Le 10 octobre 2024, le président ukrainien Volodymyr Zelensky était accueilli au Palais de l’Elysée, pour la cinquième fois. La veille, le président français Emmanuel Macron était en déplacement dans l’Est de la France, dans un lieu tenu secret où la France forme la moitié d’une brigade ukrainienne, qui sera équipée par l’armée française.
L’armée ukrainienne est composée de 78 brigades au total, dont aucune n’avait été formée à l’étranger pour l’instant. Alors qu’elle a déjà formé au total 15 000 soldats ukrainiens, la France se place donc encore une fois au premier rang dans l’interventionnisme, ce qui est caractéristique de son escalade contre la Russie.
Rappelons aussi qu’entre le 24 février 2022 et le 1er mai 2024, la France a fourni à l’Etat ukrainien 3 milliards d’euros d’équipements militaires. Il faut ajouter à ça 2,1 milliards d’euros versés à la « Facilité européenne pour la paix ».
1 500 militaires français de l’armée de Terre s’occupent à plein temps, près de Reims (car il faut des conditions pluvieuses), d’entraîner les soldats ukrainiens, au nombre de 2 300. Ils appartiennent à trois bataillons d’infanterie et leurs appuis (génie, artillerie, surveillance sol-air et reconnaissance). C’est la moitié de la brigade. Le reste, soit 2200 soldats, est en Ukraine.
Les entraînements sont relatifs à ce qui est fourni par la France, c’est-à-dire 18 canons Caesar, 18 chars de combat légers AMX 10-RC, 10 camions (tous terrains) TRM 10 000, 128 véhicules blindés de l’avant, des missiles Crotale NG, des systèmes sol-air moyenne portée (SAMPT), des lance-roquettes unitaires, une vingtaine de postes de missiles antichars Milan.
La brigade ukrainienne en question est la 155e brigade mécanisée, toute nouvelle. Elle est aux couleurs… de l’Armée insurrectionnelle ukrainienne (UPA) de Stepan Bandera, ce qui indique que ce sont les nationalistes ukrainiens qui sont à la manoeuvre.
Le troisième bataillon mécanisé de la brigade emploie même un drapeau utilisant le symbole de la croix gammée. C’est représentatif de comment le nationalisme ukrainien fait ce qu’il veut, avec l’appui de l’Otan, dans l’indifférence générale des opinions publiques occidentales.
L’arrière-plan idéologique du nationalisme ukrainien, c’est vraiment le « Generalplan Ost » de l’Allemagne nazie avec 80 ans de retard. L’Etat ukrainien ne cache de toutes façons pas qu’il veut dépecer la Russie (et en prendre une petite partie), interdire « Tolstoïevski« , etc.
Alors que nous avons annoncé le conflit armé Russie-Ukraine six mois avant qu’il ne commence, c’est toujours aussi terrible de voir comment l’Ukraine se précipite dans le nationalisme le plus destructeur (détruisant tous les livres en russe, détruisant tous les monuments aux résistants anti-nazis), tombe dans les bras de l’Otan et de l’Union européenne en essayant de se vendre pour s’en sortir.
C’est un vrai suicide, dont le grand symbole est Volodymyr Zelensky, ce comique de profession qui, chaque jour pratiquement depuis le début du conflit, pratique un story-telling mis en place par la superpuissance américaine.
Et la France s’est placée comme simple pion au service de cette dernière, comme en témoigne toutes les positions d’Emmanuel Macron. L’idée est de faire sortir la France de la crise capitaliste commencée en 2020 en participant au dépeçage de la Russie. C’est la bataille pour le repartage du monde.
Rappelons ici que le remaniement ministériel, avec l’arrivée d’un nouveau premier ministre, a connu une exception. Sébastien Lecornu est resté ministre des Armées, comme preuve de la continuité du soutien français à l’Etat ukrainien, l’Ukraine étant utilisée comme chair à canon.
Le fait que la brigade s’appelle « Anne de Kyiv » est révélateur du story telling, également. Déjà il est dit « Kyiv » au lieu de Kiev, pour faire en sorte que ça sonne comme en ukrainien et non comme en russe, alors qu’en français on a toujours dit Kiev. Un quotidien français comme Libération avait déjà adopté cette construction, déjà typique dans tous les pays anglo-saxons.
Ensuite, Anne de Kiev est une allusion à la Rus’ de Kiev. C’est un Etat médiéval qui est l’ancêtre de la Biélorussie, de la Russie et de l’Ukraine, les « trois soeurs ». Celles-ci se sont historiquement regroupées, notamment pour faire face à l’empire de la Pologne et de la Lituanie.
Le nationalisme ukrainien, dans la fiction qu’il propose, oscille entre dire que les Ukrainiens n’ont rien à voir avec les Russes, et dire qu’ils seraient les vrais « Russes » en raison de la Rus’ de Kiev, ancêtre historique de cette partie du monde slave.
Dans tous les cas, il y a l’idée d’une « pureté » ukrainienne victime d’une Russie désignée comme Moscovie et composée d’un peuple à moitié mongol, qu’il faut écraser car maléfique.
Le nom de la brigade renforce cette idéologie, avec une part de story telling français également, puisque Anne de Kiev, qui a vécu dans la Rus’ de Kiev au 11e siècle, s’est en effet marié à Henri Ier, roi des Francs. C’est un prétexte pour inventer un lien historique entre la France et l’Ukraine.
Cette histoire de brigade est à la fois dans la continuité des choses et une vraie rupture. C’est dans la continuité du 26 février 2024, où Emmanuel Macron a lancé l’escalade française contre la Russie en parlant de la possibilité d’envoyer des troupes au sol.
C’est une rupture, car on parle tout de même de la formation de soldats qui sont ouvertement présentés comme devant ensuite immédiatement aller au combat.
C’est un pas de plus dans la logique du conflit ouvert. Un pas après l’autre, l’engrenage se pose. Et vu comment en France le régime est en crise en raison de l’absence de majorité parlementaire, la porte de sortie de crise qu’est la guerre devient d’autant plus prégnante.
Comme en 1914, la guerre met tout le monde d’accord, permet à l’esprit de conquête de s’imposer, etc.
L’agitation anti-guerre prend d’autant plus son sens. Qui veut la fin du capitalisme veut l’effondrement de la superpuissance américaine, sa défaite et celle de la France, pour que les choses basculent. En même temps, ce qui compte c’est l’esprit d’indépendance par rapport à toutes les forces qui cherchent l’hégémonie.
Le contre-exemple lamentable de ceux qui croient soutenir la Palestine en valorisant le Hamas, le Hezbollah, l’Iran est un grand avertissement. Il ne faut surtout pas faire cela. Ce qui compte, c’est le drapeau rouge, ce sont les masses, c’est le Socialisme.
Avec la leçon de Rosa Luxembourg et de Lénine : il faut lutter pour la défaite de son propre impérialisme !