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La faillite de l’Éducation nationale face au confinement

Le système éducatif français est à la peine depuis de nombreuses années, tant par son rapport désastreux à la jeunesse que par la qualité et le contenu de son enseignement. Face à la crise sanitaire et à la survenue intempestive du confinement, il s’est littéralement effondré… finissant par tout simplement annuler les examens scolaires.

Dans un épisode de l’émission « C’est pas sorcier » datant de 2010 consacré à la grippe aviaire, il est expliqué qu’une pandémie est quelque chose d’envisagé par l’État, qu’il y a des scénari en place et qu’un confinement massif des élèves pourrait être déclaré un jour.

Dix ans plus tard, ce jour est arrivé, et c’est comme si le ciel était tombé sur la tête de l’Éducation nationale. Les moyens techniques ont pourtant évolué drastiquement depuis 2010, mais rien n’était prêt. En fait, rien n’avait été envisagé concrètement et rien n’a donc pu être mis en place.

C’est un jeudi soir que les élèves et les enseignants ont appris à la télévision qu’il ne leur restait plus qu’un jour à l’école, avant de rester à la maison. Trois semaines plus tard, le Ministre de l’Éducation nationale a fini par expliquer que les examens du brevet des collèges, des baccalauréats généraux et professionnels, des BEP et des CAP n’auront pas lieu.

Tout ce qu’il a été en mesure de proposer, c’est de compter sur les notes obtenues avant le confinement, reconnaissant de facto que rien de ce qui aura pu être fait durant cette période ne peut être pris au sérieux.

Il a aussi décidé de prolonger éventuellement l’année scolaire de deux semaines, afin de pouvoir ajouter quelques évaluations à toute hâte si un retour en classe est possible. Et encore, tout cela pour donner finalement tous les pouvoirs à des jurys qui décideront sur la base des bulletins précédents qui aura ou pas son diplôme.

C’est une manière de s’assurer de maîtriser par le haut et de manière totalement forcée et artificielle le taux de réussite final aux différents examens. Au passage, remarquons quelle fin lamentable, mais significative, cela constitue pour le dernier baccalauréat par série de l’histoire…

> Lire également : La remise en cause du principe d’un baccalauréat universel

Depuis maintenant trois semaines, les professeurs semblent n’avoir que la débrouille afin de garder le contact avec les élèves. Certains « cours » ont lieu sur Discord, Zoom, voir même sur What’sApp ou Facebook… D’autres professeurs, soit parce qu’ils ne maîtrisent pas ces outils, soit parce que, pour des raisons souvent légitimes ils refusent de les utiliser, n’ont plus qu’un lien sporadique avec leurs élèves, ou en tous cas certains d’entre eux. Il ne s’agit plus alors que de quelques e-mails échangés, en général via les outils de l’Éducation nationale qui ont été très rapidement surchargés et dépassés.

La réalité est que beaucoup d’élèves ne se retrouvent qu’avec des fiches en guise de cours et des exercices à envoyer à leurs professeurs, qui parfois répondent à peine. Les plus sérieux s’entre-aident via des groupes de travail, notamment pour les jeunes filles. Une partie d’entre eux, dont beaucoup de garçons, délaissent totalement les cours.

La situation est encore plus compliquée dans l’enseignement professionnel où il est pratiquement impossible de suivre un cours sans une présence physique avec des machines ou des outils en particulier. Des choses auraient été possibles, mais il aurait fallu pour cela prévoir et former tant les élèves que les enseignants. Ainsi que les familles, bien sûr.

Combien d’élèves se retrouvent ainsi « au bord du chemin » ? Le Ministère n’est en fait pas en mesure de pouvoir quantifier sérieusement l’impact du décrochage dans un sens ou même du maintien du lien scolaire dans l’autre. De toute façon, il est évident que les chiffres sont vertigineux, on sait que les élèves de l’enseignement professionnel (650 000 environ), les élèves de maternelle (2, 5 millions), une bonne partie des élèves du primaire et des collèges sont massivement laissés à leur sort ou en incapacité de pouvoir suivre le principe de la « formation à distance ».

Le fait d’envisager maintenant de donner tous les diplômes du secondaire de manière administrative (sous prétexte du « contrôle continu ») est l’aveu de cet échec lamentable et le reflet d’une impréparation totale, qui ne date d’ailleurs pas du confinement…

> Lire également : Réforme du baccalauréat: la situation compliquée dans les Lycées

Les prétentions ou les illusions de l’époque de Jamy dans « C’est pas sorcier » sont bien derrière nous. La perspective d’une pandémie était connue depuis des années, la crise en cours a été annoncée comme un risque des mois avant son arrivée en France, mais il n’y avait aucun plan, rien n’a été pris au sérieux. L’État a été totalement pris au dépourvu, avec une ampleur et des conséquences dont on ne peut même pas prendre encore la mesure, mais dont la pitoyable fin du baccalauréat sous sa forme traditionnelle est tout un symbole.

La faillite est complète et correspond à la fin d’une époque : celle de l’individualisme triomphant. Seule une démarche collectiviste est rationnelle.

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Réforme du baccalauréat: la situation compliquée dans les Lycées

Symbole du libéralisme triomphant, le baccalauréat a été démantelé au profit de parcours individuels à la carte, avec une place faite au contrôle continue en plus de l’examen final traditionnel. Ce contrôle continu consiste finalement en des minis épreuves assez similaires aux partiels universitaires et leur organisation pour les élèves de Première qui a lieu en ce moment se fait dans une grande confusion.

Voici les propos intéressants tenus par le président de la fédération de parents d’élèves FCPE au Conseil Supérieur de l’Éducation d’hier, jeudi 23 janvier 2020.

Il y est expliqué que ces nouvelles épreuves de contrôle continue (E3C), en plus du grand flou dans lequel elles ont lieu, entraînent une pression permanente de l’examen, au détriment de l’enseignement lui-même. Beaucoup d’enseignants et de syndicats d’enseignants déplorent la même chose, en plus de nombreuses autres critiques.

« Déclaration liminaire

Conseil Supérieur de l’Education du jeudi 23 janvier 2020

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les membres du Conseil,

Nous assistons à une situation inédite dans l’école de la République. D’un point de vue réglementaire, des élèves ont passé les premières épreuves communes de contrôle continu(E3C), alors même que le décret relatif à la fraude ou tentative de fraude n’est pas paru. Ce texte, nous l’avons vu le mois passé en CSE et il s’appliquera bien à la génération Bac2021.

La FCPE se répète à chaque CSE : la méthode Coué ne fonctionne pas pour la conduite de changement et en particulier dans l’éducation qui exige un temps long, un temps de consensus, un temps d’explication, un temps d’organisation.

Il n’est pas possible de mettre en péril la confiance de la jeunesse en l’Ecole et en son avenir. C’était tout le sens de la communication des présidents départementaux de la FCPE dès le 26 janvier 2019 qui appelait à faire une pause. Une pause pour anticiper les difficultés, travailler à réduire les inégalités scolaires, de territoire ou de parcours. Nous n’avons pas été les seuls à demander ce temps. Mais, rien. Tout a continué et nos propositions n’ont pas été entendues.

La tension est palpable chez les parents. Nous avons lancé un questionnaire début janvier pour appréhender le niveau de compréhension et d’information des parents d’élèves sur les réformes en cours. 5000 répondants,dont plus de 40% d’entre eux ne sont pas adhérents à la FCPE et 68 % d’entre eux ont des enfants en première. Et les connections continuent.

Ce sont 70 % des parents qui se trouvent mal informés sur les réformes, qui ne savent pas comment s’organisent les E3C. 67% qui ne connaissent pas les 54h dédiées à l’aide à l’orientation et près de 60% qui se repèrent difficilement dans les spécialités.

Néanmoins, les enjeux de la réforme sont assimilés, puisque les 5 sujets de préoccupation majeurs sont l’orientation, le choix des spécialités, les E3C, Parcoursup et les nouveaux programmes.

Rappelons-nous ensemble ce qu’est le lycée, trois ans pour apprendre et préparer son projet d’avenir post bac. Trois ans de scolarité et trois de construction citoyenne pour les jeunes adultes qu’ils seront au sortir de l’Ecole. Au début des travaux sur la réforme, le nouveau bac devait permettre aux élèves de sortir d’un examen sanction, source de stress, en intégrant le contrôle continu. Un enjeu essentiel pour la FCPE.

Mais il y a eu les épreuves communes de contrôle continu, les fameuses E3C pour les initiés. Ce format hybride à mi-chemin des modus operandi des épreuves terminales et du contrôle continu, version «super devoir blanc». Dans les faits, elles ressemblent énormément aux partiels universitaires.

Par deux fois ce dernier mois, nous avons alerté publiquement sur les questions techniques comme pédagogiques, sur les inégalités qui seraient à l’œuvre dans la mise en place des E3C cette année. Nous avons demandé un ajournement.

Oui, les difficultés n’ont pas été anticipées. Oui, nous sommes dans une situation inédite et ce sont les élèves en premier lieu qui en pâtissent et qui y jouent leur diplôme national du baccalauréat. Alors même qu’il n’y avait nul besoin de créer une telle usine à gaz pour évaluer leur travail sur l’année. Nous recevons tous les jours des témoignages de situations d’élèves ou d’établissement à propos des difficultés générées par les E3C. C’est une usine à gaz qui explose aujourd’hui.

Alors, est-ce une solution pertinente pour évaluer la progression des élèves ? 18 mois de scolarité, trois sessions sur plusieurs matières, sans ôter le contrôle continu, les épreuves anticipées et les épreuves terminales. Les élèves sont ainsi continuellement sous pression d’examen: en lieu et place d’apprendre, d’analyser leurs erreurs pour progresseravec les équipes éducatives, ils bachotent.Onest bien loin d’un climat serein de travail pour les élèves, de moins d’examen et de moins de stress.

Pour la FCPE, nous sommes loin de la prise en compte de l’évaluation progressive de l’élève dans ses apprentissages et de son bien-être. Enfin, je finirai mes propos sur une alerte concernant la génération Bac 2020, les élèves qui sont en terminale cette année. Parcoursup a ouvert hier et ils passeront leurs épreuves en juin. Aujourd’hui, ils souffrent des répercussions indirectes de la réforme et des E3C, les bacs blancs sont reportés. Oui, ils sont angoissés, car ils savent être la dernière génération d’un système. Que deviendront celles et ceux qui possiblement échoueront au baccalauréat ?

Nous attendons des réponses et avant le mois de juin.

Je vous remercie de votre écoute. »

Notons également que la FCPE, à l’issue d’une conférence de presse hier, a critiqué les actions de certains professeurs jouant la surenchère en boycottant ou bloquants les épreuves. Il a ainsi été déclaré de manière assez juste, ou en tous cas illustrant bien le climat délétère ambiant :

« Cela suffit que nos gamins soient toujours les victimes de ces adultes qui n’arrivent pas à trouver les clés du dialogue […]. On est dans une situation de rapport de force, une guerre de positions entre un ministre et des enseignants, et personne ne veut lâcher »

À cela s’ajoute une grande confusion pour les élèves de Terminale, la dernière génération passant le bac sous sa forme traditionnelle, devant faire leur choix d’orientation sur la Parcoursup avec un grand flou qui règne encore sur les choix optimaux à faire, des professeurs peu au courant pour aider les familles et les élèves, etc.

> Lire également : La remise en cause du principe d’un baccalauréat universel

Cela en dit long sur l’effondrement de notre société, dans laquelle les points de tensions se multiplient, avec une dégringolade généralisée de tout un tas de secteurs du quotidien, de tout un tas d’aspects, menant tout droit à une rupture de grande ampleur.

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Culture

Bac littérature 2018 : pédérastie et inceste au programme

Ainsi, le sujet au Bac littérature hier pour les Terminales Littéraires était directement consacré à la pédérastie. C’est révélateur d’à quel point un esprit « moderne » pratiquement dégénéré a obtenu la main-mise sur de vastes sphères intellectuelles, dans le prolongement de la promotion libérale-libertaire de la pédophilie par des intellectuels dans les années 1970.

Et le constat est sans appel. Il ne s’agit pas simplement d’avoir choisi non pas l’autre roman au programme, Madame de Montpensier de Madame de Lafayette. Il s’agit d’avoir posé une question directement liée à la pédérastie dans le roman Les Faux-monnayeurs d’André Gide.

Voici les deux questions posées au Bac littérature hier, la première étant celle qui nous intéresse directement :

Une critique déclare qu’à la fin des Faux-monnayeurs « tout rentre dans l’ordre ». Qu’en pensez vous ? (8 points)

André Gide avait d’abord envisagé d’inscrire les réflexions d’Edouard sur le roman dans un premier chapitre pouvant servir de préface. Il y a pourtant renoncé. Selon vous, pourquoi ? (12 points)

Or, la toute fin des Faux-Monnayeurs consiste en la phrase suivante :

« Je suis bien curieux de connaître Caloub. »

Caloub est justement un très jeune adolescent…dont le nom est un anagramme de « boucle », comme reflet de l’éternel retour vers les jeunes à soumettre.

Car celui qui dit cela est un écrivain de 38 ans, Édouard, qui couche avec son propre neveu dont il est le « mentor ». Tout le roman consiste justement à raconter comment deux pédérastes tentent d’obtenir des faveurs des lycéens, le tout à mots couverts.

Mais quand on dit à mots couverts, il faut relativiser ; les propos de l’oncle sur son propre neveu sont très clairs :

« Dès que je le vis, ce premier jour, dès qu’il se fut assis à la table de famille, dès mon premier regard, ou plus exactement dès son premier regard, j’ai senti que ce regard s’emparait de moi et que je ne disposais plus de ma vie ».

Le jeune peut d’ailleurs écrire, dans une lettre, que :

« Pour cacher son identité, Laura passe pour la femme d’Édouard ; mais chaque nuit c’est elle qui occupe la petite chambre et je vais retrouver Édouard dans la sienne. Chaque matin c’est tout un trimbalement pour donner le change aux domestiques. »

Le roman est d’ailleurs d’une large portée autobiographique.

Marc Allegret et André Gide en 1920

André Gode, dans son Journal, raconte en novembre 1918 sa définition de la pédérastie :

« J’appelle pédéraste celui qui, comme le mot l’indique, s’éprend des jeunes garçons. J’appelle sodomite […] celui dont le désir s’adresse aux hommes faits. J’appelle inverti celui qui, dans la comédie de l’amour, assume le rôle d’une femme et désire être possédé.

Ces trois sortes d’homosexuels ne sont point toujours nettement tranchées ; il y a des glissements possibles de l’une à l’autre ; mais le plus souvent, la différence entre eux est telle qu’ils éprouvent un profond dégoût les uns pour les autres ; dégoût accompagné d’une réprobation qui ne le cède parfois en rien à celle que vous (hétérosexuels) manifestez âprement pour les trois.

Les pédérastes, dont je suis (pourquoi ne puis-je dire cela tout simplement, sans qu’aussitôt vous prétendiez voir, dans mon aveu, forfanterie ?) sont beaucoup plus rares, les sodomites beaucoup plus nombreux, que je ne pouvais croire d’abord ».

Là encore, il faut être prudent. Dans le Tome II de son Journal publié dans la prestigieuse Pléiade, André Gide peut écrire des choses comme :

« La compagnie de très jeunes enfants me requiert irrésistiblement. Il en a toujours été de même et nul plaisir n’est chez moi plus sincère. »

Cela en fait davantage un pédophile et par ailleurs tous ses écrits littéraires tournent autour de cette obsession. On remarquera comme les éditions Folio jouent de cette question des jeunes garçons comme ici sur une couverture!

Les Faux-monnayeurs racontent comment des gens des milieux les plus aisés font de la pédérastie un style de vie : qu’en 2018, l’Éducation Nationale n’ait rien de mieux à proposer en dit long sur ses valeurs, sur la décadence générale sur le plan culturel, sur la corruption par le capitalisme.

Seule une Gauche ancrée dans la population qui travaille, loin des styles de vie individualistes et corrompus, peut renverser une telle situation.

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Politique

La lutte corporatiste de l’UNEF contre la sélection universitaire

Le syndicat étudiant UNEF a mis en ligne un site afin de critiquer la sélection universitaire. Le choix du nom de domaine de ce site en dit long sur le populisme, puisqu’il s’agit de sélection-université.lol.

L’absence de contenu n’étonnera pas quand on sait que le congrès d’Aubervilliers du Parti socialiste se tient bientôt et que les partisans de Benoît Hamon et de son mouvement génération-s s’agitent beaucoup pour obtenir une certaine influence.

Voici d’ailleurs l’argumentaire mis en avant sur le site produit par l’UNEF pour dénoncer la sélection. On y voit une argumentation particulièrement bornée, utilisant l’écriture inclusive pour revendiquer les droits étudiants, sans jamais mettre en perspective le sens de la réforme par rapport au capitalisme et à ses exigences.

C’est une vision corporatiste, défendant les seuls intérêts des étudiants en tant qu’individus ayant le droit, par définition, de faire ce qu’ils veulent. C’est une déformation complète du principe de la lutte pour une éducation populaire, accessible, mais donc avec un certain contenu.

Ce n’est pas sans rappeler les récents propos de Hervé Christofol, le secrétaire général du principal syndicat d’enseignants du supérieur, le Snesup. Un sénateur de droite demandait en effet il y a dix jours que le nombre de postes à l’université soit corrélé aux emplois disponibles suite à ces études.

La réaction de Hervé Christofol a été de dire :

« C’est l’Etat qui planifierait les carrières des gens ? On se croirait en RDA du temps des soviétiques ! »

C’est une vision libérale, qui nie que les études, les emplois, sont définis par le capitalisme, et qui déforme la gauche pour la transformer en service après-vente du capitalisme, ainsi qu’en Père Noël venant agrandir la possibilité des souhaits individuels.

La mise en place de la sélection à l’entrée des filières “en tension”

Cette réforme remet en cause le principe de libre accès à l’université qui garantit à chaque titulaire du baccalauréat de pouvoir poursuivre les études, dans la filière de son choix à l’université.

Désormais, lorsque les demandes seront supérieures au nombre de places dans une filière, les universités trieront les étudiant-e-s sur dossier, et en fonction de l’avis du conseil de classe du lycée, entre ceux qui pourront accéder à cette filière, et ceux à qui on répondra “non”, en les empêchant de poursuivre leur projet d’étude.

Cette sélection ne concernera pas uniquement les quelques filières en tension citées habituellement (droit, santé, psycho, staps). Pour rappel, cette année ce sont 169 filières qui ont été “en tension” à la rentrée 2017 : ce serait donc d’ors et déjà ces 169 filières qui pourraient avec cette disposition de la loi sélectionner l’année prochaine. Pire, face au manque de moyens budgétaires et à la hausse des effectifs étudiants, le nombre de filières en tension va certainement s’accroître.

Ainsi, à court terme, ce sont la majorité des filières qui pourraient sélectionner à l’entrée de l’université, et fermer la porte à des milliers de jeunes.

Le “oui, si” : les universités imposeront une année supplémentaire à certain-e-s étudiant-e-s

Le constat est partagé, il est urgent de remédier aux 60% d’échec en licence. Pourtant les mesures annoncées ne sont pas à la hauteur de cette ambition puisque l’on nous fait croire qu’il faudrait changer les étudiant-e-s plutôt que l’université.

En effet, la réforme de l’accès au premier cycle universitaire mettra en place une nouvelle réponse possible sur APB : « oui,si ». Les universités pourront sélectionner sur dossier d’un côté les étudiant-e-s qui pourront faire leur licence normalement, en trois ans, et de l’autre côté, les étudiant-e-s à qui l’on imposera une année de remise à niveau, qui rallongera leur cursus universitaire, et entraînera des coûts financiers inabordable pour de nombreux-ses étudiant-e-s.

Au lieu de mettre en place des dispositifs pédagogiques pour tou-te-s les étudiant-e-s sur la base du volontariat, le gouvernement fait encore une fois le choix d’imposer des dispositifs particuliers et d’entériner un enseignement supérieur à multiples vitesses.

Nos bourses en danger avec la mise en place d’un “contrat pédagogique”.

Un “contrat de réussite pédagogique” sera désormais signé entre les universités et chaque étudiant-e. En fonction de la réussite ou non de l’étudiant-e durant ses examens, des années d’études ou des modules supplémentaires seront imposées à l’étudiant-e, ce qui accentuera un peu plus l’individualisation des diplômes, et ses bourses pourraient même lui être retirées.

Derrière ce contrat, une logique : si l’on échoue à l’université, c’est de notre responsabilité en tant qu’étudiant-e, et il faudrait ainsi mettre en place des sanctions supplémentaires. Cette logique nie la responsabilité de l’Etat et des universités, qui ne mettent pas en place des conditions d’études de qualité, nous permettant de réussir et de progresser.

Nos droits étudiants en danger avec la mise en place de licences à la carte

Le gouvernement souhaite créer des licences à la carte: dans une même filière d’un même établissement les étudiant-e-s n’auront pas les mêmes cours, le même nombre d’heures d’enseignement. Le gouvernement souhaite en profiter de cette individualisation des diplômes pour supprimer les rattrapages et la compensation des matières, des droits fondamentaux aujourd’hui pour les étudiant-e-s pour nous permettre de réussir.

Au-delà de supprimer des droits fondamentaux, cela va créer des inégalités entre les étudiant-e-s d’une même filière, car nos diplômes ne seront pas les mêmes! Ainsi, nos chances d’avoir une insertion professionnelle  de qualité ne seront pas les mêmes car nos diplômes n’auront pas la même valeur.

Par ailleurs, tous les établissements ne pourront pas mettre en place les mêmes enseignements, ce qui va accentuer les inégalités qui existent déjà entre les universités.

La réduction des voeux sur APB: des milliers de bachelier-e-s seront sans affectation

Le gouvernement souhaite limiter le nombre de vœux qu’il est possible de faire sur APB et d’enlever la possibilité de les hiérarchiser. Cette mesure, combinée à la possibilité pour les universités de sélectionner à l’entrée des filières “en tension”, va aggraver le nombre d’étudiant-e-s orienté-e-s dans des filières par défaut ou bien sans proposition d’inscription.

Cette mesure ne permettra donc pas « un accès plus juste et plus transparent dans le supérieur », comme le prétends le ministère, mais empêchera à des milliers de jeunes l’accès à l’enseignement supérieur.

Prétendre vouloir accueillir tou-te-s les étudiant-e-s sans investissement budgetaire suffisant … De qui se moque-t-on ?

Alors que le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche est débattu à l’assemblée nationale, celui-ci est en totale contradiction avec les objectifs affichés par le gouvernement.

Alors que plus de 15 établissements sont dans une situation budgétaire particulièrement difficile selon la Cours des Comptes, les locaux des universités sont vétustes, que les amphithéâtres sont surchargés et que des milliers de jeunes n’ont obtenu d’inscription à l’université en cette rentrée, l’augmentation prévisionnelle du budget des université est largement insuffisante.

En effet, le ministère prévoit d’investir 1 milliard d’euros ans l’enseignement supérieur durant la totalité du quinquennat, alors qu’il faudrait un investissement de deux milliards d’euros par ans aux universités pour pouvoir fonctionner et accueillir tou-te-s les étudiant-e-s!

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Réforme du baccalauréat et « Parcoursup » : communiqué autour de l’UNEF

Suite à la remise en cause du baccalauréat universel et à la mise en place dès cette année d’un nouveau système d’inscription pour les études supérieures, le syndicat UNEF a mobilisé ces derniers jours.

En voici le communiqué diffusé à l’occasion du premier février et signé par différentes autres mouvements de jeunesse liés à des partis ; on notera l’utilisation de l’écriture inclusive.

Suite au vote de la loi réformant l’accès à l’université en décembre à l’assemblée, le mois de janvier est celui de la mise en place de la sélection dans les universités via la nouvelle plateforme « Parcoursup ».

Afin de trier les dossiers des lycéen∙ne∙s, chaque université se fondera sur des attendus nationaux, déclinés en attendus locaux. Pour des milliers de jeunes, ces attendus auront pour effet de les décourager de poursuivre des études, de leur bloquer la possibilité d’accéder à la filière de leur choix, voire de l’université tout court.

En effet, l’augmentation du nombre de bachelier, combinée à la restriction du nombre de places disponibles dans les universités, vont à terme transformer la majorité des filières ouvertes, en filières « en tension », donc rendues sélectives par la loi.

Par ailleurs, la complexe procédure d’admission, parce qu’elle limite les bachelier∙e∙s à 10 vœux non hiérarchisés, risque de maintenir la plupart des jeunes sur liste d’attente jusqu’à la dernière phase de la procédure.

Pour tous les jeunes sans affectation à l’issue de la procédure, leur seule option sera de faire appel au rectorat, qui leur proposera une unique affectation dans une filière où demeurent des places vacantes, sans garantie que cette affectation soit en cohérence avec leur projet pédagogique et professionnel. Les jeunes n’auront que 24 heures pour répondre à cette proposition, sans quoi perdront toute chance d’accéder à l’enseignement supérieur.

Par ailleurs, le gouvernement souhaite, dans le cadre de cette réforme, remettre en cause l’arrêté licence, texte qui cadre nationalement les droits étudiants du cycle licence, sorte de code du travail et étudiant-e-s. En remettant en cause des protections fondamentales telles que les rattrapages ou encore la compensation entre les matières, et en souhaitant individualiser à outrance les parcours, c’est notre droit à la réussite qui est menacé.

Les étudiant-e-s devront signer un contrat de réussite avec leur établissement, et s’ils n’en respectent pas les termes, leurs bourses pourraient se voir supprimées. Alors que les mauvaises conditions d’études à l’université et la précarité financière sont les premiers facteurs d’échec dans l’enseignement supérieur, le gouvernement se trompe lorsqu’il estime que retirer les bourses des étudiant-e-s en difficulté, c’est-à-dire les sanctionner, les incitera à réussir, cela ne fera au contraire qu’augmenter un taux d’échec d’ors et déjà très élevé en licence.

Le gouvernement souhaite mettre en place une cotisation de 90 euros par étudiant∙e∙s, visant à financer les services de médecine préventive, de vie étudiante, culturels et sportifs des universités. La mise en place de cette cotisation fait un peu plus reposer le financement du service public de l’enseignement supérieur, en grande difficulté du fait du désengagement de l’Etat, sur les épaules de ses usager.e.s. Les contours de sa répartition ne sont par ailleurs toujours pas clairs, ne permettant pas d’avoir de certitude sur ses objectifs et son efficacité réelle.

Cette réforme de l’accès à l’enseignement supérieur se combinera avec la réforme du baccalauréat, qui risque d’entériner la fin du bac comme diplôme national. En mettant en place une modularisation des enseignements secondaires sans cadrage national, qui aggravera les inégalités territoriales entre lycées, il sera créé, de fait, une concurrence entre établissements. Cette concurrence sera d’autant plus grave qu’elle sera prise en compte dans les procédure d’admission à l’université, par l’étude des dossiers des candidat-e-s.

Alors que depuis son élection le président et son gouvernement font sans cesse le choix de politiques qui favorisent les plus riches et les puissants à l’image de la suppression de l’ISF, ici, ce sont une nouvelle fois les classes populaires qui sont visées. Cette sélection va toucher prioritairement les lycéen.ne.s issus des quartiers les plus populaires et les plus en difficulté. Elle laissera sur le carreau des milliers de lycéen.ne.s qui se retrouveront sans diplôme et sans avenir.

Alors que les jeunes ont déjà exprimé leur opposition à l’annonce du plan étudiant depuis plusieurs mois, nos organisations réitèrent leur refus de voir s’instaurer la sélection à l’entrée de l’université, nous réclamons le retrait du plan Vidal. Nous exigeons aussi l’abandon des projets de remise en cause des droits fondamentaux des étudiants, ainsi que la mise en place d’une réforme du bac qui engendrera de profondes inégalités territoriales et sociales.

Il est grand temps d’agir pour qu’un vrai service public de l’information et de l’orientation voit le jour et que des moyens soient injectés afin de permettre à chacune et chacun de maîtriser et de choisir son parcours de vie.

Nos organisations ont déjà formulées de nombreuses propositions alternatives et nous continuerons à les porter de toutes nos forces face à ces projets qui menacent notre avenir.

Nos organisations appellent les jeunes à se mobiliser le jeudi 1er février 2018, à se réunir, dès maintenant pour débattre des réformes, à se mobiliser sous toutes les formes décidées collectivement (grèves, blocages, manifestations, rassemblements, etc), pour alerter sur les dangers des réformes en cours.

Nous réclamons le droit pour toutes et tous (lycéen.ne.s, étudiant.e.s, salarié.e.s). de faire grève, et nous nous prononçons d’ores et déjà contre toute sanction, administrative ou policière, contre celles et ceux qui tenteront d’exercer ce droit légitime.

Une nouvelle réunion réunissant nos organisations se tiendra à la suite du 1er février pour proposer des suites à cette journée de mobilisation.

Signataires :

UNEF – UNL – Solidaires étudiant.e.s – FiDL

Mouvement Jeunes Communistes de France – Ensemble Jeunes – Jeunes Insoumis – Jeunes Générations – MJS Réseau jeune du PG – Union des étudiants Communistes – NPA Jeunes

JOC – MRJC – LMDE

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Société

La remise en cause du principe d’un baccalauréat universel

C’est une ironie comme l’histoire les connaît qu’Alain Devaquet soit décédé quelques jours avant la remise hier d’un dossier au ministre de l’Éducation nationale afin de réformer le baccalauréat. Car le projet d’Alain Devaquet en tant justement que ministre de l’Éducation nationale en 1986 avait provoqué une mobilisation énorme de la part des étudiants et des lycéens.

Ceux-ci avaient compris que le projet d’Alain Devaquet était la sélection, un parcours universitaire à multiple vitesses. Ils ont été d’une grande combativité par conséquent, la répression étant elle brutale, comme en témoigne la mort de l’étudiant Malik Oussekine.

Celui-ci avait été tué par des policiers du peloton de voltigeurs motoportés, c’est-à-dire deux policiers à moto, l’un conduisant, l’autre frappant avec sa matraque. Malik Oussekine a été tué peu après minuit, alors qu’il sortait d’un club de jazz et que la police traquait des « casseurs ». Ils l’ont massacré dans un hall d’immeuble.

Cet événement, combiné à la vague contestataire contre le projet d’Alain Devaquet, a marqué toute une génération. Cela a été un marqueur de la contestation du capitalisme.

Mais en trente années, le libéralisme a largement conquis les masses. La fausse gauche célèbre le libéralisme de mœurs sans voir – ou plutôt sans prétendre voir – qu’il va de pair avec le libéralisme économique.

Aussi, cette fois, le projet de sélection passe comme une lettre à la poste chez les lycéens et les étudiants. Pire encore, il va commencer au lycée.

On connaît ici le principe : l’État laisse pourrir une situation, pour après reconnaître la nécessité d’un changement. La plupart des privatisations ont connu ce justificatif de « l’efficacité ».

Et en l’absence de connaissances politiques, de traditions de gauche, les lycéens et les étudiants tombent dans le panneau. Chacun s’imagine « sortir du lot » pour les plus carriéristes, quant aux autres, ils voient juste avec plaisir le principe d’un « bac à la carte ».

Car le baccalauréat, pour ce qui ressort du rapport remis hier au ministre concerné, supprime les séries L, ES et S. Il y aura un tronc commun et des options à choisir.

Dans le tronc commun, on trouve l’histoire-géographie, les mathématiques, deux langues vivantes, l’EPS, le français et de philosophie. Puis, en option, il y aura les mathématiques-sciences de la vie et de la Terre, lettres-langue vivante, sciences économiques et sociales / mathématiques.

En apparence, aucune différence. En pratique, pour les classes de seconde, de première, de terminale, il faudra à chaque fois re-sélectionner une de ces options. C’est la fin d’un bac universel.

De plus, les notes seront en continu, ce qui va renforcer la valeur très différente des lycées. Un bac dans tel lycée n’aura clairement pas la même valeur qu’un autre bac dans un autre lycée.

Évidemment, les options à choisir dépendront du « marché du travail ». A la soumission aux professeurs pour avoir les bonnes notes – on connaît la dimension subjective dans les matières littéraires ou les langues – s’ajoute celle aux entreprises.

Pour préserver la fiction du « bac », le projet prévoit également que la moitié de la note finale dépende de quatre examens de fin d’année, avec deux majeures au printemps, la philosophie et un oral en juin.

Enfin, pour clouer la dépendance, il n’y aura plus d’oral de rattrapage, mais l’étude du livret scolaire de première et de terminale.

C’est la négation de l’épreuve universelle et le renforcement de la soumission à la concurrence, à la compétition, aux intérêts des entreprises, et cela de manière totalement unilatérale.

Cela ne veut pas dire que le baccalauréat ait été idéal dans sa forme passée. Tous les gens de gauche savent ce que signifie l’épreuve comme mise sous pression, bachotage sans contenu, illusion sur la vie adulte qu’il y a après, etc.

Cependant, l’idée d’une épreuve universelle, pour une société reconnaissant être une collectivité transcendant les individus, ne peut être que l’exigence de base de toute personne de gauche.