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Le 39e congrès du PCF : retour ou agonie ?

Quelque chose s’est passé, mais quoi?

Quelque chose s’est passé, mais quoi?

Le 39e congrès du Parti Communiste Français d’avril 2023 a largement fait réfléchir. Il y a en effet une réaffirmation du PCF comme structure indépendante et propositionnelle. Du point de vue des adhérents du PCF, c’est un succès. Fabien Roussel est considéré comme celui qui a réussi à refaire du PCF un parti politique qui ne soit pas dans l’ombre ni d’une union de la Gauche, ni de La France Insoumise.

C’est ça qui ressort du congrès, au-delà de toute autre considération. Que disent les observateurs, comment interprètent-ils ça?

Chez Regards.fr, un média historiquement lié au PCF, cela ne plaît pas du tout. On trouve à sa tête Roger Martelli, une ancienne figure du PCF, et  Clémentine Autain, ancienne du PCF passé à La France Insoumise. Là, on est horrifié. C’est une fuite en avant de la part du PCF et ça contribue à une guerre des gauches.

Autrement dit, il est constaté une rupture avec la trajectoire de la gauche populiste du type La France Insoumise. Ce point, on peut effectivement le considérer comme acquis. Pour les gens comme Regards, c’est intenable et un suicide.

Sur le papier, il est évident aussi qu’un tel maintien « identitaire » du PCF dérange forcément des structures comme le PRCF et le PCRF qui en sont issues. Elles pensaient que le PCF allait disparaître et que, en posant des jalons, elles prendraient le relais. Là cela semble impossible en l’état.

Si le PCRF ne dit rien, le PRCF considère que ça ne compte pas, au final. Il parle d’un PCF qui serait encore en pleine euro-mutation ». Il considère que c’est bien le cas malgré les prétentions de Fabien Roussel au sujet d’un retour du PCF sur la scène. La raison?

Les valeurs, des idées proposées. Le PCF, pour le PRCF, bascule à droite. Il ne peut donc aboutir à rien, même s’il prétend revenir.

« Ce constat s’appuie sur des faits objectifs, et non sur des anathèmes ou sur des accusations sans preuve :

– Déclarations reniant le passé communiste : hommage au liquidateur Gorbatchev et à l’anti-communiste Soljenitsyne ; mépris affiché pour les kolkhozes et le centralisme démocratique ; refus de considérer Staline comme un « camarade » (ainsi que Xi Jinping et Kim Jung-un) tout en affirmant que, vu certaines de ses déclarations, « Biden pourrait prendre sa carte au PCF » ;

– Positions tendant vers la Réaction : soutien à la manifestation factieuse des policiers organisée devant l’Assemblée nationale en mai 2021 par Alliance en présence du fasciste Zemmour pour « accuser la Justice ») ; feu vert aux préfets pour expulser les sans-papiers non régularisés ; « débat » avec Valérie Pécresse à la Fête de l’Huma 2021 ; louanges aux « grandes fortunes très intelligentes, qui ont créé, inventé » ; pitoyable mise en opposition de la « gauche du travail » et de la « gauche de la paresse » ; regret de l’annulation de la visite de Charles III en plein conflit des retraites.

– Ancrage définitif de la France dans l’ordre capitaliste UE-OTAN : soutien sans faille au régime pronazi de Kiev martyrisant le Donbass ouvrier depuis 2014 ; appel à un « débat parlementaire » pour savoir s’il faut faire la guerre contre la Russie (!) ; vote des députés P« C »F en faveur de l’infâme résolution du 30 novembre 2022 (avec « Renaissance », les « LR », le « PS » et « EELV ») pour l’envoi d’armes à l’Ukraine (et l’élargissement de l’OTAN à la Suède et à la Finlande et de l’UE à l’Ukraine), etc.

– Politique légaliste et euro-« social-démocrate » : NUPES ; appel à un « débat pacifié » dans le cadre de la Ve République avec la Macronie en plein affrontement de classes sur les retraites ; maintien du P« C »F au sein du Parti de la Gauche européenne (PGE) rallié à l’euro et la construction européenne et invisible dans les luttes. Le PGE, qui accueille encore Syriza malgré ses trahisons et capitulations néolibérales en Grèce sans que cela émeuve le P« C »F, a d’ailleurs eu les honneurs du congrès du P« C »F avec la présence de son président Walter Baier, ovationné après avoir déclaré que « les mouvements sociaux sont un tremplin pour une Europe sociale, écologique et féministe » (en somme, pas mieux que Mitterrand, Jospin ou Hollande !).

La Riposte, un courant trotskiste qui eut un temps un écho dans le PCF, quant à lui que tout ça est surtout un écho d’une décomposition du PCF. En effet:

« le contenu analytique, politique et programmatique du document [proposé par la direction et voté à plus de 80%] est d’une pauvreté affligeante ».

Il est pensé ici que le PCF se survit à lui-même. C’est une position trotskiste traditionnelle.

Ce n’est pas du tout ce que pense le PCF(mlm), par contre. Le PCF, selon lui, s’est vraiment relancé. Il s’est vraiment relancé, car il est en train de mourir.

Pour les maoïstes en effet, le PCF esr révisionniste depuis les années 1950. Sa seule fonction est d’être un pare-feu au communisme véritable.

Là, il agonise, donc une dernière fois il tente d’apparaître comme super révolutionnaire. Dans le pdf de Crise (qu’on remet ici, voir page 45), il y a donc une analyse approfondie des thèses « révolutionnaires » de la motion de Fabien Roussel.

Et il est affirmé que la clef et la preuve de tout ça, c’est la réaffirmation par le PCF du concept de « capitalisme monopoliste d’Etat ».

Toute la motion se fonde dessus. D’où une critique très développée de son concepteur, Paul Boccara.

crise-23-avril-2023

Résumons.

Le PCF se maintient politiquement et va agir dans les prochaines années. Il ne se soumettra pas à La France Insoumise et Jean-Luc Mélenchon.

Les gens qui ont quitté le PCF pour prôner une fusion surtout avec La France Insoumise sont très déçus de ça. Il y en a encore dans le PCF, à autour de 15%, la majorité étant elle par contre très contente du retour affirmatif du PCF.

Pour les sortis et la minorité, le PCF court au suicide. Pour la majorité, le PCF est de retour comme force politique.

Le PRCF, qui compte occuper l’espace du PCF, dit que ce n’est qu’apparence, qu’en réalité le PCF continue sa dissolution au sein des institutions façonnées par l’Union européenne (d’où une ligne de « Frexit progressiste » qui serait nécessaire).

Il continuera de s’étioler, il n’y a rien en attendre. Il est déjà mort.

Le PCF(mlm), maoïste donc en opposition avec la ligne du PCF depuis les années 1950-1960, considère au contraire que le PCF, s’il agonise, revient à ses fondements dans un dernier sursaut pour constituer une barrière, encore une fois, à l’affirmation du communisme véritable. C’est le « révisionnisme » du PCF, qui tente une dernière réactualisation afin de tromper les gens.

C’est son rôle, sa nature : il le tente jusqu’au bout.

Trois positions, donc : le PCF va se décomposer (face à La France Insoumise), il va s’étioler (en raison du cadre européen), il va s’affirmer (dans une dernière agonie).

L’avenir dira qui a raison.