Une tentative de porter un regard concret pour un vote utile pour ces élections européennes : quelles listes à Gauche s’assument telles quelles ? Lesquelles peut-on soutenir ? Rien que le fait que la question se pose montre le problème.
Pour qui voter ? Pour cela il y a les professions de foi ! Il suffit de les lire et de faire son choix ! Il y a « En marche pour l’Europe », la liste du mouvement d’Emmanuel Macron. On dira ce qu’on voudra, c’est propre et constructif, avec l’Europe comme utopie libérale-sociale. Qui ne dirait pas non d’ailleurs à une vingtaine d’universités européennes d’ici 2024 ? À une force de protection sanitaire contre les fraudes alimentaires ?
Il ne faut pas s’étonner que des gens aient de l’espoir en cela, au-delà bien entendu de leur intérêt économique. Mais justement, le libéralisme, c’est non, alors regardons la suite.
Il y a les écologistes, avec Yannick Jadot. Après tout, la planète est en train de souffrir. Mais bon, pas certain qu’un repas végétarien optionnel dans la restauration collective change grand-chose… Ni d’ailleurs le droit de vote à seize ans ou l’accueil digne des migrants. Même pas des réfugiés : là on est carrément dans le libéralisme le plus poussé… Passons à autre chose.
Il y a Lutte Ouvrière. Sympa ! Non, ce n’est pas le mot, car c’est fade. Mais c’est digne. Le camp des travailleurs, une enseignante et un ouvrier en tête de liste, le rejet de la grande bourgeoisie, au moins c’est posé. Pas politique, car c’est la même chose depuis des décennies, mais c’est déjà ça. La profession de foi du PCF est plutôt claire aussi, elle est très propre, c’est plus politique : les salaires, l’urgence climatique, l’opposition aux traités ultralibéraux… Minimaliste, mais politique. S’il n’y avait pas en tête de liste Ian Brossat, ce dandy de la mairie de Paris, cela serait plus crédible…
Bon allons voir la liste de Benoît Hamon. Lui au moins il est sincère, et déprimé apparemment en ce moment. Il pense que ses idées vont être coulées si là son score est trop faible. En même temps, la profession de foi est tellement faible, il tend le bâton pour se faire battre. Il faut battre la Droite au pouvoir et les nationalistes, mais il n’y aucune référence à la Gauche. Alors allons voir la liste de Raphaël Glucksmann, lui voulait unir la Gauche ! Mais non, il est juste parlé d’une Europe forte, « pour peser face à l’Amérique de Trump, la Russie de Poutine et la Chine de Xiping ».
Dupont-Aignan et Debout la France ? Même plus gaulliste social, désormais c’est de droite et ce ouvertement. Les « Européens » ? Des centristes qui font la gueule à Emmanuel Macron. Les Républicains ? La même chose en plus conservateur. L’UPR ? La secte du Frexit, uniquement bonne à dire que la France serait l’esclave de l’Union Européenne. La France Insoumise ? Pareil et la base tend d’ailleurs toujours plus aux souverainistes et aux fachos.
Marine Le Pen et Jordan Bardella ? La même chose en encore plus démagogique, et son score va faire mal, très mal. Et c’est là qu’on se dit qu’il faut voter quand même. Parce que l’abstention + un carton de l’extrême-droite, cela va être difficile à digérer. En même temps, ils sont tellement nuls tous à Gauche : sans ambition, sans utopie, sans romantisme, sans socialisme. Pour les plus dégoûtés – les plus conscients peut-être, voter est impossible. Pour d’autres, plus sentimentaux, plus résignés, il y a Benoît Hamon, Ian Brossat, et la liste de Lutte Ouvrière, en sachant que seuls les deux premiers peuvent éventuellement arriver au 5 % nécessaire pour avoir un élu.
Dans tous les cas, un bulletin de vote ne suffira pas à quoi que ce soit : une liste unie à Gauche aurait pu être un vrai marqueur, un témoignage d’une recomposition qu’on soutient. Là c’est trop faible, bien trop faible, alors qu’il y a la catastrophe climatique, le capitalisme en crise et l’extrême-droite qui progresse de manière ininterrompue. Les prochaines années vont être celles de bien des exigences !