Tout va très vite, tout doit aller très vite concernant la course européenne à l’armement pour assurer la guerre par procuration en Ukraine. Quinze jours après la présentation du plan d’investissement « ReArm Europe » par la présidente de la Commission européenne, Ursula Von Der Leyen, un livre blanc de la défense a été présenté au Conseil européen le 19 mars 2025. Le Conseil européen s’est réuni le 20 et 21 mars avec pour objectif de poursuivre les travaux du 6 mars.
Les financements de la guerre sont désormais décidés au niveau européen, avec un moyen pour contourner l’organe décisionnel « démocratique », le Parlement européen.

Le plan va d’ailleurs changer de nom, de « ReArm Europe » à « Readiness 2030 » (en français « préparation 2030») sur demande de Georgia Meloni et Pedro Sanchez qui trouvaient le nom trop « chargé » et « aliénant »… La date 2030 fait désormais référence à la date supposée où la Russie attaquerait l’Europe.
L’idée que la guerre puisse se décider des années à l’avance laisse d’ailleurs dubitatif, lorsque l’on connaît l’Histoire ; on sait qu’elle survient lorsque personne n’est prêt. Ce qui explique pourquoi personne ne prétend la vouloir, tout en la préparant, et que tout les États estiment se défendre, même en attaquant. Mais là n’est pas la question.
Le Conseil européen est une institution composée des différents chefs d’Etats et de gouvernements européens et qui impulse les dynamiques juridiques relativement à l’écart. Normalement toute initiative passe devant le Parlement européen, avec des votes reflétant le « pluralisme » issu des élections européennes.
Or, depuis 2007, il existe un moyen de passer outre le Parlement pour promulguer des plans de financement d’urgence, c’est l’article 122 du traité de l’Union européenne, relatif à la politique économique et monétaire.
- Sans préjudice des autres procédures prévues par les traités, le Conseil, sur proposition de la Commission, peut décider, dans un esprit de solidarité entre les États membres, des mesures appropriées à la situation économique, en particulier si de graves difficultés surviennent dans l’approvisionnement en certains produits, notamment dans le domaine de l’énergie.
- Lorsqu’un État membre connaît des difficultés ou une menace sérieuse de graves difficultés, en raison de catastrophes naturelles ou d’événements exceptionnels échappant à son contrôle, le Conseil, sur proposition de la Commission, peut accorder, sous certaines conditions, une assistance financière de l’Union à l’État membre concerné. Le président du Conseil informe le Parlement européen de la décision prise.
On est en droit de se demander quel Etat membre est en difficulté, faisant face à ce qui est appelé des « événements exceptionnels échappant à son contrôle ». Les textes de loi sont vraiment détournés, utilisés au bon vouloir de quelques individus.

En effet, cet article 122 devrait permettre de faire acte de décision concernant les propositions du livre blanc, où il est question de mettre à disposition la somme de 800 milliards d’euros pour la défense européenne. Il s’agit de 150 milliards d’euros sous forme de prêts et de 650 milliards provenant des budgets de défense nationaux des États membres.
Les 150 milliards ont déjà été validés au titre de l’article 122 lors de la réunion d’urgence du conseil européen le 6 mars 2025. Depuis cette date, les textes du conseil européen sur l’Ukraine sont adoptés à 26, sans la Hongrie.
Pour le reste, les 650 milliards estimés, on a donc une décision hors parlement de l’Europe qui va être soumise aux états, pour contribuer au « pot commun » de guerre européenne. Sera-t-elle votée ou pas ? Ce n’est pas clair.
Ce qui a déjà été décidé formellement ou pas, tout est assez flou. En tout cas, la guerre se prépare sans les masses françaises, dans le cadre d’institutions qu’elles n’ont pas choisi, ni par le vote, ni par quelconque conquête politique.
On est clairement dans le cadre de la fascisation des appareils d’états, avec comme nouveauté, la fascisation des instances européennes. La guerre de la bourgeoisie ne peut se faire sans supprimer la démocratie. Mais l’Europe veille à donner des gages.
À ce titre, le discours tenu le 20 mars par le président du Conseil européen, António Costa, face à la presse n’a presque pas fait mention de la guerre. Il s’agit de rassurer les gens en parlant de compétitivité :
« Et c’est ce que le Conseil européen a fait aujourd’hui, en prenant dans trois domaines importants des décisions importantes, consistant à réduire les formalités administratives inutiles, à rendre l’énergie plus abordable pour les citoyens et les entreprises; et à transformer l’épargne en investissements productifs. »
António Costa
Puis il a insisté sur la nécessité de l’écologie, ce qui sont des paroles en l’air vu la volonté de « réduire les formalités » (comprendre « réduire les normes, y compris environnementales »). Et en conclusion :
« Une économie durable est également une économie socialement équitable, une économie qui ne laisse personne de côté. Aussi avons-nous réaffirmé ce jour notre modèle social européen et l’importance que revêt le socle européen des droits sociaux. En un mot: prospérité, durabilité, équité.«
António Costa
La bourgeoisie européenne compte bien embarquer les masses dans sa conquête d’hégémonie par la force, en agitant la carotte du confort occidental. C’est la guerre qui est proposée en échange d’un nouveau cycle de prospérité sous l’égide américaine.
Pour les va-t-en guerre, il faut moins de démocratie pour faire la guerre tout en brandissent la défense de la démocratie pour justifier la guerre.
Seule la révolution peut empêcher la guerre, ou alors la réalité rattrapera les gens et ce sera la grande désillusion qui entraînera la Révolution.