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Dissolution du mouvement Bastion social, une victoire du camp démocratique

La dissolution du mouvement Bastion social par l’État français ce mercredi 24 avril 2019 est une nouvelle importante pour toutes les personnes ayant conscience de l’importance du combat antifasciste. C’est indiscutablement une bonne chose, car ce groupe d’activistes d’extrême-droite représentait une menace directement dangereuse pour le mouvement démocratique et populaire en France, notamment à Lyon.

De manière typiquement fasciste, l’idéologie du mouvement Bastion social consistait à prôner une « troisième voie », nationaliste, par rapport au capitalisme et au Socialisme.

Nous avons évoqué ce mouvement à plusieurs reprises dans des articles, et nous l’avions présenté dans un article complet et détaillé en février 2018.

> Lire également : Le “Bastion social” et ses locaux à Lyon, Strasbourg, Chambéry, Aix-en-Provence, Marseille

Organisé autour de ce qui se voulait être des squats d’extrême-droite, sur le modèle de Casapound en Italie, il devait être un mouvement fédérateur de la jeunesse nationaliste radicale, avec pour objectif de constituer des brigades de choc, afin de se confronter, de provoquer.

La dissolution du mouvement Bastion social est donc une victoire, partielle mais réelle, du camp démocratique sur le fascisme. Cela ne sera bien sûr pas suffisant, car seule la classe ouvrière, en portant le Socialisme, peu véritablement écraser le fascisme. Le libéralisme d’un Emmanuel Macron, qui s’avère être par ailleurs un réactionnaire partageant des valeurs de la Droite la plus conservatrice, notamment sur la chasse à courre, ne peut pas grand-chose face au romantisme nationaliste. Il est même évident que cela l’alimente.

Il faut cependant raisonner de manière politique, intelligente, et reconnaître ici à quel point il était juste de voter pour Emmanuel Macron contre Marine Le Pen au second tour de la Présidentielle, justement parce que le gouvernement d’Emmanuel Macron a dissout Bastion social, ce que n’aurait jamais fait Marine Le Pen.

Il ne s’agit pas pour autant d’avoir des illusions sur la capacité d’Emmanuel Macron à mener la bataille qu’il imagine contre le populisme, voire le nationalisme – les déboires de la tête de liste LREM aux Européennes Nathalie Loiseau, concernant sa présence sur une liste d’extrême-droite à une élection étudiante dans sa jeunesse, en dit déjà très long sur tout cela.

Cette dissolution par l’État d’un groupe fasciste est importante, mais elle n’est qu’un aspect partiel, temporaire, à l’efficacité très limitée. C’est un coup porté au fascisme, mais il se renforcera d’une autre manière si la situation ne change pas.

C’est à la Gauche de mener pleinement la bataille contre le nationalisme et le fascisme, de manière unitaire, en assumant les valeurs historiques du mouvement ouvrier. Ce qu’il faut, évidemment, c’est un nouveau Front populaire en France, comme en 1936 !

Voici le communiqué du Ministère de l’Intérieur sur la dissolution du mouvement Bastion social :

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Le pourrissement du mouvement des gilets jaunes

La mobilisation des gilets jaunes ce samedi 1er décembre a été marquée par de la casse et des scènes de violence contre la Police à Paris et dans plusieurs villes. Il y a eu en tout plus de 300 arrestations et une centaine de blessés rien qu’à Paris, dont 14 du côté des forces de l’ordre qui ont souvent servit de défouloirs. Cette journée montre un pourrissement du mouvement des gilets jaunes.

Le graffiti sur l’Arc de triomphe, « les gilets jaunes triompheront », est sans aucun doute l’élément le plus marquant symboliquement de ce troisième week-end de révolte des gilets jaunes. Car on est là à la fois dans la mythomanie et dans le substitutisme.

Mythomanie, car les gilets jaunes ne peuvent pas triompher, étant un mouvement informe, porté socialement par des artisans, commerçants, indépendants, sans autre horizon politique que le populisme et la démagogie fasciste. Substitutisme, car plus il y a radicalisation en apparence des excités de la petite-bourgeoisie, moins il y a de monde en réalité.

Jean-Luc Mélenchon peut bien s’imaginer qu’il y a une « révolution populaire » et que « les gens ne baissent pas en détermination», on est passé en trois week-ends de 300 000 manifestants à un peu plus de 100 000, puis 80 000 hier.

Aux abords des Champs-Élysées à Paris, cela donnait quelques milliers de personnes, dont un bon millier là pour le folklore d’une casse stérile et médiatique. Un théâtre qui s’est ensuite développé place de l’Opéra, avenue Kléber, avenue Foch, rue de Rivoli, avenue de la Grande Armée, avenue d’Iéna, avenue Raymond Poincaré, boulevard Haussman, avec le traditionnel incendie de voitures, les vitres de banques brisées, les CRS harcelés, etc.

À ce spectacle se sont greffées quelques centaines de pilleurs organisés et équipés pour se servir opportunément, le tout sous l’œil racoleur des caméras des chaînes d’information pendant qu’en plateaux les journalistes et les invités commentaient avec la posture de l’offuscation.

L’inconsistance de la démarche s’est illustrée de manière dramatique avec ce jeune homme participant à l’arrachage de l’immense portail d’entrée du Jardin des Tuileries, puis s’en retournant soudain comme si de rien, avant que le portail ne lui écrase la tête en s’effondrant.

L’absence de policiers et de pompiers étaient bien souvent de rigueur, comme il se doit, à Paris comme ailleurs. Le gouvernement est très éduqué et il sait que la société française est grandement endormie, que la France profonde n’aime pas les troubles.

Aussi, si les gens qui cassent s’imaginent que la France, l’une de plus grandes puissances capitalistes du monde, en a quelque chose à faire de leurs actions infantiles, c’est que leur naïveté est aussi développée que la vanité de leurs actions. Tablons plutôt pour expliquer leur démarche sur la mauvaise foi, ainsi que sur une très large influence du mélange altermondialisme – populisme nationaliste – complotisme d’extrême-gauche – activisme d’extrême-droite.

Si la capitale a regroupé bon nombre de ces « séditieux », comme les nomme le ministre de l’Intérieur qui n’exclut pas d’avoir recours à l’état d’urgence, l’agitation et la casse ont concerné de nombreuses villes en France comme Tours, Marseille ou Toulouse.

Les slogans des gilets jaunes pénétrant puis incendiant la préfecture du Puy-en-Velay en Haute-Loire synthétisent parfaitement l’état d’esprit des gilets jaunes : « Macron démission » et « on est chez nous ».

On n’en a pas fini avec les dégâts sur le plan des valeurs qu’ils auront causé, avec leur culte du spontanéisme, du rejet de la politique, de l’intervention individuelle « rentre-dedans » comme solution aux problèmes économiques. Dans leur définition même, les gilets jaunes sont le vecteur du refus catégorique, formel, sans appel, de toute critique du capitalisme et de la bourgeoisie.

C’est un écho direct de la posture ultra-populiste de Marine Le Pen lors du débat du second tour des présidentielles, de la « fachosphère » sur internet avec un site comme « F de souche » qui n’a jamais rien produit malgré une surface immense, de l’activisme débridé des regroupements d’extrême-droite comme le « bastion social » à Lyon. C’est le reflet d’un capitalisme de plus en plus pourri, faisant des gens des individualistes forcenés, nihilistes sur le plan philosophique, anti-démocratique dans leur vision du monde.

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Attaques fascistes à l’université : le libéralisme a concédé un espace à l’extrême droite

Christine Hugon est une enseignante titulaire de l’Université de Droit de Montpellier, spécialiste du Droit privé. Montpellier compte en réalité trois Universités et celle-là fait souvent office de bastion de la réaction, comme souvent c’est malheureusement le cas dans les Universités ou les Facultés de Droit de notre pays.

Christine Hugon est aussi par ailleurs l’animatrice d’une association qui promeut la pratique aristocratique de la monte à cheval selon la technique dite de « l’Amazone », qui s’accompagne de tout un dressage et surtout de tout un style qui exprime de part en part la Réaction.

Elle a exprimé sur France Info cette phrase suite aux violences d’il y a quelques jours à Montpellier, lors d’une tentative d’occupation d’un amphithéâtre dans l’Université de Droit par des étudiants majoritairement venus de l’Université Paul-Valéry, bastion de l’extrême-gauche étudiante locale :

« Il y a des gens qui votent extrême droite et qui sont à des années lumières de ces millices » (France Info, 30 mars 2018)

Qu’une femme qui appartienne à la bourgeoise la plus étroite, avec un tel niveau d’éducation, puisse assumer de tels propos en dit long sur l’hégémonie culturelle qu’a gagné l’extrême-droite dans la région de Montpellier.

Il nous faut bien comprendre ce qu’il y a de totalement inacceptable dans une telle affirmation. Déjà, nous en sommes aujourd’hui au point où la Réaction ne se contente plus d’une opposition par le vote ou le jeu électoral : elle est en position de pouvoir tabasser avec l’appui des institutions : en Picardie les militants anti-chasse à courre d’AVA en février et à Montpellier.

Et ces attaques n’ont rien de phénomènes isolés, ou marginaux, ils s’inscrivent dans toute une tendance, même un processus, de radicalisation de l’extrême droite.

Il nous faut ainsi relever l’attaque coordonnée du 26 mars dernier contre une AG d’étudiants à Lille 2, où une vingtaine de militants d’extrême droite a tabassé les étudiants qui quittaient l’assemblée, se sont repliés avant l’arrivée de la police puis ont revendiqué l’agression sur un compte Twitter qu’ils ont supprimé pour ne pas se faire identifier personnellement.

A l’Université de Paris I, sur le site Tolbiac, bloqué par des étudiants qui tentent d’occuper les lieux sur la durée, une milice d’extrême droite, la « Cocarde étudiante » a pourtant tenté un véritable coup de force en débarquant en pleine AG à 10h du matin.

Si l’attaque a pu être repoussée par la foule, les militants d’extrême droite n’ont pas hésité à porter des coups. Le même site d’ailleurs a été visé quelques jours plus tôt par une attaque plus ciblée sur le bureau de l’Union des Etudiants Juifs de France, vandalisé avec des inscriptions antisémites.

A Paris toujours, au lycée autogéré dans le XVe arrondissement, cette fois c’est un faisceau armé de barres de fer, se revendiquant du GUD, groupe qu’il est inutile malheureusement de présenter et dont ce n’est d’ailleurs pas la première attaque sur ce lycée, qui a forcé l’entrée de l’établissement pour s’attaquer à deux élèves.

Cette opération de terreur s’est accompagné là aussi de gestes de revendications explicites comme des saluts nazis et des injures homophobes contre les victimes. A Strasbourg aussi où une vingtaine de militants liés au « Bastion social » de l’Arcadia a tabassé six étudiants à proximité du Palais Universitaire, siège d’un mouvement de contestation d’étudiant, en revendiquant leur agression ouvertement, où une étudiante a ainsi témoigné :

Pauline, elle, na rien dit à sa famille. Ses parents ne comprendraient pas. Ils vivent «dans un bled», «ont voté FN aux dernières élections». Les policiers lont «traitée comme une petite fille capricieuse», dit-elle : «J’étais paniquée et on ma dit que si je ne me calmais pas, c’était tant pis pour ma déposition.» (Libération, 29 mars 2018)

Voilà le résultat de l’aveuglement libéral sur l’extrême droite et la de la dénégation des électeurs qui en soutiennent les partis institutionnels. L’union, la confiance au sein des familles même se brise, la société libérale est ébranlée, épouvantée, paralysée. Alors elle nie.

Même les policiers cherchent à décourager la victime, à la faire taire, à ne pas pousser à une enquête, exprimant finalement leur volonté de ne pas réprimer.

C’est inacceptable. Mais c’est malheureusement inévitable, le libéralisme va être débordé par l’extrême droite et sa violence. Que veulent donc les gens qui votent à l’extrême droite sinon les milices et le terrorisme ? Que croit sérieusement une personne comme Christine Hugon, pour en revenir à elle quand elle affirme une phrase aussi « naïve » ? Quand elle ajoute même :

« Ils avaient des planches de cagettes, j’ai cru que c’était des battes de base-ball. Ils ne frappaient pas sur la tête. S’ils avaient voulu frapper fort à deux, l’étudiant serait inerte. C’étaient des coups qui étaient retenus. »

On voit qu’on est dans l’hypocrisie, la négation pure et simple de la violence concrète, des faits.

Christine Hugon tente ainsi tout à la fois de séparer les électeurs d’extrême droite des militants de groupes violents, et de minimiser la violence de ces mêmes groupes. Christine Hugon n’est sans doute pas une militante d’extrême droite, peut-être a-t-elle des sympathies pour celle-ci ou certaines de ces idées, mais elle est avant tout une bourgeoise libérale, probablement conservatrice sur les bords, mais certainement pas quelqu’un qui cautionne la violence.

Mais la voilà face à la réalité, complètement dépassée. Ce n’est pas là ce qu’elle voudrait, mais c’est là ce qui est. L’arbre préfère le calme, mais le vent continue de souffler. Christine Hugon, tout comme la société bourgeoise libérale est en train d’être dépassé par ce qui se passe.

C’est le sens de ce qu’a voulu exprimer Christine Hugon : la violence, brutale, directe et choquante, son esprit personnel la rejette, tout comme elle pense qu’on puisse voter pour l’extrême droite sans que cela ne puisse avoir de conséquences politiques concrètes.

Ni les contradictions, ni l’antagonisme ne sont franchement perçus, assumés ou même pris au sérieux. Il s’agirait d’exprimer une opinion, donner son avis et même faire valoir sa « liberté ». On pourrait ainsi choisir de voter pour l’extrême droite sans devoir se sentir responsable des violences que celle-ci commet en fin de compte. Cela ne saurait être que des « incidents », sans responsabilités collectives.

Le libéralisme a concédé un espace à l’extrême droite, et depuis elle a gagné des positions, produit une culture, diffusé un style. Certes, elle n’avance pas unie, cependant il en va souvent ainsi historiquement et la logique des faisceaux est de toute façon à la base même de sa vision du monde et de ses conceptions politiques.

Tout cela est sérieux, l’extrême droite ne veut pas du libéralisme, elle ne veut pas de la démocratie bourgeoise, elle dit et elle veut le pouvoir précisément pour l’abattre, pour changer la société.

Et ses forces grandissants à mesure que décline le libéralisme bourgeois sous le poids de ses contradictions, elle ne s’embarrassera pas des règles ou des élections, du moins pas ses groupes les plus virulents, qui vont accentuer la pression.

Les gens qui votent à l’extrême droite sont peut-être pour certains a des années lumières de saisir cela, mais parce qu’ils sont encore libéraux d’esprit et parce qu’au fond donc, ils ne prennent pas au sérieux l’extrême droite.

Mais l’extrême droite, ce sont les milices, la violence, le tabassage des opposants, l’embrigadement des esprits.

L’extrême droite ne voit le peuple que comme un appui à sa prise de pouvoir, ne rêve que de « l’ordre », de désarmer et d’assécher la société civile, d’écraser la Gauche.

L’extrême droite veut le pouvoir et elle assume et assumera de plus en plus ouvertement la violence, et cela, ses scores électoraux, même s’ils ne concernent que des partis établis et reconnus comme le Front National, en sont bien sûr la caution, l’appui. Ne pas le comprendre, c’est faire preuve d’ignorance ou pire, d’aveuglement.

Un tel niveau de dépolitisation tel qu’on le connaît en tout cas montre l’ampleur du vide de la culture politique en raison de l’hégémonie libérale. Certes, l’Etat, qui refuse formellement cette violence, a réagi fermement à Montpellier en poussant la justice contre les complices de ces agressions : un enseignant, Jean-Luc de Boissezon et même le doyen Philippe Petel, tout deux mis en examen. Mais ces complicités sont en elles mêmes un état des lieux.

Et de par sa nature – imbriqué dans l’élite sociale et économique, façonnée par la bourgeoisie, de fait à son service – l’Etat ne peut pas aller jusqu’au bout de sa prétendue neutralité.

Tout cela ne suffira pas donc pas à enrayer la tendance à la radicalisation de l’extrême droite. La tâche historique de la Gauche est de le comprendre et de lui faire face.

Il nous faut étudier l’extrême droite, il nous faut lui répondre, mais plus seulement dans le débat libéral : dans la lutte. Il nous faut produire nos analyses, les diffuser massivement, constituer des bases démocratiques pour rassembler le plus grand nombre face à l’extrême droite et ses milices.

Il nous faut un haut niveau d’exigence intellectuel, une conscience de l’histoire de la lutte des classes dans notre pays. C’est cela faire face à l’extrême droite, c’est cela assumer avec un contenu, une maturité prête à l’engagement anti-fasciste, pour défendre et étendre la démocratie authentique (dont on est toujours plus éloigné), en rompant avec le libéralisme.

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Le « Bastion social » et ses locaux à Lyon, Strasbourg, Chambéry, Aix-en-Provence, Marseille

« Si nous voulons incarner la transmission de la flamme devant brûler au sein de chaque âme européenne, alors nous devons être des soldats politiques, tant physiquement qu’intellectuellement. »

Ce discours, on le connaît : c’est celui de l’extrême-droite des troupes de choc, des bandes armées, des milices menant des opérations d’agression. C’est le style des chemises noires italiennes de Benito Mussolini, des chemises brunes d’Adolf Hitler. Et c’est le mythe d’une Europe « nationaliste » qui était le grand projet nazi du début des années 1940.

Or, c’est une réalité toujours plus prégnante en France et cela a une cause bien déterminée. Quand la gauche n’est pas capable de développer une ligne culturelle, elle laisse des espaces béants à la confusion qui permet l’émergence de l’extrême-droite, avec des thèmes « sociaux » nationalistes.

On l’a vu avec Alain Soral, avec Dieudonné, ces dernières années, et désormais on peut le voir avec le mouvement « Bastion Social », qui dispose d’un local à Lyon (Le Pavillon Noir), ainsi qu’à Strasbourg (L’Arcadia), Chambéry (L’Edelweiss), Aix-en-Provence (La Bastide), et compte en ouvrir un à Marseille (Le Navarin) le 24 mars 2018.

L’idée de ce mouvement est de fédérer les activistes d’extrême-droite non plus politiquement, mais culturellement, en s’appuyant sur des locaux, si possible sous la forme de ce qui est appelé une « occupation non-conforme ». En clair, l’objectif est si possible de réaliser un squat d’extrême-droite à visée culturelle, associative.

Cette stratégie vise directement à faire un mouvement de contestation non-institutionnel, en se donnant une aura de radicalité, comptant profiter du fait que la gauche universitaire ou anarchiste vit en cercle fermé et profite souvent des espaces culturels et intellectuels institutionnels pour exister matériellement.
Une conférence de presse a ainsi été tenue il y a peu à Strasbourg et celle-ci a été justifiée notamment ainsi par le « Bastion Social » :

« La conférence de presse avait pour objectif de rappeler quelques vérités sur ce torrent médiatique qui a sévit autour de notre local [à Strasbourg]. Je rappelle que M. Ries, maire de Strasbourg, subventionne à hauteur de 23 000€ par an un local d’extrême gauche, le Molodoï, avec l’argent public et qu’il a également financé 500 000€ de ses travaux. »

Voici la version du Molodoï, qui assume tout à fait, sans voir de problèmes, à ce que la mairie soutienne un projet pourtant censé être alternatif, ce qu’il n’est par définition pas, pour recevoir une somme pareille.

« Rapidement, lorsqu’il a fallu chiffrer nos désirs nous nous sommes rendu compte de notre incapacité à financer les travaux. Dès lors nous nous sommes tournés vers la municipalité qui, depuis le premier bail emphytéotique signé en 1991 accompagne financièrement le projet associatif Molodoï à l’aide d’une subvention annuelle de fonctionnement.

Le montage financier, à hauteur de 500 000 euros, nécessitera que la ville de Strasbourg soit porteuse du projet de chantier et donc que nous abandonnions temporairement notre emphytéose.

Muni d’un bail précaire -dûment négocié- dont la durée de validité s’adaptait à la durée des travaux, nous avions ainsi la garanti de retrouver notre emphytéose lors de la remise des clefs de fin de chantier.

Nous y sommes et vous allez découvrir un lieu qui n’est pas métamorphosé mais embelli. La seule concession que nous ayons dû faire est le paiement annuel d’un forfait de 3000€ soit un « loyer » de 250€ mensuel.

Les grincheux/euses parleront d’une augmentation de plus de 200% puisque depuis 1994 le forfait n’était que de….15€ annuels ! Les joyeux/euses souligneront qu’avec un nouveau bail de 20 ans et une salle toute fraîche, ce forfait nous coûtera 60 000€ pour un investissement de 500 000€ de travaux…

D’autres nouveautés vous attendent : nous proposons un service supplémentaire aux associations utilisatrices qui souhaitent vendre de la bière pression. Une tireuse 4 becs est désormais installée en permanence au bar de la salle. Mais attention, le prix de la bière étant beaucoup plus cher au litre (2,40€ à la pression pour 1,32€ en bouteille) les associations n’auront pas d’obligation de fonctionner avec la tireuse et pourront continuer avec le bon vieux système des 75 cl.

Car nous souhaitons instamment que les associations gardent à l’esprit la nécessité de pratiquer des prix les plus bas possible : le Centre Autonome Jeune Molodoï doit rester un lieu de cultures alternatives, abordable pour tous et ne doit pas participer à la gentrification du quartier. Nous serons vigilant.e à ce que les prix d’entrée et les prix des boissons ne s’envolent pas au prétexte de servir des bières exotiques.

Depuis 2004, le Molodoï embauchait de jeunes ingénieurs son en contrat aidé de deux ans, histoire de se former et de faire ses premiers pas dans une salle polyvalente aux événements multiples.

La politique du gouvernement mettant fin aux emplois aidés (sauf pour la police!) les désignant comme des vestiges d’un temps révolus, nous oblige à embaucher en CDD. Les charges financières vont donc augmenter pour la salle et dans cette perspective, nous avons décidé d’augmenter le forfait « grande sono » de 450 à 500€. »

Subventions et contrats aidés, aides massives aux travaux : il est évidemment impossible de prétendre par la suite être en conflit avec un État si généreux avec soi.

Et cette compromission a un prix, car là-dessus, l’extrême-droite peut asseoir sa légitimité. En disant que, finalement, les gens de gauche apparemment les plus contestataires profitent de l’argent de gens qu’ils sont censés haïr, l’extrême-droite en profite pour discréditer la gauche en général.

La démagogie a alors un vaste espace pour affirmer qu’être de gauche, c’est finalement boire sa bière dans des locaux associatifs au milieu d’étudiants et d’universitaires, en cercle fermé, alors qu’être d’extrême-droite serait véritablement une rébellion.

C’est ce que fait le « Bastion Social » en dénonçant la « finance apatride », en se revendiquant d’une « inspiration nationaliste-révolutionnaire », en se voulant une « troisième voie, tant éloignée du capitalisme destructeur des peuples et des civilisations que du marxisme internationaliste. »

Et son succès tient à quelque chose d’également très important. Le grand problème de l’extrême-droite, c’est la révolution française. L’extrême-droite est historiquement liée au catholicisme et récuse 1789 et le principe de république, notamment avec l’Action française.

Or, cela signifie que le nationalisme ne peut pas profiter du drapeau français comme moyen d’expression, ce qui est un grand handicap politique. D’où l’utilisation des croix celtiques comme symboles pour les nationalistes, du trident pour les nationaux-révolutionnaires.

« Bastion Social » est ici, pour la première fois historiquement depuis 1945 si l’on met de côté le Front National qui lui visait directement à être un mouvement de masse, un mouvement nationaliste jouant sur la « préférence nationale » au nom des couleurs bleu – blanc – rouge.

C’est un changement d’une grande importance, permettant d’être davantage fédérateur. Et qui se justifie idéologiquement par un discours nationaliste européen, où chaque patrie viendrait s’intégrer au projet.
Et dont l’objectif est de manière très claire la constitution de brigades de choc, de confrontation, de provocation.