On en sait davantage sur les ambitions spatiales militaires de l’État français et celui-ci n’y va pas par quatre chemins. On va vers l’armement des satellites, une utilisation de toutes les ressources spatiales civiles au service de l’armée. Et tout cela, dans une course aux armements assumée, avec un objectif déclaré : l’hégémonie.
« La revue stratégique de défense et de sécurité nationale de 2017 a fait le constat d’une compétition accrue entre États-puissances qui augmente la probabilité d’une confrontation militaire interétatique. »
Cette citation provient du document officiel de l’armée française concernant la « stratégie spatiale de défense française ». Cela a le mérite d’être clair : la tendance à la guerre est là. Et l’espace joue un rôle capital, car les communications et l’orientation des troupes passe désormais par là, tout comme bon nombre d’activités économiques profitant des télécommunications, du GPS, etc.
La militarisation de l’espace est donc inévitable et elle va être forcenée du côté français, car c’est là déjà un de ses points forts. La veille du 14 juillet, Emmanuel Macron avait annoncé, devant les plus hauts gradés de l’armée, la formation prochaine d’une section militaire dédiée à l’espace. Il fait ainsi exactement comme Donald Trump qui a annoncé la naissance d’une « space force ».
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Florence Parly, à la tête du ministère des armées, en a donné longuement les caractéristiques, sur la base aérienne 942 de Mont-Verdun, fin juillet. L’endroit héberge le Commandement de défense aérienne et des opérations aériennes. Le ministère des armées a diffusé un communiqué à ce sujet, qui commence par une citation de l’allocution de la ministre :
« Aujourd’hui, nos alliés et nos adversaires militarisent l’espace. Et alors que le temps de la résilience se fait de plus en plus court, nous devons agir. Nous devons être prêts. »
Alliés et adversaires : telle est la logique de l’État, qui en militarisant l’espace, sait très bien ce qu’il fait, à savoir aller à la guerre. Les choses sont ici entendues, il s’agit bien d’affrontement et d’agir donc pour avoir les moyens de cet affrontement.
Florence Parly a également affirmé la chose suivante, tout à fait exemplaire de l’esprit « star wars » qui prédomine :
« Vouloir devenir un jour général de l’espace, ce ne sera plus une fantaisie, ce sera une ambition crédible »
Dans son introduction au document sur la Stratégie spatiale de défense de l’armée, elle place la barre également très haut :
« La France, troisième puissance spatiale, j’y crois. Nous avons fait partie des pionniers. Nous sommes sur le point de devenir l’avant-garde. »
Concrètement, la militarisation de l’espace va se réaliser à partir d’une entité autonome, qui prend le relais du Commandement interarmées de l’espace formé en 2010, en intégrant également le Cosmos (centre opérationnel de surveillance militaire des objets spatiaux) et le CMOS (centre militaire d’observation par satellites).
Cette nouvelle entité va dépendre de l’armée de l’air encore, mais seulement formellement. Dans les faits, elle va être appelée à monter en puissance et à posséder ses propres capacités opérationnelles.
Son budget va être d’ailleurs boosté : le budget 2019-2025, déjà de 3,6 milliards d’euros, va connaître une augmentation de 700 millions d’euros. Le fait que les télescopes civils du CNRS et d’Ariane Group soient associés aux radars Graves et Satam pour la surveillance de l’espace sera dorénavant encore plus formalisé. Les satellites de communication Syracuse seront bientôt munis de caméras de surveillance, de lasers de puissance pour éblouir, de mitraillettes pour détruire les panneaux solaires.
Des nano-satellites patrouilleurs sont également prévus, afin de servir d’intercepteurs. Des minis lanceurs de satellites de remplacement font partie de tout ce projet de guerre spatiale.
Officiellement, comme il existe une législation mondiale de l’espace, il s’agit de tout contourner au nom de la « légitime défense », que cette législation reconnaît justement. Pour ce faire, le ministère des armées va avoir juridiquement le statut d’opérateur spatial. C’est le Centre national d’études spatiales qui va être à la disposition de l’armée pour ce faire. Florence Parly a expliqué à Jean-Yves Le Gall, assis au premier rang pour l’allocution :
« Nous avons besoin de vous aujourd’hui et nous aurons besoin de vous demain. »
C’est là strictement parallèle à la NASA, devenue un outil des forces militaires américaines, tout en restant officiellement indépendante, civile, non militaire, etc.
À cela s’ajoute que la France, tout comme les autres puissances spatiales, refuse de délimiter où commence l’espace. On sait que c’est à partir d’entre 80 km et 120 km de la Terre, mais personne ne veut fixer le chiffre, en prévision des nombreux conflits à venir, chacun cherchant à évaluer encore la situation.
L’horizon, c’est 2030 : à cette date, le Président de la République, en tant que chef des armées, disposera de la guerre spatiale comme élément militaire. La tendance à la guerre va se renforcer comme jamais d’ici là ; les années 2030 seront conflictuelles, c’est déjà prévu.