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Société

L’affaire Norman témoigne que les youtubeurs sont des déréglés

Les réseaux sociaux ne sont pas de nature démocratique.

Norman Thavaud en garde à vue pour viols et corruption de mineurs : c’est l’un des principaux youtubeurs français, avec douze millions d’abonnés. On parle ici de quelqu’un dont les vidéos ont fait 2,7 milliards de vues. 4 millions de personnes le suivent sur Facebook, 3,4 millions sur Twitter.

On parle surtout de quelqu’un qui est connu pour avoir l’air sympa et une sorte d’image de doux naïf. Sauf que ça, c’est dans les vidéos. En réalité, l’image qu’avaient de lui les gens connaissant l’envers du décor était totalement différente, et c’est vrai de la plupart des youtubeurs.

C’est que les youtubeurs disent des choses, mais rien n’est vrai. Ils vendent un produit, ils sont eux-mêmes un produit. Leur talent n’est pas brut, ni leur sincérité, même si cela en a l’apparence. Tout est calculé, millimétré, décidé par des capitalistes.

Prenons Norman, par exemple. Ses productions relèvent de Webedia, un groupe de médias français employant 2400 personnes. Et Webedia est une filiale de Fimalac, un monopole s’occupant du divertissement, de l’hôtellerie de luxe, d’immobilier, etc.

Le propriétaire de Fimalac est le milliardaire français Marc Ladreit de Lacharrière, dans le top 30 des plus riches Français, qu est l’administrateur du club Le Siècle et président du comité français du club Bilderberg.

Il y a ainsi une ligne droite allant de Norman le youtubeur qui a l’air sympa et l’oligarchie financière. C’est une preuve du caractère capitaliste des vidéos de Norman, de la nature de son activité, de sa nature à lui aussi.

Car il pouvait être sympa et correct auparavant – il ne pouvait pas le rester de toutes façons une fois qu’il avait vendu son âme. Et c’est vrai de tous les youtubeurs, même de ceux qui ne relèvent pas d’une production industrielle encadrée, parce qu’ils tendent à ça quand même, leur rêve étant d’en être, de « croquer » comme ceux qui ont réussi.

Des vidéos racoleuses, formatées pour divertir sans enjeu, manipulant les esprits… Avec une chose pareille, on ne peut pas s’étonner que les youtubeurs eux-mêmes déraillent.

Ils sont déréglés, ils sont coupés du peuple et ont une démarche anti-démocratique. Inévitablement ils basculent, exactement comme les « hommes politiques », les grands financiers, etc.

Il y a une formule qui a ses limites pour dire ça, mais enfin elle a une grande part de vérité : le pouvoir absolu corrompt absolument.

Tout youtubeur qui réussit est condamné à être corrompu, que ce soit avant sa réussite ou après. Vue la pression actuelle du capitalisme, il est d’ailleurs plutôt obligé de l’être dès le départ, désormais.

Norman fut quant à lui l’un des premiers youtubeurs, mais il a franchi le pas tout de même, voire même il a contribué à mettre en place le monstre, donc il doit encore plus être humainement déréglé.

Cela montre bien qu’il ne faut pas s’arrêter à la forme, mais saisir le fond, ce que seul fait la Gauche historique, qui assume la culture, la civilisation.

Combien ont tort les gens s’imaginant de gauche et cherchant à manoeuvrer sur youtube, twitter, facebook… ! Ils se font corrompre et ils ne le remarquent même pas. Ils perdent leurs âmes en s’imaginant activistes, alors qu’ils ne sont actifs que pour le capitalisme.

On ne peut pas lutter contre le capitalisme en utilisant des choses façonnées par lui. On n’a besoin ni de youtubeurs, ni de McDonald’s, ni de centrales nucléaires.

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Guerre

Militarisation : le Service National Universel profite de youtubeurs

Avec le petit scandale de l’utilisation d’influenceurs opérant sur youtube pour promouvoir le Service National Universel, l’opinion publique découvre l’ampleur du dispositif. Ce qu’elle voyait comme une simple initiative civique se révèle bien être un bourrage de crâne militariste.

Le Service National Universel ne va être mis en place que progressivement, pour concerner tous les jeunes à partir de 2026, pendant un mois. Concernant tous les jeunes hommes et toutes les jeunes femmes, il touche véritablement toute la jeunesse et à terme, il sera aisé pour l’État de prolonger sa durée, une fois les structures mises en place, à la première « crise » venue.

C’est une remise en place du service militaire qui est visée, dans une interprétation correspondant aux exigences de la guerre moderne. L’État veut être capable d’encadrer psychologiquement et culturellement la jeunesse, d’en faire un levier pour diffuser dans la société le nationalisme et le militarisme. Et également bien entendu d’avoir suffisamment de main d’œuvre pour la guerre.

Comme l’ont formulé Rodrigo Arenas et Carla Dugault, les coprésidents de la FCPE, la fédération des parents d’élèves :

« Le SNU est la réintroduction au pas de l’oie et à grand renfort de communication du service militaire. »

Ce qui se joue, c’est la militarisation de la société, dans le cadre d’une tendance à la guerre. Et cela de manière particulièrement bien organisée.

Le Maroc vient par exemple également de revenir au service militaire, abandonné il y a douze ans. La décision a été prise brutalement, sans prévenir et de manière intéressante, les soutiens de famille y échapperont, ainsi que ceux qui font des études. C’est une belle manière de chercher à encadrer une génération précise, qui servira de chair à canon sans déranger ni la formation de cadres pour l’économie ni l’économie elle-même.

La France, quant à elle, vise à la fois davantage et moins. Elle veut d’abord des forces soutenant l’armée telle qu’elle existe, et ensuite d’éventuelles réserves. La raison à cela est que comme l’a formulé le premier ministre Edouard Philippe lors du 14 juillet 2019 :

« L’armée est la protectrice de la nation et de son côté la nation respecte l’armée. »

Le fait que l’armée soit extérieure à la société est ouvertement assumée. C’est un corps étranger, pas une armée populaire. D’où la décision du gouvernement d’utiliser trois youtubeurs, qui ont chacun deux millions d’abonnés sur youtube, pour faire la promotion du Service National Universel.

Il s’agit de Sundy Jules, Enzo, tais-toi !, et Tibo InShape. Les deux premiers ont utilisé le principe de la « story » sur instagram, qui au moyen d’une vidéo permet de s’immiscer dans la vie privée des gens, en feignant donc un rapport non hiérarchique, non commercial. La vidéo de promotion du SNU était mis en avant et pour illustrer les propos tenus, voici notamment ceux de Sundy Jules :

« C’est ouf, c’est une vidéo inédite du SNU en France. Regardez ça, c’est iconique. »

Tibo InShape a quant à lui directement fait une vidéo « je fais le nouveau service militaire? ». C’est tout autant de la propagande, mais cela a le mérite de la franchise, puisque dans la vidéo on a même Gabriel Attal, en charge au gouvernement du service national universel. Tibo InShape, avec ses vidéos sur la musculation, est un habitué de la valorisation des normes « viriles » et de l’ambiance « entre mecs », c’est-à-dire ne volant vraiment pas haut.

Tout cela ne sera pas considéré par la jeunesse comme véritablement un problème, car elle a du mal à considérer les choses de manière sérieuse. Par contre, quand elle le fera, elle se révoltera. C’est le paradoxe de la société capitaliste développée de ce début de 21e siècle.

Il y a d’un côté des exigences conçues comme individuelles, avec une porosité très claire au nationalisme permettant le maintien d’un capitalisme fort, dominant les pays du tiers-monde. De l’autre, l’aspect personnel de ces exigences ne peut aller que de pair avec le refus du militarisme et de l’encadrement au service du nationalisme.

La bataille entre la Gauche et le militarisme doit s’appuyer sur cette base pour parer aux terribles coups qui restent à venir, car la tendance à la guerre est irrépressible.

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Culture

Le double caractère des vidéos de Youtubers sur internet

Ce qui est produit sur les plateformes de partage de vidéos en ligne, comme YouTube, ne relève pas unilatéralement de quelque chose d’artificiel, d’une virtualité qui serait « coupée » du réel. Il y a un double aspect, qu’il faut comprendre.

Les plateformes diffusant des vidéos sur internet, en particulier YouTube de par le nombre d’utilisateurs, sont dans une certaine mesure un espace d’expression de la volonté d’aller vers toujours plus de compréhension, vers l’analyse, mais aussi le partage, l’intelligence collective.

Prenons par exemple le nombre significatif de vidéos tutoriels. Elles sont disponibles sur un grand nombre de sujets, sur le bricolages, la cuisine, les activités ludiques ou sportives, mais aussi scientifiques. Presque chaque thématique scientifique a ses vidéos : l’histoire, la botanique, la géologie, l’économie, etc.

On a donc là quelque chose de particulièrement intéressant. En plus d’être stimulant, c’est un véritable outil potentiellement démocratique. C’est un espace ouvrant la possibilité de dépasser les contradictions entre travail manuel et travail intellectuel, de diffuser et partager largement les connaissances en accès totalement libre.

Mais ces plateformes, à commencer par YouTube, ne sont pas des outils populaires mis gratuitement à la disposition de tous dans cette perspective potentielle. Déjà parce qu’à la base, ce sont avant tout des espaces commerciaux devant permettre de générer du profit pour des groupes privés extrêmement puissants. Ce sont surtout les fameux GAFA, dont pour ce qui nous intéresse ici justement : Google.

L’action de ces groupes se situe dans le cadre juridique des grands États capitalistes. Ils entretiennent avec ceux-ci un rapport de force tendu, mais situé néanmoins dans le besoin d’un appui paradoxal et cependant largement mutuel.

D’autre part, parallèlement à cette base déjà contradictoire, la perspective démocratique n’en reste pour ce qui est le plus significatif, qu’au stade de la potentialité.

Ce qui compte, c’est le nombre de « clics », c’est-à-dire de connections pour ouvrir une vidéo. Et c’est le principal critère de « monétisation » utilisé par l’algorithme imposé par la situation de monopole de Google.

Donc, les productions les plus mises en avant et celles qui sont le plus « vues » s’auto-nourissent des faiblesses culturelles, des préjugés, des raccourcis, du racolage, de la régression, etc. Elles reflètent toujours un peu plus la décadence des valeurs dans le libéralisme porté justement par ces grands monopoles comme Google.

On est vite submergé par le narcissisme sous tous les prétextes, par la culture « buzz », les placements de produits, les « punchlines » les plus stupides, les clashs, la vulgarité et finalement purement et simplement le glauque.

C’est le royaume du grotesque allant jusqu’à l’ignoble.

Les vidéos sur internet sont ainsi une formidable outil de culture populaire et d’expression démocratiques. Elles existent cependant dans une réalité économique et un cadre culturel qui sont décadents. Les valeurs ne sont pas les bonnes et les tentatives d’être utile socialement sont bien souvent trop limitées.

Une société nouvelle, qui sera démocratique et populaire, aura forcément besoin de ces espaces d’expression. La gauche en tant que porteuse d’un projet de société, d’un idéale de vie, ne peut qu’être intéressé au plus haut point par cela.

Le rôle de la Gauche est certainement de montrer en quoi un bond en avant est nécessaire. Les vidéo sur internet doivent devenir productrices de culture et de valeurs nouvelles. Elles ne pourront pas se limiter éternellement au reflet des tracas d’une jeunesse habile et intelligente, mais marquée surtout par l’amusement et l’anecdotique.