L’Europe de l’Est se précipite dans la guerre.
Le 4 novembre 2022, le président russe Vladimir Poutine s’est rendu sur la place Rouge afin de déposer une gerbe de fleurs devant le monument dédié à Kouzma Minine et Dmitri Pojarski, devant la cathédrale Basile-le-Bienheureux. Le prétexte était le jour de l’unité nationale, fêtée auparavant par le tsarisme et réintroduit en 2004.
La date fait référence à la grande révolte populaire à Moscou du 4 novembre 1612 contre l’occupant polonais. Le marchand Kouzma Minine et le prince Dmitri Pojarski dirigèrent ce combat menant à l’indépendance russe et à l’instauration de la dynastie des Romanov.
Cet épisode est totalement inconnu en France où la narration polonaise a masqué cette période, afin de donner plus de volume à l’occupation russe de la Pologne par la suite. Mais au 17e siècle, la Pologne, au sein de la « République des Deux Nations » avec la Lituanie, était une puissance majeure et expansionniste.
Le territoire de cette force féodale recouvrait alors les territoires actuels de la Pologne, une grande partie de l’Ukraine, de la Lituanie et de la Biélorussie, mais également une petite partie de la Russie, de la Lettonie et de l’Estonie.
Maintenant, à moins d’être naïf, il n’est pas bien difficile de voir qu’il existe actuellement une alliance stratégique Ukraine – Pologne – Lituanie – Lettonie – Estonie contre la Russie, avec comme objectif assumé de la démembrer. La Suède, qui historiquement a mené de nombreuses guerres dans la région (et a précipité la chute de la République des Deux Nations), est de la partie, tout comme la Finlande.
Le but est de dire que la Russie est un empire, qu’il faut « libérer » ses peuples, donc former une « Moscovie » de taille réduite, en s’appropriant au passage des territoires, et décomposer le reste en « républiques » semi-coloniales.
Le jour de l’unité russe en 2022 prend donc une tournure stratégique tout à fait significative. Du point de vue français cela ne se voit pas, mais à l’Est les choses sont claires, c’est soit la Russie, soit le bloc Ukraine – Pologne – Lituanie – Lettonie – Estonie.
Le maréchal fasciste polonais des années 1920 – 1930, Józef Piłsudski, avait d’ailleurs déjà conceptualisé ce principe d’un « intermarium ». Il s’agissait alors pour la Pologne, allié ou plus exactement vassalisé au Royaume-Uni, devenir une grande force régionale.
On en revient au même schéma puisque le Royaume-Uni est première ligne contre la Russie et prête à envoyer des troupes, alors que dès février 2022 a été instaurée une alliance Ukraine – Pologne – Royaume-Uni dénommée la « trilatérale ».
Il faut donc bien comprendre qu’en Europe de l’Est, on va vers un affrontement significatif, au minimum. Et si la superpuissance américaine parle beaucoup de l’utilisation par la Russie d’une bombe nucléaire tactique, c’est également parce que si tout déborde, la Russie ne se laissera pas faire par le bloc en face.
En parlant de cette menace pratique, la superpuissance américaine ne mène pas seulement une attaque contre la Russie, elle avertit en même temps les fous furieux que sont le Royaume-Uni, les pays baltes, la Pologne et l’Ukraine…
Ainsi que la Finlande et la Suède. Leurs dirigeants de gouvernement, Sanna Marin et Ulf Kristersson, n’ont pas hésité à expliquer au tout début du mois de novembre 2022 qu’il serait possible que leurs pays accueillent des armes atomiques américaines. C’est là suicidaire, déjà que l’entrée de la Finlande dans l’OTAN fait de Helsinki une cible directe de par la géographie de la zone.
On est complètement dans le repartage du monde, avec chacun cherchant à en profiter le plus possible. La Pologne est en effet tout autant susceptible d’avaler une partie de l’Ukraine qu’une partie de la Biélorussie, selon les possibilités du moment… Tout est une question d’opportunités… C’est l’ère de l’impérialisme.