Le 4 mars 2025 a été une journée chargé d’événements, montrant encore une fois que la chronologie commencée le 26 février 2024 a tout son sens. On peut même dire que quiconque ne se fonde pas dessus pour comprendre l’Histoire en plein déroulement rate l’essentiel de ce qui se passe.
Le premier choc a été, bien entendu, que les États-Unis annoncent le gel de la livraison d’armes à l’Ukraine. Donald Trump met notamment en avant sur les réseaux sociaux un propos de Volodymyr Zelensky du 1er mars comme quoi « la fin de la guerre est très, très lointaine ». Donald Trump a affirmé que « c’est la pire chose que Zelensky pouvait dire et l’Amérique ne va plus tolérer ça très longtemps ».
Une interview du vice-président américain J. D. Vance sur Fox News est sortie par la suite. Elle date théoriquement d’avant l’annonce du gel de la livraison d’armes, mais on se doute qu’il n’y a pas de hasard.
Il dit la chose suivante surtout :
« Si vous voulez de véritables garanties de sécurité, si vous voulez vraiment vous assurer que Vladimir Poutine n’envahisse plus l’Ukraine, la meilleure garantie de sécurité est de donner aux Américains un intérêt économique dans l’avenir de l’Ukraine (…) Quel est le plan ? Vous ne pouvez pas financer la guerre éternellement. Le peuple américain ne le tolérera pas. »
Cette garantie américaine indirecte vaudrait mieux que
« 20 000 soldats d’un pays quelconque qui n’a pas fait la guerre depuis trente ou quarante ans. »
Cela n’a pas raté, quelques heures plus tard, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a expliqué sa disposition à « s’asseoir à la table des négociations dès que possible », et à « travailler sous la direction énergique du président Trump pour parvenir à une paix durable ».
Le contrat américano-ukrainien sur les minerais est de nouveau sur la table, et Volodymyr Zelensky s’est exprimé en faveur d’une trêve partielle.
« Les premières étapes pourraient être la libération des prisonniers et une trêve dans le ciel (interdiction des missiles, des drones à longue portée, des bombes sur l’énergie et d’autres infrastructures civiles) et une trêve maritime immédiate, si la Russie fait de même. »
Seulement voilà, entretemps, les bellicistes européens se sont précipités dans la brèche. Le même jour, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a présenté à Bruxelles le plan « Rearm Europe » (« réarmer l’Europe »).
« Nous vivons une époque à la fois cruciale et dangereuse. Je n’ai pas besoin de décrire la gravité des menaces auxquelles nous sommes confrontés ni les conséquences dévastatrices que nous devrons endurer si ces menaces se concrétisent (…). Si les États membres augmentaient leurs dépenses de défense de 1,5 % du PIB en moyenne, cela pourrait créer une marge budgétaire de près de 650 milliards d’euros sur une période de quatre ans. »
Elle propose également une institution pour fournir 150 milliards d’euros de prêts aux États membres pour les investissements de défense.
Cette annonce intervient dans le contexte de l’annonce de Donald Trump quant au gel des livraisons d’armes qui, on s’en doute, a provoqué une déferlante en faveur de la mobilisation militaire pour le régime ukrainien.
« C’est un devoir de civilisation que nous avons à remplir », a dit le premier ministre François Bayrou. Dans son éditorial, Le Monde dit que Donald Trump a trahi l’Ukraine, mais pas seulement : « C’est un coup de poignard de plus dans le flanc de l’Europe ».
Le ministre de l’économie Eric Lombard indique que des efforts budgétaires sont à prévoir en faveur de l’armée :
« Nous devrons faire plus d’efforts pour nous protéger, pour bâtir cette économie en faveur de la paix et renforcer la défense dans un modèle européen. Nous allons devoir dépenser plus d’argent public et donc effectivement, cela imposera plus d’efforts. »
Comme si cela ne suffisait pas à la journée, Donald Trump a officialisé des droits de douane supplémentaires de 25 % au Mexique et au Canada, de 10% pour la Chine (à ajouter aux 10% ajoutés tout récemment).
L’Union européenne sera concernée très rapidement avec 25% en plus sur l’acier et l’aluminium. Et d’autres ajouts suivront encore, pour tout le monde.
C’est ce qu’on appelle la guerre commerciale. La superpuissance américaine, hégémonique, cherche à reprendre un maximum de forces, avant de systématiser son remodelage complet de l’ordre mondial, pour relancer un nouveau cycle d’hégémonie, après celui de 1945-1989 et de 1989-2020.
Au cours de ce processus, on l’aura compris, la patate chaude ukrainienne a été remise à l’Union européenne et au Royaume-Uni qui, en raison de la crise, n’ont pas d’autres choix que de se précipiter dans la guerre.
Tout se définit désormais par là, il faut être aveugle pour ne pas le voir. Et c’est ce que nous disons depuis le début du conflit en Ukraine, en particulier depuis le 26 février 2024. Personne n’y croyait à l’époque, nous y voilà.
Et on se demande ce que va faire une « gauche de la gauche » qui n’a pour sa quasi totalité jamais parlé de la question de la guerre ces trois dernières années. Comment peut-elle espérer s’en sortir, alors que tout se détermine en fonction de ça ?
Que va faire une « gauche de la gauche » qui se veut contestataire ? Va-t-elle continuer à faire comme si de rien n’était ? Car ce n’est plus possible. La marche à la guerre est là, elle traverse toute la société.
Concluons sur un message publié sur un réseau social, toujours le 4 mars 2025, par le ministre français des armées Sébastien Lecornu. Cela témoigne du niveau des contradictions entre grandes puissances dans le cadre de la bataille pour le repartage du monde.

« Dimanche, un avion de chasse SU-35 russe a adopté un comportement dangereux à l’égard d’un drone Reaper français, en mission de surveillance dans l’espace aérien international au dessus de la Méditerranée orientale.
Trois passages successifs à grande proximité, qui auraient pu entraîner la perte de contrôle du drone, attestant une volonté de restreindre la libre circulation aérienne dans les espaces communs.
Une action intentionnelle, non-professionnelle et agressive qui n’est pas acceptable. La France continuera d’agir pour défendre la liberté de navigation dans les espaces aériens et maritimes internationaux. »
Ou la révolution empêche la guerre, ou la guerre provoque la révolution !