Un pas de plus vers une guerre inévitable.
Depuis plusieurs semaines, la Turquie et la Grèce font en sorte que leurs avions débordent sur le territoire de l’autre, comme il en avait été parlé à la mi-août dans les points chauds du moment. La Grèce parle ainsi, pour la partie écoulée de 2022 de déjà 6100 violations de la part de l’aviation militaire turque.
Mais elle est elle-même très provocatrice. Dans les derniers jours d’août 2022, le système grec de défense aérienne S-300 en Crète a verrouillé des F-16 turcs, ce qui équivaut à des « actes hostiles ». Il y a eu également des F-16 turcs, qui accompagnaient deux bombardiers B-52H Stratofortress américains dans le cadre de l’OTAN, qui ont été harcelés par des F-16 grecs.
C’est que la Grèce aimerait gagner du temps. La Turquie considère cependant, dans un contexte où l’inflation est monstrueuse, autour de 80%, que les temps de la confrontation sont venus. Elle entretient pour ce faire de très bonnes relations avec la Russie et elle sait que l’Union européenne est confrontée à une crise énergétique significative. La fenêtre de tir est là et depuis mois, le discours turc est très violent, notamment autour de la question chypriote, ces derniers jours un nouveau pic étant passé.
Au tout début de septembre 2022, le président turc Recep Tayyip Erdoğan a tenu les propos suivants faisant allusion à la victoire turque sur la Grèce à Izmir exactement cent ans auparavant :
« Si vous allez plus loin, vous paierez un prix élevé, très élevé ! Votre occupation des îles [de la mer Égée] ne nous lie en rien. Le moment venu, nous ferons le nécessaire. Nous pouvons arriver subitement la nuit. Nous n’avons qu’un mot pour la Grèce : n’oublie pas Izmir! «
Ce « subitement la nuit » correspond à la ligne turque qui est de considérer que la Grèce n’est pas un adversaire sérieux et qu’elle peut être balayée aisément. Le 5 septembre 2022, il a ainsi exprimé son point de vue comme quoi :
« Je voudrais faire le rappel suivant à propos de la Grèce, qui a récemment intensifié son harcèlement et sa grossièreté envers notre pays. La Grèce n’est pas à notre niveau, car elle n’est pas notre égale politiquement, économiquement ou militairement. »
Et le lendemain, lors d’une visite en Bosnie-Herzégovine, une zone où la Turquie a une grande influence, il a repris son thème de « la nuit »:
« Quand nous disons que nous pouvons venir soudainement la nuit, cela signifie que nous pouvons venir soudainement une nuit. Pourquoi ai-je dit ça ? Ils ont ces îles entre leurs mains… et sur ces îles il y a des bases et bien plus encore, et si les menaces illégales continuent, alors la patience aussi prendra fin. Quand vient la fin de la patience, la fin de la patience est le salut. »
Dans ce contexte, la Grèce cherche à jouer la figure de la victime en permanence, afin d’apparaître comme la « victime » lors du conflit prochain. Elle fait en fait comme l’Ukraine vassalisée par la superpuissance américaine : on se doute bien que si l’armée ukrainienne ne s’est pas effondrée depuis six mois, c’est qu’elle était puissante, ce qui souligne comment l’OTAN en a fait un fer de lance depuis 2014.
L’affrontement gréco-turc relève pareillement de contradictions entre puissances, car il n’existe certainement pas un « impérialisme » unifié comme certains veulent le faire croire. Bien au contraire, les dissensions sont inévitables et la guerre est celle pour le repartage du monde.
La Grèce, pour avoir le beau rôle, a ainsi dénoncé, le 7 septembre 2022, les menaces de la Turquie auprès de l’OTAN et des Nations-Unies, ainsi que de l’Union européenne, celle-ci ayant immédiatement officiellement protesté contre la Turquie. Le ministre grec des affaires étrangères, Nikos Dendias, a ouvertement parlé du risque d’une « situation similaire à celle se développant sur une autre partie du continent ».
La France s’est empressée de soutenir son allié, puisqu’il y a des accords militaires secrets franco-grecs. Voici les propos de la ministre française des affaires étrangères Catherine Colonna avec le quotidien grec Kathimérini. Elle-même a été en Turquie le 5 septembre 2022 et en Grèce le lendemain, dans ce contexte explosif.
« Q – Pour la France, la Méditerranée orientale est une région importante qui réserve des opportunités d’envergure mais aussi de grands défis, d’un intérêt européen élargi. Quelle est l’amplitude du partenariat stratégique entre la Grèce et la France, en particulier dans le secteur délicat de la défense ?
R – La relation bilatérale entre la Grèce et la France est exceptionnelle, ses racines culturelles et civilisationnelles sont anciennes, elles sont aujourd’hui profondes et solides dans tous les domaines.
Le partenariat stratégique signé par le président de la République, Emmanuel Macron et le Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, il y a un an, a permis de l’enrichir.
En matière de défense, ce partenariat instaure une coopération étroite entre nos forces armées qui bénéficiera à nos alliés, et je me réjouis du choix grec d’équipements militaires français, qui promet une interopérabilité accrue pour les années à venir.
C’est une grande satisfaction de constater que, face aux nombreux défis qui sont les nôtres, Paris et Athènes partagent très souvent les mêmes approches et tendent toujours vers plus de solidarité et plus d’unité, au sein de l’Union européenne. J’ai déjà pu en discuter avec Nikos Dendias, à Paris, en juillet dernier, et nous étions convenus de poursuivre nos échanges à Athènes. »
Voici également les propos militaristes de la Déclaration de la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères a l’occasion de la visite de son homologue grec à Paris le 29 juillet 2022 :
« Nous avons bien sûr évoqué la situation en Méditerranée orientale. C’est une zone d’attention particulière pour nos deux pays. Et je veux dire même un sujet de préoccupation, au-delà de l’attention. Le ministre m’a fait part de sa grande préoccupation, voire même de son inquiétude je crois pouvoir dire, face aux récentes évolutions dans la région, aux menaces contre la souveraineté de son pays, à certaines déclarations d’un de nos partenaires.
Il s’exprimera sur ce point, mais je tiens à redire ici et devant vous comme la France l’a déjà exprimé à de nombreuses reprises, y compris par la voix du président de la République à la fin du mois de mai, que la France est l’amie et l’alliée de la Grèce.
Et qu’elle est pleinement solidaire, face à toutes les tentatives d’atteinte à la souveraineté de la Grèce, et face à toutes les menaces qui pourraient peser sur sa souveraineté.
Donc nous resterons attentifs à l’évolution de la situation et vous pouvez compter sur nous monsieur le ministre. »
La France, elle, veut la guerre contre la Turquie, plus que la Grèce qui aimerait temporiser. Et la Turquie avance. L’affrontement s’annonce – et il faudra dénoncer de manière principale l’armée française, car tel est le devoir de la Gauche alignée sur ses valeurs historiques.