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Charlie Hebdo criminalise l’Union communiste libertaire

Un intolérable article de Charlie Hebdo relève de la criminalisation d’une organisation communiste libertaire.

Le 25 décembre 2020, l’Union Communiste Libertaire a pris publiquement position en réponse à un odieux article paru dans Charlie Hebdo. « Misère d’une chronique (quand Jean-Yves Camus veut s’en prendre à l’UCL) » répond à l’article « Black bloc : sous les pavés, tout et n’importe quoi ». Cet article payant a été écrit par Jean-Yves Camus, un politologue ayant un certain écho à Gauche pour ses analyses sur l’extrême-Droite, alors que lui-même a tout de même la particularité d’être un fervent religieux (il s’est converti au judaïsme, une chose par ailleurs extrêmement difficile). La raison est qu’il y a vrai niveau intellectuel et que les informations sur l’extrême-Droite intéressant toujours. Mais c’est une dénonciation incroyable de populisme que Jean-Yves Camus a écrit dans Charlie Hebdo, au point qu’il est forcément nécessaire que celui-ci soit boycotté et même Charlie Hebdo devient de fait inacceptable.

Le fond de l’article de Jean-Yves Camus est intelligent et raisonnable. Parlant des « black block », il dit : ces gens n’existent pas politiquement, ils ne sont présents que dans les cortèges, pour le reste ils ne sont pas présents dans la société. Il reproche l’attitude de chercher la casse en tournant le dos aux gens, alors qu’il y a tellement à faire.. Tout cela est très bien et c’est le discours classique de la Gauche historiquement.

Cependant, Jean-Yves Camus va plus loin et assimile alors l’Union communiste libertaire aux casseurs et aux apprentis terroristes! Le tout dans une sorte d’amalgame totalement absurde et littéralement incroyable pour quelqu’un s’y connaissant aussi bien que lui. Voici ce qu’il dit :

« La plupart des groupes radicaux qui manifestent contre la loi « sécurité globale » se réclament du communisme libertaire (Union communiste libertaire ou UCL), du municipalisme libertaire ou de l’autonomie, et ceux qui ont étudié cette mouvance se souviennent du slogan « Autonomie et offensive ». Ce dernier terme dit assez que la radicalité ne peut s’accommoder des postures « pacifiques » (…).

Ceux qu’on nomme « casseurs » ne lancent pas un pavé dans une vitrine et n’attaquent pas les policiers avec des cocktails Molotov par jeu : ils le font pour déclencher l’étincelle qui mettra le feu à la plaine. Sauf que cette phrase signée Mao Zedong suppose que « les masses » embrayent sur le mouvement, ce qui ne semble pas le cas.

D’où le risque que de petits noyaux militants, comme celui interpellé le 11 décembre pour projeter une action violente contre des policiers, choisissent de passer à ce qu’il faut bien appeler le terrorisme, habituelle méthode de fuite en avant des avant-gardes militantes dépourvues d’emprise et qui n’arrivent pas à déclencher la révolution. Il faut dire que les bases de la révolte sont confuses, notamment quand il s’agit de faire converger la mobilisation pour les libertés publiques, celle contre l’« islamophobie » et un antiracisme d’inspiration indigéniste.

La figure tutélaire du groupe arrêté le 11 décembre avait combattu au Rojava contre l’État islamique, avec les Unités de protection du peuple. Donc dans l’optique d’un municipalisme libertaire, féministe et antipatriarcal. Or que trouve-t-on sur le site de l’UCL ? Un appel à manifester contre le « confinement autoritaire et ultralibéral », une rubrique « Féminisme » et un communiqué de soutien au Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) ! Sur un pareil mélange, l’extrême gauche restera groupusculaire, malgré la marmite sous pression que constitue la société française. »

Les « groupes radicaux » sont anarchistes donc ils se rattachent à l’Union communiste libertaire et comme il y a une fuite en avant cela revient forcément à l’Union communiste libertaire, qui est ici directement assimilé aux gens arrêts le 11 décembre (voir 7 personnes arrêtées et accusées de bombisme). C’est là :

– inacceptable tant que les personnes arrêtées ne se sont pas exprimées politiquement (avec un certain écho) ;

– une tentative de pousser l’État à réprimer l’Union communiste libertaire en l’assimilant à des gens ayant choisi l’illégalité.

Il n’y a pas là une maladresse. L’Union communiste libertaire vient d’une démarche totalement opposée aux black blocks, sans même parler de l’autonomie offensive de la fin des années 1970 ! Cette organisation vient de la fusion récente d’Alternative libertaire, historiquement (très) proche des trotskistes de la Ligue communiste révolutionnaire et de la Confédération des groupes anarchistes, issue de la Fédération anarchiste (voir La fusion entre Alternative Libertaire et la Coordination des Groupes Anarchistes).

Or, quiconque sait que chez les anarchistes (au sens le plus large), c’est l’Organisation communiste libertaire dont la tradition est historiquement la plus parallèle aux autonomes, certainement pas l’Union communiste libertaire dont les ancêtres s’opposaient aux autonomes et encore plus à l’autonomie offensive, historiquement pro lutte armée (« autonomie offensive – lutte armée – pour le communisme! »).

Dans sa réponse, l’Union communiste libertaire le dit d’ailleurs avec justesse :

« Notre stratégie ne repose pas sur l’émeute et l’insurrection mais bien sur la construction de contre-pouvoirs et l’auto-organisation des luttes sociales. La plupart des membres de notre organisation sont actives et actifs dans les syndicats (à la CGT comme à SUD-Solidaires), dans des associations pour le droit au logement, des associations et collectifs écologistes, féministes, antifascistes, antiracistes. »

On peut tout à fait considérer qu’une telle activité est réformiste et vide de sens, on peut très bien accuser l’Union communiste libertaire d’avoir un discours post-moderne, confus, tout ce qu’on voudra. Mais dire que l’Union communiste libertaire n’a pas de réflexion et sont vélléitaires comme des casseurs, c’est une erreur complète ; les assimiler avec des gens poursuivis par l’État, c’est inacceptable.

Ce qui ne signifie pas qu’il faille accepter pour autant le principe de la dissociation, tout cela relève d’un débat à Gauche, et d’ailleurs de quel droit Jean-Yves Camus se met-il sur le même plan que des groupes de gauche organisés ? En quoi un religieux rigoriste a-t-il à donner des leçons à la Gauche ? En quoi un religieux rigoriste a-t-il à donner des bons et des mauvais points sur les orientations stratégiques de la Gauche ?

Charlie Hebdo a commis une lourde faute en publiant un tel article et il est incroyable d’ailleurs que ce journal, si durement frappé par l’islamisme, tolère qu’on humilie d’un revers de la main une personne définie comme :

« La figure tutélaire du groupe arrêté le 11 décembre avait combattu au Rojava contre l’État islamique, avec les Unités de protection du peuple. »

Que Charlie Hebdo donne la parole à cette personne et qu’on juge sur pièce, plutôt que de le dénoncer alors qu’il est arrêté sans droit à la parole !

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Politique

Robert Ménard se fait détruire par Charlie Hebdo

Tel est pris qui croyait prendre ! Le populiste d’extrême-Droite Robert Ménard s’est senti pousser des ailes avec l’actualité et a cru qu’il pourrait s’accaparer l’esprit « Charlie » avec une campagne d’affichage municipale reprenant une couverture de Charlie Hebdo.

Cela était très présomptueux de sa part, car il s’est logiquement fait détruire par Charlie Hebdo, dans un communiqué aussi simple qu’efficace !

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Société

Charlie Hebdo – 5 ans déjà

Il y a cinq ans, la France démocratique connaissait un haut-le-cœur provoqué par une brutalité sans nom, sanglante, assassine. Elle a compris tout de suite les enjeux et, sans encenser Charlie pour autant pour sa démarche, a affirmé que les questions démocratiques doivent être répondues de manière démocratique. Elle a défendu l’honneur du pays en refusant la haine et le fanatisme, barrant la route aux mentalités d’extrême-Droite qui auraient pu avoir un boulevard pour reléguer la France dans l’étroitesse de l’esprit raciste.

L’esprit Charlie des origines est directement issu de l’esprit de mai 1968, dans son côté remise en cause de l’ordre établi et de l’idéologie de la France profonde. C’était la France gaulliste qui était dénoncée, pour ses matraques, ses mentalités bornées, son militarisme, sa beauferie, etc. Qui parle aujourd’hui d’État policier pour la France devrait étudier cette période !

Une nouvelle génération s’est appuyée sur cette culture très française du portrait, poussé jusqu’à la caricature. Cela a relancé Charlie, pour apporter une nouvel esprit critique dans une situation nouvelle, puisque le conservatisme lourd et pesant a au fur et à mesure cédé la place à un libéralisme dissolvant les liens sociaux, renforçant l’individualisme et l’indifférence.

Ce que dénonçait surtout Charlie hebdo, c’est en réalité surtout l’hypocrisie. Il y a une réelle continuité dans les dessins et l’esprit de Charlie sur ce plan là. Il y a une dénonciation, mais avec comme but d’enseigner, suivant le modèle « plaire et instruire » de Molière et La Fontaine. On trouve cela humoristique et en plus on découvre la vanité, le mensonge des puissants, des militaires, des religieux. Aucune institution n’échappait à Charlie.

Charlie Hebdo était bien entendu critiquable sur bien des points ; tout comme le Canard enchaîné, il y a des critiques souvent faciles et unilatérales, tout en se plaçant au-dessus de la mêlée. C’était finalement du divertissement plus qu’autre chose. Il y avait cependant un certain esprit critique et lorsque les islamistes ont frappé Charlie Hebdo, la France démocratique a compris l’enjeu. Mieux valait avoir tort éventuellement avec des démocrates que de se retrouver, d’une manière ou d’une autre, avec le fanatisme, la négation de la raison.

Qui utilise la raison peut parfois se tromper – qui ne l’utilise pas se trompe tout le temps.

La France aurait basculer dans l’extrême-Droite, elle ne l’a pas fait. Des millions de personnes ont été dans les rues pour défendre l’esprit critique, sans engagement concret, mais au moins en défense de la raison.

Cela fut un moment résolument positif de notre histoire !

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Guerre

L’armée française à l’offensive: la dénonciation de Charlie Hebdo

Quand l’armée commence à ouvrir la bouche, on comprend que l’époque est tourmentée et que les forces les plus réactionnaires sont à l’offensive. Quand c’est en plus pour dénoncer l’antimilitarisme de Charlie Hebdo, on comprend qu’une sacrée digue est tombée. En s’exprimant, par deux fois, le chef d’état-major de l’armée de terre Thierry Burkhard cherche à siffler la fin d’une récréation : désormais, dans la nouvelle époque qui est celle du repartage du monde, on ne touche plus à l’Armée. Il échouera : la dénonciation de la guerre et de l’armée française ne fera que s’accentuer !

On sent que c’est la crise et la pression est là. L’ambiance est à serrer les rangs derrière le capitalisme français, sous le drapeau national. La CGT chômeurs du Morbihan a ici payé cher sa naïveté, en mettant sur Twitter le message suivant à la suite de la mort de 13 militaires au Mali :

« Toutes nos pensées aux familles de militaires morts pour le colonialisme au #Mali »

Rien de bien choquant pour qui est de gauche. Insupportable pourtant dans la culture de la CGT, qui est depuis cinquante ans un soutien indéfectible à l’Armée française et à la production d’armes. Le communiqué officiel a la main lourde :

« La CGT adresse toutes ses condoléances aux familles et aux proches des soldats disparus lundi 25 novembre, au Mali.

Aussi, la Confédération générale du travail condamne fermement et se désolidarise des propos tenus dans un tweet de « chômeurs CGT 56 ».
Ce tweet est le résultat d’une initiative personnelle qui ne saurait engager ni le Comité de chômeurs 56, ni l’Union locale CGT de Lorient, ni l’Union départementale CGT du Morbihan qui a également fait un communiqué en ce sens.

Montreuil, le 27 novembre 2019 »

Même l’Union Départementale y est allé dans l’opération de dénonciation.

« Communiqué UD CGT 56 suite au tweet du 26 novembre 2019 de CGT Chômeurs 56

L’union départementale CGT du Morbihan s’associe à la douleur des familles des soldats disparus dans l’exercice de leur métier. Ce tweet est le résultat d’une initiative personnelle qui ne saurait engager ni le Comité de chômeurs 56, ni l’union locale de Lorient, ni l’union départementale du Morbihan. Nous condamnons les propos tenus. Ils vont à l’encontre des engagements de la CGT pour la paix.

Christèle Rissel pour l’Union Départementale CGT du Morbihan »

Tout cela est pathétique et quelle honte encore sur la question militariste de la part de la CGT. Tout cela serait relativement anecdotique, de par son absence totale de nouveauté et ce depuis cinquante ans, toutefois si le chef de l’armée de terre n’avait pas fait les mêmes remontrances, cette fois à Charlie Hebdo.

Le chef d’état-major de l’armée de terre Thierry Burkhard a d’abord publié un message sur twitter.

Puis, il a fait une lettre ouverte.

Tout cela, donc pour dénoncer Charlie Hebdo se moquant de la campagne de recrutement de l’armée.

Le quotidien Le Monde a cherché à se renseigner et voici ce qu’on apprend alors :

« L’entourage du chef d’état-major précise : « Ce ne sont pas les caricatures en tant que telles qui nous choquent, nous connaissons l’antimilitarisme de Charlie, mais cette façon de s’en prendre aux familles ». L’une d’elles a décidé de porter plainte, selon cette même source. »

Qu’a-t-on ici ? Hypocrisie, coup de pression et Le Monde au service de cela. Et cela au moment où Valeurs Actuelles en profite pour affirmer son soutien total au militaire Pierre de Villiers pour la conquête du pouvoir.