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Nationalisme du made in France: Adrien Quatennens prône Cdiscount contre Amazon

En critiquant l’entreprise Amazon au profit de son équivalent français Cdiscount, Adrien Quatennens montre en quoi il est un social-chauvin.

Il est tout à fait légitime de détester un monstre comme Amazon quand on sait en quoi une telle entreprise est synonyme de pression maximale sur les employés des entrepôts ou sur les chauffeurs-livreurs des entreprises sous-traitantes auxquelles elle impose des conditions drastiques. Il y a bien sûr aussi la question des impôts, puisqu’Amazon fait partie de ces championnes de l’optimisation fiscale, de manière tout à fait légale par ailleurs.

Il est donc très facile pour quelqu’un comme Adrien Quatennens, figure de La France Insoumise, de critiquer Amazon. Cela n’engage à pas grand-chose et surtout cela ne coûte rien politiquement. Il ne s’en prive donc pas et l’a fait par exemple dimanche 29 novembre dans un émission de télévision. Il relaiera ensuite lui-même l’extrait sur Twitter :

Le problème d’Adrien Quatennens, c’est qu’en réalité il ne critique pas Amazon. Ce qu’il critique, c’est une entreprise américaine de la logistique… pour défendre son équivalent français Cdiscount. Cela s’appelle le nationalisme et encore pourrait-on aller plus loin. Quelqu’un qui agite la question sociale pour dire que le capitalisme étranger, c’est mal, mais que le capitalisme de son propre pays c’est bien… relève de l’extrême-Droite. 

Pour quelqu’un réellement de gauche, Cdiscount n’a rien de mieux qu’Amazon, c’est exactement la même chose, l’entreprise vise à la même hégémonie sur la logistique et la vente en ligne, et elle utilise les même procédé de pression sur les prix et les travailleurs, etc. C’est un point de vue de classe, pas un point de vue national, bourgeois.

Mais ce point de vue national est depuis longtemps celui de La France Insoumise, depuis le départ même, car La France Insoumise a en fait été le vecteur du passage au nationalisme du Parti de Gauche. Le Parti de Gauche est né comme scission du Parti socialiste, il a ensuite été remplacé dans sa base par des gens non formés politiquement qui ont suivi le populisme de Jean-Luc Mélenchon, qui a toujours plus utilisé le nationalisme comme mythe mobilisateur.

La France Insoumise ne relève pas de la Gauche. C’est une déviation au nationalisme telle qu’on en a vu à de nombreuses reprises historiquement. Les propos d’Adrien Quatennens opposant Amazon à Cdiscount le montrent très clairement.

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Après le mythe de la grève générale, le populisme du référendum

La grève générale n’étant clairement pas en vue, il fallait trouver un autre mythe mobilisateur de la part du PCF et de La France insoumise pour sauver la CGT. C’est l’Humanité qui s’est chargée de la mission, avec un grand appel à un référendum. Il faut sauver le soldat CGT.

Si la CGT coule, alors tout un pan de la Gauche s’écroule. Pas celle liée au Parti socialiste, car elle s’appuie de son côté sur des valeurs, un programme. Mais celle liée au PCF, à La France insoumise, au NPA, c’est-à-dire « à la gauche de la gauche », qui vit de surenchère.

S’il n’y a plus la CGT, il n’y a plus le levier de la surenchère. Et c’est la fin de tout. Il ne reste alors que les idées, le programme, les valeurs, et cela ne pèse pas lourd, tellement le populisme a fait des ravages.

L’ultra-gauche peut bien de son côté commencer à dénoncer une CGT qu’elle a entièrement soutenu jusque-là. Elle ne fait que revenir à son culte de la marginalité après un traditionnel suivisme syndical à la première occasion. Hier, les chasubles CGT, les cortèges CGT, aujourd’hui les postures de regret du manque d’élan, de la « trahison » des dirigeants. Rien de plus classique. On connaît l’adage : « la crise est une crise de la direction révolutionnaire ». L’ultra-gauche connaît son Léon Trotski.

Mais le PCF et LFI ont de l’ambition. Sans la CGT, il n’y a plus les moyens de cette ambition. Il faut donc agir avant qu’il ne soit trop tard. Ce qui se lit ici, c’est l’étrange rapport, très pervers, entre la gauche de la gauche et le syndicalisme. Il y a des non-dits, des zones réservées, un équilibre précaire mais en même temps une grande connivence, etc. Il y a un accord masqué qui, véritablement, pourrit la primauté de la politique et ce depuis les débuts de la CGT.

Il y a par conséquent une dépendance à la CGT, que le PCF et LFI la reconnaissent comme essentielle. Il faut donc sauver la CGT, qui va dans le mur. Mais comment faire pour ne pas la compromettre, pour qu’elle sauve la face ? D’où l’idée de demander un référendum, avec une pétition en ce sens, signée des principales figures de la « gauche de la gauche ».

La CGT, anti-politique, ne le signera pas, surtout lancée dans la grève, du moins officiellement. Si elle le fait, elle remettrait en cause sa propre logique syndicaliste. Elle ne peut donc pas vraiment être vexée. Surtout que c’est l’Humanité qui lance la pétition. On a aussi parmi les signataires Patrick Le Hyaric, qui est directeur de l’Humanité, ainsi que Bernard Thibault, ancien secrétaire général de la CGT.

Les angles sont donc arrondis. Et pour sauver le soldat CGT, on a Ian Brossat du PCF, ainsi que Adrien Quatennens et Jean-Luc Mélenchon de La France Insoumise. On a Marie-Noëlle Lienemann et Emmanuel Maurel de la Gauche républicaine et socialiste et Gérard Filoche de la Gauche démocratique et sociale.

On a Julien Bayou, qui est secrétaire national d’EELV, et Alain Coulombel, porte-parole d’EELV. On a Clémentine Autain de La France insoumise et Guillaume Balas, coordinateur de Génération-s.

On a également des figures d’arrière-plan, comme Pouria Amirshahi, ancienne figure majeure du syndicalisme étudiant et actuel directeur de publication de Politis, Willy Pelletier qui est coordinateur général de la fondation Copernic, Alain Obadia qui est président de la fondation Gabriel-Péri.

La liste initiale comporte également des avocats, des intellectuels, des chercheurs, des artistes, des économistes, etc. avec quelques ambulancier, sans profession et chauffeur poids lourd pour donner un côté populaire.

Est-ce que cela suffira ? Certainement pas. C’est même plus un signe d’effondrement qu’autre chose. Car la véritable actualité n’est pas dans ces noms. Elle est dans le fait que les hauts cadres du Parti socialiste ont également signé la pétition, et notamment Olivier Faure, qui est secrétaire national du PS, et Jean-Christophe Cambadélis, ex-premier secrétaire.

Qu’Olivier Faure veuille faire bien, soit. Mais que viennent faire les autres signataires, et notamment Jean-Christophe Cambadélis ? Ce dernier a un regard extrêmement précis et aguerri. Il disait tout récemment, avec justesse, au sujet des municipales :

« La gauche, elle, va toucher le fond de la piscine alors que le PS gardera pour l’essentiel ses bastions. Le PCF aussi, grâce à une alliance jugée hier impossible avec le PS. Même si ce sera l’arbre qui cachera la forêt des reculs du premier tour, la rupture avec la France insoumise va coûter chère au PCF et à la France insoumise.

Les écologistes seront globalement très hauts et devant les socialistes là où la gauche n’est pas sortante. Dans les villes de Besançon, Bordeaux etc. où la gauche est unie avec eux, ils peuvent même virer en tête. Reste que l’écologie est un vote de 1er tour, pas ou pas encore de rassemblement.

Quant à la France insoumise, elle est réduite à une posture de témoignage protestataire, ayant du mal à exister dans ce scrutin qui est pour elle encore plus difficile que les européennes. »

Et il ajoutait, présentant sa solution :

« Mais, encore une fois, le problème de la gauche c’est la faiblesse et le manque d’attractivité du PS. Ce n’est pas un problème de personnes mais une question structurelle. La marque est obsolète, il faut la refonder (…). Ce renouveau, cette réinitialisation du PS nécessite de dépasser le PS. »

Jean-Christophe Cambadélis croit-il qu’une Gauche, qu’il qualifie de « réformiste », peut naître d’un appel populiste à sauver une CGT antipolitique qui a mené un mouvement de protestation dans le mur ?

Cet appel au référendum est un suicide pour la Gauche politique. Il est une énième tentative de contourner les problèmes, les questions de politique, d’économie, de morale, de société, de valeurs. Il n’est aucunement possible d’échapper à la seule solution possible : constituer une Gauche consciente, organisée, structurée, établie de manière stricte.

Cela n’est pas possible avec une Gauche populiste, libérale culturellement, refusant l’organisation au nom de « mouvements », ne cherchant jamais à établir des structures locales menant un travail sur le long terme.

Le signe qu’on a ici, c’est que le Parti socialiste lui-même agonise – pas qu’il va contribuer à une structuration à Gauche. Sinon il ne se retrouverait pas là.

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Acte XXIV des gilets jaunes : échec d’une pseudo-convergence

Encore moins de monde, et ce malgré la présence de Jean-Luc Mélenchon et le forcing d’une partie de la CGT. Les beaux jours n’auront pas suffi à masquer la vacuité politique des gilets jaunes.

Ce 27 avril 2019 était socialement très important. En effet, les gilets jaunes tenaient leur traditionnelle initiative du samedi après l’intervention d’Emmanuel Macron pour exposer ses propositions de réforme devant le pays. Il y avait donc l’espace d’une réponse par la révolte aux dites propositions.

De plus, toute une partie de la CGT a fait un forcing énorme pour que le 27 avril il y ait une puissante manifestation parisienne, notamment la CGT Commerce et Services. L’objectif déclaré était de faire une démonstration de force qui convergerait avec les gilets jaunes.

On retrouve ici tout l’esprit syndicaliste révolutionnaire propre à la culture française, ce poison anti-politique dont, par ailleurs, les gilets jaunes sont une variante plus ou moins blanquiste. Et comme d’habitude cela fit un peu de bruit pour pratiquement rien. Les gilets jaunes, au nombre de 2600 à Paris, furent rejoints par un petit cortège CGT de 3500 personnes, pour une convergence derrière la bannière « Face à une attaque globale, riposte générale », le tout n’apportant rien car 0 + 0 = 0.

Futé politiquement, le secrétaire général de la confédération Philippe Martinez a soigneusement évité de se montrer. Furent par contre présents à cette faillite Amar Lagha de la CGT-Commerce, Jean-Luc Mélenchon, Adrien Quatennens et Alexis Corbière de La France Insoumise, Philippe Poutou et Olivier Besancenot du NPA.

Le reste des gilets jaunes avait imaginé un forcing d’un autre genre, avec une manifestation « internationale » à Strasbourg. Cela ne donna que la présence de 2000 personnes… Il faut dire que les Allemands ne connaissent pas la déliquescence politique de la France. Le SPD (social-démocrate) a 437 000 membres, les Verts 77 000, die Linke (la Gauche) 61 000. Même la CDU (le parti de la Droite) a 415 000 adhérents. En France, le parti politique avec le plus d’adhérents, c’est le PCF avec 80 000…

La démarche anti-politique va continuer malheureusement, car les gilets jaunes vont parasiter le premier mai. Leur faible nombre pour l’acte XXIV de cette farce a d’ailleurs été justifié de leur côté par le fait que le premier mai est censé être témoin d’une grande initiative de leur part. Les médias prévoient depuis de nombreux jours beaucoup de casse. Non contents de n’arriver à rien, les gilets jaunes comptent faire couler la Gauche avec eux…

Pourtant, ils avaient toutes leurs chances avec l’intervention d’Emmanuel Macron du 25 avril. Sa conférence de presse a été d’une rare nullité. Le grand débat avait été censé récupérer toutes les exigences de la population et ce qu’il en sort, ce sont quelques mesures techniques pour relever ceci, réorganiser cela. Ce sont des choses sans âme, sans profondeur.

Conscient de cela, Emmanuel Macron a d’ailleurs souligné l’importance des frontières et puisé dans les auteurs idéalistes. Dans l’allocution du 15 avril, non diffusée en raison de l’actualité dramatique que fut l’incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris, il faisait référence à la philosophe Simone Weil parlant du « besoin de l’âme humaine ».

Il a cette fois cité Bernanos :

« Est-ce qu’on change jamais ? L’avenir le dira. Comme dit Bernanos, on a sa conscience pour soi. »

Pauvre Bernanos, dont l’exigence morale s’affirmant à travers une exigence spirituelle se voit dégradée à une posture machiavélique politicienne, ce qu’il abhorrait justement.

Emmanuel Macron a par ailleurs multiplié les pics traditionalistes, tout à fait dans l’esprit de son soutien total et absolu aux chasseurs. On a ainsi eu droit au propos suivant notamment :

« L’art d’être Français, c’est être à la fois enraciné et universel. »

Il va de soi que la prochaine étape, pas forcément portée par Emmanuel Macron, sera le fait d’abandonner le côté universel pour se cantonner à la dimension « enracinée ». Même si en attendant, Emmanuel Macron veut une France enracinée et universelle exactement comme le capitalisme français, à la fois national et acteur international.

Car cet « enracinement » ne porte rien de culturel, il est idéologique, comme en témoigne la nomination d’un très haut responsable militaire à la tête de l’organisation de « reconstruction » de Notre-Dame de Paris.

Le capitalisme se crispe toujours plus : Emmanuel Macron devait faire un sauvetage moderniste, avant l’éventuelle carte nationaliste. Et finalement, Emmanuel Macron compose déjà avec les valeurs du Fascisme dont l’ombre se profile toujours davantage…

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Société

Défaite de l’Allemagne en football et nationalisme français de la « France Insoumise »

La France Insoumise s’est lancée dans une opération de nationalisme anti-allemand forcené à la suite de l’élimination, au premier tour de la coupe du monde, de l’équipe d’Allemagne. Cette dernière a connu une défaite récurrente ces dernières années de la part du champion en titre s’imaginant pouvoir se reposer sur ses acquis et échouant à reconquérir son titre (et non pas simplement le conserver).

Ce qui ressort ici, ce sont les valeurs du nationalisme français le plus traditionnel qu’on retrouve chez la France Insoumise, en opposition frontale avec les valeurs de la Gauche qui n’ont jamais assimilé un peuple à son gouvernement, ni d’ailleurs un peuple à un préjugé négatif quelconque.

Malheureusement, ce sont bien évidemment les partisans de l’Union Européenne dans sa version libérale, capitaliste, qui ont été aux premières loges pour le dénoncer. Car c’est un affrontement entre libéraux et nationalistes auquel on assiste ici, ce qui est un piège terrible.

Les libéraux, les capitalistes, prétendant améliorer les conditions matérielles et empêcher la guerre grâce à l’Europe, ce qui est de moins en moins vrai et bientôt ne le sera plus du tout.

Les nationalistes veulent que leur pays tirent leur épingle du jeu le plus vite possible, en faisant cavalier seul.

C’est à cette catégorie qu’appartient la France Insoumise et son populisme. C’est bien toute une stratégie, profitant de toutes les opportunités. On a d’ailleurs Manuel Bompard, coordinateur des campagnes de la France insoumise, qui parle à cette occasion de dégagisme.

Djordje Kuzmanovic, responsable « géopolitique » de la France insoumise, a la même interprétation populiste. On remarquera qu’il présente la France comme une colonie allemande, ce qui est un discours relevant de l’idéologie nationale-révolutionnaire.

Bastien Lachaud, député LFI de Seine-Saint-Denis, a publié un tweet enlevé par la suite, disant :

Merci aux Coréens, Battiston est enfin vengé – Séville 1982 ! Dégageons Angela Merkel pour venger les peuples européens

Adrien Quatennens, député LFI du Nord, a tenu des propos dans le même esprit.

Jean-Luc Mélenchon a par ailleurs tout fait pour souligner le trait, déjà bien forcé.

Preuve de la démagogie de Jean-Luc Mélenchon, voici ce qu’il a pu mettre en avant juste avant ces propos.

Plus de guerre, plus de compétition, puis peu après la dénonciation nationaliste de l’Allemagne. Tout cela est d’ailleurs un fourre-tout lamentable, puisqu’en même temps on trouvait cela : Merkel associée aux panzers, qui dépouillerait la France.

L’échec de la Gauche est terrible : il accorde des espaces aux chauvins, aux nationalistes, aux antisémites, qui se prétendent contre le capitalisme, contre l’impérialisme, pour mieux mobiliser dans un sens nationaliste.

Ce qui est totalement ressemblant à l’Italie des années 1920, l’Allemagne des années 1930, avec l’utilisation du ressort « national » pour mobiliser prétendument pour du « social ».