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Politique

Oui, Willy Schraen, la «guerre civile»!

Dans son interview au Journal du Dimanche, le président des chasseurs Willy Schraen menace : on va vers la « guerre civile » s’il continue à y avoir les graines de la « grande révolution animaliste ». Ce qu’il exprime ici, c’est sa terreur devant la lutte de classes, qui ne peut que renverser le régime.

Willy Schraen est un bourgeois comme on en fait plus, un bourgeois capable de flairer la menace subversive, à l’ancienne, comme les gaullistes savaient le faire. C’est que les gaullistes étaient cultivés, très cultivés même, alors que la bourgeoisie d’aujourd’hui est simplement utilitariste ; sa culture s’est ratatinée, ses connaissances sont factices et il n’y a plus que l’idéologie de la consommation débridée, dont l’art contemporain avec toute sa vacuité est le plus grand symbole.

Willy Schraen, lui, a compris que hors du gaullisme point de salut : il faut une Droite populaire, solidement appuyée sur le conformisme de la France profonde, pour que le régime capitaliste puisse avoir en France de solides fondements. Alors, il est en grand stress, car il est en train de s’apercevoir que ce que Mai 1968 avait échoué à faire, notre époque le réalise. C’est tout le mode de vie français « à l’ancienne » qui se voit ébranlé, voire remis en cause.

De par son sens de l’Histoire, Willy Schraen a compris que tout est alors une question de vision du monde. Et pour lui il est encore temps, urgemment temps même, d’assécher l’émergence d’une vision du monde raisonnant en termes de planète et ne considérant pas les animaux comme des ressources. Si on ne le fait pas… le conflit est inévitable.

En ce sens, il a tout à fait raison, et la Gauche, s’appuyant sur ses fondamentaux historiques, doit simplement reprendre à l’inverse, ses propos au Journal du Dimanche du 16 août 2020 :

« Aujourd’hui, ses tentatives malsaines [à Nicolas Hulot] de rattrapage en essayant de faire passer le Covid pour un cri d’alerte de la biodiversité, c’est du racolage idéologique.

C’est semer les graines d’une tempête qui emportera tout. A ce rythme, on aura une guerre civile (…).

Elle [= l’écologie] va s’essouffler car à un moment on ne pourra pas toucher au pré carré vital des Français. Le bon sens et la raison vont revenir.

Cette grande révolution animaliste n’aura pas lieu.

Quand ils iront mieux, on pourra se poser autour d’une table. Je serai heureux d’y participer car j’ai une vraie vision écologique. »

Il est évident que le Covid-19 est le produit d’une crise de la biodiversité, que les chasseurs sont des figures du passé, que le rapport aux animaux doit être changé, que le « pré carré vital des Français » n’est que le masque d’un mode de vie individualiste consommateur toujours plus vide dans son contenu culturel et toujours plus empli d’exploitation, d’aliénation, de souffrances morales, psychologiques et physiques.

Alors, oui, Willy Schraen, la « guerre civile », ou plus exactement la révolution est inévitable. Car le monde ne restera pas tel qu’il est, car le changement complet des mentalités est nécessaire, car la planète est malade d’une humanité qui a totalement perdu toute orientation intellectuelle, culturelle, morale.

Et pour cette guerre civile, il y a deux camps qui s’appellent simplement : la Gauche et la Droite.

> Lire également : Le ministre de la justice Eric Dupond-Moretti en duo avec le chef des chasseurs Willy Schraen

 

 

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Le ministre de la justice Eric Dupond-Moretti en duo avec le chef des chasseurs Willy Schraen

La nomination de l’avocat Eric Dupond-Moretti avait surpris, mais en dénonçant agressivement les anti-chasse, on a compris le sens du coup tactique par Emmanuel Macron.

Le Journal du Dimanche a depuis longtemps une orientation pro-Macron, comme quoi le groupe Lagardère l’apprécie particulièrement. Ce dimanche, le « JDD » a lancé une double offensive :

– une interview de Willy Schraen, le président des chasseurs, où celui-ci souligne sa proximité avec le régime ;

– la « révélation » que le ministre de la justice a écrit la préface d’un ouvrage de Willy Schraen prochainement publié, en prenant entièrement partie pour les chasseurs.

Le « JDD » n’a pas oublié deux choses, signe qu’il agit de manière commandée. Tout d’abord, il parle de l’affaire Elisa Pilarski, tuée en novembre 2019, en disant que les résultat des tests ADN sur les chiens seront disponibles fin août, en insistant bien que la famille d’Elisa Pilarski ne veut pas qu’on incrimine la chasse à courre en général.

Ensuite, il donne la parole aux organisateurs du « référendum pour les animaux » pour une petite tribune appelant à ne pas voir la démocratie se voir confisquée. C’est que la récolte des signatures pour la possibilité de ce référendum patine grave, la tribune constatant avec amertume qu’en fait le personnel politique est structurée à l’arrière-plan sans qu’on le sache :

« Nous nous étonnons que le président du Sénat assure, dans une lettre au président de la Fédération des associations de chasseurs aux chiens courants, que nous nous sommes procurée, son « attention quant à l’avenir que pourrait connaître » ce référendum. »

La naïveté des milliardaires ayant lancé cette idée de référendum – Xavier Niel (Free), Marc Simoncini (Meetic) et Jacques-Antoine Granjon (Veepee, ex-Vente-privee.com) – est ici assez surprenante. Elle tient sans doute à ce qu’il s’agisse de nouveaux bourgeois, né sur le terrain de la modernité technologique et coupé de la bourgeoisie traditionnelle.

Surtout que l’on sait désormais que le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, est ouvertement pro-chasse, lui-même pratiquant la « fauconnerie ». Dans sa préface à l’ouvrage de Willy Schraen, il y va fort, comme on l’apprend par le Journal du Dimanche : les tenants de défense des animaux seraient des « illuminés », des « intégristes », il s’agit d’un « extrémisme », les chasseurs doivent « relever la tête ».

En allusion aux autodafés nazisme et au barbecue de viande en même temps, Eric Dupond-Moretti dit même avec provocation que :

« Ce livre, les ayatollahs de l’écologie s’en serviront pour allumer le barbecue où ils cuiront leurs steaks de soja. »

Le « JDD » nous dit que ces propos datent d’avant sa nomination. Cependant, il aurait alors fallu bloquer la préface après que la nomination ait eu lieu. En réalité, il s’agit d’une annonce politique : les chasseurs peuvent y aller, les partisans de la défense des animaux vont se faire isoler et punir. On comprend qu’Eric Dupond-Moretti soit pour briser tout le système juridique : ce qu’il veut, c’est d’une « justice » aux ordres du régime, qui annonce où cogner.

Quant à Willy Schraen, qui publie donc « Un chasseur en campagne », ses propos dans l’interview au « JDD » sont assez typiques, c’est-à-dire subtilement politique, très doué tactiquement, et totalement réactionnaire, avec une propension à l’outrance et à la volonté de détruire. Bref, c’est du Willy Schraen.

La maîtrise est complète et le populisme total. Il dit ainsi plusieurs fois « nous les ruraux ». Le reste est à l’avenant : « la France rurale a l’impression d’être fortement humiliée », « on va maintenir la chasse à la glu » (quel que soit l’avis du gouvernement), « il ne faut pas donner [le ministère de] l’écologie aux écologistes », « Hulot a failli mettre le pays à feu et à sang », le référendum pour les animaux est un « totalitarisme de la rue », etc.

Son lyrisme est parfaitement rodé et soit l’interview a été retravaillée à de nombreuses reprises, soit c’est un fin orateur, d’esprit assez baroque il faut le dire :

« On est en train de créer un nouvel ordre moral, une sorte de tribunal populaire écologiste animaliste. Cette écologie ressemble à l’Inquisition. On veut nous crucifier.

Ces gens nous expliquent que l’animal et l’homme ne font qu’un. Je suis désolé mais le poisson rouge dans le bocal de mon fils, ce n’est pas mon frère. Dire qu’il faut un ministère de la Condition animale, c’est de la folie furieuse. »

Dénoncer l’Inquisition tout en faisant une allusion à la crucifixion du Christ juste après, cela demande un certain style. Et, donc, tout en niant un quelconque « pacte », Willy Schraen avoue avoir soutenu Emmanuel Macron aux élections européennes et avoir cherché à contrer les gilets jaunes.

Emmanuel Macron qui a nommé ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti, Eric Dupond-Moretti qui a écrit la préface de l’ouvrage de Willy Schraen avant d’être nommé. Willy Schraen qui connaît bien Emmanuel Macron. Tel est le nom de la nouvelle trinité : le Père Emmanuel Macron, le Fils Eric Dupond-Moretti et celui qui se veut Saint-Esprit : Willy Schraen.

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Écologie

La stratégie de la tension menée par le patron des chasseurs Willy Schraen

Lors d’une interview au site chassons.com, le président de la Fédération nationale des chasseurs Willy Schraen s’est adonné à l’une de ces provocations dont il a le secret. «À un moment on va devoir finir par agir sur le chat» explique-t-il en se justifiant par le fait que selon lui il tue « bien plus d’animaux que les chasseurs ».

Dans son interview à chassons.com, Willy Schraen a suggéré que :

« Le piégeage du chat à plus de 300 mètres de toute habitation, ce serait une bonne chose »

Ce propos ne pouvait évidemment que provoquer une vague d’indignation. Suite à cela, il ne dormirait pas depuis plusieurs jours, serait sous anxiolytiques, recevant des menaces ou étant l’objet de « contrat » sur sa tête, etc. Il serait même sous protection policière, ainsi que sa famille.

Tout cela ne doit rien au hasard, mais fut savamment calculé. Willy Schraen savait très bien les réactions qu’il allait provoquer et c’est ce qui était recherché. Pour se poser en victime, pour augmenter la tension, pour attiser le feu.

Il avait d’ailleurs tout prévu : d’abord susciter l’émoi à propos des chats, puis expliquer ensuite qu’il ne s’agissait que de « chats errants revenus à l’état sauvage », qui constitueraient une menace pour la « biodiversité » et de nombreux oiseaux.

Ce faisant, il pose un véritable problème, pour apporter une solution relevant du problème. Car tant les chasseurs que le développement urbain anarchique, associé à une « consommation » d’« animaux de compagnie » anarchique, relève du déséquilibre apporté par les humains au situation naturelle.

Opposer les chats aux oiseaux est exemplaire d’une vision du monde totalement erronée. C’est pour cela que les défenseurs des animaux ne font pas cette opposition, mais combattent pour aider les oiseaux et pour chercher à améliorer la situation des chats, ceux-ci étant massivement abandonnés, la situation ayant empiré comme jamais ces dernières années.

Mais cela n’intéresse pas les chasseurs qui veulent surtout s’en prendre aux chats en en faisant les bouc-émissaires de la destruction de la vie sauvage. Ils ne sont pas là pour s’opposer à des désastres provoqués par les humains, mais pour renforcer leur propre position.

C’est un jeu tactique, de bout en bout, et d’ailleurs Willy Schraen a même finalement prétendu que les gens ont mal interprété ses propos, qu’il n’a jamais parlé de tuer les chats. De la part d’un chasseur, on a du mal à le croire. Surtout quand il parle ensuite pour se défendre… de les remettre à la SPA !

Comme on le voit, à la provocation succède la provocation ; c’est absurde et totalement infaisable de toutes manières, mais l’idée est d’en rajouter, toujours d’en rajouter.

Tout défenseur des animaux sait d’ailleurs que la réponse immédiate n’est pas la SPA, mais le mouvement en soutien aux « chats libres ». Il faut ainsi savoir que la loi du 6 janvier 1999 a donné un statut de « chats libres » aux chats errants, à condition qu’ils soient stérilisés, identifiés (tatouage avant et désormais une puce), par des bénévoles indépendants, des associations de protection animale ou des communes, qui s’engagent à les nourrir après les avoir remis où ils étaient.

Cette activité est essentielle et les gens la menant font partie de la première ligne au service des animaux. C’est un travail concret, comme celui pour les oiseaux, qui ne relève d’aucune médiatisation, d’aucun soutien ou si peu. Et réaliser une telle activité implique une rupture avec la vie quotidienne exigée par l’idéologie dominante, car culturellement cela apparaît comme totalement « bizarre ».

On a donc de la part de Willy Schraen, plutôt qu’un véritable sujet, une opération provocation savamment orchestrée. La chasse n’est pas qu’un simple « loisir » en France, elle représente un élément fondamental du dispositif réactionnaire français. Willy Schraen agit ainsi en militant, pour mobiliser toute une frange de la population réfractaire à tout changement, culturel, écologique, etc.

En ce temps de crise, alors que la société est profondément bouleversée par la situation sanitaire, les réactionnaires voient une occasion en or à saisir pour répandre leur vision du monde. S’en prendre au chat n’est ici qu’un prétexte afin de pouvoir critiquer les défenseurs de la natures et des animaux.

C’est la raison pour laquelle dans la même interview il a assumé tout une posture violente, virile, digne des mentalités les plus arriérées :

« j’aimerais bien qu’on en choppe quelques-uns quand-même », « il y a quelques coups de poing dans la gueule qui se perdent », « je comprends le chasseur aujourd’hui qui dit si j’en choppe un, il va prendre une bonne branlée ».

C’est de toute une vision du monde dont il s’agit là, celle refusant de voir les exigences historiques de l’époque, s’imaginant trouver refuge dans un passé fantasmé, avec l’attitude du gaulois « bon vivant », grande gueule et adepte du coup de point érigé art de vivre.

Willy Schraen avait exactement ce genre d’attitude et d’appel à la violence contre la mobilisation démocratique et populaire opposée à la chasse à courre. On ne sera pas étonné à ce sujet que Willy Schraen ait reçu immédiatement le plein soutien de la part de Guy Harlé d’Ophove, figure majeure de la réaction, président de la fédération des chasseurs de l’Oise, département bastion de la chasse à courre.

On a encore ici un exemple de ce qu’on doit appeler la lutte des classes. La lutte des classes authentique, pas celle imaginée par la CGT.

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Société

Affaire de la forêt de Retz: le président des chasseurs se cache derrière les notables

L’affaire de la forêt de Retz obligeait, à un moment ou à un autre, à ce que le dirigeant de la Fédération des Chasseurs s’exprime. Willy Schraen a choisi Valeurs Actuelles, la grande revue de la Droite la plus réactionnaire, prônant une alliance avec l’extrême-Droite. Il met bien entendu les veneurs hors de cause par définition, mais surtout il souligne que la tête de l’État est toujours à 100 % derrière les chasseurs. À l’arrière-plan, il y a la haute bourgeoisie.

Willy Schraen a répondu dans Valeurs Actuelles, car il savait qu’il devait bien dire quelque chose et que la plus importante des choses qu’il pouvait raconter, c’est que la mort d’une femme tuée par des chiens dans la forêt de Retz dans l’Aisne ne serait, finalement, qu’un fait-divers. La chasse est toujours un dispositif réactionnaire et l’affaire ne change rien : voilà en substance ce qu’il raconte.

Willy Schraen n’hésite pas à mouiller le Président de la République lui-même. À la question « Pensez-vous que cette polémique peut mettre en péril la chasse à courre ? Le Président Macron reste t-il l’ami des chasseurs ? », il répond :

« J’ai rencontré hier Emmanuelle Wargon, la secrétaire d’Etat auprès de la ministre de la Transition écologique, qui m’a assuré de son soutien. Elle est parfaitement consciente que cette polémique est injustifiée. Quant au président Macron, nos rapports sont excellents. Nous bénéficions toujours de son écoute. La réforme de la chasse avance même si nous ne sommes pas d’accord sur tout ! Dans l’immédiat, nous voulons faire stopper les violences verbales et physiques, que ce soit de la part de Brigitte Bardot, Rémi Gaillard, de groupuscules ou tant d’autres associations. Je vous le dis : nous allons lancer une série de procédures judiciaires pour que cela cesse. »

C’est là de la politique très fine. Peu importe ce qui arrive, dit Willy Schraen, ce qui compte c’est qu’il y ait deux camps. La chasse est un vecteur offensif de la réaction et elle va le rester.

C’est tellement subtile que la question et la réponse ici citées ferment l’interview. C’est tellement subtile qu’au tout début, Willy Schraen souligne la chose suivante, pour mettre directement l’accent sur le poids de la chasse à courre :

« Il y a 18 000 chasses à courre par an en France. »

Ce nombre est très important, non pas eu égard la population française, mais par rapport à la haute bourgeoisie. Cela veut dire que cette dernière considère la chasse à courre comme une de ses valeurs. C’est donc intouchable.

Pour être le plus clair possible ici, prenons les propos de Pierre de Boisguilbert, ancien responsable de la Société de Vènerie. Parlant du fait qu’une personne soit tuée par des chiens de chasse à courre, il affirme :

« En cinq siècles ça n’est jamais arrivé. »

En réalité, on n’en sait rien du tout. Il y a une quantité effroyable de « faits-divers » liés à la chasse à courre, avec des animaux blessés ou tués chez les gens, des gens blessés même. Tués peut-être, qui sait, en cinq cent ans. Mais cela est totalement effacé des tablettes en raison de l’hégémonie réactionnaire. La chasse à courre est comme hors-sol de par l’importance sociale de ses participants. On est ici dans l’arrière-cour de la haute bourgeoisie.

L’enquête sur l’affaire de la forêt de Retz a dû même être confiée à un service d’Amiens, car participait à la chasse à courre possiblement incriminée un lieutenant-colonel de gendarmerie. La fonction de ce militaire décoré (médaillé de la Défense Nationale Or agrafe Gendarmerie, Chevalier de l’ordre national du mérite, titulaire de la médaille de la protection du Territoire National agrafe Harpie), c’est… de diriger la gendarmerie de toute l’Aisne.

On voit ici la puissance des notables. L’armée et la haute bourgeoisie forment ici des bastions imprenables, à moins de les briser. Cette affaire de la forêt de Retz a des proportions concrètement immenses de par les forces concernées par l’enquête.