Allons, allons, il faut raison garder. La dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron, à la suite des élections européennes de 2024, a provoqué une onde de choc. Le trouble et la perplexité règnent partout. Mais tout est très simple, en fait, si on pose les choses adéquatement. En quelques points, on comprend tout.
1. Les résultats sont tranchés
Voyons les faits que sont les résultats. Le bloc présidentiel, autour du parti présidentiel Renaissance (et avec le Modem, Horizons, le Parti Radical, l’Union des démocrates et indépendants) a obtenu 14,5% des voix. En face, l’opposition est donc largement majoritaire, de manière écrasante.
Il y a déjà le Rassemblement national, avec 31,5% des voix. Il y a ensuite le bloc autour des socialistes, avec 14% des voix.
La France insoumise, qui représente la « gauche » populiste, a 10,1% des voix. La Droite historique, avec Les Républicains, a 7,1% des voix.
Europe Écologie Les Verts a 5,5% des voix, les nationalistes de Reconquête (avec Marion Maréchal) a 5,3% des voix, et le PCF a 2,3% des voix.
L’Alliance rurale a 2,2% des voix, le Parti Animaliste 2%, les nationalistes de l’UPR et des Patriotes, 1% chacun.
2. Il faut bien une légitimité
Évidemment, ce sont les élections européennes et cela ne veut pas dire que des élections parlementaires auraient donné le même résultat. On ne peut toutefois pas gouverner avec l’impression qu’on ne représente que 14% des voix, alors qu’il y a eu 51,4% de participation.
Dissoudre est en même temps un risque, cela implique un très grand risque qu’aux élections législatives qui vont avoir lieu, il y aura une cohabitation. Et on pouvait se dire qu’ayant la majorité parlementaire, même si précaire, Emmanuel Macron pouvait manœuvrer quand même, d’une manière ou d’une autre.
Cependant, à un moment, cela n’aurait plus réellement fonctionné, alors pourquoi attendre ? Qui plus est, la France est ce qu’elle est…
3. Le RN n’est pas fasciste, mais les Français sont vraiment nuls
Le RN de Marine Le Pen et de Jordan Bardella n’est pas du tout fasciste. C’est un parti exprimant des aigreurs et du protectionnisme, une nostalgie prononcée et la peur du déclassement social. Et il soutient le régime ukrainien.
Ce n’est donc pas une « menace » pour Emmanuel Macron, malgré ses propos. C’est un concurrent.
Et, à côté de cela, les Français sont nuls. Ils ne font pas de politique, et quand ils en font, ils mélangent tout et sont mauvais. Sur le plan des idées, plus rien n’est cohérent, c’est une ignoble tambouille, avec des mélanges empruntés à la Droite et à la Gauche, sans aucune cohérence.
La situation n’est donc pas dramatique. Et il y a même une opportunité pour Emmanuel Macron s’imaginant disciple de Machiavel…
4. Emmanuel Macron impose une polarisation à l’américaine
La clef, c’est qu’Emmanuel Macron impose une cassure politique à l’américaine. Qu’importe si son parti présidentiel perd les élections, car en face il y aura une union des droites. Il aura alors réussi son parti, qui est de « moderniser » la société française, c’est-à-dire de l’aligner sur le style américain, avec deux gros partis dont les rapports de force internes dépendent de la bourse aux idées, aux activistes et aux lobbys.
Voici ce que nous disions le 4 juin 2024 pour qualifier ces élections de fictives.
« Il y a ici deux options politiques, pour faire pression dans un sens ou dans un autre. Il y a les modernistes, les bobos, LGBT, libéraux culturellement mais pour un filet social… pour les « gagnants », ceux qui profitent le plus de la situation et en veulent encore plus.
Et il y a les nationalistes, les conservateurs… pour les « perdants », les aigris ayant la nostalgique des années 1980.
Linkedin et Twitter pour les uns, Facebook et les SMS pour les autres, et Instagram et Tiktok pour tous. Cela correspond aux « Républicains » et aux « Démocrates » aux États-Unis. »
Effectivement, c’est cela qui se met en place. Ces élections européennes de 2024 ont été fictives, donc ont fait passer un cap aux institutions. De par leur vide, elles amènent une situation pleine.
Et maintenant !
Emmanuel Macron va chercher à élargir le socle de la majorité présidentielle, pour constituer un parti Démocrate à l’américaine, en prévoyant une union des droites qui formera l’équivalent des Républicains américains.
Il y a deux possibilités. Soit il a raison et l’opération fonctionne. Il aura alors réussi son opération de modernisation, d’américanisation.
Soit il a tort et c’est nous qui avons raison : la crise commencée en 2020 a tout changé et Emmanuel Macron ne reflète que l’illusion bourgeoise d’une modernité perpétuelle et contrôlée dans sa mise en place.
Dialectiquement, pour l’instant, les deux sont vrais. La société française est américanisée, le processus va fonctionner. Il fallait que le parti présidentiel perde pour obtenir sa légitimité dépassant le simple cadre de l’élection d’Emmanuel Macron. Potentiellement, le Parti démocrate à l’américaine peut naître en France désormais.
En même temps, il est vrai que les gens n’y connaissent rien et basculent d’un côté ou de l’autre, suivant une tendance. L’esprit des gens façonnés par la société de consommation est binaire. Pourtant, la France a porté beaucoup de luttes de classe et la situation historique n’est pas celle d’un vaste pays à l’écart et disposant de l’hégémonie mondiale.
La France est la maillon faible de la chaîne des pays capitalistes les plus développés. C’est un pays décadent, où tout s’effondre sur tous les plans. Rien n’a plus de solidité. Les vœux d’Emmanuel Macron sont donc vains. Son initiative ne réussit que parce plus rien ne tient… Et donc, ce qu’il vise ne tiendra pas non plus.
Et dans ce chaos, dont relève les prochaines élections pareillement, il faut donc l’esprit de Parti, les positions de la Gauche historique pour recomposer le prolétariat en tant que classe, et organiser un nouvel État, une nouvelle société. C’est l’alternative Socialisme ou barbarie!
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