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Extrême-Droite: le Brexit célébré par les tenants sociaux-nationalistes du «Frexit»

Le Brexit est entré en vigueur et c’est le début de la formation d’un bloc de plus dans la bataille pour le repartage du monde, celui avec le Royaume-Uni comme centre de gravité et rassemblant les pays du Commonwealth. Les sociaux-nationalistes français ont fêté cela et espèrent que cela va aider leur argumentation démagogique en faveur du « Frexit ». Pour eux, la France doit faire de même et, voyant un espace, ils se rassemblent.

Vendredi 31 janvier 2020 on a eu droit à un rassemblement avec les principales figures du social-nationalisme français, pour « fêter » l’entrée en vigueur du Brexit. Organisé par l’Union Populaire Républicaine (UPR) de François Asselineau, on y trouve toutes les principales figures soutenant cette ligne, et donc pas Marine Le Pen qui l’a abandonnée à la suite de la défaite à la Présidentielle.

Il manque toutefois également le Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF), qui se réjouit également du Brexit, bien que de manière critique, et prône un « Frexit progressiste ». Le PRCF est relativement influent comme « gauche » du PCF et prône un retour à la ligne sociale-patriotique du PCF des années 1960-1980 (« Patriotisme et combat pour le socialisme sont indissociables ! »).

Voici le communiqué entier de l’UPR, qui doit faire froid dans le dos à tout antifasciste. On a ici en effet une convergence sociale-nationaliste qu’il serait absurde de balayer d’un revers de la main. C’est une vraie proposition stratégique qui se forme ici, représentant une menace démagogique majeure.

« François Asselineau a organisé ce vendredi 31 janvier 2020 une grande soirée pour célébrer l’évènement historique que constitue le Brexit, à l’espace « Atelier Basfroi » dans le 11ème arrondissement de Paris.

S’inscrivant dans l’esprit du Conseil national de a Résistance de 1943-44, cet événement politique exceptionnel a permis de rassembler, le temps d’une soirée, des personnalités françaises de bords politiques très différents mais partageant une même joie de voir nos voisins britanniques se libérer de la tyrannie de l’Union européenne.

Notre photo montre ainsi tous les responsables réunis se réjouir de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, au moment des 12 coups de minuit. De gauche à droite :

  • Florian Philippot, Président des Patriotes, ancien Vice-Président du Front National,

  • Martine Fumey, vice présidente du Club des entreprises Numéros 1 français de l’export,

  • Dominique Jamet, cofondateur de l’Union nationale citoyenne, ancien Vice-Président de Debout La France, ancien journaliste à Marianne, France-Soir et au Figaro,

  • Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout La France, député, ancien candidat aux élections présidentielles de 2012 et 2017,

  • (derrière Nicolas Dupont-Aignan) : Pierre Lévy, rédacteur en chef du mensuel Ruptures, ancien journaliste à l’Humanité et ancien militant syndical à la CGT.

  • Jacques Cheminade, président de Solidarité & Progrès, ancien candidat aux élections présidentielles de 1995, 2012 et 2017,

  • François Asselineau, président-fondateur de l’UPR, ancien candidat à l’élection présidentielles de 2017, organisateur de la Grande Fête du Brexit,

  • Philippe Pascot, écrivain et ancien maire-adjoint d’Évry auprès de Manuel Valls,

  • Jean-Frédéric Poisson, Président du Parti Chrétien Démocrate, ancien maire de Rambouillet et ancien député des Yvelines,

  • John Laughland, universitaire anglais, de nationalité française et britannique, auteur de The tainted sources of Europe, traduit en français par « la liberté des nations »

  • Gilles Casanova, secrétaire général adjoint du Front démocrate et de l’Union des Démocrates et des Écologistes, ancien conseiller de Jean-Pierre Chevènement,

  • Djordje Kuzmanovic, président de République souveraine, ancien porte-parole et conseiller de Jean-Luc Mélenchon pour les questions internationales et de défense,

  • (derrière Djordje Kuzmanovic ) : David Bourgeois, représentant des Gilets jaunes.

Le Comte de Paris, Jean d’Orléans, prétendant au trône de France, avait envoyé son représentant personnel, Bruno Cazelles, à titre d’observateur (non présent sur la photo). »

Cette dernière remarque en dit long sur les ambitions réactionnaires de ce projet social-nationaliste, qui vise à faire s’effondrer la Gauche en se plaçant à droite de Marine Le Pen, qui sera présentée comme pas assez « souverainiste ». Il y a un vrai public pour ce mouvement : toute la génération passée par la lessiveuse Dieudonné-Soral. La menace est très claire.

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Fondation des « Patriotes »: un nouveau parti nationaliste

« J’ai beaucoup d sympathie pour les électeurs et sympathisants du FN qui sont déçus, j’en fais partie. »

Voilà la ligne, l’identité du mouvement des « Patriotes » de Florian Philippot, qui vient de tenir son congrès de fondation.

Ce mouvement se veut l’enfant légitime de la ligne tenue par Marine Le Pen lors du débat télévisé face à Emmanuel Macron entre les deux tours des présidentielles. L’échec de Marine Le Pen a fait reculer celle-ci sur la question de la sortie de l’Europe ; Florian Philippot se pose comme canal historique.

Sa ligne est celle du « Frexit », l’équivalent français du Brexit.

Il y a encore beaucoup d’amateurisme, le site du mouvement étant plus que mal sécurisé. Cependant, il ne faut pas se leurrer, ce nouveau mouvement d’extrême-droite a un espace réel pour exister, car Florian Philippot tente de rassembler le plus largement possible en supprimant l’aspect raciste qui, d’une manière ou d’une autre, marquait le Front National.

A cela s’ajoute l’ajout de l’idéologie « sociale » apporté par Florian Philippot, qui a fait du Front National un véritable mouvement d’extrême-droite, au sens où il y a l’alliance du national et du social, alors qu’avec Jean-Marie Le Pen, il n’y avait qu’une ligne pro-libérale.

Florian Philippot, qui tente de chercher à exprimer cela par des formules bien net, résume cela en disant :

« J’ai mis le FN sur des rails gaullistes, on a changé le logiciel, les scores ont augmenté. Mais ça a déraillé, le FN est revenu sur des rails lepenistes. »

Or, on sait très bien comment la démagogie « sociale » nationaliste est difficile à combattre pour la gauche. En jouant sur le repli sur soi, sur l’unité au-delà des classes sociales – des classes sociales par ailleurs niées par la « nouvelle » gauche -, en jouant sur la peur de la compétition de la mondialisation (les « Chinois », les « Américains, etc.), le nationalisme a aisément de la vigueur.

Il faut d’ailleurs souligner deux choses importantes. D’abord, le congrès de fondation des « Patriotes » s’est tenu ce week-end à Arras, histoire de montrer que le but est la conquête du Nord, aux dépens des traditions ouvrières, de gauche.

Font partie des 6500 adhérents revendiqués du mouvement José Évrard, député élu avec le Front National après avoir longtemps été membre du PCF. Mentionnons également le fait que le vice-président des « Patriotes » est Franck de Lapersonne, un tribun de très haute volée avec une vraie connaissance idéologique des principes d’extrême-droite.

Ensuite, le siège des « Patriotes » est à Saint-Ouen, en banlieue parisienne, un bastion de la ceinture rouge, avec un maire PCF de 1945 à 2014. C’est une sorte de vague écho à la tentative de Jacques Doriot, dirigeant communiste de Saint-Denis, qui s’est tourné vers le fascisme dans les années 1930 avec le Parti Populaire Français.

Notons également que le siège est loué à Marcel Campion, le patron des forains, connu pour ses rodomontades médiatiques, ses coups de force en mode blocage des voies, etc.

On a ici tous les ingrédients typiques de l’extrême-droite : des réseaux et des cadres nationalistes, une dynamique « sociale » revendiquée où la nation est présentée comme le seul vecteur possible, une orientation populaire pour affaiblir la gauche en général, tout en prétendant ratisser le plus large possible.

Florian Philippot explique ainsi cela au sujet des membres :

« On a des gens du FN, de DLF, de l’UPR, de la France insoumise, de LR… et deux tiers de nos adhérents ne viennent d’aucun parti. »

Ce n’est pas pour rien que Florian Philippot ne mentionne ni le PS, ni le PCF. Son but est de liquider la gauche et il se positionne comme fer de lance d’un discours capable de faire cela. Les « Patriotes » sont censés agir comme l’éperon du souverainisme, c’est-à-dire du nationalisme.

Au projet d’une France socialiste, le nationalisme des « Patriotes » oppose l’union au-delà des classes sociales. Pour aujourd’hui, cela ne rime pas à grand chose. Mais pour demain – et qui est de gauche sait que le capitalisme est instable, toujours victime de crises profondes, d’une tendance au militarisme, à la guerre – cela peut suffire pour donner naissance à un vaste mouvement nationaliste, dans une fièvre qui suivrait une crise.