Mis en garde en vue pendant 48 heures, Alain Soral a raconté celle-ci dans une longue vidéo, où il fait l’éloge de la police.
Alain Soral raconte, visiblement fatigué et choqué mais relativement combatif, son arrestation dans la rue pour « provocation publique non suivie d’effet à la commission d’atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ». Il raconte que la police a été très sympa, qu’il n’a jamais été malmené, et même, somme toute, que les policiers s’avèrent surtout des sympathisants de sa cause.
Il a aussi fait l’éloge des policiers de la Direction régionale de la police judiciaire de la préfecture de police de Paris : les hommes seraient sportifs, les femmes mignonnes, tout le monde serait jeune et black blanc beur. Tout est carré, bien géré, malgré le caractère sommaire ou sale de locaux où sont les prisonniers. C’est la France qu’il aime et il attend d’eux d’ailleurs, ainsi que de l’armée, qu’ils renversent le régime. Il considère d’ailleurs qu’il va faire de la prison, à moins que ne soit à court terme renversé « l’État juif » qui veut le mettre hors-jeu.
Tout cela révèle un aspect essentiel, tout de même. En effet, Alain Soral, dans sa vidéo, n’appelle pas à la révolution. Il précise bien qu’il n’est pas pour la lutte armée, mais pour que les organes comme la police et l’armée basculent. Ce faisant, il quitte totalement le terrain populiste « insurrectionnel » des gilets jaunes ; il abandonne donc également sa verve populiste visant, comme Dieudonné, à mettre de l’huile sur le feu et à faire en sorte qu’une vague « spontanée » violente surgisse des tréfonds de la société.
Alain Soral a, dans les faits, capitulé. Il ne capitule pas idéologiquement : il reste un fanatique d’extrême-Droite, un paranoïaque pour qui les « Juifs » contrôleraient l’État, l’économie, la politique internationale, etc. Il capitule cependant dans sa dimension agitatrice. Il fait comme Julien Coupat lors de son arrestation : de la littérature, mais plus de la politique.
Le schéma est exactement le même. Julien Coupat, au moment de son arrestation, avait derrière lui des milliers de sympathisants, voire de gens organisés. Il en va de même pour Alain Soral. Une arrestation a une dimension politique : une figure politique en profite pour affirmer ses thèses les plus fondamentales, à la face du pays, appelant à un changement complet, un renversement, etc.
Ni Julien Coupat ni Alain Soral ne l’ont fait. Malgré l’énorme écho de leur arrestation, le fait qu’ils soient une actualité, ils ont continué de s’adresser uniquement à leurs sympathisants, ils ont tourné leur discours dans une optique littéraire, bref ils n’ont pas fait de politique. Ils ont abandonné la politique.
Julien Coupat avait comme vue politique un mouvement par en bas de petits groupes décentralisés formant des communautés s’engageant dans la subversion, action violente y compris ; Alain Soral espérait former une rébellion « national-socialiste » de type élémentaire, un soulèvement par en bas contre « l’occupation » « juive ». Une fois rappelé à l’ordre par l’État, ils capitulent.
On arguera que ce n’est pas plus mal. C’est vrai. Cependant, il faut penser que ces gens ont amené dans des voies de garage des milliers de personnes. Beaucoup ont cru à la dimension « révolutionnaire » de leurs appels. Ils ont ainsi été perdus par la Gauche, dont ils auraient dû devenir des cadres portant un changement historique complet. La capitulation de gens comme Julien Coupat ou Alain Soral n’est donc pas simplement une bonne chose : c’est aussi l’aboutissement d’un processus très négatif où des énergies ont été déviées, gâchées.
Voilà pourquoi il fait rappeler, parfois, leur nature historique, afin que cela serve d’enseignement. Les populismes prétendent mener à des victoires rapides, au moyen de quelques recettes pratiques, d’une vision du monde sommaire. Les populismes nient l’intelligence et fournissent des attitudes clefs en main, prétendant que n’importe qui peut, n’importe, comment, devenir « subversif ». Cela a une dimension fascinante qui n’en est que plus dangereuse.
Il faut donc savoir montrer la vanité de telles initiatives, leur nihilisme.