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Événements significatifs

Dialogue imaginaire entre Javier Milei et le peuple français

Le peuple français : Quel est donc ce bruit ? Encore les Argentins, à parler de leur coupe du monde de football gagnée, ou plutôt volée cet été 2023 ?

Javier Milei : Pas du tout, je viens d’être élu président de l’Argentine, avec 56% des voix. Je suis un ancien chroniqueur de la télévision, en deux ans de politique je suis parvenu au meilleur poste, comme Emmanuel Macron je suis sorti d’un chapeau magique !

Le peuple français : Emmanuel Macron, quelle déception… Et quelles sont vos idées ?

Javier Milei : Vous allez adorer ! Je dis que les politiciens ne sont que des bons à rien, que l’État est rempli de bureaucrates ne faisant rien et se goinfrant, qu’il y en a assez de payer des impôts et qu’il faut les baisser de moitié.

Le peuple français : Oh, mais c’est très bien ça ! On voudrait le même chez nous. Mais attendez, nous Français sommes sceptiques vous savez… Vous avez forcément des défauts. Vous êtes forcément plutôt mou, comme notre Emmanuel Macron…

Javier Milei : Pas du tout, j’adore ma patrie, d’ailleurs j’ai le soutien de l’armée, qui apprécie que je relativise tous les crimes commis lors de la dictature militaire de 1976 à 1983. Vous savez, les gauchistes, ces gens-là… Des « excréments humains », comme je dis.

Le peuple français : Vous n’êtes pas comme votre compatriote le pape, dites donc.

Javier Milei : Le pape ? Il propage le communisme, je l’ai dit plusieurs fois et le je redirai.

Le peuple français : Cela sonne un peu trop bien. Nous les Français, nous aimons nos petits plaisirs… Vous voulez certainement nous interdire notre cannabis…

Javier Milei : Absolument pas, prendre de la drogue est un choix individuel. Cela ne concerne pas l’État et vous pouvez donc fumer autant que vous voulez.

Le peuple français : Attendez, c’est trop beau pour être vrai. Mmmmh… le chef du Parti socialiste, Olivier Faure, nous dit que vous vous opposez aux LGBT ! Pas que cela nous intéresse, mais nous sommes vraiment attachés aux libertés…

Javier Milei : Pourquoi serais-je contre ? « Si vous décidez d’être homosexuel, en quoi est-ce que cela affecte-t-il ma vie ? Ma liberté ? En rien. Ma propriété ? En rien. Par conséquent, je n’ai rien à dire. » Quant aux trans… « Du moment que je n’ai pas à payer la facture, je n’ai aucun problème. »

Le peuple français : Merveilleux, nous allons faire en sorte d’avoir votre équivalent chez nous !

Javier Milei : Vous en avez bien besoin ! Car chez vous, l’État est bien trop présent. Toutes ces aides sociales, l’école gratuite… il faut y mettre un terme.

Le peuple français : Pardon ? Vous voulez supprimer les aides sociales ?

Javier Milei : Oui, et puis ces ministères inutiles, comme la Santé. On n’a pas besoin de tout ça.

Le peuple français : Mais ce n’est pas possible !

Javier Milei : Vous êtes bien d’accord que l’État c’est mal et que les impôts sont horribles, non ? Vous avez l’esprit anarchiste, comme moi. Il faut donc supprimer tout cela.

Le peuple français : Mais non !

Javier Milei : Vous n’êtes pas cohérents. Le libéralisme, c’est le libéralisme… Chacun fait ce qu’il fait, du moment qu’il y a un consensus. D’ailleurs, je suis pour l’amour libre, rien qu’avec cela, vous Français devez m’adorer.

Le peuple français : C’est vrai.

Javier Milei : Il fait être libre partout, tout le temps. On doit être libre de vendre ses organes, ses enfants…

Le peuple français : Quoi ! Ah, ça, non, nous ne le voulons pas !

Javier Milei : Si vous ne le voulez pas, vous ne le faites pas. Il faut cependant en avoir le droit.

Le peuple français : Ah si c’est avoir le droit, ce n’est pas pareil…

Javier Milei : Les temps changent, et on s’adapte, autant être libre. « La liberté avance », et c’est d’ailleurs le nom de mon parti. On peut faire tellement ce choses ! Regardez, quand mon chien Conan est mort, je l’ai cloné et désormais j’ai Milton, Murray, Robert et Lucas! Formidable, n’est-ce pas ! Leurs noms vient de mes économistes préférés, Milton Friedman, Murray Rothbard et Robert Lucas.

Le peuple français : Mais ce sont des économistes libéraux !

Javier Milei : Ah, vous les Français, êtes incorrigibles. Vous êtes des libéraux sur tous les plans, sauf l’économie.

Le peuple français : C’est que, si on peut en profiter…

Javier Milei : A un moment il faudra un choisir, et comme le dit mon mot d’ordre électoral, viva la libertad carajo !

Le peuple français : C’est que nous ne voulons pas être comme les Américains…

Javier Milei : Pourquoi ? Je suis pour l’Ukraine et vous soutenez militairement l’Ukraine. Nous sommes dans le même camp.

Le peuple français : Euh… nous ne nous intéressons pas à ces choses…

Javier Milei : Bon, bon. Vous y viendrez, le libéralisme est dans votre ADN !

Le peuple français : Nous préférons attendre.

Javier Milei : La jeunesse n’attendra plus, elle est libérale vous savez ! Ce sont les jeunes qui ont porté mon élection, ils feront pareils chez vous. D’ailleurs je vous laisse, on m’attend, je dois aller supprimer la monnaie de mon pays.

Le peuple français : Pour la remplacer par quoi ?

Javier Milei : On paiera en dollars, ce sera très bien, plus d’inflation : elle était de 185% dans mon pays cette année. Je ramène l’espoir !

Le peuple français : C’est bien de donner espoir !

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Refus de l’hégémonie

Premier élargissement des BRICS

Le groupe Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud (Brics) s’est élargi à l’occasion de son 15e sommet en Afrique du Sud, à Johannesburg, du 22 au 24 août 2023. Un tel événement, une année et demie après le début du conflit armé entre la Russie et l’Ukraine, reflète la vague de fond qui est l’affirmation historique du tiers-monde contre l’hégémonie de la superpuissance américaine. Non seulement il n’y a pas d’alignement sur cette dernière, mais il y a même un soutien appuyé à son concurrent, la superpuissance chinoise.

La raison de cela, c’est que l’incroyable croissance du capitalisme dans la période 1989-2020, désormais brisée par la crise, a produit un développement massif de trop de pays pour que l’équilibre des forces ne soit pas remis en cause. L’affrontement sino-américain ne concerne pas que les États-Unis et la Chine. Tous les pays du monde participent, à leur échelle, à la grande bataille pour le repartage du monde.

Les BRICS forment le camp des outsiders les plus affirmés. Et les pays membres vont être rejoints en 2024 par l’Arabie saoudite, l’Égypte, les Émirats arabes unis, l’Argentine, l’Iran et l’Éthiopie.

L’exemple de l’Arabie Saoudite est très parlant. Son État a été construit littéralement artificiellement par les États-Unis en raison du pétrole. C’est tellement un satellite néo-colonial que lorsque Ben Laden avec Al-Qaïda tente une révolte justement néo-coloniale contre les États-Unis, cela n’a aucun impact véritable. Et vingt ans après les attentats du 11 septembre 2001, l’Arabie Saoudite s’émancipe de la tutelle américaine pour partir à l’aventure.

Autrement dit, des pays à moitié féodaux, largement soumis économiquement aux pays « riches », deviennent tout de même assez riches pour chercher à tirer leur épingle du jeu. En Argentine, le peuple est dans la misère, mais le pays a atteint une masse suffisamment grande pour tenter de rentrer dans le grand jeu.

Tel est l’appel d’air fourni par en priorité la Chine, mais également la Russie (à travers sa taille et ses ressources), à quoi s’ajoutent l’Inde qui est concurrente de la Chine mais a besoin d’espace face aux États-Unis, le Brésil qui se verrait bien dominer l’Amérique du Sud, l’Afrique du Sud qui aimerait bien devenir la puissance dominante dans la partie Sud de l’Afrique.

Les dirigeants des pays des BRICS dans sa version 2023

Toute une série de pays est d’ailleurs à la porte des BRICS. On parle ici des pays suivants en première ligne, même si la liste n’est pas précisément fixe : Afghanistan, Algérie, Angola, Bahreïn, Bangladesh, Biélorussie, Gabon, Indonésie, Kazakhstan, Mexique, Nicaragua, Nigeria, Pakistan, République démocratique du Congo, Sénégal, Soudan, Syrie, Thaïlande, Tunisie, Turquie, Uruguay, Venezuela, Zimbabwe. Les prochains adhérents seront certainement l’Algérie et le Nigeria, l’Indonésie et la Thaïlande.

Il va de soi que l’intégration des prochains pays est déjà programmé. Le fait d’avoir intégré un pays latino-américain, deux pays africains, trois pays moyen-orientaux, est un signal fort. Il s’agissait de souligner un peu l’interventionnisme sur le continent américain (chasse gardée des États-Unis selon la doctrine Monroe en 1823), beaucoup la perspective africaine, à la folie la mise à la disposition des ressources en pétrole et en gaz.

Ce qui est dit, c’est : « nous avons la masse en termes d’habitants, nous avons le grand poids lourd économique chinois et le grand poids lourds en ressources russe, le moyen-orient se moque de qui dominera du moment qu’il est de la partie, vous avez tout à gagner à nous suivre. »

Le conflit armé en Ukraine a fourni la première étape de la grande remise en cause, la question de Taïwan en fournira la seconde. C’est la fin de l’occident qui se joue.

Le président français Emmanuel Macron a tenté de rendre visite au sommet des BRICS : il s’est fait recaler. La France est désormais clairement considérée comme un simple satellite américain. Elle est en première ligne pour l’intégration de l’Ukraine dans l’Union européenne et dans l’Otan. Ce qui est tenté, c’est un partenariat France-Ukraine pour remplacer l’Allemagne comme force principale en Europe. Pour cette raison d’ailleurs, la droite allemande rage totalement du soutien « trop faible » du gouvernement socialiste allemand au régime ukrainien. L’extrême-Droite exige par contre une alliance avec la Russie.

Le président russe Vladimir Poutine n’a pas pu venir au sommet des BRICS non plus, en raison des poursuites pénales promues par l’occident, par l’intermédiaire de la Cour pénale internationale. C’est le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, qui l’a remplacé, afin d’éviter à l’Afrique du Sud de se retrouver dans un imbroglio juridique international.

Les pays membres ou futurs membres des BRICS ne veulent que prendre la place des pays riches. Cependant, ils affaiblissent historiquement l’ordre mondial, ils contribuent à la remise en cause de l’occident. Et ils portent une pierre bien trop lourde pour eux. La remise en cause totale de l’hégémonie américaine n’impliquera pas l’affirmation de la Chine (ou bien de manière très temporaire), mais bien du Socialisme, car c’est l’ensemble du système capitaliste mondial qui sera totalement ébranlé.

C’est la fin de l’occident et cette fin implique la fin du capitalisme. Et si l’occident croit dans sa quasi intégralité que tout restera tel quel, c’est en raison de l’aveuglement propre à une force en décadence. Le monde a totalement changé depuis 2020, il continue de changer et il ne s’arrêtera plus de changer jusqu’à l’effondrement général du capitalisme !