Catégories
Politique

Les réactions à la proposition de fédération populaire par Jean-Luc Mélenchon

Plusieurs personnalités liées à la Gauche ont réagit à la proposition faite par Jean-Luc Mélenchon de créer une fédération populaire. Les réactions sont dans l’ensemble mitigées, car tout le monde ou presque a compris qu’il s’agirait surtout d’un « rassemblement » autour de sa propre personne.

Le Premier secrétaire du Parti socialiste a bien résumé le sentiment général à Gauche sur la proposition du leader de la France insoumise :

« C’est « Je veux bien rassembler mais sur mes bases et derrière moi ». Et c’est comme ça qu’on n’y arrive jamais ».

Olivier Faure a également considéré que c’était d’abord « un aveu d’échec » de la part de  celui qui avait initialement refusé « l’idée même de rassembler la Gauche ».

Selon lui, le député insoumis considérait auparavant « qu’il n’était pas de la Gauche mais du peuple », ce à quoi il a répondu :

« la Gauche, ça n’est pas le populisme, ça ne le sera jamais. Jamais. Cela suppose de sa part qu’il fasse ce pas-là et qu’il abandonne cette idée folle du populisme de gauche ».

Olivier Faure considère par ailleurs que le Parti socialiste fait la démarche de l’unité pour les élections européennes en présentant Raphaël Gluksman et que cela fonctionne, tout en regrettant qu’il y ait actuellement une « offre divisée ». C’est un raisonnement qui peu paraître absurde, car cela revient à se féliciter d’une situation tout en regrettant qu’elle n’existe pas.

Il faut cependant comprendre que le Parti socialiste considère être toujours la force centrifuge de la Gauche. Il imagine pouvoir rassembler à nouveau après ces élections, ce qui couperait de fait l’herbe sous le pied de Jean-Luc Mélenchon :

« Il y a déjà une progression, qui n’est pas suffisante, et nous devons viser un score qui nous mettent dans une situation où nous puissions, demain, être à nouveau en mesure de rassembler et d’être un pôle de stabilité à gauche. »

Le sénateur et secrétaire national en charge des relations extérieures du Parti socialiste Rachid Temal est allé dans le même sens qu’Olivier Faure, en critiquant l’exclusion de fait du PS par la France insoumise :

« Mélenchon dit « Je veux discuter avec la Gauche », mais ne veut pas des partis et met des oukases sur le PS  ! »

Le candidat Raphaël Glucksmann a pour sa part considéré qu’effectivement, « la gauche ne pourra être une offre crédible que si elle se réunit », mais qu’il faut d’abord avoir des discussions de fond, en assumant les divergences de chacun. On comprendra que cela revient là aussi à critiquer le populisme de Jean-Luc Mélenchon, qu’il avait d’ailleurs qualifié quelques jours avant de « Thatcher de gauche ».

De son côté, le tête de liste du PCF aux Européennes Ian Brossat a eu une position plus mesurée, mais néanmoins sceptique. Il a considéré qu’il était d’accord sur l’idée de se reparler à Gauche après les Européennes, mais que pour autant « personne ne peut jouer les gros bras ».

Le secrétaire national du PCF Fabien Roussel n’a pas réagit publiquement, ou alors très discrètement et cela est passé inaperçu. Rappelons qu’il expliquait au mois de février dernier discuter toutes les semaines avec Jean-Luc Mélenchon « pour lui demander de se détendre un petit peu, qu’on puisse trouver les contours d’un rassemblement ensemble », précisant que cela ne « veut pas dire forcément fusionner dans des listes ».

Benoît Hamon a pour sa part répondu longuement à la proposition de fédération populaire, dans un entretien également à Libération dès le lendemain. Il a considéré cela comme un « geste d’unité » pris très « au sérieux ».

Sa position est néanmoins compliquée à comprendre. Il explique qu’il faut une unité face au danger que représente l’extrême-droite, sans parler du fait que justement Jean-Luc Mélenchon n’aborde jamais le sujet de l’extrême-droite dans son long entretien.

> Lire également : Jean-Luc Mélenchon rejette le principe de Front populaire et appelle la Gauche à suivre sa démarche

Les propos de Benoît Hamon sont de gauche, avec un héritage évident de la tradition du Front populaire :

« Je vois la colère partout. L’alternance la plus naturelle aujourd’hui, c’est Marine Le Pen. Je me refuse d’user de cette situation avec cynisme comme le fait Emmanuel Macron en polarisant le débat entre lui et le Rassemblement National. Je préfère apporter des réponses positives aux inquiétudes des Français. Pour ce faire, il nous faut une gauche forte. Le drapeau est aujourd’hui à terre, relevons-le. »

Il semble cependant céder à la panique, en oubliant l’analyse de fond en raison d’un danger imminent, ce qui est forcément un grave erreur. Il dit en effet :

« Alors à tout prendre entre le désastre annoncé et un geste d’unité je préfère prendre acte de ce geste d’unité et le prendre au sérieux. Après tout, le fair-play, c’est peut-être contagieux. »

Il ne semble pas avoir vu que Jean-Luc Mélenchon n’était pas du tout dans une optique de Front populaire face à l’extrême-droite.

Le secrétaire national d’Europe Écologie-Les Verts David Cormand a lui très bien vu que la question se posait par rapport à l’extrême-droite et que le « peuple de gauche » ne considérait pas le leader de la France insoumise comme étant un opposant à l’extrême-droite :

« Mélenchon le fait maintenant parce qu’il est en difficulté politique, interne, et dans les sondages. Il voit bien que le peuple de gauche qui lui avait accordé sa confiance à la présidentielle considère moins que c’est lui qui peut offrir une alternative aux libéraux et aux fachos ».

Finissons par Yannick Jadot, tête de la liste Europe Écologie-Les Verts, qui pour le coup assume totalement de ne plus être de gauche. Il a répondu qu’il fallait totalement rejeter la question de l’unité de la Gauche :

« J’ai noté qu’après m’avoir tapé dessus, il était favorable à l’économie de marché, finalement. Il est vrai que l’économie chez Maduro, l’économie des sovkhozes, ça ne fait pas rêver. Le problème de Mélenchon, Faure, Hamon, Glucksmann est que le pôle socialiste a explosé. Ils utilisent l’écologie pour essayer de masquer leur rupture. Ils disent tous : il faut recomposer la gauche derrière moi.

Moi, mon sujet, c’est qu’un projet écologique et solidaire gagne en Europe et dans ce pays. Je n’ai jamais été socialiste, trotskiste ou communiste, je n’ai toujours été qu’écologiste. J’ouvre portes et fenêtres aux citoyens qui ont compris que la lutte contre le dérèglement climatique était la mère de toutes les batailles et qu’elle pouvait être un formidable levier de justice sociale. »

Il rejette de ce fait totalement la proposition Jean-Luc Mélenchon, le considérant presque ouvertement comme un équivalent de Marine Le Pen (alors que lui-même est un équivalent d’Emmanuel Macron) :

« Non, ça ne m’intéresse pas. Jean-Luc Mélenchon a des convictions, une colère, une indignation par rapport à l’injustice sociale que je peux partager. Mais il a une conception de la démocratie qui n’est pas la mienne. Il passe son temps à brutaliser le débat politique, moi je veux apaiser notre pays. Il se place dans une logique national-étatiste, moi je veux une France beaucoup plus décentralisée, régionalisée.

Je crois fondamentalement que l’Europe, malgré ses défauts, est une formidable aventure, qu’elle est notre horizon civilisationnel. Il a quelques ambiguïtés avec Maduro et Poutine. Nous les écologistes, combattons toutes les dictatures, de droite, de gauche, où qu’elles soient. Nous devons à nos enfants une Europe des libertés, qui reconnaît à chacune et chacun sa dignité, ses identités multiples. Nous leur devons un avenir bienveillant dans lequel ils se projetteront avec confiance. »

Catégories
Politique

Parti socialiste : lettre pour l’unité contre Emmanuel Maurel

A l’occasion de la candidature de Luc Carvounas, Stéphane Le Foll et Olivier Faure au poste de secrétaire du Parti socialiste, des élus et des membres de la direction de ce dernier ont signé une « lettre pour l’unité ».

L’initiative part de Rachid Temal, coordinateur du Parti socialiste et représente le courant dominant de ces dernières années, liées à François Hollande. Cet appel à l’unité est, en ce sens, en fait un appel à battre un autre candidat, Emmanuel Maurel, qui représente le courant Maintenant la gauche, qui vient justement de publier un document exprimant sa lligne politique : L’ambition de gagner.

Lettre pour l’unité

Cher Luc, cher Olivier, cher Stéphane, Nous nous adressons à vous en cette veille de congrès car, membres de la majorité sortante comme vous, nous voulons vous transmettre un message.

Nous recevons vos candidatures séparées comme un engagement parce que notre parti, après les défaites historiques qu’il a subies, a besoin de débats, de réflexion et d’abnégation.

Vos initiatives démontrent que des hommes et des femmes pensent encore que notre histoire commune doit continuer pour la Gauche et pour la France. Ceci ne sera possible qu’au terme d’un profond renouvellement.

Si vos candidatures ont provoqué un regain d’attention pour le PS, elles ne peuvent porter que sur le fond et ne doivent pas se transformer en conflit de personnes qui nous ont tant abimés. Nous ne pouvons plus nous le permettre. Le pays a besoin de la Gauche parce qu’il n’est pas sain, pour une démocratie, que l’opposition ne soit portée que par les extrêmes. Sans la gauche, la France n’est plus la France.

Dans un monde incertain, où Trump, Poutine et d’autres illustrent par leurs politiques à quel point la démocratie n’est jamais acquise, le besoin d’Europe et d’une France debout est fort pour humaniser la mondialisation en œuvrant à un développement solidaire et à la paix.

Au moment où le Président de la République veut s’identifier au centre pour ne pas assumer sa politique libérale et Jean-Luc Melenchon veut incarner le peuple contre les élites, seul le PS peut rassembler la gauche. Nos militants et électeurs qui nous font encore confiance attendent beaucoup de nous. C’est pourquoi nous voulons réaffirmer quelques principes, avant l’ouverture de ce débat.

Un certain Parti socialiste est mort dans les urnes en 2017. Une certaine façon de faire de la politique doit bel et bien être enterrée. L’exigence, la sincérité et surtout l’utilité du PS, sa capacité à être humble et en résonnance avec les grands enjeux de société, voilà ce que le pays attend de nous pour pouvoir à nouveau redevenir audible et crédible. Les motions que vous présenterez, leurs analyses et les propositions que vous ferez nous aideront à comprendre ce qui vous distingue sur le fond.

Mais nous voulons vous rappeler un engagement commun : si le prochain congrès doit engendrer un profond renouveau, il ne peut le faire en rompant avec la culture de gouvernement qui est notre bien commun. Il faut mener un inventaire sérieux et lucide des cinq dernières années, au plan national comme au niveau européen.

Il nous faut tourner la page, nous rénover mais aussi assumer ce que nous fûmes au pouvoir. Si ce travail demande distinction et objectivité, on ne peut pas se contenter de la culture d’opposition. Nous avons tranché collectivement cette question.

Nous sommes et restons l’opposition de la gauche responsable. Chaque terme a son importance et son sens. Nous devons aussi travailler à l’autonomie du PS.

Aujourd’hui, aucune alliance politique ne s’impose. Emmanuel Macron construit une orientation de centre-droit, à vocation libérale et installe une autorité verticale toujours refusée par les socialistes.

Nous lui opposons une conception équilibrée de l‘économie, un refus du tout libéral, un renforcement de la solidarité, une décentralisation approfondie et un respect des corps intermédiaires.

L’actuelle crise structurelle du Front National met de côté, provisoirement, l’argument du vote utile face au risque frontiste, même si ses idées sont toujours violemment présentes dans le débat politique et ont dépassé depuis longtemps le cadre strict du parti d’extrême droite.

Quant à Jean-Luc Melenchon, touché par les sirènes populistes, il veut substituer un clivage élite/peuple au clivage gauche/droite, estimant les partis de gauche dépassés. Ne lui donnons pas raison !

Décider d’un type d’alliance, à cet instant de notre débat, reviendrait à nous subordonner, donc à disparaître. La rénovation avant les alliances devrait être notre ligne de conduite.

Cette démarche n’exclut ni les partenariats ponctuels sur certains sujets, ni une relation rénovée avec les autres femmes et hommes de gauche. Nous voulons le rassemblement du peuple de gauche et nous pensons être les seuls à pouvoir pratiquer le et – et : et ceux qui ont voté Macron, et ceux qui ont voté Melenchon et ceux qui se sont abstenus.

Le PS est encore le seul parti à pouvoir proposer ce rassemblement des électeurs de toutes les gauches, y compris dans le cadre d’un débat ouvert et constant au sein de la Gauche. Nous devons procéder de nous-mêmes mais aussi parler à ceux que nous avons déçus et que d’autres ont trompés Nous voulons également réaffirmer notre orientation.

Nous devrons aborder les élections européennes en européens et les élections municipales en décentralisateurs.

Pour cela, il faudra nous engager avec volontarisme et modestie, ne pas s’emballer pour un succès, ni se désespérer pour un revers, parce que la route de la reconstruction ne sera pas linéaire.

Nous vous proposons deux rappels :

– Le congrès qui s’ouvre n’épuise pas les sujets. Il faudra préparer, sous une forme renouvelée, ouverte et participative, les Conventions thématiques qui jalonneront notre reconstruction. Il nous faudra rajeunir, féminiser, représenter les territoires et prendre en compte la réalité sociologique de notre pays.

Notre Parti devra être décentralisé et ouvert. Il devra co-construire avec la société. Il faut un programme de travail dense avec le militant placé au coeur.

– Le Parti Socialiste a besoin d’une majorité claire, ce qui n’exclut pas la minorité. Mais, pour qu’il y ait un travail efficace, il faut que chacun inscrive son action dans un cadre prônant l’efficacité. Le travail en commun ne peut pas être la confusion. Le congrès d’orientation ne peut pas se rejouer sur chaque sujet en débat.

Nous souhaitons que, lorsque ce débat aura été arbitré par les militants, vous vous retrouviez sur les bases alors définies pour constituer une vraie majorité, car il n’y a pas de Parti renouvelé sans majorité assumée.

Premiers signataires : premier-es fédéraux, responsables nationaux et fédéraux ADOMO Caroline, ALARCON Antony, ASSARAF Christian, ARNAUD Samuel, AUGIER Florence, AZZAZ Nadège, AZOULAI Laurent, BERGOUNIOUX Alain, BLATRIX Florence, BRIEN Nicolas, BRUNSCHWIG Xavier, BODIN Nicolas, BOURGI Hussein, BOUAMRANE Karim, BORD Corinne, BRAUD Maurice, BROUSSY Luc, BRUEL Mickael, CANET Michel, CARREIRAS Joël, CLAVEQUIN Maude, CIOT Jean-David, CHANTRELLE Laurent, CHENUT Jean-Luc, CHEVALIER Fabien, COILLARD Stéphane, CONWAY-MOURET Hélène, COUMET Jérôme, DANEL Pierre, DESTOT Michel, DELBOS Olivier, DIOP Dieyneba, DOUCET Philippe, ELKOUBY Eric, FABIANO Patrice, FAGES Marie-Laure, FILLEUL Martine, FINIELS Philippe, FOUILLERE Christophe, GAGNAIRE Franck, Brice GAILLARD, GELLY-PERBELLINI Michel, GERARDIN Annie, GINER Bernard, GUUDUBOIS Elisabeth, GLOANEC-MAURIN Karine, GROSNON Thierry, GUERRIEN Marc, GUILLAUME Sylvie, HADIZADEH Ayda, HARQUET Philippe, HOFFMANN-RISPAL Danièle, IBARRA Stéphane, JEAN BAPTISTE EDOUARD Léon, JOUBREL Yannig, KHADEMI Antoine, LIME Catherine, LE CONSTANT Philippe, LE GARREC Alain, LE MEAUX Vincent, LE MOËL Annaig, LEPRÊTRE Marie, LEPRETRE Patrick, LIOUVILLE Jean-Pierre, MATHELIER Guillaume, MAALOUF Rita, MARECHAL Denis, MAUPAS Valérie, MESSAFTA Lies, MEYSEN Felix, MOINE Philippe, NARASSIGUIN Corinne, NICOLLET Eric, NIEPCERON Loïc, NEUGNOT Michel, ORAIN Frédéric, OUMER Nawel, PAPOT Jean-François, PESCHEUX Victor, PICARD Maxime, POLSKI Olivia, RECALDE Marie, REVAUL D’ALLONES-BONNEFOY Christine, RISPAL Gérard, ROULY Nicolas, ROUILLON Christophe, ROY Isabelle, ROZE Christophe, SAYER Ghislain, SAW Fatoumata, SEVE Patrick, SFEZ Nicolas, SADOUN Marc, SOUMARE Ali, VALENTI Paola, TEMAL Rachid, THOMAS Jean-Jacques, TRIJOULET Thierry, TRIGANCE Yannick, TYSSEYRE Jean-Michel, VIEU Patrick, VENON Boris, VERON Vincent, VINCENT Bernard, WOLF Romain