Des missiles russes ont frappé la ville de Sumy le 13 avril 2024 et c’est rentré dans une séquence qu’il s’agit d’évaluer, car elle intègre toute une narration en faveur de l’intervention militaire directe en Ukraine. Celle-ci est très clairement pour le court terme, dans les mois qui viennent au plus tard.
Immédiatement après les frappes (en fait une double frappe), il y a eu une déferlante médiatique au sujet d’une attaque russe contre la population civile. Le bilan meurtrier, avec 34 morts et plus d’une centaine de blessés, a été présenté comme emblématique de la politique génocidaire de l’armée russe.

La chaîne LCI s’est ainsi déchaînée, parlant même de l’emploi de missiles à sous-munition afin de massacrer la population. Rappelons ici pour bien cerner les choses qu’il y a 10 000 civils tués depuis le début du conflit militaire russo-ukrainien, un nombre horrible mais en même temps vraiment bas et ne correspondant nullement à une dimension prétendument génocidaire.
La dénonciation de la Russie génocidaire est cependant inévitable du côté du régime nationaliste ukrainien, et de tous ses soutiens. L’actuel chancelier allemand Olag Scholz a expliqué que de « de telles attaques montrent ce qu’il en est de la prétendue volonté de paix de la Russie », et le prochain chancelier allemand Friedrich Merz a parlé d’un « crime de guerre grave, délibéré et voulu ».
Il a beaucoup été souligné qu’il s’agissait d’un jour marqué par une fête religieuse, comme ici avec Euronews :
« Les missiles ont frappé la ville dimanche matin, alors que les gens se rassemblaient pour célébrer le dimanche des Rameaux, le dimanche précédant Pâques.
Des images ont montré des lignes de sacs mortuaires noirs sur le bord de la route, tandis que d’autres corps ont été vus enveloppés dans des couvertures d’aluminium parmi les débris. »
Le président Volodymyr Zelensky a pareillement souligné que :
« La frappe a touché le centre-ville le jour des Rameaux. Seule des voyous immondes peuvent agir de la sorte. »
Et l’armée ukrainienne a annoncé qu’il y aurait une riposte sévère :
« La Russie prouve une fois de plus qu’elle ne cherche pas la paix. Son objectif est de semer la peur. Mais la Russie ne rencontrera que notre fureur et une riposte inévitable.
Notre réponse sera sévère. Nous détruirons les occupants, leurs installations militaires, leurs armes et leur équipement – où qu’ils se trouvent. Les crimes de guerre russes sont imprescriptibles. Les auteurs doivent être traduits en justice. »
La cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas a affirmé de son côté :
« Des scènes déchirantes se sont déroulées ce matin à Soumy. Exemple horrible de la Russie qui intensifie ses attaques alors que l’Ukraine a accepté un cessez-le-feu inconditionnel. »
Emmanuel Macron a évidemment affirmé que la Russie est la seule source de la guerre.
« Deux missiles russes ont frappé ce matin le cœur de la ville de Soumy en Ukraine, en faisant de très nombreuses victimes civiles, dont à nouveau des enfants.
Cette guerre, chacun sait que c’est la Russie, seule, qui l’a voulue. Aujourd’hui, il est clair que c’est la Russie qui, seule, choisit de la poursuivre.
Au mépris des vies humaines, du droit international et des offres diplomatiques du Président Trump.
Il faut des mesures fortes pour imposer un cessez-le-feu à la Russie. La France y travaille sans relâche, avec ses partenaires. Aux victimes, aux blessés, à toute l’Ukraine qui résiste : notre solidarité, notre respect, notre engagement. »
Notre fanatique ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot a naturellement également apporté sa pierre à l’édifice :
« Ce week-end, l’horreur en Ukraine a atteint son apogée avec le massacre du dimanche des Rameaux à Soumy. »
Tout est donc très simple : les Russes sont des massacreurs, les seuls responsables de la guerre. Il y a le camp du bien et le camp du mal.
Il faut maintenant observer un simple fait. Aucun média occidental n’a diffusé l’information pourtant très largement disponible en Ukraine à la suite de la frappe : les lieux visés devaient accueillir la cérémonie du 7e anniversaire de la 171 brigade territoriale de défense aérienne, avec de hauts responsables militaires, pour des remises de médaille.
Pour cette occasion, toutes les organisations civiles ukrainiennes ont été invitées, ainsi que les médias.
On le sait, car Artem Semenikhine, maire de la ville de Konotop, a par la suite dénoncé la tenue d’une telle cérémonie militaire en présence de civils, notamment des enfants, surtout à trente kilomètres du front.
Artem Semenikhine avait annoncé une longue présentation de cette affaire pour le jour même, à 18 heures, à moins qu’entretemps ne viennent se prosterner à genoux devant le peuple le chef de l’administration régionale Vladimir Artyuk, le chef du cabinet présidentiel Andriy Yermak et le dirigeant des services secrets ukrainiens SBU Vasyl Maliuk.

Naturellement, il a été menacé d’une accusation de trahison en faveur de la Russie et donc il n’a rien dit du tout. L’affaire a été écrasée promptement.
[Ajout du 15 avril : le président ukrainien a démis en ce jour le chef de l’administration régionale Vladimir Artyuk. Aucune explication officielle n’a été donnée ! L’information est présentée, quand elle l’est, de manière anecdotique par les médias français.]
S’agit-il alors d’un coup monté par les Ukrainiens pour forcer la Russie à la faute, dans la mesure où il n’y a pas eu de soldats blessés ?
Peut-être, ce ne serait pas étonnant vu le caractère nationaliste criminel du régime ukrainien prêt littéralement à tout, mais peu importe.
Force est de constater que les médias occidentaux n’ont pas rapporté le scandale lancé par le maire de Konotop, pourtant largement diffusé en Ukraine (quant à la version de l’armée russe, elle a été rapportée par les médias 48 heures après l’attaque).
C’est cela qui compte : tout ce qu’on apprend sur le conflit est unilatéral et toujours au service de la narration belliciste occidentale. On est dans le bourrage de crâne de masse.
Il n’est donc pas possible de se faire un avis sur le tas, simplement en reprenant les informations. Il faut une capacité d’analyse, ce que nous proposons depuis six mois avant que ce conflit ne commence, puisque nous avions compris ce qui se passerait.
De la même manière, nous fournissons une chronologie de l’escalade française contre la Russie, car là aussi tout nous apparaît clairement. Les gens peuvent bien penser à autre chose s’ils le veulent et tant qu’ils le peuvent, mais les faits sont les faits.
Les médias de la société capitaliste sont au service du capitaliste et toutes les prétentions à la « neutralité » sont mensongères.
Plus ça se veut neutre, plus c’est d’ailleurs hypocrite, mensonger, surtout du côté du quotidien Le Monde, qui présente par exemple de manière sentimentale et élogieuse l’enterrement de Margaryta Polovinko, artiste décédée en avril 2025 sur le front en tant que secouriste au sein de la 3ᵉ brigade d’assaut de l’armée ukrainienne. On parle ici… d’Azov et le symbole nazi de la Wolfsangel est d’ailleurs gravé sur son cercueil.
Ou encore avec le reporter Emmanuel Grynszpan, un zélé propagandiste du Monde, qui n’hésite pas aux mensonges les plus grossiers, comme le 8 avril 2025 où il explique que les Ukrainiens comptent récupérer la culture russe dès la guerre finie… alors qu’en pratique les livres en russe sont brûlés par millions et que le régime nationaliste ukrainien exige qu’on supprime Tolstoï, Dostoïevski et Tchaïkovsky !
Le « camp du bien » est prêt à toutes les hypocrisies, à tous les mensonges pour sauver les apparences.
On ne peut pas « se placer au-dessus de la mêlée », mettre tout le monde à dos, appeler à la paix. Une telle chose n’a pas de sens alors que la France est partie prenante et que le bourrage de crâne est de mise.
Ce qui compte, c’est de s’opposer à l’initiative générale de son propre capitalisme, à sa tentative de s’en sortir par la guerre.
Conformément à la ligne de Rosa Luxembourg et de Lénine, l’ennemi est dans notre propre pays, et l’aspect principal est toujours de combattre son propre impérialisme.