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Événements significatifs

Hamas, Arras: la spirale négative et comment s’en protéger

La France était sous le choc à la suite des événement à Gaza, à la suite de l’offensive du Hamas contre Israël qui a tourné au massacre de civils (en filmant et en diffusant les vidéos sur les réseaux sociaux, y compris des assassinés). Et voilà que le 13 octobre 2023, un jeune d’origine tchétchène se rend dans son ancien lycée d’Arras pour poignarder des enseignants en criant « Allah Akbar », en tuant un, en blessant grièvement deux.

C’est un événement marquant de plus, qui est de la même ampleur que « Je suis Charlie » et que le massacre au Bataclan. La société française est touchée dans toute sa profondeur, en raison de son histoire. La lutte de 2023 contre la réforme des retraites n’avait par exemple qu’effleuré la surface de la société ; pour les gens, c’était important, et pourtant une anecdote historiquement.

Là, avec tout ce qui se passe, c’est très différent. C’est une question de civilisation et les masses savent très bien que ce n’est pas une question de religion. C’est une question d’effondrement des valeurs. Le capitalisme triomphant fait se dissoudre tout principe dans le relativisme et partout les monstres s’infiltrent, pratiquant le cannibalisme social. Monopoles d’un côté, éléments anti-sociaux de l’autre : le peuple subit les coups des uns et des autres.

L’arrière-plan du meurtrier est d’ailleurs sans ambiguïtés : on est typiquement dans l’effondrement moral, administratif, politique français. Voici comment Europe 1 présente la chose :

« Fiché S, âgé de 20 ans, d’origine tchétchène et arrivé en France en 2008… Plusieurs heures après l’attaque au couteau dans un lycée d’Arras, qui a tué un professeur et blessé trois autres personnes, le profil de l’assaillant et de son entourage se dessine. Et alors que son frère avait été interpellé à l’été 2019 dans le cadre d’un projet d’attentat déjoué, sa famille, alors assignée à résidence, aurait même pu être expulsée en 2014.

Selon un document qu’Europe 1 s’est procuré, le cabinet de Manuel Valls, alors ministre de l’Intérieur, avait décidé d’annuler la rétention de la famille Mogouchkov. Cette dernière, composée d’un couple et de cinq enfants, était assignée à résidence dans un foyer de La Guerche-de-Bretagne, au sud de Rennes. La police aux frontières s’y était rendue le 18 février 2014 à 6h du matin pour les conduire à l’aéroport de Saint-Jacques-de-la-Lande, près de Rennes, où un avion spécialement affrété attendait la famille, direction la Tchétchénie.

Mais la procédure avait suscité un tollé dans les rangs de plusieurs associations de défense des sans-papiers. Le parti communiste français (PCF) s’était également fendu d’un communiqué de soutien à la famille Mogouchkov. « Que de moyens gaspillés pour saboter la vie d’une famille ! »

Tout cela fournit des points à la Droite, mais la Droite n’est plus la Droite : la France est devenue un satellite américain et il n’y a même plus de bourgeoisie française à prétention gaulliste. La seule chose qui compte politiquement en France, c’est de savoir comment gérer une population occidentale cherchant à garder ses privilèges, y compris à travers le social-impérialisme. Tous les partis et dirigeants, de Marine Le Pen à Jean-Luc Mélenchon, soutiennent l’armée française dans son intégration à l’Otan, assument l’Union européenne comme vaste satellite américain, acceptent la guerre de conquête contre la Russie (et demain la Chine).

Il n’y a donc aucun espoir politique à attendre. La société française va continuer à péricliter. Le mélange LGBT cosmopolite et repli nationaliste-communautaire va perdurer, exactement comme aux États-Unis.

Et là n’est pas le vrai enjeu. La vraie alternative, c’est Socialisme ou barbarie. Ce dont on a besoin, c’est de porteurs de civilisation, de gens annonçant le futur inévitable qu’est le Socialisme. Il faut laisser le passé au passé. Ce passé est tellement passé qu’il s’entre-dévore, afin d’empêcher qu’on arrive au futur !

On ne peut pas comprendre autrement le Hamas qui massacre un festival techno. On aurait dû voir une offensive portée par la Gauche palestinienne, unifiant sur une base démocratique les masses travailleuses ; au lieu de cela, on a la fuite en avant dans le massacre et la folie fondamentaliste.

Telle est la division : entre le passé et le futur. Et il ne faut pas se faire piéger par ce passé qui s’entre-dévore ! C’est le seul moyen de se protéger de la spirale négative du capitalisme en crise !

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Politique

Éviction de Steeve Briois : la fin du « rêve » national-social

Le Rassemblement national met Hénin-Beaumont de côté.

Fraîchement élu président du Rassemblement national, Jordan Bardella, a recomposé son bureau exécutif, l’organe décisionnel du parti. L’éviction de ce bureau exécutif de Steeve Briois, maire depuis 2014 d’Hénin-Beaumont dans le Pas-de-Calais, est particulièrement marquante.

C’est en effet lui qui a ancré Marine Le Pen dans ce territoire populaire depuis le début des années 2010, au point de la faire élire députée du département. Le « nord », et particulièrement cette ville d’Hénin-Beaumont, a représenté pour le Front national devenu Rassemblement national tout un symbole, et même une stratégie à part entière.

Il s’est agi d’un tournant social entièrement assumé, en captant la base prolétaire et petite-bourgeoise d’un territoire « périphérique » avec un discours nationaliste à prétention sociale. Loin des grandes métropoles technocratiques et modernistes donc, loin de la Droite traditionnelle et de la Gauche bobo.

De fait, Marine Le Pen a siphonné des pans entiers de l’électorat de la Gauche, mais surtout elle a coupé l’herbe sous le pied de la Gauche historique avec cette orientation. Localement, c’est une véritable catastrophe tellement ce mouvement a été, et est encore, puissant.

Immédiatement après son éviction du bureau exécutif du Rassemblement national, Steeve Briois a réagi avec des mots très durs à l’encontre de son parti, l’accusant de se tourner unilatéralement vers la Droite :

« Je ne peux qu’y voir un rabougrissement, et j’espère que le Rassemblement national n’est pas en train de céder au grand compromis nationaliste, cette stratégie d’union des droites radicales, qui a échoué à la présidentielle, plutôt que de l’ensemble des patriotes de droite comme de gauche ».

De fait, il considère que son éviction marque « un début de purge contre ceux qui défendent la ligne sociale », au profit de courants « droitards » qu’il qualifie d’identitaires et intégristes. On comprendra qu’il s’agit là de la ligne portée par Eric Zemmour et Marion Maréchal.

Cette nouvelle orientation du Rassemblement national, si elle s’avère réelle, sera forcément une bonne chose pour la Gauche historique. Elle ouvrira à nouveau l’espace qu’elle a odieusement abandonné au nationalisme.

Le prix à payer en revanche sera très cher, car il y aura forcément une radicalisation très forte de la Droite, qui va chercher à avancer tel un rouleau compresseur dans le contexte de crise, pour non plus séduire les classes populaires, mais les annihiler puis les écraser.

Il y a là probablement une nouvelle phase politique qui se dessine en France, et il s’agit d’être à la hauteur. La fin du « rêve » national-social en mode Hénin-Beaumont est une occasion à ne pas rater, mais il va falloir travailler dur pour être à niveau.

Car la Gauche historique part de loin, de très loin, et il y a toute à reconstruire. Et ce n’est pas avec le populisme de La France insoumise et son racolage lamentable sur le racisme et l’immigration qu’on arrivera à quelque-chose.

Il va falloir une sévère remise en cause, à tous les niveaux, pour se mettre à la hauteur des exigences. Cela va être rude, très rude, et dans un contexte toujours plus explosif. Cela va être un grand déchirement intérieur !

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Politique

Appel: «Nous, les Hauts-de-France !»

Voici un appel salutaire pour l’Union de la Gauche pour les Hauts-de-France aux élections régionales de mars 2021. Certains y verront avec regret l’absence d’une écologie tournée vers les animaux (et pas seulement réduite à la question de la limitation des rejets de CO2), d’autres esprits chagrins diront avec justesse sans doute que l’Aisne, l’Oise et la Somme cela a un nom : la Picardie.

Cela étant, c’est une initiative unitaire qui, si elle parvient réellement à porter quelque chose, serait une contribution réelle pour aider la Gauche à sortir du pétrin dans lequel elle est.

« 🥁 NOUS LES HAUTS-DE-FRANCE !

Nous les Hauts-de-France est un mouvement de citoyennes et de citoyens qui souhaitent ouvrir une nouvelle ère pour notre région. Venus de l’Aisne, du Nord, de l’Oise, du Pas-de-Calais et de la Somme, nous mettons en commun nos richesses, nos expériences et notre désir d’action pour être les moteurs de la transformation économique, écologique et démocratique qui redonnera aux Hauts-de-France la première place dans la France du XXIème siècle !

📢 NOTRE APPEL :

Des cités populaires aux grands ports du Nord, du cœur des métropoles aux territoires frontaliers, de la Baie de Somme aux plaines agricoles et au bassin minier, des bords de l’Escaut, à ceux de l’Aisne et de l’Oise, nous sommes fiers de notre région, les Hauts-de-France, de son histoire plurielle, souvent meurtrie, et de sa culture singulière, toujours chaleureuse.

Nous appelons à l’unité de projet et d’action pour changer son avenir qui s’assombrit.

Il n’est de richesse que d’hommes. Pourtant notre région est frappée d’une crise de vitalité : elle se vide et se dépeuple. Alors qu’elle comptait plus de 6 millions d’habitants en 2015, les Hauts-de-France sont désormais en voie de rétrécissement avec une population totale qui est passée sous les 6 millions d’habitants et qui perd, cette année, sa troisième place au niveau national en termes démographiques. Les territoires ruraux sont les premiers touchés. La faute à une politique régionale qui a négligé l’attractivité économique, environnementale et culturelle et a laissé partir nos talents.

Notre région est en mauvaise santé. Elle est malade de la pollution de l’air, des sols et des sous-sols. Naître dans les Hauts-de-France c’est, aujourd’hui, avoir l’espérance de vie la plus faible de tout l’Hexagone. En rupture avec les majorités précédentes, aucune politique de santé d’envergure n’a été mise en place durant cinq ans à l’échelle régionale pour lutter contre cette mortalité précoce. La prévention est faible, les déserts médicaux s’étendent, les maternités ferment, les hôpitaux sont saturés et la région regarde ailleurs.

Notre région continue de souffrir, plus que d’autres, d’un chômage massif et de taux records de précarité et de pauvreté, dévastateurs pour la cohésion sociale. Dans ce domaine le Président de Région semble faire mais en réalité fait semblant. La politique de la région en matière d’emploi est une gabegie financière et un échec économique. Gabegie financière car la région a dupliqué, sans aucune coordination et sans résultat probant, le service public national de l’emploi en créant un avatar régional de Pôle emploi. Proch’emploi c’est Pôle emploi en moins : pas d’accompagnement des demandeurs d’emploi, une simple mise en relation et un nombre de retours à l’emploi au niveau régional artificiellement gonflé par des entrées nombreuses en contrats d’apprentissage courts et donc peu professionnalisants. La région ferait mieux de promouvoir des solutions innovantes comme, par exemple, un outil bancaire public régional finançant des projets utiles créateurs d’emplois, à partir de critères écologiques et sociaux forts. Dans le même temps, la formation initiale a été délaissée avec notamment un sous-investissement de la région dans les lycées.

Notre région a aussi été privée d’ambition écologique alors même que les Hauts-de-France devraient être l’avant-poste d’une écologie sociale exigeante et populaire. Exigeante car la reconstruction écologique du pays implique de mettre la région au travail pour assurer la bascule dans un monde sans carbone. Populaire car l’écologie du quotidien c’est celle qui libère les habitants de la région des embouteillages sur leur trajet domicile-travail en leur offrant des solutions de transport en commun publiques, riches et diversifiées et en réduisant drastiquement le nombre de camions sur les routes par le ferroutage et le transport fluvial. C’est aussi celle qui permet de faire baisser la facture de chauffage par la rénovation thermique des logements et qui assure à tous une alimentation saine et de qualité. C’est enfin celle qui encourage le « vivre et travailler au pays » par le recours au télétravail, négocié avec les salariés, en assurant le financement de la construction d’espaces de travail partagés publics à proximité du lieu de résidence.

Nous, élus, citoyens volontaires, femmes et hommes libres, nous refusons que notre région continue de s’effacer et soit prisonnière de dogmes libéraux et d’un modèle de pensée, de gouvernance et de gestion périmés. Nous voulons redevenir la locomotive du pays, une région exemplaire pour son excellence sociale, environnementale, culturelle, numérique. Une région qui mise sur ses atouts et notamment son industrie mise en action pour accompagner les transitions à venir.

Nos priorités sont claires. Il s’agit de surmonter la crise sanitaire, économique et sociale issue de l’épidémie de la COVID-19, d’éviter la catastrophe climatique et d’empêcher le grand bond en arrière démocratique que constituerait la conquête de notre région par le Rassemblement national.

Pour ce faire, nous nous engageons dans la création d’un mouvement citoyen, de la gauche et de l’écologie, unitaire, qui portera les espoirs d’une reconstruction environnementale et sociale aux élections régionales de 2021 et permettra le dépassement des rivalités de personnes.

Nous les Hauts-de-France ! sera le lieu de l’enthousiasme collectif, du travail civique, du débat et de l’action pour l’avenir de notre Région et de ses habitants.

Rejoignez-nous !

✍️ LES PREMIERS SIGNATAIRES :

Thierry AURY (PCF, 60), Eric BOCQUET (PCF, 59), Jean-Louis BRICOUT (PS, 02), Thierry BROCHOT (EELV, 60), Rémi Cardon (PS, 80), Dominique CLINCKEMAILLIE (EELV, 60), Damien Carême (EELV, 59), Delphine DAMIS-FRICOURT (Generation.s, 80), Marie-Laure DARRIGADE (LFI, 60), Yves DAUDIGNY (PS, 02), Karima Delli (EELV, 59), Antoine DETOURNE (Generation.s, 62), Vincent DHELIN (EELV, 59), Jean Bruno GORNY (citoyen engagé à Hénin-Beaumont, 62), Frédéric FAUVET (militant associatif, 80), Martine Filleul (PS, 59), Brigitte Fournié-Turquin (EELV, 02), Aurélien GACK (LFI, 62), Aurélien GALL (PCF, 02), Michelle Greaume (PCF, 59), Jacky Hénin (PCF, 80), Thomas Hennequin (PS, 02), Patrick Kanner (PS, 59), Benjamin LUCAS (Generation.s, 80), Roxane LUNDY (Generation.s, 60), Christian MANABLE (PS, 80), Bastien MARGUERITE (PS, 62), Alain MOREAU (Responsable associatif, 02), Alexandre Ouizille (PS, 60), Fabien Roussel (PCF, 59), Laurence Rossignol (PS, 60), Émilie THÉROUIN (EELV, 80), Marine Tondelier (EELV, 62), Karine TROTTEIN (PCF, 59), François VEILLERETTE (militant écologiste, 60), Sarah ZEROUALI (citoyenne engagée dans une association étudiante d’accès aux droits, 59).

➜ Découvrez notre l’appel et les premiers signataires :
https://nousleshautsdefrance.fr/ »

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Société

Troublante fin de saison au RC Lens, filmée dans un documentaire (la magie du football a-t-elle disparu?)

L’Équipe a diffusé sur sa chaîne télévisée un documentaire sur le RC Lens, club majeur et souvent très apprécié dans le football français en raison de son identité ouvrière. Durant quatre épisodes est montrée la vie du club de l’intérieur lors de la saison 2019/2020, qui s’est terminée dans les circonstances que l’on sait avec le confinement.

Ce qu’on y voit est forcément intéressant quand on aime le football et la culture populaire en général, mais n’a somme toute rien d’extraordinaire. On suit surtout des bourgeois dirigeants le club à la manière de bourgeois, faisant semble-t-il de leur mieux alors que les précédents dirigeants ont été désastreux. C’était en quelque sorte une anomalie que ce club soit en deuxième division et cela apparaît comme une réussite bienvenue de le voir à nouveau en Ligue 1 la saison prochaine.

Tel n’est cependant pas le principal intérêt du documentaire, qui nous rappelle surtout de manière particulièrement saisissante comment s’est finie cette saison de football en France. C’était il n’y a pas longtemps, mais cela paraît une éternité tellement il s’est passé quelque chose d’immense, d’inimaginable, de particulièrement historique.

La société française a été littéralement figée, du jour au lendemain, en raison du confinement qui était le dernier recours afin d’endiguer la vague épidémique de Covid-19, particulièrement alarmante. Le ciel est tombé sur la tête d’à peu près tout le monde en cette moitié du mois de mars 2020 et le football n’a bien sûr pas échappé à l’impératif sanitaire.

Le RC Lens était alors deuxième de Ligue 2, ayant même joué son dernier match à huis-clos en raison des premières mesures sanitaires. C’était là un premier « drame », car à ce niveau, le football sans supporters n’est plus vraiment la même chose… Et inversement, pour les supporters, le football sans le stade, ce n’est plus vraiment le football. Même quand on ne va pas au stade soi-même, un match à la télévision avec un stade vide, cela n’a aucune saveur.

Avec le confinement, le championnat a été suspendu puis la fin de saison décrétée, probablement à juste titre contrairement à ce qu’il s’est fait dans d’autre pays où les matchs sont joués sans public, pour finir « administrativement » la saison. En France, les classements ont été figés et le RC Lens s’est vu officiellement promu en Ligue 1 (et le Amiens SC a été honteusement poussé vers la Ligue 2). Mais une promotion sans supporters qui la fêtent, sans envahissement de terrain, sans défilé des joueurs dans la ville, sans salves d’applaudissement et autres manifestations d’une joie démesurée, quel sens cela-a-t-il ? Est-ce toujours ça, le football ?

Les images du documentaire montrant cela sont saisissantes… car justement il n’y a pas d’images. On a juste des rues lensoises désespérément vides et une promotion sportive qui s’avère n’être plus qu’une formalité comptable. Le supporter suivi toute la saison par le documentaire est ému par le titre, mais depuis son portable dans son salon. Pareil pour le président du club ou les joueurs intervenants. L’émotion est là, mais précaire, pas forcément forcée, mais semblant fortuite.

Et c’est là qu’on se demande : la magie du football a-t-elle disparu ? On est maintenant au mois de juillet et, donc, cette promotion du RC Lens en ligue 1, qui pourtant n’est pas quelque chose d’anodin, n’est pas fêtée, ne pourra pas être fêtée. Et si ça l’est, ce sera trop tard, formel, administratif, sans âme.

Il faut en dire de même d’ailleurs pour le titre de champion d’Angleterre du Liverpool FC, club extrêmement populaire localement ainsi que de part le monde, dont le titre était attendu depuis trente ans. Les matchs ont repris en Angleterre, sans public, avec tout un protocole sanitaire. Les « reds » ont obtenu le titre sportivement peu après la reprise, mais l’entraîneur est contraint de dire aux supporters de rester à la maison et que le titre sera fêté comme il se doit quand cela sera possible… Mais tout le monde sait que ce ne sera pas pareil. Il y aura forcément dans cette célébration, si tant est qu’elle ait lieu, une froideur, un décalage. Il manquera quelque-chose, un quelque-chose qui ne se décrète pas, qui est insaisissable et s’envole rapidement. Ce n’est probablement pas pour rien que « Liverpool » a complémentent manqué son premier match après l’officialisation de son titre, en s’inclinant presque honteusement 4 à 0 face à son dauphin, le Manchester City FC.

Quelque-chose a disparu, et ne reviendra probablement jamais, ou en tous cas pas comme avant. Parce que le football, particulièrement en Angleterre, est censé toujours être là, s’imposer à tout, à tous les accidents de la vie. On divorce, on perd un proche, son travail, une région est sinistrée économiquement, etc.… mais le club lui est toujours là. Malgré les défaites, malgré les joueurs, les entraîneurs et les dirigeants qui vont et viennent.

Ce qui est vrai en Angleterre est vrai pour tous les clubs dans le monde, forcément marqués par l’approche anglaise, au moins en partie. C’est vrai au RC Lens, ne serait-ce que par la physionomie de son stade, mais aussi par l’état d’esprit de ses supporters. D’ailleurs, si la frange la plus organisée et déterminée des supporters lensois relève au sens strict de la culture « ultra », d’influence italienne, cela n’est pas aussi franc quand dans d’autres clubs en France. L’influence anglaise, de type « Kop », est beaucoup très preignante dans le stade. Pour faire simple, disons que les « ultras » ont une approche unilatérale, s’inscrivant directement dans le jeu et se devant d’être « toujours présent », de ne jamais critiquer l’équipe pendant un match. Cela a sa dignité, mais c’est différent de l’approche « Kop » à l’anglaise, beaucoup plus festive, faisant plus facilement la différence entre le club (une identité d’ordre éternelle) et l’équipe sur le terrain, qu’on peut critiquer pendant le match, ou juste regarder sans applaudir ni chanter quand il n’y a pas d’emballement.

Toujours est-il que, pour les « Kop » ou les « ultras », ou pour le supporter lambda, le football relève d’une certaine magie, dans le sens où cela transcende la raison immédiate. Cela correspond d’ailleurs à toute une époque, commencée au milieu du XIXe siècle.

Cette « magie », aussi longtemps mise de côté depuis le confinement, pourra-t-elle réapparaître ? A-t-elle d’ailleurs vraiment existé ? Ou n’était-elle finalement qu’une belle illusion… ?