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Compte-rendu bilan du Référendum pour les Animaux

La proposition d’un Référendum pour les Animaux a échoué, voici un compte-rendu de ce qui s’est passé, pour tracer un bilan.

Pourquoi le Référendum pour les Animaux est-il un échec ?

La raison de l’échec tient à ce que cinq mois après son lancement, la proposition de ce référendum n’a réussi à obtenir que 145 signatures de parlementaires sur les 185 nécessaires pour la validation par le Conseil Constitutionnel.

Il ne sera pas possible d’en obtenir plus et l’initiative s’arrête là, malgré qu’un million de personnes aient apporté leur signature de soutien sur le site officiel.

Qui a eu l’idée de proposer un Référendum pour les Animaux ?

La présentation de l’idée a été prétexte à une scène assez pittoresque. En février 2020, des représentants de quasiment toutes les associations de protection animale du pays ont été invitées chez un restaurateur parisien, dans le plus grand secret.

Ce furent alors le journaliste Hugo Clément, le chef d’entreprise Marc Simoncini (à l’origine du site de rencontre Meetic) et la spécialiste de la communication Jennifer Bierna qui présentèrent le projet.

Les représentants des associations furent évidemment très étonnés et comprirent immédiatement que la situation présentait un piège. Refuser, c’était mettre de côté quelque chose pouvant aider les animaux. Accepter, c’était suivre un projet aux contours flous mis par des gens extérieurs à la cause animale.

En quoi consistait la proposition d’un Référendum pour les Animaux ?

À la réunion de février 2020, il y avait cinq propositions devant servir de dénominateur commun aux représentants présents afin de leur forcer la main, en quelque sorte :

– Fin de l’élevage en cage à l’horizon 2025 et obligation pour les élevages d’avoir un accès plein-air à l’horizon 2040,

– Fin des élevages à fourrure à l’horizon 2025,

– Interdiction immédiate de la chasse à courre,

– Interdiction immédiate des spectacles avec animaux sauvages,

– Obligation d’utiliser des méthodes alternatives à l’expérimentation animale « lorsqu’elles existent ».

Quel est le rôle des milliardaires dans le Référendum pour les Animaux ?

Pour compliquer encore plus la situation, il n’y avait pas que le chef d’entreprise Marc Simoncini à la manœuvre. Il y avait également deux milliardaires :Jacques-Antoine Granjon (vente-privee.com) et Xavier Niel (Free).

Tout partirait d’une initiative de ce dernier. Sa naissance est contée ainsi : révolté par des images de maltraitance animale et convaincu par des amis, Xavier Niel se mit à chercher les leviers à sa disposition pour changer les choses. Son choix se porta alors sur le Référendum d’Initiative Partagée, dont la possibilité était née un an auparavant. En quête d’un partenaire pour porter le projet devant le public, le nom d’Hugo Clément lui fu suggéré par ses enfants. Les mesures, elles, furent choisies sur la base de sondages : seules celles comptant plus de 80% d’opposition dans le grand public furent retenues.

Au-delà du conte, on peut en tout cas constater que les milliardaires n’ont strictement rien apporté à part une petite aide technique. Ils n’ont pas apporté d’argent, ils n’ont pas apporté de moyens et même leurs contacts se sont avérés peu efficaces et réalisés sur le tas.

Il n’y avait pas d’intention machiavélique, plus une sorte d’attirance à l’américaine de milliardaires s’imaginant une fonction sociale dans le cadre de leurs activités. D’ailleurs, à la toute fin novembre il fut annoncé que Xavier Niel se lançait sur le marché agro-alimentaire « bio et durable ».

Pourquoi avoir accepté une telle proposition de leur part ?

Il faut bien comprendre le dilemme vécu alors par les représentants présents. D’un côté, une telle proposition de tels gens était pour le moins surprenante. De l’autre, la situation des animaux est tellement catastrophique qu’il y avait là peut-être un levier pour faire avancer les choses, surtout s’il y avait une unité imposée par les faits.

Les représentants d’une association internationale de protection de l’environnement très connue, présente dans une cinquantaine de pays, exposèrent par exemple leurs doutes sur la crédibilité d’une telle démarche en collaboration avec de grands capitalistes, et ils se retirèrent. Mais ils pouvaient se le permettre alors qu’ils ont déjà plus de deux cent millions d’euros de budget annuel !

Les représentants des associations, tout en regrettant pour beaucoup l’anomalie qu’était l’absence du rejet de la corrida, décidèrent donc d’aller de l’avant pour voir ce qu’il en ressortirait. Il leur semblait pour les animaux qu’il n’y avait guère le choix et d’ailleurs tout le monde a réagi ainsi dans les associations, tout en attendant de voir.

Liste des associations sur le site du Référendum

Comment s’est passé le lancement du Référendum pour les Animaux ?

Prévue pour la fin mars 2020, l’annonce au public a plusieurs fois été reportée en raison de la crise sanitaire du Covid-19. Il y avait alors bien sûr la grande crainte que le projet ne soit plus lisible par l’opinion publique en raison d’une intense actualité occupant tous les esprits.

Dans cette intervalle, il y eut également des ajustements, avec beaucoup de discussions. Des mesures furent ajoutées au package, dont l’interdiction de la vénerie sous terre et de la chasse à la glu. Ces ajouts furent simultanés à l’arrivée de la Ligue de Protection des Oiseaux parmi les associations partenaires.

Il fut alors décidé de lancer coûte que coûte l’initiative, sans attendre septembre. En juillet 2020, il y a alors l’annonce qui s’est déroulé à la « Station F », la pépinière de start-ups appartenant à Xavier Niel.

Ce fut l’occasion d’une mauvaise surprise, puisque le CV de Jennifer Bierna, la « communicante » du projet, était particulièrement lourd. On pouvait lire sur la présentation fournie aux journalistes qu’elle avait été l’assistante de Bruno Le Maire, d’Eric Woerth, puis de Christophe Castaner, chargée de commission à l’UMP pendant la campagne de Nicolas Sarkozy… Bref, c’était une cadre de la droite éprouvée, qui officiait quelques semaines avant encore comme directrice de la communication chez Illiad, la maison-mère de Free.

C’était un premier problème majeur soulevant beaucoup de questions, mais devenant en même tout de suite très secondaire alors que le processus se lançait.

Quel a été l’impact du projet de Référendum pour les Animaux ?

De prime abord, l’impact médiatique recherché par les organisateurs a été relativement au rendez-vous. Les premières signatures de parlementaires tombèrent rapidement : en un mois, le site en comptait déjà une centaine.

Le groupe parlementaire ÉcologieDémocratie – Solidarité, qui venait de se créer avec des députés de La République En Marche, soutinrent notamment le projet comme un seul homme. Ce sont au total 88 parlementaires de la majorité (LREM, Agir, MoDem & EDS) qui signeront le RIP.

Le groupe La France Insoumise à l’Assemblée signa aussi à l’unanimité. Toutefois, à la demande de François Ruffin qui ne voulait pas être associé individuellement à l’initiative, il fut exigé que leurs noms n’apparaissent pas sur le site officiel, protégés par un unique logo de groupe.

En apparence, on avait donc une bonne base. En réalité, c’était là en trompe-l’œil. Ces forces étaient relativement marginales et avaient tout à gagner à se présenter sous un jour positif auprès des gens, alors qu’au niveau populaire il y avait un vrai soutien pour l’initiative. Les 500 000 soutiens sur le site dédié au projet furent rapidement atteints.

Comment sont apparus les premiers obstacles au Référendum pour les Animaux ?

Il faut bien comprendre ici que pour les représentants des associations, tout cela était déjà très bien. Former un écho dans la société pour les animaux était quelque chose d’incontournable dans une situation terriblement difficile. C’était déjà ça.

Mais évidemment, il y avait l’espoir d’aller plus loin. Il y a toutefois une énorme sous-estimation des forces traditionalistes-réactionnaires dans le pays. Pour les chasseurs, pour les éleveurs… bref pour tous ceux pour qui les animaux sont des matières premières ou des marchandises, le Référendum apparaissait comme une menace terrible.

Aussi faible qu’elle soit – on est très loin du véganisme évidemment – il y avait une charge démocratique œuvrant à pousser les choses dans un certain sens.

Les fédérations d’éleveurs et de chasseurs commencèrent alors, au milieu de l’été 2020, une véritable campagne de harcèlement des parlementaires dont le nom figure sur le site du RIP.

Fin juillet, ceux-ci reçoivent d’ailleurs un SMS venant de la Société de Vénerie leur indiquant que des noms auraient été ajoutés frauduleusement à la liste, pour semer le doute. Des fédérations de chasse publient des tracts et envoient des e-mails affirmant que le RIP entraînerait l’abolition des chiens d’aveugles, du miel ou de la pêche même non-léthale, etc.

Des rassemblements furent organisés devant des permanences d’élus signataires, comme celle de Caroline Fiat (LFI) en Meurthe-et-Moselle, le président de la fédération de chasse locale déclarant alors :

« Vous allez avoir la guerre dans les campagnes. On est venu aujourd’hui sans le monde des agriculteurs ou des forestiers. Mais ça va barder en France. Retirez votre signature, car, sinon, à mon avis, vous ne referez pas un second mandat. »

Le député de Nancy Laurent Garcia (MoDem) vit quant à lui sa permanence carrément vandalisée. Deux mois plus tard, les freins de son véhicule furent sabotés et il échappe de peu à un accident.

Comment sont apparus les seconds obstacles au Référendum pour les Animaux ?

Les activités des éleveurs et des chasseurs ont été très efficaces. Pendant toute une période, des désistements viennent chaque jour équilibrer le nombre de nouveaux signataires, et le total se trouve gelé juste avant la rentrée, autour de 140 noms.

Ce n’est en soi pas du tout étonnant et c’était tout à fait prévisible. Les gens de la protection animale savaient à quoi s’en tenir et ce dès le départ. Il va de soi que pour les milliardaires et Hugo Clément, tout cela apparaissait plutôt comme surprenant, car leur initiative vient de l’extérieur de la réalité du terrain.

Dans les faits, il y avait une véritable polarisation et d’ailleurs il y avait une attente pour que le référendum, une fois validée, serve de base à une véritable campagne d’envergure nationale.

C’est là qu’est apparue la seconde limite. Elle vint du Parti Socialiste. Celui-ci aurait dû tenir une réunion pour envisager une signature collective, comme à l’occasion du Référendum sur la privatisation des Aéroports de Paris l’année précédente.

Après quelques semaines, le premier secrétaire Olivier Faure finit toutefois par contacter les organisateurs : il ne donnait sa signature qu’à titre personnel, son parti refusait de soutenir l’initiative. Seuls cinq parlementaires PS sur 89 finiront par figurer sur la liste, soit même moins que les 8 signataires Les Républicains !

Pourquoi le Référendum pour les Animaux n’a-t-il pas su dépasser les obstacles par la Gauche ?

Le problème s’est posé de la manière suivante. Pour le Parti socialiste, il y avait trois blocages. Le premier, c’était la question des milliardaires à l’origine de l’initiative, mais ce n’était qu’un prétexte car il aurait été possible, en mettant son poids dans la balance, de changer la donne.

Le second, c’était justement que le centre de gravité du Référendum tenait aux associations pour les animaux, avec leur propre agenda, auquel le Parti socialiste ne comprenait pratiquement rien.

Le troisième, c’est que le peu de ce que le Parti socialiste saisissait de l’agenda des associations pour les animaux était inacceptable. Il y a eu une véritable vague d’opposition à la question animale de la part de gens totalement inféodés à l’idéologie de l’élevage, du terroir, à la France profonde avec ses préjugés, sa vision du monde rétrograde, etc.

Cela peut sembler étrange, car on parle là de gens se définissant de Gauche. Cependant, les valeurs de la Gauche ont été abandonnés au profit d’un libéralisme culturel associé à un conservatisme très violent concernant les animaux, avec en plus des considérations électorales populistes.

On peut retrouver tous ces arguments à travers deux articles du journal l’Humanité (12), très hostiles au Référendum pour les animaux et arqués sur des positions qui sonnent tout à fait comme des prétextes pour ne pas s’engager.

Le pendant de la Gauche gouvernementale, c’est l’ultra-gauche, mais là aussi il n’y avait rien à attendre comme soutien. Cette mouvance pro-LGBT, anti-islamophobie, etc. n’en a rien à faire des animaux, étant obnubilés par les questions purement « identitaires ».

Quant aux « antispécistes », très à la mode il y a quelques années encore, ils ont commencé à s’évaporer avant même la question du Référendum pour les animaux et de toutes façons batailler pour l’opinion publique ne les a jamais intéressés.

Pourquoi le Référendum pour les Animaux n’a-t-il pas su dépasser les obstacles par la Droite?

Il est bien connu qu’il y a des gens qui veulent aider les animaux mais qui face aux horreurs, face à un mur, bascule dans la misanthropie, dans le camp de l’extrême-Droite. Celle-ci prétend en retour vouloir améliorer le sort des animaux. C’est de la démagogie et on l’a vu dans les faits avec le Référendum pour les animaux. Il y avait un boulevard pour l’extrême-Droite et naturellement elle s’est bien gardée de quitter le terrain de la démagogie.

Pour l’extrême-Droite, ce fut comme si le Référendum pour les animaux n’existait pas, c’est dire même à quel point cela lui posait problème.

On peut même dire qu’en fait le Référendum pour les animaux posait des problèmes à tout le monde. Cela remettait trop de choses en questions : le rapport aux animaux, le rapport à l’agriculture, le rapport à la vie quotidienne, le rapport à la consommation, à la définition des marchandises…

C’était possiblement ouvrir la boîte de Pandore permettant une remise en cause générale. C’est bien pour cela que les milliardaires à l’origine de l’initiative ne se sont nullement investis réellement et n’ont rien investi pour faire avancer les choses.

La défaite arrange en fait beaucoup de monde. La proposition a donné l’illusion qu’il est possible d’essayer quelque chose, mais la porte a été refermée.

Quel est le bilan du Référendum pour les Animaux ?

Si l’on pose la question s’il a été juste de la part des associations de soutenir un tel projet, la réponse est oui. Elle a provoqué beaucoup de choses, une certaine prise de conscience, une volonté de faire quelque chose. Cela a montré que la surface est grande pour la Cause animale.

Il apparaît par contre que justement cette Cause est incapable de passer un stade : celui de l’organisation, de la réflexion prolongée. Le capitalisme a déformé les gens en général et les défenseurs des animaux également. L214 est un équivalent des gilets jaunes dans la cause animale, avec un style consommable, du populisme racoleur, une négation de l’intellect, etc.

De manière cohérente, cette association a d’ailleurs pesé de tout son poids pour essayer de faire converger le Référendum pour les animaux avec sa propre démarche. La proposition de Référendum avait en effet dans sa substance même une démarche tellement ouverte qu’elle inspirait et pouvait permettre aux gens de faire finalement un peu n’importe quoi n’importe comment, du moment qu’ils s’inscrivent dans ce cadre.

Et ce qui est flagrant, c’est que cette définition donnée par les milliardaires s’est heurtée à la réalité. La France profonde a dit stop. Il y a eu un mur et il est politique. Le capitalisme veut bien qu’on fasse ce qu’on veut, mais si cela aboutit à l’universalisme, il dit stop ; si cela aboutit à remettre en cause des pans entiers de l’économie ainsi que la forme même de la société humaine dans sa relation avec les animaux, il dit stop.

Il ne faut sans doute pas penser que les gens l’aient compris. C’est cependant une expérience importante qui servira d’exemple plus tard. Si le Référendum, avec ses revendications n’allant pas bien loin, s’est enlisée, quelle est la crédibilité d’une association comme L214 pour réussir là où le Référendum a échoué ?

Il est évident qu’il y a en réalité en France un problème de mentalités, de vision du monde, avec comme base le capitalisme qui diffuse le relativisme, maintient le conservatisme, tout en laissant un espace consommateur anecdotique aux végétaliens. C’est la fin d’une époque ; le Référendum pour les Animaux a accompagné l’insertion de la question animale dans le panorama du pays et sa place est simplement anecdotique.

Si l’on n’est pas d’accord avec cela, alors il faut mener la bataille culturelle ; il faut saisir en quoi il n’y a pas de « spécisme », mais un capitalisme destructeur engloutissant tout sur son passage ; il faut mettre au centre la vie naturelle, les refuges, les centres de soin. C’est là l’unité du particulier et du général et c’est exactement cela qui manque pour se mettre efficacement au service de la Cause animale.

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Vidéo «chasse à courre, les animaux traqués », par AVA

Dans le cadre de la mobilisation en vue d’obtenir un référendum pour les animaux, AVA a publié une vidéo sur la chasse à courre. De manière très simple et tout à fait efficace, il est rappelé en quoi consiste cette pratique et pourquoi elle est particulièrement barbare, arriérée. L’abolition de la chasse à courre fait partie des propositions du référendum pour les animaux.

 

 

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Le Parti socialiste va-t-il empêcher le référendum pour les animaux?

Au 18 août 2020, il manque 56 signatures de parlementaires pour lancer réellement le projet de référendum pour les animaux. Parmi ces signatures manquantes, il y a celles des parlementaires socialistes, qui s’alignent ici sur la Droite farouchement opposée à tout débat démocratique et populaire au sujet des animaux.

Le projet de référendum concernant six mesures en faveurs des animaux connaît une réelle dynamique, étant porté à la base par les associations de protection animale. Il a déjà obtenu le soutien de 500 000 personnes, ce qui est considérable puisque il n’y a eu pour l’instant aucune réelle campagne à destination du grand public.

Le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure, qui est député, a apporté sa signature à ce projet de Référendum d’initiative partagé en faveur des animaux. C’est une bonne chose, il a pris ses responsabilités. Mais il n’est pas suivi par son parti.

À l’Assemblée nationale, le groupe Socialistes et apparentés compte 28 membres, mais seulement 4 d’entre eux signent pour la possibilité d’un référendum : Olivier Faure donc, ainsi qu’Alain David, Régis Juanico et Marietta Karamanli. Merci à eux !

En ce qui concerne le Sénat, c’est pire. Le groupe Socialiste et républicain compte 71 membres, dont seuls 5 signent pour la possibilité d’un référendum : Corinne Féret, Bernard Jomier, Angèle Préville, Laurence Rossignol et André Vallini. Merci à eux !

Si l’ont fait les comptes, cela fait 65 sénateurs + 24 députés, soit 89 parlementaires liés au PS qui pourraient apporter leur signature. Et il n’en manque pour l’instant que 56, alors que le plein semble avoir déjà été fait ailleurs (LREM, écologistes divers, France insoumise, etc.)

Le Parti socialiste porte ici une responsabilité majeure en bloquant la possibilité du référendum (et avant cela de pétition citoyenne), qui représente pour tout le mouvement de la protection animale une occasion importante de s’adresser à la population française.

Que la Droite y soit opposée, c’est dans l’ordre des choses, car elle incarne par définition une hostilité au mouvement démocratique et populaire. C’est la raison pour laquelle Gérard Larcher, le président du Sénat, qui est une figure de la Droite, s’est illustré ces derniers jours par une lettre de soutien à la chasse, « notamment à la chasse aux chiens courants », dans laquelle il laisse sous entendre son opposition au référendum (tout en prenant les formes sur le plan constitutionnel).

La Droite, unie et cohérente dans ses choix, entend bien s’opposer à la protection animale et voit d’un très mauvais œil le référendum pour les animaux. Elle compte d’ailleurs dans ses rangs le Président Emmanuel Macron lui-même, défenseur de la chasse, à propos duquel le Président de la Fédération des chasseurs Willy Schraen relate souvent sa proximité et l’a encore fait très récemment. La Droite compte également dans ses rangs le ministre de la justice Eric Dupont-Morreti, lui aussi ardent défenseur de la chasse, qui préface un livre du Président de la Fédération des chasseurs, farouchement opposé au référendum.

Dans ces conditions, il est d’autant moins acceptable pour les parlementaires se revendiquant de la Gauche de refuser leur signature, car ils se mettent ici à la remorque de la Droite la plus réactionnaire, opposée à un mouvement populaire, celui de la protection animale.

Historiquement, il y a toujours eu de riches personnes soutenant les initiatives pour les animaux. Cependant, il faut bien voir que le mouvement de la protection animale est porté en pratique par une base extrêmement populaire, et particulièrement féminine. Il s’agit de personnes dont le dévouement pour les animaux est sans faille, malgré peu de moyens et une opposition souvent agressive.

Ne pas voir cela aujourd’hui, l’ignorer, c’est se mettre à l’écart de la Gauche, de sa tradition, de son parcours historique et de ses valeurs démocratiques et populaires.

Que les parlementaires socialistes aient des interrogations, des craintes, voire des réticences à propos des mesures ou de certaines mesures soumises par le référendum pour les animaux, c’est une chose. Cependant, le sujet est sur la table et il est porté par un mouvement populaire. Alors les parlementaires de gauche n’ont pas le choix : ils doivent assumer le débat démocratique et permettre le référendum, pour apporter ensuite leurs arguments.

> Lire également : Pourquoi donc le journal L’Humanité mène-t-il campagne contre le «référendum pour les animaux»?

En attendant, en continuant à refuser d’apporter leur signature, les parlementaires socialistes confisquent le débat. Ils porteraient une lourde responsabilité si le projet de référendum venait à échouer. Gageons que le « RDV de la Gauche d’après » organisé par le PS du 28 au 30 en guise d’université d’été soit un lieu d’échanges et de remise en cause pour les parlementaires qui s’entêtent à faire le jeu de la Droite la plus réactionnaire.

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Le ministre de la justice Eric Dupond-Moretti en duo avec le chef des chasseurs Willy Schraen

La nomination de l’avocat Eric Dupond-Moretti avait surpris, mais en dénonçant agressivement les anti-chasse, on a compris le sens du coup tactique par Emmanuel Macron.

Le Journal du Dimanche a depuis longtemps une orientation pro-Macron, comme quoi le groupe Lagardère l’apprécie particulièrement. Ce dimanche, le « JDD » a lancé une double offensive :

– une interview de Willy Schraen, le président des chasseurs, où celui-ci souligne sa proximité avec le régime ;

– la « révélation » que le ministre de la justice a écrit la préface d’un ouvrage de Willy Schraen prochainement publié, en prenant entièrement partie pour les chasseurs.

Le « JDD » n’a pas oublié deux choses, signe qu’il agit de manière commandée. Tout d’abord, il parle de l’affaire Elisa Pilarski, tuée en novembre 2019, en disant que les résultat des tests ADN sur les chiens seront disponibles fin août, en insistant bien que la famille d’Elisa Pilarski ne veut pas qu’on incrimine la chasse à courre en général.

Ensuite, il donne la parole aux organisateurs du « référendum pour les animaux » pour une petite tribune appelant à ne pas voir la démocratie se voir confisquée. C’est que la récolte des signatures pour la possibilité de ce référendum patine grave, la tribune constatant avec amertume qu’en fait le personnel politique est structurée à l’arrière-plan sans qu’on le sache :

« Nous nous étonnons que le président du Sénat assure, dans une lettre au président de la Fédération des associations de chasseurs aux chiens courants, que nous nous sommes procurée, son « attention quant à l’avenir que pourrait connaître » ce référendum. »

La naïveté des milliardaires ayant lancé cette idée de référendum – Xavier Niel (Free), Marc Simoncini (Meetic) et Jacques-Antoine Granjon (Veepee, ex-Vente-privee.com) – est ici assez surprenante. Elle tient sans doute à ce qu’il s’agisse de nouveaux bourgeois, né sur le terrain de la modernité technologique et coupé de la bourgeoisie traditionnelle.

Surtout que l’on sait désormais que le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, est ouvertement pro-chasse, lui-même pratiquant la « fauconnerie ». Dans sa préface à l’ouvrage de Willy Schraen, il y va fort, comme on l’apprend par le Journal du Dimanche : les tenants de défense des animaux seraient des « illuminés », des « intégristes », il s’agit d’un « extrémisme », les chasseurs doivent « relever la tête ».

En allusion aux autodafés nazisme et au barbecue de viande en même temps, Eric Dupond-Moretti dit même avec provocation que :

« Ce livre, les ayatollahs de l’écologie s’en serviront pour allumer le barbecue où ils cuiront leurs steaks de soja. »

Le « JDD » nous dit que ces propos datent d’avant sa nomination. Cependant, il aurait alors fallu bloquer la préface après que la nomination ait eu lieu. En réalité, il s’agit d’une annonce politique : les chasseurs peuvent y aller, les partisans de la défense des animaux vont se faire isoler et punir. On comprend qu’Eric Dupond-Moretti soit pour briser tout le système juridique : ce qu’il veut, c’est d’une « justice » aux ordres du régime, qui annonce où cogner.

Quant à Willy Schraen, qui publie donc « Un chasseur en campagne », ses propos dans l’interview au « JDD » sont assez typiques, c’est-à-dire subtilement politique, très doué tactiquement, et totalement réactionnaire, avec une propension à l’outrance et à la volonté de détruire. Bref, c’est du Willy Schraen.

La maîtrise est complète et le populisme total. Il dit ainsi plusieurs fois « nous les ruraux ». Le reste est à l’avenant : « la France rurale a l’impression d’être fortement humiliée », « on va maintenir la chasse à la glu » (quel que soit l’avis du gouvernement), « il ne faut pas donner [le ministère de] l’écologie aux écologistes », « Hulot a failli mettre le pays à feu et à sang », le référendum pour les animaux est un « totalitarisme de la rue », etc.

Son lyrisme est parfaitement rodé et soit l’interview a été retravaillée à de nombreuses reprises, soit c’est un fin orateur, d’esprit assez baroque il faut le dire :

« On est en train de créer un nouvel ordre moral, une sorte de tribunal populaire écologiste animaliste. Cette écologie ressemble à l’Inquisition. On veut nous crucifier.

Ces gens nous expliquent que l’animal et l’homme ne font qu’un. Je suis désolé mais le poisson rouge dans le bocal de mon fils, ce n’est pas mon frère. Dire qu’il faut un ministère de la Condition animale, c’est de la folie furieuse. »

Dénoncer l’Inquisition tout en faisant une allusion à la crucifixion du Christ juste après, cela demande un certain style. Et, donc, tout en niant un quelconque « pacte », Willy Schraen avoue avoir soutenu Emmanuel Macron aux élections européennes et avoir cherché à contrer les gilets jaunes.

Emmanuel Macron qui a nommé ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti, Eric Dupond-Moretti qui a écrit la préface de l’ouvrage de Willy Schraen avant d’être nommé. Willy Schraen qui connaît bien Emmanuel Macron. Tel est le nom de la nouvelle trinité : le Père Emmanuel Macron, le Fils Eric Dupond-Moretti et celui qui se veut Saint-Esprit : Willy Schraen.

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AVA: «La chasse à courre contre la démocratie»

Voici le communiqué d’AVA France, qui mène depuis plusieurs années un combat démocratique et populaire contre la chasse à courre. AVA est impliqué dans l’initiative du Référendum pour les animaux et dénonce ici l’attitude particulièrement agressive et anti-démocratique des chasseurs à courre voulant étouffer toutes voix n’allant pas dans leurs sens.

« ⚔️ LA CHASSE A COURRE CONTRE LA DÉMOCRATIE ⚜️

Depuis l’annonce du Référendum pour les Animaux, les tenants de la chasse à courre déploient tout l’arsenal qu’on leur connaît pour faire barrage à l’expression du peuple.

Sur les réseaux sociaux, les personnalités qui se sont prononcées pour cette initiative sont prises pour cible : Julien Courbet, Cauet, Pierre Niney, Nicola Sirkis, Nagui sont harcelés de messages injurieux sous leurs publications.
Les parlementaires qui ont choisi publiquement de soutenir le projet référendaire reçoivent quant à eux des SMS et des e-mails mensongers pour qu’ils retirent leur nom des listes. Quelques-uns hésitent désormais à se montrer. Mais malgré cette atmosphère, le nombre de soutiens dans la société civile et parmi les élus continue de grimper de jour en jour. Il ne manque plus qu’une cinquantaine de parlementaires pour déclencher le processus du Référendum d’Initiative Partagée ! 👍

La chasse à courre, pratique portée par une des franges les plus réactionnaires des classes dominantes actuelles, ne peut être abolie que grâce à une mobilisation massive de la population, d' »en bas », tellement les rouages de l’Etat sont pris dans la rouille des lobbies et le clientélisme des notables locaux. 🗣👥

C’est en tous cas l’option qu’a choisi AVA, plaçant une confiance totale dans la volonté de la population, accélérant son organisation. 📣

La route est peut-être encore longue, et les forces qui tiennent cette pratique détestée de tous encore vives. En Angleterre, dans les mois qui ont précédé l’abolition de la chasse à courre, des députés avaient du être placés sous protection policière suite à des menaces venant du monde de la vénerie. Soyons certains qu’ils nous réservent encore des choses ici aussi.

Cet épisode raconte un peu plus ce qu’est, et ce qu’aura été, la chasse à courre, ses valeurs et ce qu’elle aura représenté comme force sociale néfaste dans notre société.

Vivement l’abolition ! 🌳🏡👨‍👩‍👧‍👦

➡️ La situation vue par la presse : https://www.ladepeche.fr/…/les-defenseurs-de-la-chasse-a-co…
➡️ Pour suivre l’avancée du projet : https://twitter.com/RIPanimaux »

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Pourquoi donc le journal L’Humanité mène-t-il campagne contre le «référendum pour les animaux»?

Le journal L’Humanité a publié récemment une tribune, puis une interview, pour dézinguer le projet de référendum d’initiative partagé concernant six mesures en faveurs des animaux. La protection animale est refusée au nom du capitalisme agricole, avec le mythe réactionnaire de l’élevage « paysan ».

L’Humanité a publié une tribune le 21 juillet 2020 intitulée « Quand des prédateurs capitalistes se soucient du bien-être animal ». Elle est écrite par Gérard Le Puill, qui fait figure de monsieur agriculture au PCF où il écrit régulièrement à ce sujet dans la revue théorique « Économie et politique ».

Dans sa tribune, il se fait directement le porte-parole du capitalisme agricole français, refusant toute amélioration de la condition animale au prétexte de la concurrence mondiale :

« Supprimer seulement en France la manière tout en « case, box ou stalle » pour les veaux, agneaux, vaches et truies conduirait les metteurs en marché hexagonaux à importer des viandes de veaux, de porcs et autres élevés en « case » en « box » ou en «stalle » dans d’autres pays de l’Union européenne. Ce qui aboutirait, en même temps, à une réduction de l’emploi en France et à un déficit accru de la balance commerciale. »

Gérard Le Puill parle directement au nom de ce capitalisme agricole français, expliquant au sujet des œufs par exemple que « la filière est très engagée vers une sortie progressive du système de poules pondeuses en cage. » Pour cette raison, il faudrait la préserver de tout changement législatif et surtout pas que la population française donne son avis sur la question.

C’est, au sens strict, un argument capitaliste et c’est d’ailleurs celui que les industriels utilisent régulièrement en matière environnementale ou sociale. Avec un tel raisonnement, il ne faudrait pas lutter pour des augmentations de salaire ou la protection sociale, parce que les autres pays du monde ou de l’Union européenne ont de moins bonne pratique et font concurrence, il faudrait d’ailleurs ne jamais rien dire et même dire merci patron.

La question des accords commerciaux avec des pays exportateurs de viandes est bien sûr un véritable problème, mais cela n’est pas une raison pour refuser que les choses changent en France. Cet argument de la concurrence mondiale, utilisé de cette façon, n’est qu’un prétexte pour empêcher toute mesure en faveur des animaux.

Il y a à l’arrière-plan un point de vue profondément rétrograde, prétendant qu’il existerait encore en France une paysannerie élevant des animaux, alors que cela fait bien longtemps que les éleveurs sont des capitalistes et que ce secteur est ultra modernisé, considérant l’animal comme une marchandise.

Gérard Le Puill a donc beau jeu ici de dénoncer les « prédateurs capitalistes » à l’initiative du projet de « referendum pour les animaux », car il ne vaut pas mieux en proposant à la place de défendre les capitalistes utilisant les animaux à leurs profits.

Notons au passage que L’Humanité ne se pose pas autant de question sur les « prédateurs capitalistes » quand il s’agit de sponsoriser la « Fête de l’Huma », où on a pu voir ces dernières années un stand Groupe Dassault, propriété de la richissime famille capitaliste du même nom, exposant des avions de guerre.

Tout cela est fort dommageable pour les animaux. Et, donc, cet argument des « milliardaires » a été utilisé une nouvelle fois dans L’Humanité dans son édition du 31 juillet 2020 avec une interview de Jacqueline Porcher. Elle est sociologue à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (un organisme d’État servant le capitalisme agricole) et explique cette fois que les défenseurs des animaux… n’aiment pas les animaux !

Naturellement, l’initiative du projet de « référendum pour les animaux » vient des richissimes capitalistes Jacques-Antoine Granjon, Xavier Niel et Marc Simoncini, et on peut comprendre que cela ne soit pas attirant pour des gens de gauche. Cependant, ce n’est pas une raison pour raconter n’importe quoi en enfonçant les associations de protection animale embarquées dans la démarche.

> Lire également : Lancement du projet «référendum pour les animaux»

Le problème, c’est que Jocelyne Porcher ne croit pas en un monde meilleur, où l’humanité aurait un nouveau rapport avec les animaux, sans les exploiter, sans les martyriser, etc. Son modèle, c’est « l’élevage paysan » d’avant les « transformations du capitalisme au XIXe siècle », avec « des races locales en libre parcours et abattage à la ferme »… Dans le genre rétrograde, et surtout mensonger, difficile de faire pire.

Alors elle explique que ce projet de referendum accréditerait sa thèse selon laquelle « la cause animale est devenue celle du capital » (elle a écrit un livre à ce sujet). Forcément, défendre les animaux ne va pas dans le sens du retour au XIXe siècle qu’elle défend, et qui relève d’ailleurs bien plus du pétainisme que de la Gauche historique.

Du coup, elle raconte n’importe quoi, pour dénigrer. L’interdiction de l’expérimentation animale ? Cela ne servirait à rien car « c’est déjà dans la loi ». La mesure concernant les animaux de cirque ? Elle ne servirait à rien, car ceux-ci sont « en voie de disparition ». Et en ce qui concerne la chasse à courre ? Là encore, cela ne concernerait « que très peu d’animaux », donc ce serait inutile.

Si de tels arguments sont possibles, dans « L’Huma », c’est que la Gauche en France est à la ramasse depuis des années et des années sur la question animale. Elle n’a jamais su se tourner vers le monde de la protection animale, des refuges animaliers, du végétarisme, du veganisme, etc.

Pourtant le monde ne l’a pas attendu pour évoluer. Et comme la Gauche n’est pas là pour donner un contenu social à des questions fondamentales comme celle des animaux, c’est le capitalisme qui s’en empare, pour tenter de se moderniser. Si la Gauche avait fait son travail, on n’en serait pas là, avec des milliardaires pratiquant une véritable OPA sur le milieu de la protection animale.

En attendant, la question est sur la table et les associations de protection animale ont décidé de porter l’initiative, en souhaitant ce référendum pour avoir une large audience auprès de la population. Les députés et les sénateurs de gauche devraient donc les soutenir, au moins pour une raison démocratique (il faut 185 parlementaires signant pour lancer une pétition et accéder ensuite au référendum).

Tel n’est pas le cas, puisque seuls quelques députés et sénateurs de gauche apporte leur soutien pour l’instant, d’après le site referendumpourlesanimaux.fr (Alain David, Olivier Faure, Régis Juanico et Laurence Rossignol du PS, Elsa Faucillon du PCF ainsi que Guillaume Gontard du groupe communiste au sénat).

Le 31 juillet 2020, il manque ainsi 63 parlementaires pour lancer la pétition préliminaire au référendum ; les députés et sénateurs de gauche porteraient une lourde responsabilité face aux associations de la protection animale s’ils continuaient à leur refuser la possibilité d’un referendum.

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Lancement du projet «référendum pour les animaux»

Un référendum pour faire progresser la condition animale : tel est le projet lancé par en haut, mais avec le soutien logique d’associations disposant de peu de moyens et de peu de leviers pour faire avancer les choses.

Quand il n’y a pas d’initiative par en bas, il y en a par en haut, car un espace démocratique inoccupé se voit forcément utiliser. En l’occurrence, on a une proposition de référendum qui a été lancée à l’initiative de Hugo Clément, Marc Simoncini, Jennifer Bierna, Marie Tabarly, Xavier Niel et Jacques-Antoine Granjon.

Hugo Clément est un journaliste végétarien totalement extérieur à la tradition de la lutte vegan, mais ayant un énorme succès médiatique ces derniers mois autour du thème de la condition animale ; Marie Tabarly est une navigatrice et comportementaliste équin.

À leurs côtés on a donc des capitalistes chevronnés formant des poids lourds financiers : Xavier Niel (Free), Marc Simoncini (Meetic), Jacques-Antoine Granjon (vente-privee.com).

En ce qui concerne Jennifer Bierna, c’est une juriste, qui s’occupe de la communication du groupe Illiad auquel appartient Free (et accessoirement ou pas, elle est une cadre de la Droite, conseillère au plus haut niveau possible, y compris gouvernemental).

Ce sont eux qui sont à l’initiative du projet « référendum pour les animaux », présenté comme une « initiative citoyenne, engagée et politique en faveur de la cause animale ». Ce sont eux d’ailleurs qui ont pris la parole pour présenter pendant 1h30 le projet, à la Station F, un campus de startups ouvert par Xavier Niel à Paris.

Comme quoi, la politique c’est quand des citoyens multimillionnaires prennent la parole ? Et pourquoi le font-ils ? Par philanthropie à l’américaine ? Par calcul ? Par intérêt ?

En tout cas, de nombreuses associations se sont insérées dans l’initiative, n’ayant, de facto, pas le choix. En effet, la situation est dramatique : il n’y a ni relais, ni financement, ni investissement humain suffisant dans la défense des animaux. Pour faire du bruit, il y a toujours des gens. Pour remplir son Facebook ou son compte Instagram, les gens sont prêts à agir de manière véhémente. Mais dès qu’il y a toutefois un travail de fond à mener, silencieux et ingrat, invisible et difficile, il n’y a plus personne.

L’idée de pousser à un référendum apparaît donc comme soit une utopie formidable, soit au moins un levier de plus. Mobiliser en faveur de la signature de 185 parlementaires et de 10% des personnes inscrites sur les listes électorales (ce qui fait presque 5 millions de signatures à recueillir) va faire du bruit et c’est déjà bon à prendre. Et si cela marche, un référendum d’initiative partagée imposerait encore plus le thème de la condition animale.

Participent donc à la proposition d’un référendum pour les animaux les associations ASPAS, AVA, CIWF, Code Animal, CRAC, Fondation Brigitte Bardot, Fondation GoodPlanet, L214, L’alliance anti-corrida, LPO, On est prêt, One Voice, PAZ, PeTA, Pro Anima, Rewild, Sea Shepherd, la SPA, Welfarm.

On note évidemment tout de suite l’absence de la principale structure de refuges en France qu’est la Confédération Nationale Défense de l’Animal. C’est fort dommageable. En même temps c’est tout autant de galères en moins pour elle. Car les associations signataires se retrouvent dans une situation compliquée.

D’un côté, elles avaient, au moins pour beaucoup d’entre elles, intérêt à signer car le référendum consiste en des points les concernant directement :

1 : Interdiction de l’élevage en cage

2 : Interdiction des élevages à fourrure

3 : En finir avec l’élevage intensif

4 : Interdiction de la chasse à courre, du déterrage et des chasses dites traditionnelles

5 : Interdiction des spectacles avec animaux sauvages

6 : Fin de l’expérimentation animale

Cela va faire du bruit en leur faveur ; il y a déjà des soutiens people, artistiques, etc. comme avec Alessandra Sublet, Nicolas Hulot, Juliette Binoche, Tryo, Stéphane Bern, Nagui, Nicolas Sirkis, Julien Courbet, Sheila, Pascal Obispo, Bruno Solo, etc.

De l’autre, il y a trois obstacles, insurmontables.

Le premier, c’est l’arrière-plan. Les multimillionnaires à la barre, c’est quelque chose qui fait qu’on ne sait pas où on va. Le 30 juin 2020, Xavier Niel a racheté Paris Turf, le quotidien des courses hippiques. Et le 2 juillet 2020, il prend la défense des animaux ? C’est un bon exemple du fait que pour les grands capitalistes, tout sert de pion.

Le second, c’est que pour rassembler les signatures pour que le référendum se tienne, il faut d’abord avoir les 185 parlementaires. Cela signifie composer et se soumettre à ces parlementaires. Or, cela converge parfaitement avec l’apparition toute récente d’un nouveau mouvement « écologiste » et de « gauche » lancé par d’ex-macronistes.

Emmanuel Macron a besoin d’un mouvement écologiste en sa faveur aux prochaines présidentielles et là tout tombe très bien. Les lanceurs multimillionnaires de l’idée de référendum sont d’ailleurs eux-mêmes exactement des macronistes.

Le troisième, c’est l’obstacle culturel. Si on ne change pas les mentalités on ne change rien. Prenons par exemple le thème de la fin de l’expérimentation animale. C’est un combat tellement impossible que les vegans français ne l’ont absolument jamais assumé, à part le mouvement International Campaigns et bien entendu les tenants (très minoritaires) de la libération animale sans compromis.

C’est pourtant un combat juste. Cependant, c’est un combat culturel et il faut une base pour l’assumer. Et elle est de haut niveau. Même des végétariens ne peuvent ainsi pas l’assumer : on ne peut pas dire qu’on s’oppose à l’expérimentation animale tout en consommant du fromage qui contient par définition des morceaux d’estomac de jeunes ruminants.

Pour que ce référendum ait ainsi un sens, il faut un changement des mentalités, un changement culturel. Sinon, c’est de la rhétorique.

Et c’est là justement qu’on tombe sur l’Histoire. Car, finalement, la question animale est une problématique relevant du Socialisme. Soit on fait le Socialisme et on dit qu’on fait en sorte de l’élargir aux animaux, soit on parle des animaux mais cela tourne à l’abstraction, au fantasme bobo d’un capitalisme pacifié avec des élevages bio, qui est anti-historique par définition.

Ce référendum est donc voué à l’échec… Ou à une réussite, mais alors cela ne sera pas un référendum, mais un soulèvement en faveur des animaux. Et ce ne seront pas les multimillionnaires qui décideront de comment cela se passera, puisqu’ils sont une partie du problème, pas une partie de la solution.

> Le site de l’initiative : referendumpourlesanimaux.fr/