris. C’est cela tendance du moment… pour le meilleur et pour le pire. Car les choses peuvent pencher à droite comme à gauche.
A Prague, les deux mouvements majeurs ayant porté le mouvement, dans une grande concurrence bien entendu, sont ainsi Trikolora et le KSCM. Trikolora, avec à sa tête une femme, Majerová Zahradníková, est à peu près l’équivalent du Rassemblement national de Marine Le Pen. Le KSCM est le Parti communiste de Bohême et Moravie. Il faut savoir que, historiquement, la Tchécoslovaquie est le pays où le Parti Communiste avait proportionnellement le plus d’adhérents, dans le seul pays d’Europe centrale à avoir d’ailleurs réellement développé le capitalisme au début du 20e siècle.
On a donc une véritable polarisation ou un début de polarisation, mais sans que l’alternative à gauche n’apparaisse comme différente, supérieure à celle de l’extrême-Droite, les gens ayant une conscience sociale trop arriérée pour être au niveau. Il ne faut pas se leurrer : dans la situation actuelle, la Gauche tchèque anti-OTAN va se faire manger toute crue par l’extrême-Droite.
Si l’on veut ici parler de la France, il y a également une nuance importante. La manifestation à Prague était également anti-Union européenne, ce qui en France n’est pas possible : tous les partis parlementaires acceptent l’Union européenne, parce que la bourgeoisie française y joue un rôle majeur. Les mouvements extra-parlementaires sont quant à eux totalement impuissants.
Le modèle praguois n’est donc pas reproductible, alors que de plus les Tchèques sont également des Slaves proches des Russes historiquement, que la dépendance énergétique tchèque vis-à-vis de la Russie est très marquée. Néanmoins, cela montre qu’il se passe quelque chose, le fait même que cette manifestation a lieu dans un pays aligné totalement sur la superpuissance américaine montre qu’une cassure est possible.
Il faut étudier ce processus, qui peut très bien prendre la forme d’une rupture rampante dans la société – en prenant bien en compte que le grand risque, c’est la mise d’une opposition fictive « élites » – peuple qui ne peut que servir le fascisme. La France insoumise est ici, rappelons le, un tremplin pour la montée du fascisme dans notre pays. Ce dont on a besoin, c’est de la Gauche historique, pas du populisme, ni des gilets jaunes, etc.