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Ilya Répine serait maintenant ukrainien!

C’est « l’effacement » de la Russie.

C’est « l’effacement » de la Russie.

Le régime ukrainien ne fait pas que détruire les monuments à Pouchkine et dénoncer Dostoïevski comme l’expression d’une âme russe damnée, monstrueuse, criminelle. Il ne cesse également de réécrire l’Histoire pour s’approprier certains artistes.

Le peintre Kazimir Malévitch est ainsi par exemple considéré comme ukrainien, ce qui est bien ridicule, et on a désormais droit au comble de l’absurde : le peintre Ilya Répine serait ukrainien.

Ilya Répine, Procession religieuse dans la province de Koursk, 1883

Rien qu’avec cette information, l’opinion publique russe serait directement favorable à une intervention militaire. Parce que là, on touche tout de même au cœur même de la culture russe.

Pour preuve, du 5 octobre 2021 au 23 janvier 2022, il y a eu à Paris une rétrospective sur ce peintre. Cette exposition au Petit Palais avait été dénommée… « Ilya Répine ( 1844-1930), Peindre l’âme russe ».

Il est bien parlé de l’âme russe, pas de l’âme ukrainienne. L’exposition a été un grand succès d’ailleurs, avec 100 000 visiteurs, qui ont sans doute été étonnés de découvrir ce peintre de la plus haute qualité.

C’est que les « ambulants », ces fabuleux peintres réalistes russes de la fin du 19e siècle, sont malheureusement inconnus chez nous. Ils forment par ailleurs le noyau historique, avec la littérature russe de la même époque, du style artistique « réaliste socialiste » de l’URSS.

On parle ici d’artistes d’orientation démocratique, d’où le fameux tableau d’Ilya Répine sur les Cosaques, présentés de manière romantique comme épris de liberté. Les nationalistes ukrainiens aimeraient bien récupérer le peintre et donc ce tableau pour en faire un outil de leur idéologie mortifère, ethnique-patriarcale.

Ilya Répine, Les Cosaques zaporogues écrivant une lettre au sultan de Turquie, 1891

Comme il se doit, c’est la superpuissance américaine qui est en première ligne pour épauler la réécriture du régime ukrainien. C’est ainsi le Metropolitan Museum of Art de New York qui a, à la mi-février 2023, décidé de faire d’Ilya Répine un « Ukrainien ».

La raison est qu’il serait né dans ce qui est l’Ukraine actuelle et que son père était cosaque. Ce qui est un raccourci complet et on pourrait très bien inverser la proposition et dire que par conséquent, la zone concernée est russe.

Si on commence en effet comme ça, on nie les mélanges, les synthèses et on bascule dans le nihilisme nationaliste. Qu’on pense au drame yougoslave !

Sur sa lancée, le « Met » a transformé le peintre russe d’origine arménienne Ivan Aïvazovski en Ukrainien. On parle ici d’un peintre, par ailleurs d’une très grande renommée, qui est enterré dans le jardin d’une église arménienne et a été peintre de l’état-major de la Marine russe !

Mais comme il est né en Crimée, et que la Crimée est censée être ukrainienne, alors il est ukrainien ! Sidérant !

Ivan Aïvazovski, La neuvième vague, 1850
Ivan Aïvazovski, La Création ou Le Chaos, 1841

Il a été fait pareil avec Arkhip Kouïndji. Comme il est né à Marioupol, et que Marioupol est censé être l’Ukraine, alors il est ukrainien, même si sa famille relève des Grecs de la région !

Tout cela est un raccourci ignoble, qui fait fi des mélanges, des synthèses propres à cette partie du monde. Parce que justement, si l’on prend les peintures d’Arkhip Kouïndji, lui-même dans la perspective des Ambulants… on retrouve l’Ukraine.

Les peintures de ce non-ukrainien sont indéniablement, résolument, absolument d’esprit national ukrainien…

Arkhip Kouïndji, Nuit ukrainienne, 1876

On y retrouve ce côté lancinant, cette profondeur de champ s’étalant dans une candeur qui se permet de traîner son regard comme un vague à l’âme. C’est russe, et en même temps pas du tout, car cela se répand bien trop dans la complaisance sentimentale pour le moment, il n’y a pas cette inquiétude russe qui recherche des « pointes »…

Arkhip Kouïndji, Le Dniepr le matin, 1881

Si l’on veut, les Finlandais ont trop regardé les lacs, les Ukrainiens ont trop regardé les steppes et les champs, les Russes ont trop regardé les forêts.

Arkhip Kouïndji, Soir en Ukraine, 1878

Faisons une comparaison pour cerner la différence. Voici un tableau d’Ilya Répine, Tolstoï dans un champ de labour, de 1887. Il faut regarder le côté incisif, l’intensité, la pointe.

Maintenant regardons Arkhip Kouïndji, Le chemin des tchoumaks à Marioupol, de 1875. Il n’y a pas ce côté incisif russe. C’est ukrainien. C’est très proche, mais il y a une nuance, une différence.

Les Russes et les Ukrainiens expriment l’âme, mais les Russes font ressortir une pointe, que les Ukrainiens préfèrent gommer. Ou, si l’on veut, les Russes parlent beaucoup mais ne disent rien (qui relève de l’âme, intime), les Ukrainiens ne disent rien mais parlent beaucoup (ils disent indirectement).

Mais il va de soi qu’il ne faut pas attendre des nationalistes ukrainiens, ces barbares, la moindre réflexion esthétique sur la peinture ukrainienne. Ces monstres sont dans la destruction.

Car Arkhip Kouïndji peut ne pas être ukrainien et contribuer ou relever de la peinture ukrainienne. Les choses sont compliquées… l’humanité se mélange… et c’est très bien ainsi.

Le nationalisme est unilatéral et simplificateur, il empêche de saisir les synthèses historiques. Ce n’est tout de même pas pour rien que les Russes et les Ukrainiens soient si proches, tout comme les Allemands et les Autrichiens, les Indiens et les Pakistanais, etc.

Dans mille ans, il n’y aura plus de nations, plus de « couleurs de peau », on sera tous mélangé, dans une grande synthèse mondiale qui d’ailleurs continuera de manière ininterrompue.

La réécriture de l’Histoire procédant à des séparations, à l’individualisation, est une expression à la fois de la décadence de la bourgeoisie, de la décomposition des valeurs, du redécoupage du monde entre puissances.

Il faut la combattre.

Il est évident que toutes ces redéfinitions de peintres obéissent à l’objectif impérialiste de destruction de la Russie, de son futur découpage en mini-États vassalisés. C’est un processus à la fois insidieux et ouvert. La National Gallery de Londres avait déjà en avril 2022 renommé un tableau du peintre Edgar Degas, les « danseuses russes » devenant ukrainiennes.

On notera par ailleurs que la Tate Gallery de Londres considère Ilya Répine comme un peintre russe né ukrainien.

Tout cela est de la fiction. Et c’était la force de l’URSS jusqu’aux années 1950 de réfuter ce type de fiction, permettant l’unité populaire, que ce soit pour l’Ukraine et la Russie ou dans le Caucase.

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