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Boycotter la Coupe du monde 2022 au Qatar ou vendre son âme

C’est une question de principes.

Sur les huit stades qui accueillent la Coupe du monde de football 2022, un seul existait avant la désignation du Qatar en 2010 comme organisateur. Le Qatar, c’est globalement la taille de la Corse, dont essentiellement du désert. En termes de population, c’est équivalent au département du Nord, avec environ 2,5 millions d’habitants.

Il a donc fallu, en douze ans, construire sept stades internationaux, de manière totalement artificielle, à grand renfort de main-d’œuvre étrangère. Elle est essentiellement asiatique, d’Inde, du Bangladesh, du Népal, du Sri Lanka ou du Pakistan, et a choisi de venir s’y faire exploiter dans des conditions très difficiles, notamment de chaleur.

Il fait tellement chaud au Qatar qu’il a fallu décaler la Coupe du monde à la fin de l’année. Dans un premier temps, il avait été envisagé de climatiser ces stades à ciel ouvert pour organiser des matchs par 40°C minimum. Ces systèmes de climatisations ont malgré tout été installés sur 7 des 8 stades, mais ils ne devraient que peu servir avec des températures attendues autour de 25°C ; leur existence en dit néanmoins très long sur le mépris de la nature par les organisateurs de cette compétition, tant de la Fifa que du Qatar.

Le plus grand est le stade Lusail, dans la ville éponyme sortie de terre pour l’occasion. Il fait 80 000 places.

À une cinquantaine de kilomètres au nord de Doha, il y a le stade Al-Bayt, qui fait 60 000 places et a été construit en forme de tente de bédouins.

Les autres stades construits pour l’occasion ont tous une capacité de 40 000, soit plus que la plupart des stades de Ligue 1 en France.

Le stade Al-Janoub est quant à lui censé représenter les coques de bateaux de pêche perlière des côtes de la péninsule arabique.

Le stade Education City à Doha reprend la forme d’un diamant.

Le stade Ahmed Ben Ali a vu une ligne de métro spécialement édifiée pour le desservir, aux portes du désert.

Le stade Al-Thumama a une forme représentant la taqiyah, le couvre-chef traditionnel des hommes.

Le stade Ras Abu Aboud a été fabriqué avec des conteneurs de marchandises.

Le stade international Khalifa, qui existait auparavant, a été entièrement remodelé et a également une capacité de 40 000 places.

Tout cela est grotesque, et insupportable pour qui n’a pas encore totalement vendu son âme au diable capitalisme. Tant écologiquement que culturellement, construire tous ces stades dans un si petit pays, de surcroît désertique, qui plus est sans aucune dimension populaire par rapport au football, est inacceptable.

Tout comme il est inacceptable d’avoir des bâtiments aussi grotesques, sans saveur, qui sont d’ailleurs maintenant la norme partout dans le monde, y compris en Europe.

Il n’y a que les gens cyniques et désabusés, ayant totalement accepté leur condition de rouage du capitalisme tournant à plein régime, pour se dire que ce n’est pas pire qu’autre chose et suivre cette Coupe du monde.

Pour les autres, pour ceux qui refusent de vendre leur âme, boycotter cette Coupe du monde est une évidence. Cela ne changera pas le monde, cela ne changera même rien à la terrible marche du monde. Mais c’est bien la moindre des choses.

On se rappellera au passage que la question se posait exactement en les mêmes termes pour les Jeux Olympiques d’hiver de Pékin, tout aussi odieux, artificiels et contre-nature. Il était juste de les boycotter, comme il est juste de ne surtout pas regarder de match ni s’intéresser à ce mondial 2022 au Qatar… Sauf pour diffuser une réelle critique du capitalisme.

Le fameux « mur jaune » des supporters du Borussia Dortmund en Allemagne.
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Le tiers-monde, l’occident et la coupe du monde 2022 au Qatar

Il y a un phénomène à bien comprendre.

La coupe du monde de football 2022, qui a commencé le 20 novembre 2022, est la cible d’innombrables critiques en France depuis plusieurs semaines, avec une montée en puissance au fur et à mesure qu’on s’est rapproché de l’événement.

Ces critiques portent principalement sur les conditions de vie des travailleurs, qui sont par ailleurs des immigrés dans un pays porté par les exportations de gaz et dont la population d’origine est minoritaire, vivant dans une bulle sécuritaire, religieuse et dorée.

Tout cela est très juste et doit être dit, tout comme doit être souligné le caractère anti-écologiste de la construction de stades géants dans un pays où d’ailleurs le football n’existe pas réellement.

Il est cependant un aspect essentiel qu’il faut comprendre et qui, osons le dire, est sans doute l’aspect principal de la question. C’est que les critiques sont, en très grande partie, hypocrites.

Ce à quoi on assiste, c’est à un déferlement de « moralisme » servant les intérêts du capitalisme occidental contre un capitalisme concurrent venant du tiers-monde.

Doha, la capitale du Qatar

L’organisatrice de la coupe du monde, la FIFA, n’a pas attendu 2022 pour être une machine à profit, tout comme le football n’a pas attendu 2022 pour être « moderne » et tout autant une machine à profit.

Ce qui se passe, c’est qu’un capitalisme – le plus souvent bureaucratique – concurrent se développe à pas de géants, ou s’est développé en tout cas depuis 2020. Le Qatar fait partie de ce capitalisme, d’où sa capacité à organiser la coupe du monde, de manière artificielle.

La FIFA, qui vise le profit, trouve ça très bien, et cet arrière-plan explique les propos de son président Gianni Infantino le 18 novembre 2022 en conférence de presse :

« Pour ce que nous, les Européens, avons fait au cours des 3 000 dernières années, nous devrions nous excuser pour les 3 000 prochaines années avant de donner des leçons de morale aux autres. »

Gianni Infantino à la conférence de presse

La ligne idéologique de ces propos de Gianni Infantino est exactement la même que celle de Vladimir Poutine en octobre 2022 au « club Valdai », qu’on trouve dans la revue PDF « Crise » de ce mois-ci avec une présentation du G20 de Bali comme étant celui du début de la « fin de l’occident ».

L’occident serait égoïste, il veut tout garder pour lui, il critique de manière hypocrite ceux qui cherchent à se développer, etc.

Car c’est de cela qu’il s’agit désormais : il y a deux blocs, les pays occidentaux d’un côté, le bloc sino-russe de l’autre, avec les pays du tiers-monde s’alignant largement désormais sur le second. Ces pays espèrent que la perte de l’hégémonie par les États-Unis leur donneront plus de marge.

Il faut donc passer les critiques de la coupe du monde 2022 au Qatar par le prisme de ce phénomène. Les fans du club de football du Hertha Berlin disent ainsi qu’aucun d’entre eux ne peut la regarder, par principe, mais ils ne disent rien contre le fait que leur club appartienne en majorité au multimillionnaire Lars Windhorst.

Ils sont surtout choqués par un « autre » capitalisme, qui n’est pas le leur, ce qu’on retrouve dans bon nombre de dénonciations des clubs richissimes de Manchester City et du Paris Saint-Germain. Les fans du Bayern Munich haïssent par exemple le club pour eux fictif du Red Bull Leipzig, mais leur propre entraîneur Julian Nagelsmann a été acheté à Leipzig 25 millions d’euros et gagne 7,5 millions d’euros par an.

Le football est totalement rongé par le profit, mais pour les fans consommateurs avant tout, c’est toujours le capitaliste concurrent du sien qui est le mauvais, sauf évidemment pour les clubs trop petits pour le capitalisme et qui le resteront toujours.

Un visuel du mouvement porté par les fans des petits clubs « contre le football moderne » avec le personnage prolétarien d’Andy Capp tiré d’une bande dessinée britannique décrivant son quotidien en quelques cases

Surtout, la coupe du monde se déroulant pour la première fois en fin et non en milieu d’année, cela provoque une déstabilisation massive de l’environnement capitaliste du football occidental ou plus exactement européen.

C’est vrai pour d’autres championnats, mais il n’y a que dans les pays européens que c’est aussi massif financièrement. La coupe du monde 2022 modifie le calendrier, casse le rythme de la saison, bref dérange la marche normale de ce capitalisme là – au profit d’un autre capitalisme.

Cela fait que, si on regarde bien, on doit se méfier grandement de la dénonciation de la coupe du monde de football 2022. Il y a lieu de critiquer la substance de cette dernière, mais si c’est pour finalement opposer un capitalisme à un autre, ce n’est pas une critique socialiste, c’est une critique national-socialiste.

Ce qui ramène à un point de vue essentiel qu’il faut avoir : la « mondialisation » unilatérale, qui n’a jamais été que tendancielle d’ailleurs, est bien terminée. Il y a désormais des blocs. La dénonciation de la mondialisation en général est d’autant plus démagogique.

Là est la grande difficulté : critiquer le capitalisme, sans tomber dans une dénonciation de la mondialisation servant l’occident ou bien le bloc sino-russe. D’où l’importance de l’économie politique.

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Le régime et Emmanuel Macron profitent de la victoire de l’Équipe de France

La victoire de l’Équipe de France de Football à la Coupe du Monde a été largement mise en scène. La population est en quelque sorte privée d’une célébration intime, sincère, authentique. Les avions de la patrouille de France ont fait leur apparition au-dessus de Paris, comme pour bien rappeler les célébrations militaristes de l’avant-veille. De nombreux prêtres ont saisi l’opportunité pour sonner les cloches des églises et rappeler leur existence. Emmanuel Macron a été fortement mis en avant, etc.

Quoi qu’on en dise, le régime en place est le grand gagnant de la victoire de l’équipe de France de Football. Cela est bien sûr nié par l’immense majorité des commentateurs qui expriment à l’unisson la même béatitude surjouée, afin que surtout aucune voix dissonante ne transparaisse.

Et comme s’il fallait prévenir la critique, celle-ci est dénigrée dans son essence même. À ce jeu, on peut noter la copie tout à fait typique rendue par le rédacteur en chef du Figaro Guillaume Tabard, expliquant que :

« Chez tous ceux-là, une incapacité à se laisser emporter par la joie et, sur le plan politique, la hantise de voir Emmanuel Macron s’emparer de cette victoire, pour ne pas dire l’accaparer. »

Cela est très bien vue de parler de joie, car au centre de tout cela il y a en effet les masses et la joie qu’elles ont exprimée. Les célébrations ont été intenses après la victoire.

Cela avait d’ailleurs commencé dès l’après-midi avant même la rencontre contre la Croatie. Une ambiance guillerette, voire pétillante, traversait la France ensoleillée ce dimanche. Dans les villes et les campagnes, dans les stations balnéaires et les campings, les masses se parlaient ou se regardaient affectueusement.

Il y avait un parfum de 1998 avec des places de villages réunies autour d’un écran, des familles dans les jardins où les femmes, surtout les anciennes, étaient là pour réguler les excès regrettables des hommes avec l’alcool, des centres-villes où la jeunesse plus intellectuelle et cultivée prenait plaisir à s’associer à une joie simple et populaire, des cités de banlieues où l’enthousiasme était particulièrement exacerbé, et puis encore à Paris, où il y avait un peu de tout cela.

Il faut reconnaître aussi l’immense ferveur des gens qui ont attendu pendant de nombreuses heures en plein soleil l’arrivée des joueurs sur les Champs-Élysées. Il y a là quelque chose d’éminemment populaire, relevant d’une véritable communion nationale, à l’opposée par exemple des cérémonies administratives organisées par le régime pour célébrer son Armée chaque 14 juillet.

Au contraire, ce genre de défilé parisien massif, rassemblant plusieurs centaines de milliers de personnes pour un événement sportif, est quelque-chose de rare et précieux. C’était le quatrième. Il y a eu 1998 évidemment, dans une moindre mesure 2000 après la victoire à l’Euro de Football, et il y avait eu avant seulement l’incroyable déambulation du champion de course à pied Jules Ladoumègue en 1935 devant 400 000 personnes.

Il était une figure ouvrière, proche du Parti Communiste, et victime d’institutions sportives réactionnaires l’interdisant de pratiquer son sport, jusqu’à le priver de Jeux Olympiques. L’URSS lui avait proposé de concourir là-bas ; le journal Paris-Soir avait organisé pour son retour une course d’exhibition à travers Paris dont le succès fut immense.

Ce lundi 16 juillet 2018, les masses n’auront par contre pas véritablement célébré la prestation sportive des “bleus”. On ne peut pas dire que l’équipe a brillé de par le jeu qu’elle a proposé ; elle a même fait preuve d’une réussite insolente pour s’imposer face à la Belgique puis à la Croatie. Mais là n’est pas du tout la question.

Le sport n’est ici qu’un prétexte. La population s’empare de cette victoire à la Coupe du Monde pour exprimer quelque-chose de plus important que simplement le football. Cela dépasse le sport et n’appartient même pas aux joueurs eux-mêmes, pas plus qu’à Didier Deschamps.

Les joueurs ne sont pas extérieurs à l’événement, par définition, évidemment. Ils en sont simplement l’incarnation. Cela s’est traduit entre-autre par la reprise de plusieurs chansons dédiés à certains joueurs, diffusées grâce aux réseaux sociaux.

Les deux plus populaires sont celles dédiées à N’Golo Kanté, dont la qualité de jeu est particulièrement appréciée, et à Benjamin Pavard. Cette dernière fait écho à un chant stupide et très grossier des supporters marseillais pour leur finale de Ligue Europa à Lyon (sur un air classique de supporters anglais), qui a connu un grand succès au printemps chez les jeunes garçons amateurs de football partout en France.

La ferveur populaire prend donc comme prétexte le football pour exprimer un besoin social, qui est en quelque sorte un besoin d’unité.

Le régime n’a surtout pas envie de cette unité populaire, mais plutôt d’une unité derrière ses institutions et le système économique qu’il promeut. C’est la raison pour laquelle il tend à personnifier largement les célébrations. Les joueurs sont donc mis au centre du dispositif, présentés comme étant des individus ayant réussis quelque-chose.

Quand les masses disent “on a gagné”, parce que l’élan est collectif, le régime préfère un “merci les bleus”.

Pour les masses, peu importe qu’il n’y avait pas 67 millions de français sur le terrain, ce qui compte est l’unité autour d’un même mouvement, d’une même cause, aussi futile soit-elle.

Cela ne saurait compter pour les représentants du capitalisme où l’entreprise individuelle et la réussite personnelle sont au centre de tout.

C’est ainsi que de nombreuses grandes entreprises ont communiqué ce “merci les bleus”. C’est également le coeur du message d’Emmanuel Macron et de toute la communication qu’il a mise en place, faisant de cette victoire presque une “affaire d’État”.

La question n’est pas ici de savoir si le président Macron profitera personnellement de l’événement. Il ne faut pas sous-estimer les masses françaises qui, normalement, au moins pour celles ayant un héritage politique, ne se font pas avoir aussi facilement.

Par contre, parce qu’elles sont largement dépolitisées, abandonnées depuis longtemps par la Gauche, elles se retrouvent désemparées face aux institutions qui profitent de l’événement pour maintenir et renforcer le régime.

Emmanuel Macron joue un rôle important en ce sens. Il a méticuleusement soigné son approche de la question, en étant toujours là tout en prenant soin de ne jamais donner l’impression d’en faire trop.

Lors de sa visite en Bretagne pendant les phases de poule, il avait fait en sorte de “s’éclipser” pour assister à la deuxième mi-temps d’un match debout au milieu des clients d’un bar, commandant une bière et payant sa tournée pour fêter la victoire.

Il a fait inviter des jeunes footballeurs d’Île-de-France à l’Élysée pour un autre match, rendu visite aux joueurs dans les vestiaires après la victoire contre la Belgique tout en prenant soin de ne pas diffuser de photos, etc.

Les images de sa présence dans le vestiaire après la victoire en finale, appelant les joueurs “les enfants”, ont par contre été largement diffusées. Les commentaires promouvaient systématiquement son discours “émouvant”, suite logique de son attitude “survoltée” durant la rencontre.

Il avait emmené avec lui un sous-officier de l’Armée gravement blessé au Mali, afin de servir un odieux discours nationaliste, hautain, mélangeant tout et n’importe quoi, relativisant quelque chose d’aussi grave que la guerre avec du sport :

«Je l’ai revu [le militaire] le 13 juillet, il était sur un fauteuil roulant […]. Il m’a dit: “J’ai une faveur à vous demander. Après-demain, quand vous verrez les joueurs, dites-leur qu’ils ont fait rêver un petit Français comme moi.” C’est pour ça que je voulais vous l’emmener, parce que je voulais que vous vous rendiez compte de ce que vous faites».

Certains joueurs sont littéralement tombés dans le panneau pour célébrer le régime. Comme si finalement leur victoire était aussi importante pour la population que l’ouverture d’une usine donnant du travail à des milliers d’ouvriers, ou encore une découverte scientifique permettant de grandes avancées sur le plan écologique.

Benjamin Mendy s’est carrément permis un “dab” avec Emmanuel Macron tandis que Blaise Matuidi, le prenant en accolade, s’exclamait : « Avec Monsieur le Président, vive la France, vive la République ! ».

Le lendemain, le transfert des joueurs vers Paris depuis l’aéroport a également été organisé de manière à ce que la célébration des individus soit totale. On a laissé des gens s’arrêter à pied sur l’autoroute pour “voir” leur bus de prêt, d’autre circuler à scooter, sans gants, portable à la main, parfois debout sur leurs machines, au milieu de l’escadron de police motorisé encadrant le bus.

La suite de cela fût une grande “garden party” dans les jardins de l’Élysée. Étaient invités un millier de jeunes issus des clubs d’origines des joueurs de l’équipe de France, afin de souligner encore une fois le caractère individuel de l’aventure. Il était bien sûr expliqué qu’il y avait parmi-eux probablement les “futurs Mbappé”, comme si le sport amateur n’était en fait là que pour servir de réservoir au sport de haut niveau et aux clubs professionnels.

Les médias ont relayé tout cela en grandes pompes, meublant avec des interventions de journalistes ridicules voulant à tout prix se placer au coeur de l’événement. TF1, France 2, les quatre chaînes d’information en continu et la chaînes L’Équipe ont toutes assurées un direct de plusieurs heures.

En ce qui concerne la classe politique, les principales figures ont relayé, forcément, le remerciement aux “bleus”.

Édouard Philippe: « Champions du monde !!! Quel match ! Quel mondial ! Quelle équipe ! Vous faites la fierté de votre pays, bravo ».

Benjamin Griveaux: « GÉANTS 20 ans après, merci les Bleus d’offrir le rêve à une nouvelle génération » (Twitter)

François de Rugy: « On est les champions, on est, on est, on est les champions ! Bravo LesBleus ! Et bravo aux Croates pour leur jeu. Beau moment de football, beau moment de rassemblement et de fierté nationale »

Christophe Castaner: « Toucher les étoiles ! Merci à l’équipe de France ! »

Valérie Pécresse: « Champions du monde. Quel match ! Quels joueurs ! Ils ont réussi… Merci Didier Deschamps pour ce bonheur ! »

Anne Hidalgo: « Champions du monde ! Quel bonheur ! Quel match ! C’était un rêve, vous en avez fait une réalité. Merci les Bleus !

Parti socialiste: « Champions du monde ! Félicitations à l’équipe de France qui 20 ans après réitère l’exploit en s’imposant 4-2 en finale ! Bravo les Bleus ».

Manuels Valls: « Un immense merci aux Bleus, à Griezmann, Pogba, Mbappé… à la défense de fer avec Varane et Umtiti… au stratège Deschamps qui a construit un groupe soudé, efficace et fort de ses valeurs. C’est beau le foot ».

Laurent Wauquiez: « Ils l’ont fait ! L’équipe de France, championne du monde. 20 ans que la France attendait. Nous en avons rêvé. Nous avons tant vibré. Nous sommes fiers de vous ! Bravo les Bleus ! »

Nicolas Dupont-Aignan: « Bravo bravo bravo ! Tellement fier d’être Français ! Félicitations à nos héros ! »

A noter également, le message d’Eric Coquerel de “La France Insoumise”, relayant directement et sans filtre le discours en faveur du régime :

Le régime ne profitera pas éternellement de cet élan, ou de ce type d’élan. La nature du système économique qu’il promeut est trop instable. Le capitalisme génère trop de crise, de chômage, de décadence culturelle, d’incertitudes morales, pour que la ferveur populaire ne se transforme pas à un moment ou à un autre en colère populaire.

D’ailleurs, les masses étaient nombreuses à siffler le président de la République à diverse occasion lors de cette Coupe du Monde.

Le régime peut se maintenir un moment, mais il peut tout aussi bien vaciller rapidement. Ce qui comptera alors, c’est la nature du renversement de ce régime en place. Si la Gauche aujourd’hui en France n’est pas à la hauteur de cet enjeu, tel n’est pas le cas des différents cercles réactionnaires et de l’Extrême-Droite qui se préparent à cela.

Si le régime tente aujourd’hui de se maintenir par des artifices patriotiques, il ne faut pas perdre des yeux le nationalisme qui en arrière-plan se profile.

Illustration de cela, cet extrait d’une tribune de la réactionnaire Natacha Polony. Cela devrait être un avertissement, un message d’alerte à toutes les personnes de gauche soucieuses des valeurs démocratiques et de l’unité populaire.

Elle a ici très bien compris l’enjeu, la nature profonde et sincère de l’élan populaire autour de l’Équipe de France. Elle entend l’orienter vers le nationalisme plutôt que le socialisme.

« […] À nous tous, adultes et dépositaires de l’immense héritage d’un pays millénaire de convertir cet élan superficiel en sentiment profond et pérenne, à travers la transmission des textes historiques, philosophiques et littéraires qui racontent ce qu’est la France, comme à travers une géographie, des paysages qui en sont le visage.

Tous ces enfants qui brandissent des drapeaux et crient leur joie d’être français ne demandent qu’à aimer leur patrie. Ils ne sont pas toute la France, ils ne masquent pas les haines, le séparatisme, les fractures. Mais plus ils seront nombreux, et plus nous serons nombreux pour combattre ceux qui nous ont déclaré la guerre.

Nul ne s’imagine qu’un pays s’apaise par le miracle d’un match de foot mais un point nourrit nos espoirs : on ne nous sort plus le mythe de la France black-blanc-beur. Cette équipe est tout aussi diverse mais elle est avant tout bleu-blanc-rouge, ce qui signifie que -rêvons un peu – nous retrouvons peut-être un peu de cet universalisme qui est l’identité même de la France et que la globalisation culturelle a voulu remplacer par un multiculturalisme profondément communautariste.

Allons, enfants de la Patrie, les jours de gloire ne se dédaignent pas, quels qu’ils soient. »

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Une victoire à la coupe du monde de football sans panache français

Quiconque a porté son attention aux désirs des masses sait que depuis le début de la coupe du monde de football, il y a un grand désir de communion qui est exprimé. Naturellement, le traumatisme des attentats islamistes a beaucoup joué et il y a eu une envie de ferveur, s’exprimant ainsi avec la victoire de l’équipe de France de football.

France - Croatie, Fan zone

 

Mais il y a aussi toute une bourgeoisie trop heureuse de trouver un thème pour fédérer patrons et ouvriers, smicards et financiers !

Être de Gauche, c’est donc comprendre cette joie populaire, sans pour autant sombrer dans la démagogie célébrant une nation parmi les plus riches du monde, où toutes les classes sociales collaboreraient, profitant d’un vivier populaire voyant en le football un rêve américain accessible.

D’ailleurs, l’inculture des footballeurs, dont le mode de vie est toujours décadent et totalement pro-capitaliste, avec un style nouveau riche contribuant à pourrir les banlieues, n’a d’égal que l’absence de caractère français au jeu de l’équipe de France de football.

Mbappé

 

Le pragmatisme a été tellement de rigueur que Kylian Mbappé s’est justifié d’un « moi je suis en final » pour justifier son jeu théâtral face à la Belgique en demi-finale, tandis que le premier but de la finale est issue d’un coup franc consécutif à une faute imaginaire, Antoine Griezmann se laissant tomber par volonté de simulation.

Il y a ici un grand changement dans l’esprit français, qui cautionne désormais ce pragmatisme, alors qu’auparavant il célébrait, de manière bien plus française, la finale gâchée par le coup de tête de Zinedine Zidane contre un joueur italien, sans parler du fameux France-Allemagne ! Perdre avec panache a toujours été un trait du style français !

Impossible de ne pas voir qu’au-delà des aspects permettant l’approche pragmatique – les qualités des joueurs, leur style de jeu, etc. – il y a vraiment une macronisation des esprits, dans le sens d’une volonté de triompher, à tout prix.

L’esprit national disparaît, happé par le cynisme. De toutes façons cet esprit national était condamné à disparaître, mais pas dans le cosmopolitisme capitaliste : dans la rencontre de tous les peuples apportant le meilleur d’entre eux…

Là on en est vraiment très loin. De la même manière que les traditions du Paris Saint-Germain ont été entièrement anéanties par l’achat du club par le Qatar – l’argent est censé acheter la victoire en Ligue des Champions et les supporters n’y voient aucun inconvénient – l’esprit Macron a réduit la devise française à « Liberté Égalité Mbappé ».

Même Le Monde a participé aux premières loges à la valorisation du « teen ager » qui aurait un destin unique, incroyable, en comparaison avec nos propres vies qui sont censées être sans aucune densité.

France - Croatie, Emmanuel Macron

Impossible de ne pas parler non plus de l’omniprésence d’Emmanuel Macron, comme spectateur particulièrement expressif du match, puis à la remise des médailles aux joueurs, où il a pris chacun dans ses bras.

On est là dans une mise en scène qui profite elle-même d’une construction sociale : la structuration de très nombreux clubs de football par un pays très riche utilisant les victoires comme un dispositif idéologique pour assurer son hégémonie culturelle et intellectuelle.

Oui, intellectuelle, car des millions de prolétaires, incapables de lire une ligne de Karl Marx, s’y connaissent sans commune mesure quant aux joueurs, aux tactiques, aux systèmes de jeu !

Il ne s’agit évidemment pas ici de nier la valeur du jeu – bien au contraire, il s’agit d’en défendre l’esprit. Et là, il n’y a donc pas que la beauté du jeu : il y a l’utilisation par un pays riche, il y a un refuge pour un peuple qui inversement a été incapable d’éprouver ne serait-ce qu’un peu d’intérêt au cinquantenaire de mai 68.

Ne pas voir cela serait rater ce qui se passe dans notre pays !

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Réflexions

« Il a 19 ans, et il est en finale de la Coupe du monde. Vous faisiez quoi à 19 ans, vous ? »

Il est difficile d’exprimer le malaise terriblement profond qu’on peut ressentir parfois, et que dire de ce qu’on a au fond de soi à la vue de ce commentaire du Monde dans son « live » pour le match France-Belgique d’hier, en coupe du monde de football ?

« Il a 19 ans, et il est en finale de la Coupe du monde. Vous faisiez quoi à 19 ans, vous ? » peut-on lire, avec une photographie où l’on voit de dos Kylian Mbappé.

Ce n’est pas seulement la surmédiatisation et la dimension « spectacle » du football moderne qui pose ici problème, ni même l’individualisation forcenée d’un système qui ne voit justement que des individus, de par sa nature.

Bien sûr, tout cela est vrai, mais certains diront : c’est de la politique et diront que là n’est pas l’important. Admettons, même si ce n’est pas vrai. Non, au-delà de cela, il y a ce terrible problème, ce problème peut-être le plus douloureux de notre époque : la négation de la personnalité.

Car ce que sous-tend Le Monde, c’est qu’être en finale d’une Coupe du monde aurait davantage d’intensité dans le vécu que, par exemple, à 19 ans, devenir amoureux, découvrir les premiers albums de Pink Floyd, adopter un chien dans un refuge, voir sa première aurore boréale, avoir un couple de pigeons ayant construit un nid et couvant ses œufs juste devant sa fenêtre.

Et c’est là qu’on ressent en pleine face ce qui est une odieuse impression de vide ; la vie dans cette société semble être un immense gaspillage, entièrement superficiel, sans aucune substance, avec tout n’étant qu’apparence.

La vie dans cette société n’est que du remplissage, une immense accumulation de choses diverses servant au remplissage. Et, ausi, on remplit sa vie avec un emploi, avec un couple, avec des jours qui passent. Non pas qu’un emploi ni un couple ne soient pas nécessaires, pas plus que les jours qui passent ! Bien au contraire, penser à l’inverse serait basculer dans la religion ou la célébration de marginalités auto-destructrices.

Cependant, pour un couple authentique et un emploi non aliénant, pour des jours qui passent en étant emplis de vie et non remplis de consommation et de superficialité, il faut s’arracher, s’extraire, s’extirper, s’enlever, s’ôter, se retirer d’attitudes, de conventions, de normes paradoxalement totalement vides.

Et les remplacer par d’autres, fondamentalement positives, allant dans le sens de l’épanouissement de ses propres facultés, de ressentir toute une gamme d’émotions, de sentir la nature, et d’une capacité à construire, à produire. C’est cela, le socialisme.

Et donc comprendre que ce qui compte, c’est la civilisation dans son ensemble, la culture, par laquelle on existe avec la nature, et non pas des individus qui ne sont que des egos abstraits. Après tout, qu’importe de savoir qui est l’auteur de La Multiplication des pains des Très Riches Heures du duc de Berry au XVe siècle?

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9 choses anecdotiques mais importantes sur la coupe du monde de football 2018

1. Le budget de l’organisation de la Coupe du Monde est monstrueux. Annoncé à 9 milliards d’euros, il tourne plutôt autour des 10 milliards d’euros après des ajustements de dernière minutes. A titre de comparaison, le mondial en Allemagne en 2006 avait coûté 430 millions d’euros.

Le Qatar devrait dépenser encore plus pour la Coupe de Monde 2022 : le budget annoncé est, pour l’instant, de 15 milliards d’euros, dont une grande partie pour des stades qui seront inutiles. Ce problème de stades concerne déjà la Russie puisque certains stades ont été agrandis à grand frais, alors que cela sera inutile par la suite pour les clubs y évoluant, voire même cela pourra constituer un handicap en raison des frais d’entretien.

2.La diffusion TV des matchs de coupes du monde sont perturbés de jeux SMS insupportables, y compris sur Bein Sport, qui est pourtant payante. Ils sont infantilisant, jouent sur la pulsion et l’émotion des spectateurs en annonçant des sommes immenses, avec des questions stupides, du genre : qui a marqué tel but lors de tel match, alors que cela a été dit juste avant, sans parler qu’on peut trouver l’information avec internet…

Et c’est à peine légal car les jeux d’argents sont très réglementés. Les chaînes contournent en fait la réglementation en proposant de rembourser les SMS. En pratique, cela n’est bien sûr pas réclamé par l’immense majorité des joueurs, et ces jeux sont très rentables…

3. Leroy Sané est un ailier gauche allemand et le meilleur joueur de son équipe. Il n’a pas pourtant pas été sélectionné, ce qui a provoqué de puissants remous en Allemagne. Le grand quotidien Die Zeit l’a défendu : « Leroy Sané est le genre de joueur pour lequel on regarde le football ». C’est vrai qu’il est techniquement excellent et très créatif. Seulement voilà, il est mal éduqué, trop individualiste.

Pour preuve son grand tatouage dans le dos. On y voit… lui-même célébrant un but. Il y a même le logo Nike sur ses chaussures. Quel narcissisme, quelle aliénation.

4. Normalement, on peut dire que les clubs sont l’essence du football mais les compétitions internationales sont des sortes de trêve, des moments où clubs s’effacent. Tel n’a pas été le cas avec le Real Madrid qui choisit comme nouvel entraîneur le sélectionneur national espagnol Julen Lopetegui qui avait encore pourtant deux ans de contrat.

Cela dans le dos de la Fédération espagnole et en l’annonçant juste quelques jours avant la compétition. Trop énorme : la fédération espagnole n’a pas eu le choix que de le limoger, tellement cela est irrespectueux, tellement cela représente un effondrement total sur le plan des valeurs, de la morale.

5. Pour en rester à ce thème du respect de l’équipe nationale, et la tradition qui veut que les problématiques de club s’effacent, il y a également l’affaire Antoine Griezmann. Partira, partira pas de l’Atletico Madrid ?

Il a soufflé le chaud et le froid, pour finalement l’annoncer au profit d’une chaîne privée et au mépris des supporters et commentateurs, à qui il avait promis une réponse auparavant. Le joueur français a pris le risque de perturber son équipe en plein pendant le mondial, et l’on a du mal à comprendre comment la Fédération française de Football a pu accepter cela. A moins que le star system et l’argent ne décident de tout?

6. Les Français ne sont pas des Japonais, et la réciproque est vraie. Les Japonais se sont en effet remarqués dans le stade après le match, parce qu’ils récupéraient toutes les ordures de leurs zones pour les mettre dans des sacs poubelles. Un haut degré de socialisation qui fait rêver, dans un pays comme la France où jeter n’importe quoi n’importe comment est un sport national, valorisé par tout un chacun comme de l’affirmation individuelle !

7. La Belgique a un entraîneur qui ne parle ni français, ni flamand. Pas grave, puisque dans le staff pas grand monde ne le fait… Le sélectionneur Roberto Martinez est en effet espagnol, ses deux adjoints sont anglais et français (Thierry Henry), le préparateur physique est gallois, etc. Pour trouver un belge dans la hiérarchie de l’encadrement, il faut remonter jusqu’au deuxième entraîneur des gardiens, Erwin Lemmens !

En ce qui concerne les joueurs, seul le défenseur Leander Dendoncker joue en Belgique en club, au RSC Anderlecht. Tant mieux pour les échanges internationaux, quel dommage que cela soit avec la mondialisation! Et ce n’est pas comme cela que le sectarisme et le repli identitaire disparaîtront en Belgique, malheureusement…

8. L’équipe suisse a quatre joueurs d’origine kosovare : Granit Xhaka, Xherdan Shaqiri, Valon Behrami et Blerim Dzemaili. Lorsque les deux premiers ont marqué contre la Serbie, ils ont ostensiblement célébré leur but avec un geste symbolisant l’aigle albanais. C’est une provocation nationaliste : le Kosovo, désormais indépendant, est peuplé en grande majorité d’Albanais, mais est considéré par la Serbie comme l’un de ses territoires historiques.

Un tel geste est dans tous les cas une provocation ahurissante. L’entraîneur de la Serbie a, avant le match, eu une attitude qui est la bonne, celle ne faisant pas des Balkans une poudrière. « Je suis d’un pays avec plusieurs cultures, de Bosnie. Mon père est monténégrin, ma mère serbe. Je suis un homme international. La nationalité n’est pas pour moi quelque chose de pertinent. »

9. En 2002, le commentateur Thierry Roland avait expliqué que «Il n’y a rien qui ressemble plus à un Coréen qu’un autre Coréen, surtout habillés en footballeurs, d’autant qu’ils mesurent tous 1,70 m, qu’ils sont tous bruns, à part le gardien. »

Cette stupidité raciste est reprise par le sélectionneur sud-coréen Shin Tae-yong, qui lors des entraînements de préparation a fait plusieurs fois intervertir les maillots des joueurs, frappés d’un numéro précis. « Il est très difficile pour les Occidentaux de différencier les Asiatiques, c’est la raison pour laquelle nous avons fait cela » a-t-il expliqué. Il y a encore du chemin avant le 21e siècle finalement…