Expliquons simplement les choses. Le 9 septembre 2025, le Premier ministre François Bayrou a pris la porte. Son vote de confiance a échoué, avec 364 députés ayant voté contre, 194 pour (et 15 abstentions).
C’est la première fois sous le régime de la Ve République qu’une telle manœuvre – une opération de chantage à la stabilité – échoue.
Pourquoi François Bayrou a-t-il fait ce vote de confiance, en sachant qu’il allait échouer ? Il y a deux raisons.

La première, c’est qu’il s’agit pour la bourgeoisie de casser toute vague de révolte et de contestation en cette rentrée 2025.
Un éventuel nouveau gouvernement, élargi aux socialistes, peut apporter de faux espoirs et calmer les choses. Du moins, c’est l’espoir de la bourgeoisie.
C’est un espoir vain. Les masses sont nulles sur le plan de la conscience sociale et politique, elles raisonnent de manière égoïste et corporatiste. Néanmoins, la lutte de classes avance mécaniquement et s’impose d’elle-même.
On est très loin du compte et même quand les choses vont bouger, on sera encore très loin du compte. D’où la nécessité de rester sur une ligne rouge sans céder aux délires et à la petite-bourgeoisie.
Mais les choses vont changer, on va enfin avancer. L’Histoire avance inexorablement : la révolution doit obligatoirement se produire à moyen terme.
La seconde raison, c’est que la bourgeoisie exige que soit abordée la question de la dette. Il faut la lutte de classe, il faut que le gouvernement attaque les masses.
C’est considéré comme impératif, cela relève de l’esprit de restructuration du capitalisme. La marche à la guerre et la restructuration ont toujours fonctionné ensemble.
Pour bien comprendre l’exigence bourgeoise, voici des extraits de l’article de Stéphane Lauer dans Le Monde, en tant qu’éditorialiste. C’est une véritable leçon proposée aux lecteurs bourgeois très tôt le matin du 8 septembre 2025.
« Depuis l’annonce kamikaze de François Bayrou d’un vote de confiance devant l’Assemblée nationale, lundi 8 septembre, pour faire émerger un consensus sur la gravité de la dette, le débat n’a fait que s’enkyster (…).
Les doses d’argent public augmentaient, plus leur pouvoir anesthésiant plongeait le pays dans un sommeil comateux. La dette, « ce ne sont pas les gouvernements qui la consomment », soutient Bayrou.
Comment lui donner tort ? Si les mouvements sociaux se sont enchaînés ces dernières décennies dès qu’il s’est agi de rogner sur la dépense, on n’a pas vu de manifestations pour protester contre la politique du chéquier destinée à éteindre telle ou telle crise sociale ou économique.
Les 2 200 milliards d’euros de dettes accumulées depuis le rapport Pébereau, qui, depuis 2005, reste d’une actualité criante, n’ont pas été toujours redistribués de façon équitable, intelligente ou raisonnable, mais ils ont contribué, d’une manière ou d’une autre à soutenir le pouvoir d’achat, qui a continué à progresser (…).
Entreprises, consommateurs, retraités, salariés, assurés sociaux, nous avons tous profité des décisions prises par ceux que nous avons élus et qui, par calcul politique ou inconséquence démagogique, n’ont pas su dire stop pour dépenser un argent que nous n’avions plus.
Mais, au-delà de surmonter les crises, la dette a surtout permis d’amortir un déclin qui s’est installé à bas bruit. Qui s’est inquiété du recul de notre produit intérieur brut par tête, lequel a perdu en vingt ans 22 points par rapport à celui des Néerlandais, 12 points par rapport à celui des Danois ou 10 points face à celui des Allemands ?
Les déficits se sont accumulés sans bénéficier à la croissance, qui est restée en moyenne inférieure à celle de la zone euro. La hausse parallèle des dépenses publiques et des taux de prélèvement n’a fait qu’entretenir les illusions sur un système productif poussif et des services publics de moins en moins capables de répondre aux besoins des Français (…).
Le sujet n’est pas tant de stabiliser la dette pour faire plaisir à nos créanciers ou à Bruxelles, mais de stopper le déclin.
Or, les capacités d’investissement du pays sont obérées au moment où il en a le plus besoin, parce que le monde est en train de basculer aussi bien du point de vue géopolitique et démographique que climatique.
La dette est devenue un gigantesque crédit à la consommation, qui nous coûte de plus en plus cher et qui ne nous permet plus de préparer l’avenir. Ce n’est ni l’agitation sociale ni l’instabilité politique qui nous y aideront. »
Tout est dit : les pertes doivent être socialisées, tout comme les bénéfices sont privatisées. La société doit payer pour le capitalisme. Et comme le capitalisme, c’est la bourgeoisie, les masses payeront.
Des masses qui, en fait, ont elles-même largement profité du capitalisme. Elles sont largement corrompues, donc leur décrochage va être tortueux. Il va néanmoins se produire, inévitablement.
C’est enfin la nouvelle période qui s’ouvre, celle où la Gauche historique peut commencer à exister. Soit la révolution empêche la guerre, soit la guerre provoque la révolution !