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Compte Fisha: une jeunesse sous l’emprise de la pornographie

Avec le confinement, le phénomène du revenge porn devient catastrophique, de nombreux comptes appelés « fisha » font leur apparition sur les réseaux sociaux. Ils proposent un grand nombre de photos à caractère pédopornographique, mettant en scène des adolescentes ou des filles encore plus jeunes et diffusées à leur insu.

La spécificité du revenge porn est qu’il s’agit de photos prises par la personnes elle-même ou prises à son insu par son « copain » et divulguées ensuite. À l’origine, ce sont des jeunes hommes qui veulent se venger d’une rupture qui faisaient « tourner » les photos, « fisha ». Celait fait référence au fait d’ « afficher » quelqu’un (en verlant). Cela est donc utilisé en partie pour détruire la réputation d’une fille.

Mais peu à peu les jeunes hommes y ont perçu un autre intérêt, celui du commerce les amenant très facilement dans un rôle de proxénète.

En effet, ces jeunes hommes, souvent entre 15 et 25 ans, procèdent par les réseaux sociaux, ajoutant un grand nombre de jeunes filles. Après avoir discuté avec elles, ils sont capable de déceler les faiblesses et les exploiter pour arriver à leur fin. Ils se comportent souvent comme quelqu’un ayant des sentiments, projetant des projets, exhibant le fait d’avoir une voiture de pouvoir l’emmener en voyage et demandant en échange une implication physique de la jeune fille, comme gage de sincérité.

Ces photos sont exposées sur des comptes, d’abord Twitter, puis Telegram ou d’autres plateformes garantissant l’anonymat. Ces comptes demandent une somme d’argent pour permettre l’abonnement.

Avec le confinement, ces apprentis proxénètes ont tout le temps pour monter leur stratégie et les jeunes filles sont autant de temps isolées, n’ont que leur smartphone comme contact vers l’extérieur et passent beaucoup de temps seules dans leur chambre. S’il y a un contexte familial difficile, ces conversations pleines de promesses sont une évasion, un espoir.

Nous sommes donc dans une société en crise, capable de produire des adolescents mettant en place des réseaux pédocriminels avec absolument aucune considération pour les femmes, pour l’intimité et les sentiments.

Inversement, on a des jeunes filles qui sont dans un tel désarroi culturel, moral et affectif, qui se retrouvent prêtes à céder à n’importe quelle illusion, en acceptant de se faire filmer nue par un petit copain de quelques semaines, ou encore pire maintenant pendant le confinement par des inconnus leur promettant monts et merveilles sur les réseaux sociaux.

Les sentiments sont encombrants pour le capitalisme, ils sont une barrière à l’exploitation du corps des femmes dans l’industrie du sexe. Que ce soit à travers la pornographie qui deviendrait morale avec la capacité de séparer amour et rapports sexuels, ou à travers ces photos « nude » extorquées en simulant et manipulant des sentiments.

Garçon et fille confondu, il est d’ailleurs désormais courant dans la jeunesse de recevoir des photos du sexe de quelqu’un qu’on a ajouté depuis quelques heures dans ses amis.

Prendre son sexe en photo et l’envoyer deviendrait donc banal chez les 2000 ? Il est là clairement un sujet dont il faut parler à ses enfants, mais aussi entre garçons et entre filles.

Face au fléau des comptes fisha pendant le confinement, il y a des femmes qui s’organisent virtuellement pour traquer les proxénètes numériques. C’est le cas du compte Twitter @StopFisha qui informe des possibilités d’action juridique pour les victimes. Il cherche aussi a regrouper, via un chat Telegram, les personnes ayant du temps pour chercher les comptes problématiques et les faire sauter. Sur ce compte il y a régulièrement des liens à signaler, ce qui est une bonne participation à la traque au proxénète.

Sur le fond du problème, il revient à la Gauche de lutter contre la banalisation de la pornographie et la prostitution comme exploitation du corps des femmes, comme violence contre toutes les femmes. La Gauche doit agir pour une jeunesse faisant des relations un havre de paix, reconnaissant le caractère nécessaire de l’amour et de l’expression démocratique entre homme et femme.

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Société

L’affaire Mila, ou la déconnexion des identitaires musulmans et LGBT

La France est divisée en deux : il y a ceux qui consomment stupidement et ceux qui tentent de se forger une identité fictive, forcément romantique et agressive. L’affaire Mila est exemplaire de la bulle identitaire côtoyant la banalité d’un quotidien capitaliste où il ne se passe strictement rien.

Les gens sérieux regardent l’affaire Mila de haut, avec dédain, même. Interrogée à la télévision dimanche, Ségolène Royal a ainsi eu des propos très sensés :

« Critiquer une religion, ça n’empêche pas d’avoir du respect, ça n’empêche pas d’avoir de l’éducation, de la connaissance, d’être intelligent par rapport à ce qu’on dit. Une adolescente, qui est peut-être encore en crise d’adolescence, si elle avait dit la même chose sur son enseignant, sur ses parents, sur sa voisine, sur sa copine, qu’est-ce qu’on aurait dit ? On aurait dit simplement : « un peu de respect » ».

Ségolène Royal a évidemment une approche dédaigneuse, mais le fond est vrai : tout est une question de niveau culturel, de niveau de conscience. Qui veut une société réellement démocratique, avec le peuple assumant la politique, toute la politique, sait quel est le titanesque travail de conscientisation à mener…

Inversement, l’affaire Mila est passionnante pour les donneurs de leçons d’ultra-gauche (qui sont souvent des profs), pour les identitaires anti-musulmans et les identitaires musulmans. Tous ces gens cultivent leurs aigreurs et, il faut bien le dire, leur marginalité. La société n’en a effectivement rien à faire de leurs élucubrations.

Rappelons les propos de Mila, prononcés dans une « story » Instagram (soit une vidéo éphémère mais publique) :

« Je déteste la religion. Le Coran est une religion de haine, l’islam c’est de la merde, je dis ce que je pense ! Je ne suis pas raciste. On ne peut pas être raciste envers une religion. J’ai dit ce que j’en pensais, vous n’allez pas me le faire regretter. Votre religion, c’est de la merde, votre Dieu, je lui mets un doigt dans le trou du cul, merci, au revoir. »

Voici une capture vidéo de ce message éphémère :


C’est brutal, mais bon il faut ne pas avoir été en couple pour ne pas savoir ce qu’on est capable de se jeter à la tête. Surtout en France, pays du psychodrame où on considère que mener sa petite dramaturgie est un signe de bonne santé.

La différence, c’est bien sûr la portée identitaire de la question. Mila est lesbienne, elle a tenu ses propos en réponse à la critique selon laquelle elle serait raciste pour avoir rejeté quelqu’un la draguant lourdement (et avoir précisé un peu avant que le style « reubeu » ce n’était pas son genre), en réponse les identitaires musulmans la menacent de manière ultra-violente, elle ne peut plus aller à l’école en conséquence, etc.

C’est donc une passion et à ce titre passionnant. Mais cela n’est rien du tout en réalité et c’est simplement un fait-divers typique de gens idiots s’attardant sur des choses idiotes, par profond goût pour l’idiotie.

Bien sûr, pour les gens ayant à l’esprit la fantasmagorie selon laquelle les musulmans sont traqués, pourchassés en France, c’est un signe. Pour les autres ayant à l’esprit la fantasmagorie selon laquelle l’islam est conquérant, c’est un signe. Pour les gens ayant à l’esprit la fantasmagorie selon laquelle les LGBT seraient rejetés ou haïs en France, c’est un signe.

Mais ce n’est un signe de rien du tout à part pour ceux ayant basculé dans le romantisme identitaire pour se distinguer de l’anonymat universel de la consommation capitaliste. Cela n’empêche pas que madame X fasse ses courses à Louis Vuitton, que monsieur Z achète des actions, que madame Y aille à l’usine et que monsieur V se demande comment il va faire pour acheter la prochaine Playstation vu son prix.

Non, parce qu’on ne va tout de même pas s’imaginer que c’est un épisode de la lutte des classes, et puis quoi encore ! C’est simplement une expression de la décadence du capitalisme et des gens qui l’acceptent. Il y a ceux qui l’acceptent passivement, qui vaquent à leurs occupations, et ceux qui l’acceptent activement en s’imaginant rebelles et qui pratiquent des orgies de vulgarité pour satisfaire leur quête réactionnaire d’identité.

L’effondrement de la culture, voilà ce que représente l’affaire Mila. C’est exemplaire du triomphe de la futilité, de l’agressivité identitaire, du fanatisme identitaire contre telle chose, pour telle chose, et jamais, jamais de réflexion, d’effort intellectuel prolongé, et toujours sa petite personne mise en avant, toujours…

La société capitaliste est un échec complet, toujours plus !

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Culture

Le double caractère des vidéos de Youtubers sur internet

Ce qui est produit sur les plateformes de partage de vidéos en ligne, comme YouTube, ne relève pas unilatéralement de quelque chose d’artificiel, d’une virtualité qui serait « coupée » du réel. Il y a un double aspect, qu’il faut comprendre.

Les plateformes diffusant des vidéos sur internet, en particulier YouTube de par le nombre d’utilisateurs, sont dans une certaine mesure un espace d’expression de la volonté d’aller vers toujours plus de compréhension, vers l’analyse, mais aussi le partage, l’intelligence collective.

Prenons par exemple le nombre significatif de vidéos tutoriels. Elles sont disponibles sur un grand nombre de sujets, sur le bricolages, la cuisine, les activités ludiques ou sportives, mais aussi scientifiques. Presque chaque thématique scientifique a ses vidéos : l’histoire, la botanique, la géologie, l’économie, etc.

On a donc là quelque chose de particulièrement intéressant. En plus d’être stimulant, c’est un véritable outil potentiellement démocratique. C’est un espace ouvrant la possibilité de dépasser les contradictions entre travail manuel et travail intellectuel, de diffuser et partager largement les connaissances en accès totalement libre.

Mais ces plateformes, à commencer par YouTube, ne sont pas des outils populaires mis gratuitement à la disposition de tous dans cette perspective potentielle. Déjà parce qu’à la base, ce sont avant tout des espaces commerciaux devant permettre de générer du profit pour des groupes privés extrêmement puissants. Ce sont surtout les fameux GAFA, dont pour ce qui nous intéresse ici justement : Google.

L’action de ces groupes se situe dans le cadre juridique des grands États capitalistes. Ils entretiennent avec ceux-ci un rapport de force tendu, mais situé néanmoins dans le besoin d’un appui paradoxal et cependant largement mutuel.

D’autre part, parallèlement à cette base déjà contradictoire, la perspective démocratique n’en reste pour ce qui est le plus significatif, qu’au stade de la potentialité.

Ce qui compte, c’est le nombre de « clics », c’est-à-dire de connections pour ouvrir une vidéo. Et c’est le principal critère de « monétisation » utilisé par l’algorithme imposé par la situation de monopole de Google.

Donc, les productions les plus mises en avant et celles qui sont le plus « vues » s’auto-nourissent des faiblesses culturelles, des préjugés, des raccourcis, du racolage, de la régression, etc. Elles reflètent toujours un peu plus la décadence des valeurs dans le libéralisme porté justement par ces grands monopoles comme Google.

On est vite submergé par le narcissisme sous tous les prétextes, par la culture « buzz », les placements de produits, les « punchlines » les plus stupides, les clashs, la vulgarité et finalement purement et simplement le glauque.

C’est le royaume du grotesque allant jusqu’à l’ignoble.

Les vidéos sur internet sont ainsi une formidable outil de culture populaire et d’expression démocratiques. Elles existent cependant dans une réalité économique et un cadre culturel qui sont décadents. Les valeurs ne sont pas les bonnes et les tentatives d’être utile socialement sont bien souvent trop limitées.

Une société nouvelle, qui sera démocratique et populaire, aura forcément besoin de ces espaces d’expression. La gauche en tant que porteuse d’un projet de société, d’un idéale de vie, ne peut qu’être intéressé au plus haut point par cela.

Le rôle de la Gauche est certainement de montrer en quoi un bond en avant est nécessaire. Les vidéo sur internet doivent devenir productrices de culture et de valeurs nouvelles. Elles ne pourront pas se limiter éternellement au reflet des tracas d’une jeunesse habile et intelligente, mais marquée surtout par l’amusement et l’anecdotique.