L’annonce par le gouvernement de l’abandon du projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes près de Nantes est assurément une bonne nouvelle pour toutes les personnes réellement de gauche. La persistance de ce projet était une insulte permanente à l’idée de progrès et de civilisation. C’était une idée d’un autre temps, portée par des forces antidémocratiques.
L’humanité ne peut plus s’imaginer pouvoir vivre en dehors de la nature, considérant la planète Terre comme un gros caillou pourvoyeur de « ressources » lui appartenant unilatéralement. L’aéroport de Notre-Dame-des-Landes devait assécher plusieurs hectares de zones humides, au mépris des connaissances scientifiques de notre époque quant à leur importance.
Les personnalités politiques et économiques favorables au projet s’offusquent d’une décision qui serait anti-démocratique. En réalité, c’est précisément l’inverse qui est vrai.
Si l’on considère que la France est un État de droit, cela signifie que les lois sont censées s’appliquer. Or, le projet d’aéroport, quelque-soit la manière dont il était abordé, bafouait systématiquement la loi sur l’eau.
La loi sur l’eau est une loi datant des années 1970 et ayant connus quelques évolutions. Malgré ses limites évidentes, son but est justement de protéger les zones humides comme celle de Notre-Dame-des-Landes.
L’ensemble des décisions de justice rendues en faveur de la construction de l’aéroport allaient à l’encontre tant de l’esprit que de la lettre de cette loi. Elles consistaient en une interprétation unilatérale et biaisée de la réalité.
À partir du moment où il est techniquement possible de faire autrement, la destruction d’une zone humide est interdite.
De plus, de nombreux rapports, dont au moins un rapport officiel commandé directement par l’État en 2013, ont montré que les mesures compensatoires à des destructions ne seraient pas respectées par le projet d’aéroport, particulièrement par l’entreprise Vinci en charge de la construction.
Rien que cela aurait dû suffire à clore tout débat. Tel ne fut pourtant pas le cas et les forces politiques et économiques locales soutenant le projet ont continué à vouloir passer en force.
La consultation lancée par le gouvernement en juin 2016 était un nouveau coup porté à la démocratie et à l’écologie. Il n’était pas normal qu’elle ne concerne que les habitants de la Loire-Atlantique alors que l’enjeu était le respect ou non d’une loi, la loi sur l’eau, ce qui concerne la nation toute entière. On peut même arguer que cette loi relève d’accords internationaux (issus de la convention de Ramsar), et donc qu’elle concerne l’humanité toute entière dans son rapport à la planète Terre.
Le dernier épisode en date était le coup de théâtre juridique de novembre 2016, lorsque la Cour administrative d’Appel de Nantes avait rejeté des requêtes d’opposants.
Cela allait à l’encontre de l’avis du rapporteur public qui avait considéré que la loi sur l’eau n’était pas respectée. Cela montrait une nouvelle fois la faiblesse démocratique des institutions françaises. Le caractère politique et partisans de ces décisions de justices apparaissant comme évident, contrairement à ce qui est prétendu par l’Etat.
Le gouvernement en place a finalement considéré que « les conditions ne sont pas réunies pour mener à bien le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. »
Cela est dû en partie au rapport de force mis en place par les opposants, au manque de soutien réelle du projet par la population, ainsi qu’à d’autres considérations d’ordres politiques.
S’il est tout à fait logique et pertinent de se réjouir de cette décision, il ne faut pas pour autant considérer cela comme une grande victoire. L’abandon du projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes n’est pas une victoire de l’écologie portée par des forces démocratiques en France.
Durant toute la campagne d’opposition, qui a pris de l’ampleur à partir des années 2010, l’écologie et les zones humides n’ont été qu’un prétexte. Le moteur de la contestation était une vision du monde arriéré, défendant de manière fantasmée l’agriculture d’autrefois et la vie en communautés isolées. Le mouvement d’opposition, particulièrement celui de la « ZAD », était largement d’essence réactionnaire.
Au contraire, les forces de gauche doivent maintenant se focaliser sur l’essentiel. Il est urgent de porter les exigences démocratiques de la population tout en diffusant et faisant vivre une culture authentiquement écologique.
Le mouvement d’opposition à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes a été un rendez-vous manqué pour la gauche française. Elle n’a pas su être à la hauteur des exigences de son époque. Il faut maintenant changer la donne.