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Restructurations économiques

Les coupures d’électricité posent encore une fois la question de l’opposition ville/campagne

Le chaos du développement propre au capitalisme s’exprime ici.

La situation énergétique en France est catastrophique. Dès cet été, comme il l’avait été remarqué sur agauche.org, un membre de la majorité présidentielle promettait « du sang et des larmes » pour cet hiver.

Nous y voilà et le gouvernement tente de sauver ce qu’il peut sauver en assurant une continuité des activités tout en annonçant clairement de possibles délestages, c’est-à-dire concrètement des coupures d’électricité.

Et lorsque le capitalisme est confronté à une crise d’une telle ampleur, il fait payer les pots cassés aux classes populaires qui sont sa variable d’ajustement.

Cette situation se comprend bien à travers la lecture de l’opposition ville/campagne, que les coupures d’électricité risquent de mettre encore une fois à nu.

En effet, dans son annonce d’un plan de coupures d’électricité, le gouvernement a repris une circulaire du 5 juillet 1990 qui prévoit l’organisation de délestage par zone, en excluant 14 000 sites prioritaires et secrets, mais dont on se doute qu’ils rassemblent les lieux de sécurité, de santé et de la défense.

Cela signifie qu’il sera procédé au cas échéant à des coupures sur des zones d’environ 2 000 habitants qui sont raccordées à la même ligne électrique, soit entre 8h et 13h, soit entre 18h et 20h. Sauf si cette même ligne alimente un site prioritaire !

Ce sont 40 % de la population qui sont quasi certains d’échapper à ces coupures parce qu’ils vivent dans un quartier relié par leur ligne électrique à un site prioritaire. Ainsi de nombreux foyers de grandes villes comme Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux, Nantes, vont voir le risque de coupure amoindri car la densité urbaine est telle qu’il sont forcément rattachés à une ligne alimentant un site stratégique.

D’ailleurs, si l’on peut parler de délestage pour un quartier en ville, ce sera plusieurs communes en campagne.

On pourrait se dire « ô et bien c’est comme ça »… Or non car c’est là l’expression de tout un développement réalisé par le capitalisme, ou plutôt à travers le capitalisme, et son anarchie intrinsèque.

Car ce que cela signifie c’est qu’il y a une majorité de gens qui sont éloignés de sites qualifiés de prioritaires mais en fait essentiels à la vie quotidienne, tel un hôpital, un commissariat, une caserne de pompier, etc.

Ce n’est pas un hasard si plus de 6 millions d’habitants vivent à plus de 30 minutes d’un service d’urgence, l’immense majorité vivant à la campagne.

A ce titre, un scénario parlant serait celui de la perte d’accès aux donnés mobiles téléphoniques (4g et mobile) car l’antenne relais à côté de chez soi serait touchée par un délestage alors que ne le serait pas l’électricité courante pour chez soi car la ligne serait différente que celle alimentant l’antenne téléphonique !

Dans les grandes villes, ce risque serait là aussi moins prononcé du fait d’un réseau bien plus dense d’antennes relais mobiles qu’à la campagne…

Cela montre combien le capitalisme a concentré ses éléments clefs en ville et sa proche périphérie, à commencer par sa matière humaine tels les cadres supérieurs, les ingénieurs, les directeurs et présidents-directeurs, etc., et les infrastructures fondamentales.

Alors qu’il a dans le même temps expulsé dans la campagne les prolétaires qui travaillent dans des zones industrielles infâmes, se déplacent en voiture sur des routes dangereuses tout habitant dans des maisons uniformisées et loin de tout…

Et maintenant, à ce triste panorama, il faut s’imaginer la pagaille que va être la fermeture de l’école délestée et l’absence de feux de circulation…

Le délestage de l’électricité révèle en fait tout le pourquoi du comment le capitalisme est un mode de production qui est périmé…parce que cette situation est l’expression de tout un système bancal, inégal et anarchique, et que la propension qu’a prise l’opposition ville/campagne illustre parfaitement.

La bourgeoisie croit ainsi qu’il suffit de faire un plan pour « s’adapter » aux « crises », mais c’est une illusion qui masque le fait que c’est bien tout le développement des choses qui est à revoir.

Sans même parler que ces délestages sont le résultat nécessaire de toute une situation historique marquée par la guerre (de repartage) en Ukraine ainsi que par l’écocide (effets de la pandémie sur les retards de maintenance des centrales, sécheresses pour les barrages hydroélectriques…).

Bref, c’est tout le logiciel de civilisation qui est à revoir et au coeur de ce reformatage, il ne peut y avoir que les prolétaires, marqués au fer rouge par l’opposition ville/campagne et qui s’ils s’emparent de la Gauche historique, seront à même de tout surmonter.