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Sahra Wagenknecht fonde son parti au « Kosmos »

Le parti politique autour de Sahra Wagenknecht s’est fondé le week-end des 27-28 janvier 2024, avec des principes et un programme électoral pour les élections européennes. C’est à cette occasion d’ailleurs que le parti changera de nom, car pour l’instant il s’appelle « Alliance Sahra Wagenknecht – Raison et Justice ».

Cela tient au rôle central de Sahra Wagenknecht comme figure polarisante dans la situation actuelle en Allemagne ; elle-même est la co-présidente du parti fondé aux côtés d’Amira Mohamed Ali. Mais un autre nom sera choisi.

Pour l’instant, il y a eu 44 délégués pour officialiser le parti, qui a reçu 1,4 million d’euros de dons et n’a officialisé l’adhésion que de quelques centaines de personnes. Le temps choisi est le temps long.

Sahra Wagenknecht lors de la fondation

Il a été parlé ici et là de cet événement en France, et ce pour une raison très simple : la gauche gouvernementale française est pour la guerre à la Russie, ou du moins pas contre (y compris La France insoumise), mais Sahra Wagenknecht est, elle, totalement contre cette guerre.

On retrouve ici toute la tradition allemande, dans le prolongement de Rosa Luxembourg. L’ambiance de la fondation du parti y doit être quelque chose. Voici comment le quotidien français Les Echos présentent le lieu où s’est tenu le congrès de fondation :

« C’est au numéro 131 de l’avenue Karl-Marx, à Berlin, qu’ils se sont réunis. Dans un ancien cinéma construit au début des années 1970 par le régime communiste.

Planté au milieu de grands bâtiments staliniens, tout droit sortis d’une BD d’Enki Bilal, le Kosmos était alors la plus grande salle de cinéma d’Allemagne de l’Est.

Avec son architecture ovale, le lieu se voulait l’incarnation de la modernité communiste. »

En fait, l’avenue Karl-Marx, c’est la Karl-Marx-Allee, qui était auparavant la Stalin-Allee, une immense avenue (2,6 km de long et 89 mètres de large) emblématique de la reconstruction architecturale réaliste socialiste après 1945.

Et Sahra Wagenknecht est arrivée habillée… tout en rouge. Tout un symbole.

Mais ce n’est pas tout. Le Kosmos est aujourd’hui une salle pour les réunions et les meetings et c’était effectivement un cinéma en RDA. Il était consacré aux premières… dont celle du film Les Aventures de Werner Holt. Sorti en 1965, il a été vu par trois millions de personnes et le roman dont est tiré le film, écrit par Dieter Noll, avait été tiré à deux millions d’exemplaires.

La première du film Les Aventures de Werner Holt, au Kosmos

Le roman raconte la prise de conscience d’un jeune Allemand de ce qu’est vraiment le nazisme. Et il faut bien comprendre que ça, c’est l’arrière-plan de Sahra Wagenknecht.

Lors de la fondation du parti, dont on trouvera ici les principes et objectifs, il n’a pas été parlé de Socialisme, mais toujours de l’unité des gens du commun. Les commentateurs journalistiques français (ou allemands) disent alors : c’est donc un discours populiste, ou bien d’extrême-Droite.

C’est là où le manque de culture historique se révèle. Car Sahra Wagenknecht est historiquement issue de l’aile gauche de la « gauche de la gauche » allemande et elle est connue pour ne jamais critiquer la République démocratique allemande.

Et quel était le noyau idéologique de la RDA ? C’était, comme dans le roman et le film mentionnés, le traumatisme de la défaite de la Gauche face au nazisme. Pourquoi le peuple a-t-il choisi les nazis plutôt que les communistes ? Pourquoi n’y a-t-il eu une prise de conscience de ce qu’est le nazisme que de la part d’une minorité de gens ?

Car les communistes allemands ne se sont pas mentis à eux-mêmes, ils n’ont jamais prétendu que les Allemands avaient été manipulés, hypnotisés, ou que sait-on encore. Ils avaient conscience des problèmes historiques dans le parcours national allemand.

D’où, dès 1945, la volonté des communistes de fusionner avec les socialistes et d’établir une alliance avec plusieurs partis (ce qui continuera dans les années 1960, 1970, 1980, même si de manière fictive). Et le modèle de tout cela, c’est le Front populaire français, considéré comme l’opération « miraculeuse » sauvant de l’extrême-Droite.

Si on veut comprendre Sahra Wagenknecht, il suffit de voir comme les communistes français se sont alignés sur les centristes en 1934-1935 pour établir le Front populaire. C’est précisément la même ligne d’unir « les gens du commun », ceux qui travaillent, contre une poignée de va-t-en guerre de la haute bourgeoisie.

D’ailleurs, à l’époque, on visait les « deux cents familles » – une expression inventée par le centriste Édouard Daladier qui l’emploie le premier lors du congrès du Parti radical-socialiste de 1934. Et Sahra Wagenknecht parle elle des « 10 000 » d’en haut.

Ainsi, Sahra Wagenknecht entend parler à la classe moyenne et avec son approche, on croit lire le PCF de 1935, avec cette idée que le capitalisme ne tourne plus rond et que seule l’alliance populaire contre les « dominants » peut empêcher le désastre.

C’est une très bonne chose, si on part du principe de faire un front le plus large possible contre la guerre.

C’est par contre erroné, s’il est escompté que va s’ouvrir, comme par magie, une voie à une autre société. Là-dessus, Sahra Wagenknecht a une approche très RDA : il suffit d’unir les gens contre la guerre et les choses iront d’elles-même dans l’autre sens.

C’est une sous-estimation de la question de la culture. D’ailleurs, c’est le grand problème de la nature de son parti, qui oppose les petites gens au style de vie grand-bourgeois ou bobo urbain. Sauf que les petites gens, en Allemagne, ce sont les outils Lidl pour s’occuper de « son jardin » en mangeant « ses » saucisses et en buvant « sa » bière. On ne va pas loin avec ça.

Si on dit que Sahra Wagenknecht est un obstacle à la guerre et une contribution au rejet de la « gauche » post-moderne, alors c’est très bien. Et c’est déjà effectivement quelque chose !

Mais courir derrière les « classes moyennes », quitte à tout accepter de leur part, est erroné : il faut au contraire qu’elles se plient au prolétariat.

En France, on ne va pas courir derrière les gilets jaunes, les antivax, ceux qui ne pensent qu’à leurs retraites en 2023 ou les agriculteurs de 2024. D’ailleurs, ces gens n’en ont rien à faire du Socialisme ; ils vivent dans le fantasme petit-bourgeois qu’ils vont trouver une « troisième voie ».

Qu’il faille leur ôter le terrain pour les amener à bon port, à la base, oui. En ce sens, ce que fait Sahra Wagenknecht est utile à connaître. Mais sans poids culturel – et idéologique – le poids des traditions capitalistes l’emportera et c’est le prolétariat qui se retrouvera à la traîne des « classes moyennes » et de leur mode de vie « beauf » déjà largement répandu et triomphant.

Les mesures « socialistes », même bien présentées, « neutralisées », ne suffisent pas en soi. Il faut le drapeau, la conscience, les cœurs, la culture. Sans cela, on n’a rien, rien du tout !

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Principes fondateurs du parti de Sahra Wagenknecht

Ils ont été adoptés en janvier 2024 au congrès de fondation à Berlin en Allemagne.

« Notre pays ne fait pas bonne figure. Depuis des années, il est gouverné en mettant de côté les souhaits de la majorité.

Au lieu de récompenser les réalisations, il a été redistribué depuis les durs au labeur aux 10 000 d’en haut.

Au lieu d’investir dans un État compétent et de bons services public, les politiciens ont servi les vœux de lobbys influents, et par là vidé les caisses publiques.

Au lieu de prendre soin de la liberté et de la diversité des opinions, un style autoritaire de politique s’est répandu, qui entend dicter aux citoyens comment ils vivent, comment ils se chauffent, comment ils pensent et comment ils parlent.

Beaucoup de décisions politiques semblent prises sans plan d’ensemble, à courte vue et en partie même de manière incompétente.

Sans un redémarrage, notre industrie et notre classe moyenne sont en jeu.

Beaucoup de gens ont perdu confiance en l’État et ne se sentent représentés par aucun des partis existant. Ils ont, à juste titre, l’impression de ne plus vivre dans la République fédérale qui a existé auparavant.

Ils s’inquiètent pour les leurs et l’avenir de leurs enfants. Ils souhaitent une politique responsable de conservation de nos atouts économiques, de compensation sociale et de répartition juste de la prospérité, d’une coexistence pacifique des peuples et d’une préservation des fondements naturels de notre vie.

« L’Alliance Sahra Wagenknecht – Raison et Justice » a été fondée, afin de redonner la parole à ces gens. Nous sommes pour le retour de la raison en politique.

L’Allemagne a besoin d’une économie forte, innovante, et de la justice sociale, de la paix et du commerce équitable, du respect de la liberté individuelle de ses citoyens et d’une culture ouverte de discussion.

Il y a besoin de politiciens fiables, qui se sentent obligés par des objectifs.

Les membres du parti soutiennent les principes et objectifs qui suivent :

Raison économique

Notre pays dispose encore d’une industrie solide et d’une classe moyenne prospère et innovante.

Mais les conditions générales se sont considérablement détériorée ces dernières années. Notre infrastructure publique est dans une situation embarrassante pour un pays industriel leader.

Pratiquement aucun train ne circule à l’heure, en tant que patient de l’assurance maladie obligatoire, on attend des mois pour un rendez-vous avec un médecin spécialiste, il manque des dizaines de milliers d’enseignants, de places en garderie et d’ appartements.

Des rues et des ponts délabrés, des trous dans les réseaux et un internet lent, des administrations débordées et des réglementations inutiles rendent la vie difficile précisément aux plus petites et moyennes entreprises.

Le système scolaire allemand avec 16 différents niveaux d’études, des classes beaucoup trop nombreuses et une sélection anticipée, sabote les chances des enfants de familles moins aisées quant aux opportunités d’éducation et dans la vie, et échoue en même temps à la tâche de former des travailleurs qualifiés dont l’économie a un besoin pressant.

Depuis qu’avec les sanctions russes et la prétendue politique climatique, l’énergie est soudainement également devenue plus chère, ce qui menace notre pays, c’est la perte d’industries importantes et des centaines de milliers d’emplois bien rémunérés.

De nombreuses entreprises envisagent une délocalisation de leur production à l’étranger. D’autres sont menacées dans leur existence même.

La politique, influencée et achetée par les grandes entreprises [les konzerns] et l’échec des autorités antitrust ont créé une économie de marché dans laquelle de nombreux marchés ne fonctionnent plus.

Se sont mises en place de grandes entreprises qui dominent le marché, des monopoles financiers surpuissants comme Blackrock et des monopoles numériques comme Amazon, Alphabet, Facebook, Microsoft et Apple, qui imposent leur tribut aux autres participants du marché, portent atteinte à la compétition et détruisant la démocratie.

Dans une mesure considérable, l’inflation actuelle est également un résultat d’un échec du marché provoqué par un pouvoir économique trop grand.

Nous aspirons à une économie innovante, avec une concurrence loyale, des emplois sûrs et bien payés, une forte proportion de création industrielle de valeur, une fiscalité équitable et une classe moyenne forte.

Pour ça, nous voulons limiter le pouvoir de marché et dégrouper les entreprises dominants le marché.

Là où les monopoles sont inévitables, il faut confier les tâches à des prestataires à but non lucratif.

L’industrie allemande est l’épine dorsale de notre prospérité et doit être conserver. Nous avons de nouveau besoin de davantage de technologies d’avenir made in Germany, plus de champions cachés et non pas moins.

Afin d’empêcher le déclin économique de notre pays, des investissements massifs dans notre système éducatif, notre infrastructure publique et dans des administrations compétentes, sont nécessaires.

Nous avons besoin de fonds futurs pour le soutien des entreprises locales innovantes et des start-up, et non des milliards de subventions pour les monopoles d’outre-Atlantique.

L’Allemagne comme pays fort en exportations et pauvre en matières premières a besoin d’une politique de commerce extérieur fondée sur des relations commerciales stables avec le plus grand nombre de partenaires, au lieu de la formation de nouveaux blocs et de sanctions sans bornes, et qui assure notre approvisionnement en matières premières et en énergie bon marché.

Le changement du climat mondial et la destruction de nos moyens naturels de subsistance sont de sérieux défis, que la politique ne doit pas ignorer.

Cependant, une politique environnementale et de climat sérieuse requiert de l’honnêteté : l’approvisionnement énergétique de l’Allemagne, eu égard aux technologies d’aujourd’hui, ne saurait être uniquement assurée par les énergies renouvelables.

Un activisme aveugle et des mesures mal pensées n’aident pas le climat, mais mettent en danger notre substance économique, rendent la vie des gens plus chère et minent l’acceptation du public de mesures sensées de protection du climat.

La contribution la plus importante qu’un pays comme l’Allemagne puisse réaliser dans la lutte contre le changement climatique et la destruction de l’environnement est le développement de technologies clés innovantes pour une économie du futur neutre sur le plan du climat et acceptable par la nature.

Justice sociale

Dans notre pays, depuis des années, l’inégalité grandit.

Des millions de personnes travaillent dur, afin de permettre une vie bonne pour eux-mêmes et leurs familles.

Ils sont ceux qui font fonctionner notre société et payent une grande partie des impôts.

Au lieu d’avoir en retour le respect et la protection sociale, leur existence est devenue moins certaine et plus lourde dans les dernières décennies.

Beaucoup de gens, malgré un emploi à temps plein, ne parviennent avec leur revenu pratiquement pas au bout du mois.

La promesse d’avancement de l’économie sociale de marché n’est plus d’actualité, la prospérité personnelle dépend depuis longtemps avant tout du statut social des parents.

La concentration des richesses en Allemagne est aujourd’hui aussi élevé qu’elle l’était avant le début de la Première Guerre mondiale, lorsque le Kaiser régnait encore à Berlin.

Alors que les monopole, même en temps de crise, versent des dividendes records, les files d’attente aux associations caritatives sont de plus en plus longues.

Même ceux qui ont travaillé pendant des années et cotisé pour la sécurité sociale se retrouvent quémandeurs plein d’amertume après une année de chômage.

Parce qu’il n’y a pas de places en garderie et que notre société est tout sauf favorable au cadre familial, les parents célibataires et leurs enfants en particulier vivent souvent dans la pauvreté, qui n’est pas devenue plus supportable par le changement de nom de Hartz IV [réforme de 2005 supprimant des droits sociaux].

Des millions de personnes âgées ne peuvent pas, après une une longue vie professionnelle, profiter de leur retraite, parce que leurs pensions sont abaissées de manière humiliante.

Les appartements, hôpitaux, établissements de soins, cabinets médicaux et bien d’autres d’autres institutions sociales importantes ont été et sont vendus à des chasseurs de rendement

Depuis, les coûts ont augmenté tandis que coule la qualité des services pour la majorité des gens.

Nous voulons stopper la désintégration du vivre-ensemble social et de nouveau aligner la politique sur le bien commun.

Notre objectif est une société méritocratique juste avec de véritables égalité des chances et un niveau élevé de sécurité sociale.

Une économie hautement productive a besoin d’employés qualifiés et motivés. Les conditions préalables pour cela, ce sont des salaires compétitifs, des emplois sûrs et de bonnes conditions de travail.

C’est également vrai pour les salariés des métiers de services, qui sont tout aussi importants pour notre société que les bons ingénieurs et ingénieurs en mécatronique.

Afin d’éviter la pression sur les salaires, la convention collective doit à nouveau être renforcée et la validité générale des conventions collectives être facilitée.

Nous soutenons les employés, leurs syndicats et les comités d’entreprise et du personnel dans leur engagement en faveur des droits des travailleurs et d’un bon travail.

En même temps, notre pays en a besoin un État-providence fiable, qui démonte les peurs de l’avenir et protège de la chute en cas de maladie, de chômage et de vieillesse.

La privatisation et la commercialisation des services existentiels, comme dans les domaines de la santé, des soins ou du logement, doivent cesser ; les prestataires à but non lucratif doivent avoir la priorité sur ces secteurs.

Ce qu’il faut, c’est un système fiscal équitable qui allège le fardeau des faibles revenus et empêche les grandes entreprises et les particuliers très riches de se soustraire à leur juste part du financement de la communauté.

La prospérité personnelle ne doit pas être une question d’origine sociale, mais doit être le résultat d’un travail acharné et d’efforts individuels. Chaque enfant a le droit de voir ses talents découverts et promus.

La paix

Notre politique étrangère se situe dans la tradition du chancelier fédéral Willy Brandt et du président soviétique Mikhaïl Gorbatchev, qui ont opposé à la pensée et l’action dans la logique de la guerre froide une politique de détente, d’équilibre des intérêts et de coopération internationale.

La solution des conflits par les moyens militaires, nous la rejetons fondamentalement.

Nous nous opposons à ce que de plus en plus de ressources vont aux armes et aux équipements de guerre, au lieu d’aller à l’éducation de nos enfants, la recherche de technologies protectrices de l’environnement ou aux installations de santé et de soins.

L’armement nucléaire et l’escalade des conflits entre les puissances nucléaires mettent la survie du l’humanité en danger et il faut y mettre fin.

Nous luttons pour une nouvelle ère de détente, et de nouveaux contrats de désarmement et de sécurité commune.

La Bundeswehr [l’armée allemande] a pour mission de protéger notre pays. Pour cette tâche, elle doit être adéquatement équipée.

Nous refusons le déploiement de soldats allemands dans les guerres internationales, tout comme leur stationnement à la frontière russe ou en mer de Chine méridionale.

Une alliance militaire, dont la puissance dominante a ces dernières années attaqué cinq pays en violation du droit international, avec plus d’un million de personnes tués dans ces guerres, alimente les sentiments de menace et les réactions de défense et contribue ainsi à l’instabilité générale.

Au lieu d’un instrument de pouvoir pour des objectifs géopolitiques, nous avons besoin d’une union de défense alignée de manière défensive, qui respecte les principes de la Charte des Nations unies, vise au désarmement au lieu de s’engager dans la course aux armements, et dans laquelle les membres sont sur un pied d’égalité.

L’Europe a besoin d’une architecture de sécurité stable qui, à long terme, devrait aussi inclure la Russie.

Notre pays mérite un politique sûre d’elle-même, qui place l’accent sur le bien-être de ses citoyens et qui soit porté par la considération que les intérêts américains diffèrent parfois grandement des nôtres.

Notre objectif est un Europe indépendante des démocraties souveraines dans un monde multipolaire, et non pas une nouvelle confrontation des blocs, dans laquelle l’Europe se retrouve comprimée entre les États-Unis et un bloc en formation prenant toujours plus conscience de lui-même, autour de la Chine et de la Russie.

La liberté

Nous voulons redonner souffle à une formation démocratique des vœux, élargir le processus décisionnel démocratique et protéger la liberté personnelle.

Nous rejetons les idéologies extrémistes de droite, racistes et promptes à la violence.

La Cancel Culture, la pression à la conformité et le rétrécissement croissant de l’éventail d’opinions sont incompatibles avec les principes d’une société libre.

Il en va de même pour le nouvel autoritarisme politique, qui prétend éduquer les gens et réglementer leur mode de vie ou leur langage.

Nous condamnons les tentatives de surveillance générale et de manipulation des gens par les monopoles, services secrets et gouvernements.

L’immigration et la coexistence de différentes cultures peuvent être un enrichissement. Mais cela ne s’applique que tant que l’afflux est limité à un certain ordre de grandeur, ne déborde pas notre pays et ses infrastructures, et tant que l’intégration est activement promu et réussit.

Nous le savons : le prix d’une concurrence accrue pour des logements abordables, des emplois à bas salaires et pour une intégration ratée sont payés en premier lieu par ceux qui n’ont pas leur place au soleil.

Toute personne politiquement persécutée dans son pays a droit à l’asile.

Mais la migration n’est pas la solution au problème de la pauvreté dans notre monde.

Au lieu de cela, nous avons besoin des relations économiques mondiales équitables et une politique qui s’efforce de produire davantage de perspectives dans les pays d’origine.

Une société dont les acteurs les plus puissants ne sont motivés qu’à gagner plus d’argent au moyen de l’argent conduit à des inégalités croissantes, jusqu’à la destruction nos ressources naturelles et à la guerre.

Nous y opposons nos idées de sens commun, de responsabilité et de vivre-ensemble, à qui nous souhaitons redonner une chance par la modification des rapports de force.

Notre objectif est une société dans laquelle le bien commun est supérieur aux intérêts égoïstes, où ce ne sont pas les tricheurs et les joueurs qui gagnent, mais ceux qui réalisent un travail honnête et bon, sincère et solide.

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La contestation agricole de janvier 2024

Il n’y a plus de paysans en France. Il n’existe au 21e siècle plus que des entrepreneurs travaillant dans le domaine agricole, systématiquement au service de l’agro-industrie. Si les paysans ont été le pilier du pays, en tous cas numériquement, pendant des siècles, le capitalisme a tout changé au 20e siècle.

Il y a eu l’exode rural, c’est-à-dire de la main-d’œuvre devenant ouvrière allant massivement vers les villes. Puis il y a eu l’industrialisation des campagnes et plus récemment la tertiarisation des campagnes, alors que dans le même temps les aires urbaines se sont étendues loin à la campagne.

En 2020, la France métropolitaine comptait 389 800 exploitations agricoles, environ 100 000 de moins qu’en 2010. Cinquante ans auparavant, en 1970, il y en avait encore 1,6 millions, alors qu’en 1900, près d’un Français sur deux travaillait encore dans les champs…

Les agriculteurs d’aujourd’hui sont ceux qui ont racheté petit à petit les terres des autres, arrachant au passage les haies et utilisant allégrement tout ce que l’industrie leur a vendu comme produits chimiques et engins agricoles. Il y a bien sûr des exceptions, mais c’est à la marge. Et il ne s’agit pas de paysans, mais plutôt de petits entrepreneurs en mode artisanal, avec souvent initialement une vie urbaine ou intellectuelle.

L’aspect positif, c’est que dans un pays comme la France, la population est sortie de la précarité alimentaire. Les risques de maladies végétales et animales, les intempéries, les crises économiques sont relativement maîtrisés et en tous cas ils sont couverts par la quantité de production (concentrée à l’échelle nationale avec des interactions mondiales).

L’aspect négatif, c’est que l’agriculture ne sert plus à nourrir la population, mais à fournir de la matière première pour que l’agro-industrie fabrique des marchandises alimentaires. Ces marchandises sont généralement de très mauvaise qualité nutritives, voire franchement nocives, en plus d’être le plus souvent issue d’une souffrance animale abominable.

Les agriculteurs d’aujourd’hui n’ont pas subi ce système : ils sont dans leur très grandes majorité de droite, c’est-à-dire qu’ils sont réactionnaires sur le plan des mœurs et libéraux économiquement. Ils ont allègrement participé à ce système tout autant qu’ils l’ont promu. Le salon de l’Agriculture de Paris exprime parfaitement cette mentalité.

Les plus mesquins d’entre eux s’en sont très bien sortis financièrement et sont devenus de riches entrepreneurs, roulant en 4×4 flambant neuf et employant une myriade de petites-mains, souvent étrangères pour mieux les exploiter. On imaginera ici un riche viticulteur prenant régulièrement l’avion pour négocier de nouveau marchés à l’export.

Les plus naïfs d’entre eux travaillent sans merci chaque jour de la semaine, ne prennent jamais de vacances et sont l’otage des banques, pour un bénéfice commercial très maigre, offrant une vie à la limite de la précarité. On imaginera ici un éleveur de vaches laitières complètement asphyxié par la multinationale Lactalis à qui il vend tant bien que mal sa marchandise.

Bien entendu, ce sont les premiers qui dirigent les organismes représentatifs des agriculteurs, mais ce sont les seconds qui sont mis en avant pour faire pleurer dans les chaumières.

C’est exactement ce qui se passe en janvier 2024 avec les différents mouvements de contestations et de blocages/manifestations. Deux organisations portent le mouvement, plus ou moins en concurrence.

Il y a la FNSEA (et sa succursale Les jeunes agriculteurs), l’organisation majoritaire qui a recueilli plus de 55 % des voix lors des dernières élections des chambres d’agriculture et qui revendique 212 000 membres. Elle est libérale sur un mode moderniste et turbo-capitaliste, avec une intégration totale à la politique agricole de l’Union européenne.

Et puis il y a la Coordination rurale, qui a recueilli environ 20 % des voix lors des dernières élections des chambres d’agriculture et qui revendique 15 000 membres. Elle est libérale aussi, mais sur un mode plus traditionnel et conservateur ; elle puise son origine dans la critique de la politique agricole de l’Union européenne, avec une tendance au nationalisme.

La 3e organisation est la Confédération paysanne, qui a recueilli un peu moins de 20 % des voix lors des dernières élections des chambres d’agriculture et qui revendique 10 000 membres, mais elle est en retrait de l’origine du mouvement en janvier 2024. Elle est aussi libérale, mais avec une prétention sociale et écologiste, et surtout un conservatisme romantique (d’où l’utilisation abusive du terme « paysan » dans son nom).

La FNSEA est depuis plusieurs semaines à l’origine de la mise à l’envers des panneaux d’entrées d’agglomérations dans les campagnes. La coordination rurale est plutôt à l’origine de blocages importants dans le sud de la France. Tout ce petit monde converge maintenant dans l’idée de bloquer Paris et le marché international de Rungis.

De manière générale, ils dénoncent des charges en hausse, des normes contraignantes (en général des normes écologiques, parfois quelques normes sanitaires), des prix bas, une pression de l’agro-industrie, une concurrence européenne ou mondiale inéquitable ainsi que des négociations insatisfaisantes avec la grande distribution.

Il y a ici forcément les effets de la crise du capitalisme, qui touche tous les secteurs et impose une pression toujours plus forte sur les petites et moyennes entreprises de la part des monopoles, les grands groupes internationaux. Les entreprises agricoles même les plus importantes restent en fait des PME, elles ne pèsent que très peu face aux monopoles.

C’est pour cela qu’il y a une crise dans ce domaine, une crise propre au capitalisme, qui nécessite une analyse approfondie.

Néanmoins, la question se pose aujourd’hui pour la Gauche de savoir s’il faut soutenir ce mouvement, en tous cas les plus petits agriculteurs subissant une pression accrue. Ceux-ci sont l’équivalent rural des immigrés livreurs Uber dans les villes : ils sont indépendants sur le papier, mais sont totalement soumis à un grand groupe en pratique ; leur indépendance ne signifie que précarité, sans aucune garantie propre au salariat.

Le problème réside précisément ici : les petits agriculteurs s’imaginent pouvoir maintenir leur indépendance, ils croient en la fiction d’une meilleure négociation des prix agricoles pour assumer leur rémunération de chef d’entreprise. Ils nient totalement la crise du capitalisme. Ils n’imaginent aucunement s’émanciper des plus gros capitalistes agricoles, ni s’affronter aux monopoles de l’agro-industrie.

S’il y avait des agriculteurs voulant produire une nourriture saine et de qualité, avec une perspective démocratique, avec l’ambition de respecter mieux l’environnement et les animaux… Mais il y a là des gens déversant du lisier, brûlant des pneus, revendiquant de manière racoleuse et outrancière.

Il y a des agriculteurs qui n’en ont en réalité pas grand-chose à faire de ce qu’ils vendent, du moment qu’ils peuvent le vendre sans trop de contraintes administratives, ni de normes écologiques et sanitaires. Et puis, voire surtout, il y a en fait là-dedans énormément de gens qui sont des éleveurs ayant mis en place un système carcéral pour exploiter des animaux servant de matière première à l’agro-industrie.

La Gauche ne peut certainement pas apprécier cela. La contestation agricole de janvier 2024 est clairement et largement de droite. L’image d’Épinal de l’agriculteur qui serait un paysan aimant nourrir les gens est une escroquerie digne des pires films publicitaires. L’agriculture en France en 2024 est monstrueuse, entièrement soumise à une agro-industrie destructrice.

À notre époque, c’est tout ou rien. Soit on change tout en faisant table rase du passé, soit rien ne change en bien, seulement en pire. La crise est bien trop profonde.

Le problème, c’est que personne ne voit ça, ou plutôt ne veut voir ça. Les sondages ne sont pas du tout étonnants : ce serait près de 90 % des Français qui soutiennent la contestation des entrepreneurs agricoles. Avec un tel panorama, la France est mûre pour une victoire de l’extrême-Droite, cela ne fait aucun doute. Nous aurons bientôt notre Donald Trump, notre Jair Bolsonaro, notre Javier Milei.

Des gilets jaunes aux agriculteurs en passant par le mouvement contre la réforme des retraites, les Français veulent simplement maintenir leur niveau de vie et rien d’autre. Ils n’ont ni conscience, ni envergure ; ils se ratatinent à l’image de l’occident.

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Un gouvernement Attal pour faire face à la crise de 2024

Le président français Emmanuel Macron a décidé de modifier la personne tenant le poste de Premier ministre. C’est désormais Gabriel Attal qui est chargé du rôle essentiel de gouverner. Et si en apparence, on a un gouvernement marqué à droite pour ceux qui raisonnent à l’ancienne, en réalité, dans le contexte politique français, on a un gouvernement bourgeois moderne, taillé pour faire face à la crise de manière offensive.

Regardons par exemple le symbole qui est celui du Facebook officiel de gouvernement.fr. Il représente parfaitement l’approche bourgeoise moderne dominante. Les bourgeois « réacs », c’est du passé, désormais tout se vend, tout s’achète et il faut être dans les combines internationales du capitalisme occidental. C’est comme ça que ça se passe et pas autrement.

Gabriel Attal a d’ailleurs appartenu au Parti socialiste de 2006 à 2016. On est ici dans la bourgeoisie urbaine, financière, libérale, cosmopolite, pour qui tout est un terrain de jeu capitaliste.

Et le nouveau ministre des Affaires étrangères s’appelle Stéphane Séjourné. Ce n’est pas un secret qu’il a été plusieurs années en couple avec Gabriel Attal. Ce fils d’expat. – son père a fait carrière à l’international – ne vient pas de la droite non plus : il a été au Mouvement des jeunes socialistes et à l’Unef.

On est dans la bourgeoisie moderne, libérale, LGBT, alignée sur l’Otan, celle pour qui libéral rythme avec social, afin de préserver le paradis occidental, base consumériste pour la bourgeoisie vivant entre elle. On parle de gens vivant dans la richesse, dans des appartements somptueux dans les quartiers chics de Paris (ou des très grandes villes), voyageant sans cesse, disposant de résidences secondaires et de comptes en banque bien garnis, etc.

Le premier voyage de Stéphane Séjourné est évidement en Ukraine, où il s’est précipité dès sa nomination pour une visite présentée comme un « message adressé aux Ukrainiens ». Il a expliqué que:

« C’est en Ukraine que se joue la défense des principes fondamentaux du droit international, des valeurs de l’Europe, mais aussi des intérêts de la sécurité des Français. »

Par conséquent, « en dépit de la multiplication des crises », il faut savoir que « l’Ukraine est et restera la priorité de la France ».

C’est là tout à fait en phase avec l’idéologie dominante du monde occidental, libéral et consommateur, et bien sûr décadent. L’occident n’est plus qu’un parasite mondial, il n’a plus de dynamique, il ne vit que de la vente des rêves arc-en-ciel et du rêve américain de faire carrière dans la finance.

C’est tellement vrai que le gouvernement contient deux aberrations. La ministre des Sports est également ministre de l’Éducation nationale. Vu le travail à mener, c’est impossible. Il est dit que le Premier ministre, qui a été quelques mois ministre de l’Éducation nationale, va s’en occuper. Cela ne tient pas debout pour autant. On est dans le doux-rêve d’une bourgeoisie déconnectée.

On a également la ministre du Travail qui a la double casquette de ministre de la Santé. C’est totalement aberrant de par l’immense ampleur du travail à mener. C’est là une centralisation incohérente, où le subjectivisme est total. On confine au délire, la bourgeoisie perd les pédales pour croire qu’une telle démarche puisse tenir.

Dans un même ordre d’idées décadentes, on a Rachida Dati, ministre de la Culture, alors qu’elle est totalement extérieure à la question de la culture. Elle est nommée pour son passé de membre de la Droite et car elle est d’origine immigrée et populaire. C’est fictif, artificiel, comme tout ce qu’entreprend la bourgeoisie.

Et il faut arrêter le populisme et le misérabilisme délirant des gens de Gauche se croyant en 1983. Non seulement c’est faux, mais en plus cela désarme face à l’ennemi.

On a, si on regarde les choses vraiment, affaire ici à la bourgeoisie moderne, qui n’est plus raciste, pour qui tout est échange international, pour qui la superpuissance américaine est la gardienne du temple capitaliste avec l’Otan, pour qui l’Union européenne est l’organe supra-étatique chargé à l’arrière-plan d’assurer la modernisation.

La France est dans les faits pratiquement un protectorat américain, avec les institutions européennes chargées de la surveiller, notamment avec Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (depuis 2019), après avoir dirigé le FMI (de 2011 à 2019) et avoir été ministre de l’Économie (de 2007 à 2011).

Alors, si ce n’est pas un gouvernement « de droite », c’est quoi ? C’est un gouvernement de choc de la bourgeoisie moderne, libérale, cosmopolite, décadente, pour passer l’année 2024 qui va être celle de la crise.

C’est la tentative de passer en force, dans la logique Occident – Otan – LGBT.

C’est la tentative de ré-impulser le capitalisme occidental en prenant le dessus sur les concurrents nouveaux, surtout la superpuissance chinoise, mais également la Russie qui doit être démantelée.

C’est le rêve vain d’une classe décadente.

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Événements significatifs

L’Équateur bascule dans le chaos des cartels

Il a été dit et répété ici que le chaos l’emporte sur la planète, que la barbarie du Hamas le 7 octobre – jusqu’au viol de femmes tout en les mutilant – n’est qu’une expression parmi d’autres, dont font partie les cartels de la drogue. Et bien désormais, c’est l’Équateur qui a basculé, déstabilisé par des anciens gangs se professionnalisant et se militarisant sous l’impulsion des richissimes cartels colombiens et mexicains.

L’Équateur est un petit pays d’Amérique latine, peuplé de 15 millions d’habitants ; sa moyenne d’âge est de 25 ans. C’est typiquement un pays dont la structure est d’un côté féodal avec des barons locaux, de la corruption… et de l’autre colonial, avec une domination complète de la part des grandes puissances, américaine en tête.

Et s’il y a quelques années encore, le pays était le plus sûr d’Amérique latine, en très peu de temps, tout a basculé. Les assassinats ont augmenté de 800% entre 2017 et 2022. Il y avait déjà des gangs, comme les Choneros, cependant leur envergure a pris d’un coup une dimension énorme. Au point que tout a basculé lorsque le leader des Choneros, José Adolfo Macías Salazar, alias « Fito », s’est littéralement évaporé d’une prison de haute sécurité de Guayaqil, la seconde ville du pays, le 7 février 2023.

« Fito » faisait déjà ce qu’il voulait dans la prison, comme se filmer pour une vidéo d’un chant en son honneur, dans la tradition des cartels mexicains. Il avait déjà été arrêté en 2000, est parvenu à s’enfuir en 2013 pour être repris dans la foulée. Sa nouvelle évasion, à la veille d’un contrôle général de la prison, reflète l’échec total de l’État.

D’où l’état d’urgence proclamé par le jeune président (depuis novembre 2023) Daniel Noboa, avec la mobilisation et l’intervention des forces armées et de la police nationale » afin de « garantir la souveraineté et l’intégrité nationale contre le crime organisé, les organisations terroristes et les belligérants non étatiques.

Daniel Noboa, président de l’Équateur

Daniel Noboa est le fils d’une des plus grandes figures de la haute bourgeoisie équatorienne, qui contrôle une partie significative de la production de bananes, la première exportation du pays (et lui-même candidat à la présidentielle en 1998, 2002, 2006, 2009 et 2013).

Le Pérou voisin a également annoncé l’état d’urgence sur les 1400 km de frontières avec l’Équateur. Ce pays, avec la Colombie voisine de l’autre côté, est évidemment le fournisseur de cocaïne aux gangs, qui ensuite l’expédie vers les pays occidentaux, par l’intermédiaire du Mexique parfois.

Deux jours après l’évasion de « Fito », c’est Fabricio Colon Pico qui s’est évadé d’une prison du centre du pays : c’est un chef des Los Lobos, une organisation concurrente des Choneros et lié, tout comme Los Tiguerones, au Cártel de Jalisco Nueva Generación (CJNG) du Mexique. Les Choneros sont eux liés au Cartel de Sinaloa, le grand rival du CJNG.

Et le même jour que cette seconde évasion, les plateaux télé d’une chaîne publique, TC Televisión, à Guayaquil ont été occupés en direct par des membres de gang, pour une prise d’otages.

Si on regarde les faits en face, on peut dire que les cartels mexicains, en liaison avec les mafias de Colombie (mais également de toute l’ex-Yougoslavie, ainsi que d’Albanie) sont devenus si puissants qu’ils ont désormais des satellites en Équateur capable de s’affirmer militairement et par la corruption.

L’État équatorien tente d’empêcher qu’on atteigne une telle situation où plus aucun retour en arrière n’est possible. Au sens strict, les forces des gangs équatoriens ne représentent pas un obstacle insurmontable pour l’armée.

Mais le problème, c’est la tendance historique à la décomposition : depuis 2020, tout se casse la figure, plus rien ne tient et, dans tous les cas, on va dans une logique de guerre et de seigneurs de la guerre. Seul le peuple en armes peut s’y opposer et on devine le défi que cela représente pour l’Amérique latine.

On parle beaucoup de l’Afrique, dont une partie de la population souhaite largement migrer, mais c’est le cas également en Amérique latine, où plus aucun pays n’est stable. Dans tous les cas, on va vers une situation d’explosion… Les dominos tombent les uns après les autres et la crise en Équateur n’est pas la crise en elle-même, mais simplement une expression de celle-ci, qui va en s’amplifiant.

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Événements significatifs

Les Jeux olympiques, une affaire française

Les Jeux olympiques modernes sont une invention française, avec la figure de Pierre de Coubertin qui en est directement l’instigateur. C’est à l’université de la Sorbonne à Paris qu’il a pour la première fois présenté publiquement son idée d’une grande compétition mondiale et pluridisciplinaire entre différentes nations.

C’était à la fin de l’année 1892, lors d’une conférence internationale de l’Union des sociétés françaises des sports athlétiques, sous le parrainage du Président de la République Marie François Sadi Carnot et la présidence du Grand Duc Vladimir de Russie.

La France était alors une grande puissance mondiale, dont l’Angleterre était la grande rivale, ou plutôt la concurrente. Cette dernière était tournée surtout son propre empire, avec une domination directe et totale ; la France, par opposition, prétendait à une vocation universelle, pour une domination plus épurée, plus diffuse.

Les Jeux olympiques modernes ont été inventés dans ce contexte et précisément pour servir le jeu de grande puissance de la France, c’est-à-dire sa propre influence dans le développement du grand marché capitaliste mondial.

Bien sûr, les choses n’étaient pas formulées (ni même comprises) ainsi et c’est par le prisme de la culture que Pierre de Coubertin est passé pour diriger son œuvre. La mode était à l’hellénisme (la fascination pour la Grèce antique) et le sport était en plein développement : l’idée était alors évidente de proposer de nouveaux jeux « olympiques ».

Le baron Pierre de Coubertin n’était pas le seul à avoir eu l’idée, son grand rival Paschal Grousset prétendait également restaurer sous une forme moderne les olympiades antiques. Seulement, ce dernier était tourné vers le peuple et considérait la nation de manière progressiste, dans une tradition républicaine française typiquement de gauche. Il imaginait donc des « JO » scolaires et nationaux, autrement dit une grande fête populaire de la jeunesse française.

Au contraire, Pierre de Coubertin servait la grande bourgeoisie française, de culture aristocratique, ayant une vision de la nation ouvertement impérialiste. Les « JO » devaient pour lui servir le rayonnement mondial de chaque puissance, a fortiori celle de la France puisqu’elle était une grande puissance parmi les plus grandes.

C’est précisément pour cela que Pierre de Coubertin était attaché à la question de l’amateurisme dans le sport et que l’amateurisme est historiquement lié à l’olympisme moderne.

La chose est très simple à comprendre. À la fin du 19e siècle, c’est l’ensemble de la société française qui se modernise et le sport pénètre toutes les classes. L’aristocratie (liée et mélangée à la grande bourgeoisie) opte alors pour une position défensive (mais agressive) pour préserver son influence et sa domination dans le sport : l’interdiction du professionnalisme dans le sport.

C’était une attaque directe contre les couches populaires et la classe ouvrière en particulier, pour qui il était impossible de combiner une activité quotidienne éprouvante (le travail) avec le sport pratiqué de manière intense.

C’est avec le cyclisme, sport populaire français par excellence, qu’est né le professionnalisme dans le sport, avec d’un côté des industriels embauchant des sportifs et de l’autre des jeunes se faisant embaucher par des industriels pour pratiquer le sport à plein temps.

L’amateurisme devait être un rempart, une fortification contre les influences populaires dans le sport, à une époque où la lutte des classes s’exacerbait de part le développement commun, mais antagonique, de la classe ouvrière et de la bourgeoisie.

La conférence de 1892 à la Sorbonne avait été un échec, la proposition de jeux « olympiques » modernes, trop confuse, y faisant un flop. C’est justement avec la question de l’amateurisme dans le sport que Pierre de Coubertin revint à la charge deux ans plus tard, toujours à la Sorbonne à Paris, pour proposer à nouveaux ses Jeux olympiques.

Le baron le dit ouvertement plus tard, la question de l’amateurisme était un « précieux paravent » pour introduire à nouveau sa proposition, lors d’une conférence internationale sur justement la question de l’amateurisme dans le sport. Toutefois, c’était là la clef : sans l’amateurisme, qui garantissait un contrôle bourgeois, l’idée était impossible à soutenir. Sans l’amateurisme comme garde-fou, les Jeux olympiques devenaient directement un événement populaire avec une portée internationaliste.

Toujours est-il que l’entreprise fût cette fois un succès, en tous cas un premier succès. Pierre de Coubertin, qui avait rédigé le programme de la conférence de 1894, avait habilement introduit ce point à la fin des débats :

« De la possibilité du rétablissement des Jeux Olympiques. – Dans quelles conditions pourraient-ils être rétablis ? »

Le principe en fût voté le 23 juin, avec la perspective d’une première édition à Paris en 1900, puis d’une nouvelle édition dans une nouvelle ville tous les quatre ans. C’est peu ou prou ce qui se passa, à ce détail près que Pierre de Coubertin dût concéder à la Grèce, nation alors en formation (sous influence française), l’organisation d’une première édition du 5 au 15 avril 1896 à Athènes.

Pierre de Coubertin nomma lui-même le premier Comité international olympique (CIO), qui porte aujourd’hui encore ce nom en français, avec la langue française comme langue officielle. Il était composé d’un Grec, de deux Français, d’un Russe, d’un Suédois, d’un Américain, d’un représentant de Bohème, d’un Hongrois, de deux Anglais, d’un Argentin et d’un Néo-zélandais.

Après l’édition d’Athènes, ce fut donc au tour de Paris en 1900, comme prévu. Cela est peu connu, mais c’était en vérité un échec : ces « JO » n’eurent lieu que de manière confidentielle, éparpillés à différents endroits de la ville, entièrement dans l’ombre de l’exposition universelle (connue sous le nom d’Exposition de Paris 1900).

C’était toutefois un tremplin, qui permit au projet de rebondir quatre ans plus tard aux États-Unis à Saint-Louis, puis en 1908 à Londres, puis en 1912 à Stockholm, puis en 1920 à Anvers (la guerre ayant interrompu la chronologie olympique en empêchant l’édition de 1916), puis à nouveau à Paris en 1924, pour un véritable succès mondial français, imprimant définitivement les Jeux olympiques dans l’histoire mondiale moderne.

Le nombre des Comités nationaux passait de 29 pour la précédente à 44 pour cette édition 1924, avec un millier de journalistes sur place, 625 000 spectateurs pour les épreuves et 3 089 athlètes, dont 135 femmes. La cérémonie de clôture et l’établissement d’un « village olympique » furent introduits puis systématiquement repris ensuite.

Les premiers Jeux olympiques d’hiver eurent lieu la même année, également en France, à Chamonix. Cent ans plus tard, en 2024, les Jeux olympiques à Paris n’auront évidemment plus la même portée, ni historique, ni en terme de rayonnement.

C’est là une réalité qu’il faut bien comprendre.

Il est flagrant de voir à quel point le monde à changé au 21e siècle ; la France est n’est plus qu’une puissance de second rang, en pleine décadence et surtout totalement inféodée aux États-Unis et à sa culture « occidentale », en fait cosmopolite. Si les Jeux olympiques sont historiquement une affaire française, ceux de Paris 2024 n’auront plus grand-chose de français culturellement, Paris n’étant d’ailleurs plus vraiment « Paris », mais un simple « endroit » de l’occident en pleine décomposition.

Il faut toujours regarder l’histoire pour saisir quelles sont les tendances à l’œuvre, et ce que cela révèle.

[Illustrations : série de cartes postales publicitaires de 1924 commandée par la marque « Pautauberge » à l’affichiste H.L. Roowy] 

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Événements significatifs

2024, l’année de tous les défis

Il est courant, quand on espère que le monde change, de considérer que l’année qui vient, ce sera la bonne. Eh bien, on peut encore agir ainsi, sauf que l’année qui vient, ce ne sera pas la bonne, mais la mauvaise. Ce sera la bonne quand même, mais pas par le bon angle, parce que le niveau de conscience au niveau mondial est à zéro. La spectaculaire croissance capitaliste depuis 1989 a anéanti la remise en cause du capitalisme.

C’est donc dans un sentiment de dédain et d’effroi que les Français (et le reste du monde) voient arriver 2024, en sachant bien que, cette fois, il ne sera pas possible de couper à la conflagration. Et comme on connaît les Français, parfaitement définis comme « sceptiques à prétention rationaliste », agissons comme Descartes et réduisons tous les éléments au maximum, pour n’avoir que des vérités certaines. La « méthode » n’est pas bonne, mais peu importe, le monde étant ce qu’il est, ça suffira bien !

1. En janvier 2024, il y a la présidentielle et les législatives à Taiwan. On connaît les tensions sino-américaines au sujet de cette île historiquement chinoise. Le résultat électoral va polariser la crise, qui sera de toutes façons inéluctablement militaire à un moment donné.

2. En mars 2024, il y aura la présidentielle russe. C’est Vladimir Poutine qui va gagner, bien sûr. Et une fois cela fait, il aura l’espace politique pour accentuer la pression militaire contre un régime ukrainien exsangue. L’armée ukrainienne demande… 500 000 soldats en plus, alors que l’offensive estivale a abouti à la conquête de deux fois 10 kilomètres au prix d’un sang versé en masse. La défaite ukrainienne va sceller la fin de toute une initiative occidentale et chambouler la situation, à moins que ce soit l’escalade militaire occidentale et là également la situation va être chamboulée…

3. En novembre 2024, c’est la présidentielle aux Etats-Unis, avec également les législatives. On connaît la bataille interne à ce pays, avec des capitalistes pour écraser la Russie d’abord et la Chine ensuite au nom d’un style libéral LGBT (Joe Biden), et des capitalistes isolationnistes pour se focaliser uniquement sur la Chine (Donald Trump). Les élections, à coups de milliards dépensés dans la campagne, vont refléter un affrontement interne capitaliste majeur, aux conséquences énormes. Dans tous les cas, le Mexique est devenu le premier exportateur aux Etats-Unis, devant la Chine réduite au niveau du Canada. La superpuissance américaine forme sa base nord-américaine.

4. En décembre 2024, c’est la présidentielle au Venezuela. Le régime en place vacille, son initiative de conquête de l’Esequibo aux dépens de la Guyana est sa roue de secours. L’instabilité en Amérique du Sud découlant d’une initiative militaire serait d’une ampleur terrible… Et on y coupera pas alors que l’Argentine a une inflation gigantesque et qu’un anarcho-capitaliste pro-américain, Javier Milei, est désormais président.

5. La guerre à Gaza n’est pas terminée et se prolongera, avec la question du régime qui y sera instauré. Car à part les naïfs de la « gauche » opportuniste fantasmant sur la « résistance palestinienne », on est ici en plein repartage du monde avec Israël, la superpuissance américaine, le Qatar, l’Arabie Saoudite, l’Iran… Qui paie Israël, qui paie le Hamas? Sans ces financements massifs, il ne se passerait rien…

6. Enfin, en juin 2024, il y aura les élections européennes. Pour la France, c’est une élection majeure. On va voir à quel point l’extrême-Droite et la Droite sont fortes et parviennent à devenir la tendance de fond. Il y a ici une catastrophe potentielle qui fait froid dans le dos, et qui apparaît comme inévitable, la Gauche s’étant tué avec la participation gouvernementale des socialistes et les ignobles délires populistes de Jean-Luc Mélenchon et de ses alliés. Cela va être très moche…

On peut rajouter à cette liste le dérèglement climatique, l’inflation, la destruction des zones naturelles par la déforestation pour les récoltes ou bien l’urbanisation, l’augmentation mondiale de la consommation de viande, la consommation massive de drogues… Bref, tout ce « bruit de fond » dont on a désormais conscience, qu’on le veuille ou non.

Et il ne faut pas se leurrer : tous ceux au-dessus de 20 ans sont largement corrompus. Ils veulent essayer de « vivre » en grattant. Il n’y a de l’espoir que par les générations qui vont arriver, celles qui ont moins de 18 ans aujourd’hui, qui forment une page blanche, ne croyant en rien et devant trouver leur place dans un monde hostile.

C’est pour ces nouvelles générations qu’il faut établir les idées, la culture, le programme, le style, pour qu’enfin le 21e siècle apparaisse. L’avenir arrive, mais il va sortir d’une situation macabre, il ne faut avoir aucune illusion à ce sujet, à défaut d’un petit effort avant la crise, il faudra d’énormes efforts à travers la crise. Ce qui va se passer va être profondément baroque.

Alors, sans se laisser contaminer par la putréfaction du vieux monde, il faut soutenir les valeurs de l’avenir, qui grandissent immanquablement car le contraire du passé, c’est l’avenir, le contraire du négatif, le positif. Nous entrons dans une ère de bouleversement, dont il faut lire les contours. Pour les lire, il faut être une force de proposition.

C’est cela le travail que nous menons, avec en perspective l’avenir et non un présent instable, moisi, en déchéance, sans substance. La roue de l’Histoire tourne et nous sommes les premiers de demain, et nous nous nourrissons de l’avenir inévitable qu’est la République Socialiste Mondiale, avec une humanité unifiée, métissée, vivant en harmonie avec la planète comme Biosphère !

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Dialogue imaginaire entre Javier Milei et le peuple français

Le peuple français : Quel est donc ce bruit ? Encore les Argentins, à parler de leur coupe du monde de football gagnée, ou plutôt volée cet été 2023 ?

Javier Milei : Pas du tout, je viens d’être élu président de l’Argentine, avec 56% des voix. Je suis un ancien chroniqueur de la télévision, en deux ans de politique je suis parvenu au meilleur poste, comme Emmanuel Macron je suis sorti d’un chapeau magique !

Le peuple français : Emmanuel Macron, quelle déception… Et quelles sont vos idées ?

Javier Milei : Vous allez adorer ! Je dis que les politiciens ne sont que des bons à rien, que l’État est rempli de bureaucrates ne faisant rien et se goinfrant, qu’il y en a assez de payer des impôts et qu’il faut les baisser de moitié.

Le peuple français : Oh, mais c’est très bien ça ! On voudrait le même chez nous. Mais attendez, nous Français sommes sceptiques vous savez… Vous avez forcément des défauts. Vous êtes forcément plutôt mou, comme notre Emmanuel Macron…

Javier Milei : Pas du tout, j’adore ma patrie, d’ailleurs j’ai le soutien de l’armée, qui apprécie que je relativise tous les crimes commis lors de la dictature militaire de 1976 à 1983. Vous savez, les gauchistes, ces gens-là… Des « excréments humains », comme je dis.

Le peuple français : Vous n’êtes pas comme votre compatriote le pape, dites donc.

Javier Milei : Le pape ? Il propage le communisme, je l’ai dit plusieurs fois et le je redirai.

Le peuple français : Cela sonne un peu trop bien. Nous les Français, nous aimons nos petits plaisirs… Vous voulez certainement nous interdire notre cannabis…

Javier Milei : Absolument pas, prendre de la drogue est un choix individuel. Cela ne concerne pas l’État et vous pouvez donc fumer autant que vous voulez.

Le peuple français : Attendez, c’est trop beau pour être vrai. Mmmmh… le chef du Parti socialiste, Olivier Faure, nous dit que vous vous opposez aux LGBT ! Pas que cela nous intéresse, mais nous sommes vraiment attachés aux libertés…

Javier Milei : Pourquoi serais-je contre ? « Si vous décidez d’être homosexuel, en quoi est-ce que cela affecte-t-il ma vie ? Ma liberté ? En rien. Ma propriété ? En rien. Par conséquent, je n’ai rien à dire. » Quant aux trans… « Du moment que je n’ai pas à payer la facture, je n’ai aucun problème. »

Le peuple français : Merveilleux, nous allons faire en sorte d’avoir votre équivalent chez nous !

Javier Milei : Vous en avez bien besoin ! Car chez vous, l’État est bien trop présent. Toutes ces aides sociales, l’école gratuite… il faut y mettre un terme.

Le peuple français : Pardon ? Vous voulez supprimer les aides sociales ?

Javier Milei : Oui, et puis ces ministères inutiles, comme la Santé. On n’a pas besoin de tout ça.

Le peuple français : Mais ce n’est pas possible !

Javier Milei : Vous êtes bien d’accord que l’État c’est mal et que les impôts sont horribles, non ? Vous avez l’esprit anarchiste, comme moi. Il faut donc supprimer tout cela.

Le peuple français : Mais non !

Javier Milei : Vous n’êtes pas cohérents. Le libéralisme, c’est le libéralisme… Chacun fait ce qu’il fait, du moment qu’il y a un consensus. D’ailleurs, je suis pour l’amour libre, rien qu’avec cela, vous Français devez m’adorer.

Le peuple français : C’est vrai.

Javier Milei : Il fait être libre partout, tout le temps. On doit être libre de vendre ses organes, ses enfants…

Le peuple français : Quoi ! Ah, ça, non, nous ne le voulons pas !

Javier Milei : Si vous ne le voulez pas, vous ne le faites pas. Il faut cependant en avoir le droit.

Le peuple français : Ah si c’est avoir le droit, ce n’est pas pareil…

Javier Milei : Les temps changent, et on s’adapte, autant être libre. « La liberté avance », et c’est d’ailleurs le nom de mon parti. On peut faire tellement ce choses ! Regardez, quand mon chien Conan est mort, je l’ai cloné et désormais j’ai Milton, Murray, Robert et Lucas! Formidable, n’est-ce pas ! Leurs noms vient de mes économistes préférés, Milton Friedman, Murray Rothbard et Robert Lucas.

Le peuple français : Mais ce sont des économistes libéraux !

Javier Milei : Ah, vous les Français, êtes incorrigibles. Vous êtes des libéraux sur tous les plans, sauf l’économie.

Le peuple français : C’est que, si on peut en profiter…

Javier Milei : A un moment il faudra un choisir, et comme le dit mon mot d’ordre électoral, viva la libertad carajo !

Le peuple français : C’est que nous ne voulons pas être comme les Américains…

Javier Milei : Pourquoi ? Je suis pour l’Ukraine et vous soutenez militairement l’Ukraine. Nous sommes dans le même camp.

Le peuple français : Euh… nous ne nous intéressons pas à ces choses…

Javier Milei : Bon, bon. Vous y viendrez, le libéralisme est dans votre ADN !

Le peuple français : Nous préférons attendre.

Javier Milei : La jeunesse n’attendra plus, elle est libérale vous savez ! Ce sont les jeunes qui ont porté mon élection, ils feront pareils chez vous. D’ailleurs je vous laisse, on m’attend, je dois aller supprimer la monnaie de mon pays.

Le peuple français : Pour la remplacer par quoi ?

Javier Milei : On paiera en dollars, ce sera très bien, plus d’inflation : elle était de 185% dans mon pays cette année. Je ramène l’espoir !

Le peuple français : C’est bien de donner espoir !

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La NUPES tourne court

Au printemps 2022, Jean-Luc Mélenchon et la France insoumise impulsaient la « Nouvelle union populaire écologique et sociale » consistant en un accord électoral des forces de la gauche gouvernementale en vue des élections législatives de juin 2022. Un accord qui débouchait alors sur la formation d’un inter-groupe parlementaire constitué de 150 députés.

Mais au-delà de cet accord électoral et de cet inter-groupe parlementaire, la France insoumise visait en tant que force dirigeante de la coalition une perspective politique à moyen-terme. C’était la perspective de réaliser la stratégie populiste de la Gauche d’Amérique latine tant étudiée par Jean-Luc Mélenchon, en unissant dans un magma politique le plus de forces politiques pour ensuite compter sur les vagues des mouvements sociaux pour « faire la bascule » vers le pouvoir.

Du point de vue particulier du contexte français, cela ramenait la gauche française dans sa situation d’avant 1905, avec un « socialisme » partant dans tous les sens, sans visée organisatrice tangible ni armature idéologique.

Du fait de la nature social-impérialiste de l’ensemble des composantes de la NUPES, il allait de soi que le conflit entre l’Ukraine et la Russie, impliquant la France à travers sa soumission aux États-Unis dans le cadre de l’Otan, ne pouvait pas fissurer l’union.

En revanche, il ne pouvait pas en être ainsi avec l’attaque du Hamas sur des civils israéliens qui rappelait trop nettement aux français les horreurs subies lors des attentats du 13 novembre 2015. Et qui suffit à révéler une contradiction entre le courant post-moderne « décolonial » bien établi à la France insoumise et la tradition sociale-républicaine historiquement liée au PS et au PCF.

En effet, le premier communiqué de la France insoumise parlait d « offensive armée de forces palestiniennes menée par le Hamas » pour qualifier une attaque terroriste sur des civils, y compris des jeunes d’un festival de musique Techno tournés vers la paix. Puis quelques jours plus tard, c’est sur une radio que Danièle Obono, députée LFI de Paris et cheffe d’orchestre de tout ce courant « décolonial », approuvait le fait d’intégrer le Hamas dans les « organisations de résistance palestinienne ».

Avec de telles déclarations, c’est l’héritage républicain, ainsi que rationaliste, qui a refait surface et est venu se heurter à une lecture ultra-populiste des évènements par la France insoumise, mettant de côté les enjeux démocratiques de la libération nationale palestinienne.

Dans cette dynamique, c’est le PCF qui a ouvert la boîte de pandore avec la tenue d’un conseil national votant le dimanche 15 octobre 2023 à près de 93 % une résolution dans laquelle il était dit que la NUPES « telle que constituée sous la volonté hégémonique de LFI, est une impasse ». Puis le Parti socialiste s’est prononcé en faveur d’un « moratoire » sur la participation à l’inter-groupe NUPES mardi 17 octobre 2023 au soir, EELV appelant à ce que l’ensemble des députés de la coalition se réunissent pour discuter de leurs « différends ».

Évidemment, et malheureusement, l’érosion de la NUPES ne peut se faire sur la base d’un débat démocratique réel puisque cette union renvoie à un accord électoral réalisé par en haut sans perspectives programmatiques. De ce fait l’érosion est lente et sans franchise… Le député Fabien Roussel et premier secrétaire du PCF allant même jusqu’à dire qu’il ne siégerait plus à l’inter-groupe NUPES tout en laissant les députés de son parti libre de faire ce qu’ils veulent !

Une chose est sûre, c’est que la Gauche française reste prisonnière de ses propres renoncements historiques. L’effritement de la NUPES nous renvoie dans la vieille opposition entre les « sociaux-républicains » et populistes, autrefois marquées par le syndicalisme révolutionnaire, et aujourd’hui se mélangeant avec les théories universitaires les plus farfelues.

La faillite de la NUPES en cet automne 2023 apparaît comme un évènement majeur, en négatif. En négatif car l’opposition « républicains »/populistes sonne creux par rapport aux enjeux de l’Histoire.

La Gauche française est ici, encore une fois, à mille lieux de la Gauche allemande.

« Une nouvelle politique pour vous! »

À l’inverse, la démission officielle de Sahra Wagenknech, ainsi que de 9 députés, du parti« Die Linke » en Allemagne ce lundi 23 octobre 2023 se fonde sur une envergure programmatique. C’est pourquoi il est également laissé du temps entre l’officialisation du départ et l’annonce du futur parti en janvier 2024, le temps de bien élaborer et poser les choses.

De fait, la critique ne se fait pas spontanément, dans le creux d’une conjoncture, mais dans le prolongement d’une maturation politique et idéologique. Elle cible notamment la pensée libérale-libertaire ou LGBT, telle que le représentée outre-Rhin par les lois sur la légalisation du cannabis et l’ « auto-détermination de genre », comme des obstacles au redéploiement d’une Gauche populaire.

Si l’on veut s’orienter dans la décomposition politique actuelle de la Gauche française, il apparaît très nettement que c’est du côté de la démarche de l’allemande Sahra Wagenknecht qu’il faut regarder et s’inspirer.

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Le projet de parti de Sahra Wagenknecht

Le 23 octobre 2023 lors d’une conférence de presse à Berlin, c’est la députée Amira Mohamed Ali membre de « Die Linke » (La Gauche) qui a annoncé le départ de ce parti de toute une série de cadres, à la suite de Sahra Wagenknecht.

Voici les points essentiels.

1. L’extrême-Droite, concurrente et pas seulement ennemie

Les médias français, qui reprennent le discours de leurs équivalents allemands, assimilent Sahra Wagenknecht à une « populiste » au discours conservateur sur le plan des valeurs et social sur le plan économique. C’est naturellement totalement faux.

Sahra Wagenknecht a évidemment souligné qu’il ne s’agissait pas du tout d’aller dans le sens de l’AfD (le parti d’extrême-Droite allemand), avec qui aucune alliance n’est bien sûr possible. L’AfD, c’est la Droite. Sahra Wagenknecht c’est la Gauche. Le clivage est assumé.

Seulement, l’AfD a une capacité d’intervention dans les masses et il faut en prendre compte. Il y a une bataille pour les masses qui se mettent en colère, et il faut la gagner. Sinon, ce sera un désastre.

Ici, on comprend bien à l’arrière-plan l’horrible expérience des années 1930, où l’extrême-Droite a concurrencé avec succès, tragiquement, la Gauche allemande divisée.

2. Par la Raison

Les quatre mots d’ordre mis en avant lors de la conférence de presse sont « Raison », « Paix », « Liberté » et « Justice » ; toute la conférence de presse a tourné autour de la logique selon quoi il faut revenir à la « raison ». C’est ce qu’attendent « les gens qui travaillent dur, mais sont mis de côté par la politique ».

Il ne s’agit pas de proposer une ligne populiste, mais de rappeler à la raison, systématiquement. Les gens voient leur situation sociale devenir catastrophique, ils commencent à se mettre en mouvement. Ils basculent dans la démarche de l’extrême-Droite, par manque de perspectives, il faut donc être à la hauteur.

L’objectif est l’implication des gens dans des propositions politiques, sociales concrètes. Il n’est pas difficile de voir ici le parallèle historique avec le Front populaire en France, qui avait justement comme principe d’exiger de manière ininterrompue la raison contre l’irrationalisme fasciste (rappelons que le Front populaire avait consisté en l’unité des communistes, des socialistes et des radicaux).

3. La base sociale

Justement, de manière parallèle au Front populaire, le projet de Sahra Wagenknecht se veut une unité populaire. Alors que dès sa prise de parole, elle a souligné la situation de « crise mondiale », elle propose ni plus ni moins qu’une union des couches populaires et des classes moyennes contre les monopoles multinationaux.

Sahra Wagenknecht parle en ce sens beaucoup de relancer la compétitivité allemande : son discours ne se veut pas en rupture, il se propose comme « protecteur » si l’on veut. D’une certaine manière, on peut dire qu’elle cherche à faire une proposition de sortie raisonnable à une situation de stress massive des classes moyennes.

4. L’évaluation de la situation allemande comme point de départ

L’initiative de Sahra Wagenknecht ne doit rien au hasard : c’est la rencontre de la tradition de la Gauche historique en Allemagne et d’une situation de rupture économique et sociale provoquée par la guerre en Ukraine.

Les choses sont présentées de la manière suivante. « Comme sont les choses, elles ne peuvent pas continuer » : si cela continue, dans dix ans l’Allemagne sera méconnaissable en raison de la désindustrialisation.

L’Allemagne applique en effet les sanctions contre la Russie de manière maximale ; or, toute son industrie dépendait des ressources énergétiques russes. Tout le système social allemand s’effondre.

Cela va de pair avec une fuite en avant militariste, où il est prétendu que fournir des armes à l’Ukraine permettrait de mettre fin au conflit. Et l’extrême-Droite se propose comme solution.

Il faut donc une Gauche qui soit capable de proposer une perspective : c’est le sens de la rupture avec « Die Linke ».

5. La rupture avec « Die Linke »

« Die Linke » a échoué à former une opposition de gauche à la coalition gouvernementale (qui unit les socialistes, les écologistes et les libéraux). C’est le constat fait à la conférence de presse.

Il n’a pas été rappelé pourquoi, mais Sahra Wagenknecht est connue depuis plusieurs années pour rejeter la ligne de « Die Linke » qui est de se tourner uniquement vers des minorités urbaines et cosmopolites qui sont coupées de la vie réelle.

Autrement dit, elle dénonce la Gauche bobo. Et elle propose de fonder un parti vraiment de Gauche. Pour faire un parallèle en France, on peut penser à ce que fait Fabien Roussel avec le PCF, sauf que Fabien Roussel assume un côté beauf, et que ce n’est pas du tout la position de Sahra Wagenknecht.

Le style de Sahra Wagenknecht, c’est clairement le style social-démocrate de 1910, qu’on connaît en France souvent uniquement par Rosa Luxembourg. C’est maîtrisé, cadré, ultra-réfléchi, voire « doctrinaire » du point de vue français.

6. Le nouveau parti

Il y a d’abord la mise en place d’une nouvelle structure, « Bündnis Sahra Wagenknecht » (Union Sahra Wagenknecht). Pour l’anecdote qui n’en est pas une, Sahra Wagenknecht se prononce « Sara Vaguénknéchtte ». Son prénom s’écrit ainsi car il est arabe (son père est iranien) et signifie « rester la nuit à veiller quelqu’un ».

Cette Union est la première étape pour fonder un nouveau parti en janvier 2024, qui se présentera aux élections européennes dans la foulée.

Cette Union n’est pas encore un parti ; elle ne prendra d’ailleurs pas d’adhérents. Elle est une sorte de sas pour la mise en place du nouveau parti, de manière lente et organisée.

Il ne s’agit pas de viser un parti de masse, mais un parti qui se tourne vers les masses. Ici, on en revient à l’approche social-démocrate, à l’approche de la Gauche historique.

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Sahra Wagenknecht fonde un nouveau parti

Sahra Wagenknecht fonde fin octobre 2023 un nouveau parti ; voici quelques points précisant sa démarche. Nous en avons déjà parlé à plusieurs reprises, car elle est une figure de la Gauche historique. Elle n’appartient pas à la « gauche post-moderne » qui s’est installé à partir des années 2000, dans le prolongement du développement forcené du capitalisme de 1989 à 2020. Wagenknecht a ainsi comme démarche de chercher à s’adresser aux gens « normaux », refusant de s’aligner sur les principes de l’écriture inclusive, sur le migrant ou les LGBT comme figure sociales à défendre, etc.

A quel courant de la Gauche historique appartient Wagenknecht? Disons que c’est une socialiste à l’allemande. Si on prend la question de la guerre, elle relève de la social-démocratie d’avant 1914 (donc Lénine et Rosa Luxembourg compris). Elle dénonce non stop le militarisme et la course à la guerre des superpuissances ; vivant en Allemagne, elle s’oppose en premier lieu à l’OTAN et au soutien militariste sans limites au régime ukrainien.

Nous sommes la majorité et nous ne voulons pas vos guerres ! Pas de raison de célébrer les 70 ans de l’OTAN.

Sur le plan social, Sahra Wagenknecht a une ligne revendicative agressive, très agressive. Pour forcer le trait, elle agit comme si elle craignait qu’un mouvement comme les gilets jaunes se produisent, ou bien que l’extrême-Droite s’approprie une thématique sociale. Donc elle a une ligne, pas populiste, mais peut-être assez proche dans la forme, afin de vraiment la rendre lisible et présente. Cela marche très bien, tout le monde doit le reconnaître en Allemagne. Un sondage à l’annonce de la fondation de son parti montre que 19% des gens pensent pouvoir voter pour elle à l’ouest de l’Allemagne, et 29% à l’est.

Sur le plan économique, sa position est, on va dire, assez proche dans l’esprit ds discours de l’Allemagne de l’Est des années 1980. Sahra Wagenknecht considère que le capitalisme, c’est désormais un capitalisme féodal, avec des monopoles donnant le ton. Elle est pour briser ces monopoles. Par contre, elle n’est pas pour le socialisme. En fait, sa ligne tient plutôt au fameux propos de François Hollande « mon ennemi c’est la finance ». Elle veut un capitalisme industriel et concurrentiel, dans le cadre d’un système évidemment très social.

Ce qui est intéressant ici, c’est que ce capitalisme compétitif et social, c’est le vrai rêve d’Emmanuel Macron au départ. Sauf que lui est sorti de nulle part car de gros capitalistes « modernes » sont allés le chercher et qu’il est totalement intégré au turbo-capitalisme LGBT pro-migrants. Sahra Wagenknecht ne veut justement pas aller dans ce sens là. Elle est une sorte de rupture à la Emmanuel Macron, mais dans l’autre sens, ou bien si on veut, une sorte de François Hollande qui aurait assumé la rupture, ce en quoi beaucoup de gens avaient cru et espéré au moment de son élection.

Dénonciation de l’expérimentation animale en Allemagne et appel à une transition pour leur arrêt complet

Sahra Wagenknecht est évidemment totalement dénoncé par toute la « gauche postmoderne » allemande. Elle est considérée comme une « stalinienne » en raison de sa volonté d’avoir des principes bien établis et de ne pas du tout participer aux mouvements pro-migrants et pro-LGBT. Il est évident que lorsqu’elle dit que les migrations vers l’Allemagne rentrent au service du capitalisme et des monopoles – une simple vérité – cela déplaît fortement à la « gauche post-moderne » dont la fonction est justement de repeindre aux couleurs LGBT le capitalisme occidental.

Pareillement, elle a dénoncé les massacres du Hamas du début octobre 2023, tout en dénonçant dans la foulée le blocus terrible de Gaza par Israël. Rien de plus normal, et rien à voir avec l’hystérie « gauchiste » au sujet de la Palestine, dont elle se tient bien à l’écart. La ligne de Sahra Wagenknecht, c’est clairement une Gauche accessible, lisible, se plaçant dans une continuité historique et sur la base de valeurs bien définies.

C’est en cela que sa démarche est très intéressante !

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Hamas, Arras: la spirale négative et comment s’en protéger

La France était sous le choc à la suite des événement à Gaza, à la suite de l’offensive du Hamas contre Israël qui a tourné au massacre de civils (en filmant et en diffusant les vidéos sur les réseaux sociaux, y compris des assassinés). Et voilà que le 13 octobre 2023, un jeune d’origine tchétchène se rend dans son ancien lycée d’Arras pour poignarder des enseignants en criant « Allah Akbar », en tuant un, en blessant grièvement deux.

C’est un événement marquant de plus, qui est de la même ampleur que « Je suis Charlie » et que le massacre au Bataclan. La société française est touchée dans toute sa profondeur, en raison de son histoire. La lutte de 2023 contre la réforme des retraites n’avait par exemple qu’effleuré la surface de la société ; pour les gens, c’était important, et pourtant une anecdote historiquement.

Là, avec tout ce qui se passe, c’est très différent. C’est une question de civilisation et les masses savent très bien que ce n’est pas une question de religion. C’est une question d’effondrement des valeurs. Le capitalisme triomphant fait se dissoudre tout principe dans le relativisme et partout les monstres s’infiltrent, pratiquant le cannibalisme social. Monopoles d’un côté, éléments anti-sociaux de l’autre : le peuple subit les coups des uns et des autres.

L’arrière-plan du meurtrier est d’ailleurs sans ambiguïtés : on est typiquement dans l’effondrement moral, administratif, politique français. Voici comment Europe 1 présente la chose :

« Fiché S, âgé de 20 ans, d’origine tchétchène et arrivé en France en 2008… Plusieurs heures après l’attaque au couteau dans un lycée d’Arras, qui a tué un professeur et blessé trois autres personnes, le profil de l’assaillant et de son entourage se dessine. Et alors que son frère avait été interpellé à l’été 2019 dans le cadre d’un projet d’attentat déjoué, sa famille, alors assignée à résidence, aurait même pu être expulsée en 2014.

Selon un document qu’Europe 1 s’est procuré, le cabinet de Manuel Valls, alors ministre de l’Intérieur, avait décidé d’annuler la rétention de la famille Mogouchkov. Cette dernière, composée d’un couple et de cinq enfants, était assignée à résidence dans un foyer de La Guerche-de-Bretagne, au sud de Rennes. La police aux frontières s’y était rendue le 18 février 2014 à 6h du matin pour les conduire à l’aéroport de Saint-Jacques-de-la-Lande, près de Rennes, où un avion spécialement affrété attendait la famille, direction la Tchétchénie.

Mais la procédure avait suscité un tollé dans les rangs de plusieurs associations de défense des sans-papiers. Le parti communiste français (PCF) s’était également fendu d’un communiqué de soutien à la famille Mogouchkov. « Que de moyens gaspillés pour saboter la vie d’une famille ! »

Tout cela fournit des points à la Droite, mais la Droite n’est plus la Droite : la France est devenue un satellite américain et il n’y a même plus de bourgeoisie française à prétention gaulliste. La seule chose qui compte politiquement en France, c’est de savoir comment gérer une population occidentale cherchant à garder ses privilèges, y compris à travers le social-impérialisme. Tous les partis et dirigeants, de Marine Le Pen à Jean-Luc Mélenchon, soutiennent l’armée française dans son intégration à l’Otan, assument l’Union européenne comme vaste satellite américain, acceptent la guerre de conquête contre la Russie (et demain la Chine).

Il n’y a donc aucun espoir politique à attendre. La société française va continuer à péricliter. Le mélange LGBT cosmopolite et repli nationaliste-communautaire va perdurer, exactement comme aux États-Unis.

Et là n’est pas le vrai enjeu. La vraie alternative, c’est Socialisme ou barbarie. Ce dont on a besoin, c’est de porteurs de civilisation, de gens annonçant le futur inévitable qu’est le Socialisme. Il faut laisser le passé au passé. Ce passé est tellement passé qu’il s’entre-dévore, afin d’empêcher qu’on arrive au futur !

On ne peut pas comprendre autrement le Hamas qui massacre un festival techno. On aurait dû voir une offensive portée par la Gauche palestinienne, unifiant sur une base démocratique les masses travailleuses ; au lieu de cela, on a la fuite en avant dans le massacre et la folie fondamentaliste.

Telle est la division : entre le passé et le futur. Et il ne faut pas se faire piéger par ce passé qui s’entre-dévore ! C’est le seul moyen de se protéger de la spirale négative du capitalisme en crise !

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Le festival techno attaqué par le Hamas

L’offensive militaire du Hamas depuis la bande de Gaza a tellement provoqué une onde de choc qu’est passé inaperçu un massacre de grande ampleur. En effet, le Hamas n’a pas que visé des bases militaires frontalières et des kibboutz, il a lancé une opération d’envergure contre un festival de musique électronique. 260 personnes au moins y ont été massacrées et un nombre inconnu de gens ont été enlevés.

Sur les réseaux sociaux, on a pu voir des images terribles, dont celle d’une jeune femme allemande dans un pick-up, avec des militants du Hamas assis sur elle et lui crachant dessus, alors qu’une de ses jambes était désarticulée. Est-elle vivante ou morte ? Son compagnon latino-américain a-t-il lui aussi été tué ?

Cette folie furieuse rappelle immanquablement le Bataclan. Encore est-il bien sûr qu’on peut se demander comment un festival de musique électronique peut se tenir à moins de dix kilomètres de la bande de Gaza. La raison est toutefois assez « alternative ». Israël est avec le Brésil et l’Inde (plus précisément Goa) un bastion de la musique électronique appelée « Psytrance ».

Le festival israélien, appelé Supernova Sukkot Gathering, est d’ailleurs une version locale du festival brésilien Universo Paralello, et accueillait des gens appartenant à la scène psytrance du Japon, d’Espagne, du Brésil et du Mexique. Le groupe israélien « Astral Projection » est un classique du genre.

Le public psytrance est du type hippie techno, avec utilisation de drogues de variantes plutôt psychédéliques. L’esprit se veut nomade, entre cosmopolite et universaliste, le mot d’ordre du festival était d’ailleurs « Paix, Amour, Unité et Respect ». C’est du hippie technologique, du petit-bourgeois aventurier cherchant à éviter le pire du capitalisme. Après, il ne faut pas se leurrer, ce ne sont plus les années 1990 et depuis la scène trance de Goa / psytrance s’est franchement commercialisée.

Reste qu’un tel festival se veut sympathique, pacifique et il va de soi que l’attaque odieuse d’un tel festival ne sert en rien la cause palestinienne. C’est même un terrible repoussoir. Quand on voit cela, dans le monde, on se dit qu’on a affaire à des gens sans respect de rien ni personne, et que si on voudrait aider les Palestiniens, c’est pratiquement impossible. Qui a envie d’être relié à des massacres ?

En France, pourtant, il y a de gens pour se moquer d’un tel massacre. Il existe toute une tradition perverse qui va de Sade à la fascination pour le criminel Mesrine, en passant par le FLN algérien. Celui-ci, avec à sa tête des petits-bourgeois francophones fantasmant sur l’Islam, commettait des attentats horribles contre les civils. Le philosophe Jean-Paul Sartre avait justifié cela, avec à ses côtés Frantz Fanon qui a fait la théorie d’une violence aveugle comme une « révolte » anti-coloniale.

Une partie importante de la « seconde gauche » (celle hors socialiste et communiste, anti-Gauche historique) s’est alors alignée sur cette position. C’est ce qu’on retrouve aujourd’hui de manière hégémonique à gauche de la gauche, avec La France insoumise, le Nouveau Parti Anticapitaliste, l’Action antifasciste Paris-Banlieue, etc. Pour de tels gens, tout ce que fait la « résistance palestinienne », c’est bien, et puis c’est tout.

Tous les moyens sont bons, dit le NPA.

Les massacres ? On passe sous silence, du même silence qu’au moment des massacres de Merah à Toulouse en 2012. Il va de soi évidemment qu’une part d’antisémitisme est présente ici.

En plus de cela, ce qui est terrible, c’est le rôle ignoble de ces gens bien cachés en occident par rapport aux Palestiniens. Car lorsque les Palestiniens ont commencé à s’organiser dans les années 1960-1970, ils se sont lancés dans des attaques contre des civils, israéliens mais également occidentaux. Ils considéraient que c’était le seul moyen de faire entendre parler d’eux.

Là, on revient en arrière, de manière totale. Finie la perspective démocratique, populaire, de Palestiniens unifiés ébranlant l’État israélien (d’ailleurs en crise politique majeure depuis de nombreux mois). Désormais, on a le Hamas qui relève des jeux criminels des puissances grandes, moyennes et petites. L’objectif du Hamas, c’est un État islamique regroupant tous les pays arabes. C’est une expression de la féodalité, d’une féodalité palestinienne soutenue par les féodalités d’abord d’Arabie Saoudite, désormais du Qatar et d’Iran.

Soutenir donc les actions meurtrières du Hamas, ce n’est pas soutenir la « résistance palestinienne », mais l’agenda politique du Hamas, du Qatar, de l’Iran. C’est totalement évident.

Le Hamas serait la résistance palestinienne et le soutien devrait être inconditionnel

Le Figaro a justement révélé des parts d’une lettre interne à La France insoumise ; le député de Paris LFI Rodrigo Arenas, ancien responsable de l’association des parents d’élèves FCPE, y dit plein de choses justes.

«La justesse des causes anticoloniales et du refus des oppressions perdent leur légitimité le jour où elles acceptent les massacres de civils et le terrorisme aveugle comme des stratégies militaires acceptables (…).

Ne nous voilons pas la face, ajoute-t-il encore, le Hamas ne sert plus la cause palestinienne depuis longtemps. Pas plus que l’assassin de Rabin jadis ou les fanatiques religieux et B. Nentanyahou aujourd’hui ne servent la cause israélienne.

La seule cause que servent ces hommes corrompus, assoiffés de vengeance et de haine, c’est le cycle de la violence. Cette spirale infernale de douleurs et de colères qui broie les civils et l’espérance comme la mort fauche les âmes (…).

Quand des massacres, enlèvements et viols sont célébrés, justifiés par ceux qui prétendent lutter contre l’injustice, il y a de quoi désespérer. Si notre idée de la justice d’une cause nous conduit à fermer les yeux, voire pire, à absoudre ceux qui la déshonorent par leur inhumanité, il y a de quoi désespérer. »


Le député fait toutefois une erreur, car la valorisation des massacres, enlèvements et viols des « opprimés » correspond totalement à la conception de Jean-Paul Sartre. C’est censé être l’expression d’un arrachement au colonialisme. La pièce de théâtre Les justes d’Albert Camus, très connue, consiste justement en une dénonciation de cette conception folle de Sartre. Camus était lui-même d’Algérie française et a tenu des propos très connus :

« J’ai toujours condamné la terreur. Je dois condamner aussi le terrorisme qui s’exerce aveuglément dans les rues d’Alger. En ce moment, on lance des bombes dans les tramways d’Alger. Ma mère peut se trouver dans un de ces tramways. Si c’est cela la justice, je préfère ma mère. »

La guerre d’Algérie se termine en 1962. Nous sommes en 2023. Et là, nous avons des Palestiniens partant d’une prison à ciel ouvert, Gaza, pour massacrer des Israéliens – clairement les moins religieux et les moins sionistes de tout le pays – et des gens venant de différents pays, dont du tiers-monde, dans le cadre d’un festival originaire du Brésil.

C’est absurde. Cela ne correspond à rien de révolutionnaire, et encore moins alors qu’une partie énorme de la société israélienne était révoltée depuis plusieurs mois contre les projets de réforme étatique du premier ministre israélien Benyamin Netanyahou. Il y avait quelque chose à faire, tout à faire, sauf ça !

L’offensive surprise comme paquet surprise pour les « rebelles » occidentaux
Un blog ne publiant plus rien se lance dans d’immenses promesses… qui ne le concernent pas matériellement de toutes façons (sinon le féodalisme serait justement vu et combattu)

Le massacre du festival techno est en ce sens un exemple non pas de révolte, mais de nihilisme. C’est une expression d’effondrement. Cela correspond à la crise de civilisation qui est mondiale.

C’est une partie du problème, et non de la solution. Et les gens qui choisissent de s’aligner là-dessus correspondent eux-même à un tel nihilisme. C’est du Socialisme dont on a besoin, pas de cette barbarie !

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L’opération du Hamas du 7 octobre 2023

Étant donné que la crise est mondiale, aucune zone de la planète n’est à l’abri, et tous les points brûlants cèdent en premier. Il y a eu l’Ukraine, dans un conflit militaire annoncé ici plus de six mois avant son déclenchement. Il y a eu l’affrontement entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, dont nous avons parlé de manière approfondie, et qui est loin d’être terminé d’ailleurs. Il y aura Taïwan demain.

L’évènement du 7 octobre 2023, c’est l’offensive du Hamas depuis la bande de Gaza. L’État israélien a été pris par surprise, perdant un prestige déjà largement entamé. En fait, le monde entier a été pris par surprise, comme il le sera encore à l’avenir, alors que craquent toujours plus de zones.

Car plus rien ne tient. Il faudrait être bien fou justement pour croire que ce qui se passe, c’est une révolte armée palestinienne contre une occupation sioniste. Il y a bien entendu des gens en France pour imaginer une telle fiction, parce que cela correspond au film qu’ils se font. Mais ce qui se passe, c’est un craquage généralisé de tout ce qui existe, parce que les fondements de ce qui existe sont sapés par la crise.

Le Hamas est en effet un véritable reste du passé. C’est une organisation islamiste à l’ancienne, avec un style datant des années 1980-1990, qui a été portée par les forces féodales palestiniennes et du Moyen-Orient en général, avec l’appui tacite de l’État israélien qui voyait d’un bon œil l’affaiblissement de la Gauche palestinienne, si puissante dans les années 1970.

Le résultat pour les années 2000, c’est une OLP disposant en Cisjordanie d’une « autorité » bureaucratique vendue à l’Occident, alors que le Hamas s’installait en 2007 dans la bande de Gaza.

Gaza, c’est une bande de terre isolé du monde, 365 km² avec deux millions de personnes, dont une partie significative dans des camps de réfugiés. L’État israélien pratique un blocus et mène des frappes répressives quand il l’entend. Le Hamas brise toute valeur progressiste avec sa dimension féodale.

Tout le monde s’attendait donc à ce que le Hamas végète sur ce territoire. Et voilà qu’il lance une vaste opération le 7 octobre 2023, avec au moins 2000 roquettes lancées sur le territoire israélien et de multiples commandos d’infiltration. L’État israélien, qui se la joue si assuré et invincible, a été débordé et voyant au moins une centaine de personnes tuées de son côté, des soldats enlevés, des bases attaquées. Il a déclaré l’état d’urgence civile et commencé des représailles militaires.

Pourquoi tout cela, réellement ?

Parce que l’État israélien est décadent. La société israélienne n’a jamais été unifiée, le sionisme a disparu comme idéologie pour devenir le support d’un nationalisme religieux.

Parce que le Hamas, une force en perdition, précipite les choses exactement comme la Russie l’a fait, afin de sauver sa peau pour la suite des événements.

Il faut être d’une naïveté confondante pour croire le Hamas qui parle de moment décisif pour la libération de la Palestine, appelant tout le monde (c’est-à-dire uniquement les hommes) à prendre les armes, tous les Palestiniens à se lancer dans la bataille générale, etc.

C’est de la fiction, une mobilisation artificielle qui a comme but de faire que « tout change pour que rien ne change ». Exactement comme la Russie lorsqu’elle parle de défense de la civilisation pour l’avenir dans sa guerre avec l’Ukraine, alors que son objectif est simplement de maintenir le statu quo dans un monde en transformation.

En ce sens, l’initiative du Hamas est réactionnaire et pour cette raison elle n’aboutira à rien. C’est tout sauf une guerre du peuple. Si au moins on pouvait penser que cela aiderait les masses palestiniennes dans leur existence, mais celles-ci sont uniquement de la matière première pour que le Hamas perpétue son existence.

L’État israélien va d’ailleurs lui-même être obligé de précipiter les choses afin de sauver sa propre peau pour l’avenir. Les réactionnaires sont obligés de prendre l’initiative – et tout va être de pire en pire, il ne faut pas se leurrer !

On paie ici l’énorme retard historique des masses mondiales par rapport aux exigences historiques, et ce sont elles qui vont en payer l’horrible prix. Quel enfer, en 2023, de voir que les opposants sont la superpuissance américaine et la superpuissance chinoise, la Russie et l’Ukraine, le Hamas et l’État israélien !

Le vieux monde s’entre-déchire pour se maintenir dans la prochaine phase, alors que l’actualité devrait être la révolution mondiale !

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30 ans après, l’EZLN se retrouve face aux narcos

Avant la Zad de Notre-Dame-des-Landes et avant le Rojava, il y avait l’EZLN au Mexique, dont la démarche est même à l’origine de tout ce discours post-anarchiste communautaire. Lorsque les zapatistes de l’EZLN débarquent pourtant, le 1er janvier 1994, ils n’ont pas cette image-là du tout.

Avec le sous-commandant Marcos, ils font figure de mouvement alter-mondialiste armé. L’ennemi annoncé, c’est le « néo-libéralisme », l’objectif proclamé, c’est la révolution.

L’EZLN semblait ouvrir un nouveau brasier en Amérique latine, à la suite d’une longue tradition, et au moment où le Parti Communiste du Pérou (dénoncé par les médias comme « Sentier lumineux ») perdait tous ses acquis après avoir ébranlé le pays.

Le mouvement des zapatistes émerge d’ailleurs le jour de l’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA/NADTA) en occupant plusieurs mairies dans l’État du Chiapas.

Hélas ! L’EZLN – Armée zapatiste de libération nationale – s’est très rapidement vendue à l’État mexicain. La raison est qu’en réalité, l’EZLN était le masque des Indigènes du Chiapas.

Le Sud du Mexique était en effet marginalisé, depuis l’effondrement de la civilisation maya, au 9e siècle. Même à l’époque des Aztèques puis des conquistadors, le sud restait bien à l’écart, au point d’une révolte chrétienne mystique au 19e siècle pour former un État maya « Chan Santa Cruz ».

Dans ce contexte arriéré, l’État mexicain s’est d’ailleurs empressé de ne rien faire. Les accords de San Andrés en février 1996 ont officialisé une grande autonomie communautaire, l’EZLN devenant alors concrètement le « représentant » rebelle d’un Congrès indigène fondé au mois d’octobre.

Ce Congrès a une prétention nationale, mais est totalement hors-jeu depuis le début au Mexique, n’exprimant que le point de vue du « sud » arriéré. Aussi, afin de tenir en obtenant des soutiens (internationaux et de gauche), il y a eu des « rencontres intercontinentales contre le néolibéralisme et pour l’humanité », des appels « pour la vie », d’innombrables communiqués du Sous-commandant Marcos, etc., et ce pendant trente ans.

Si l’EZLN est totalement passé de mode depuis 1996, il y a eu pendant cette période des soutiens ininterrompus, comme queue de la comète de la « flamme » lancée en 1994. Il était possible d’aller au Chiapas, de rendre visite aux communautés « autonomes », de participer à tout un folklore indigéniste rebelle, etc.

Or, comme on le sait, le capitalisme a connu une immense progression entre 1989 et 2020. Inévitablement, les répercussions se feraient sentir même dans le Sud du Mexique, malgré son arriération et ses bastions « communautaires ».

Et deux rouleaux compresseurs se précipitent désormais sur l’EZLN. De par la nature du pays, ceux-ci ont deux formes : une bureaucratique, une féodale.

Le capitalisme bureaucratique mexicain aimerait bien en effet avancer par la force, en se dégageant de la pesante tutelle américaine.

Le président mexicain, Andrés Manuel López Obrador, est ainsi présenté par l’opposition libérale comme une sorte de Satan diffusant partout le virus communiste. Sa ligne est, grosso modo, celle du Venezuela.

Au nom du progrès, cela bureaucratise et militarise. La pointe extrême sud du pays connaît ainsi l’établissement d’un « train maya » pour permettre aux touristes de visiter les ruines de la civilisation maya. Non seulement c’est l’armée qui gère la construction du train, mais c’est également elle qui s’occupera du tourisme là-bas.

Ce militarisme dans le cadre d’un bureaucratisme capitaliste est présenté comme un développement du pays. Andrés Manuel López Obrador parle d’ailleurs à la population chaque matin pour expliquer tout ce qu’il fait au nom du peuple. Il s’est d’ailleurs vanté en 2019 d’avoir rencontre le Sous-commandant Marcos dans les années 1990.

Au centre, le Sous-commandant Marcos et Andrés Manuel López Obrador

Cet épisode du « train maya » touche l’EZLN, car en fait le « progrès » exige la soumission du sud du Mexique et son intégration économique, bloquée depuis la naissance du Mexique, ou même depuis les conquistadors et même les Aztèques. C’est la fin de toute une époque historique.

L’EZLN a d’ailleurs prétendu en 2019 qu’il ferait tout pour empêcher la construction du « train maya », mais c’est une défaite complète, malgré la mobilisation démocratique de quelques forces locales.

Car, l’EZLN, depuis 1996, c’est du folklore. Et le « train maya » n’est pas le seul projet : des groupes paramilitaires liés à des grands groupes capitalistes, notamment miniers, ont commencé, depuis 2019, à mener des provocations armées au Chiapas, parfois meurtrières, au point que l’EZLN prévient qu’il va « reprendre les armes ».

En réalité, l’EZLN sait qu’il ne peut rien faire et c’est pourquoi il a cherché à se relancer avec « La dernière initiative », qui depuis 2020 s’intitule « Capitalisme corporatif mondial, Patriarcat planétaire, Autonomies en rébellion ». Autrement dit, il s’est aligné sur l’idéologie du Rojava et des ZAD, dont il est de toutes façons le précurseur.

Contre les « mégaprojets », il faut que le pouvoir revienne aux « communautés » locales, etc.

Sauf que désormais ce néo-féodalisme est également confronté au capitalisme féodal virulent au Mexique : les narcos. Jusqu’à présent, le sud était relativement préservé, car les cartels mexicains visent des trafics avec les États-Unis. Ils s’exportent désormais cependant dans les pays voisins du Mexique, car ils ont des sommes d’argent colossales et une expertise militaire énorme.

Résultat, les cartels ont investi le Chiapas. En 1992, l’EZLN défilait en armes dans la ville de San Cristóbal de Las Casas, en 2023 elle est sillonnée par « Los Motonetos », des tueurs à motos au service du Cártel de San Juan Chamula, le premier cartel qui se fonde directement sur les populations indigènes.

Car les affrontements entre cartels pour le contrôle de la zone sont réguliers. Les drogues étaient inconnues au Chiapas il y a 10 ans, désormais elles sont monnaie courante dans toutes leurs variantes.

Et il y a le Guatemala juste à côté. Trafic d’êtres humains (pour migrer vers les États-Unis), d’armes, de drogues, prostitution (un phénomène massif au Mexique notamment visant les mineurs), pornographie « ethnique »…

La ville de Frontera Comalapa, aux frontières avec le Guatemala, a vu 3000 de ses 60 000 habitants s’enfuir en raison des affrontements.

Frontera Comalpa, à la frontière. Si les cartels sont désormais massivement présents dans tout le Mexique, ce n’était pas vrai justemet jusqu’aux deux dernières années pour les Etats du Chiapas, de Campeche et du Yucatan.

Tous les cartels se précipitent sur le Chiapas : « Los Zetas », « Cártel Jalisco Nueva Generación » (appelé « El Cártel de las Cuatro Letras » au Chiapas), et surtout le « Cartel de Sinaloa » qui a la main-mise.

Corruption des taxis, des fonctionnaires, des policiers, des syndicalistes, des commerçants, menaces et meurtres, tout est pratiqué pour les extorsions, les trafics, la prostitution.

Il y a dix ans, il n’y avait rien de tout cela ! Mais en contribuant au maintien d’une néo-féodalité indigéniste, l’EZLN a désormais le Chiapas qui se retrouve désormais corrompu et englouti par une autre néo-féodalité – capitaliste cette fois.

Et à cela s’ajoute l’armée et la bureaucratie capitaliste avec ses méga projets. C’est le drame complet.

Les rassemblements légaux, réformistes, sur une base communautaire de l’EZLN ont bien rassemblé un nombre très important de gens au Chiapas. Le succès a été très important. Mais le Chiapas n’est pas une île et désormais il revient dans l’histoire mexicaine, de manière sanglante.

On a là vraiment un événement significatif. C’est la fin de la candeur alter-mondialiste des années 1990. Face aux cartels de la drogue, il faut un niveau militaire digne d’une véritable armée. Ce n’est pas avec des petits regroupements d’auto-défense artisanaux que l’EZLN peut faire le poids.

La crise envahit le monde entier. L’EZLN paye le prix de son mensonge de vouloir à la place du socialisme un fantasme « communautaire », une ZAD indigène.

Cette conception anarchiste n’est qu’un romantisme individualiste du 19e siècle ; à une époque aussi développée que la nôtre, rien n’est possible sans les masses, sans la centralisation, sans un haut niveau de réflexion fondée sur les principes du Socialisme. Autrement dit, sans un Etan, une armée rouge.

Au 21e siècle, avec la crise, la naïveté et l’opportunisme se paient chers!

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Les cités de banlieue ont de nouveau craqué en 2023

Les émeutes ont de nouveau pris le dessus dans les banlieues françaises, les cités devenant l’épicentre d’affrontements avec la police. 553 communes ont été touchées, et contrairement à 2005, ce n’est pas la région parisienne qui a servi de fer de lance au mouvement. Ni Lyon ni Marseille non plus, d’ailleurs, car les émeutes ont vraiment essaimé de partout.

Il y a eu la quantité, c’est vraiment le reflet d’un craquage général. Il y a eu aussi la qualité, les émeutes se lançant avec une puissante hargne : on parle d’un milliard d’euros de dégâts.

Le paradoxe, c’est qu’autant d’émotions fortes et d’actions violentes ne produisent rien de bon. La quantité exprime juste que le désarroi dans les cités est général, la qualité que c’est une fuite en avant.

Résultat, les Français sont très choqués, ils sont même affolés. Cela ne s’arrête jamais et c’est toujours à la fois laid et violent. Gilets jaunes… Pandémie… Guerre en Ukraine… Mouvement contre la réforme des retraites… Émeutes dans les cités… Tout apparaît comme incompréhensible, passéiste, incompatible avec une vie épanouie.

Et c’est vrai ! La société française de décompose, ni plus ni moins. Les gens comprennent que le sol se dérobe sous leurs pieds.

Il ne faut pas se leurrer : le gilet jaune ne fait pas rêver, avec sa nostalgie de la France d’il y a trente ans et son style beauf. Le syndicaliste ? Pareil ! Le type est d’une ringardise absolue et n’a rien à dire. Le lumpen des cités ? C’est encore pire, lui on ne veut même pas le voir en photo. D’ailleurs les Français sont très choqués qu’on en fasse autant pour un jeune délinquant qui roule en grosse cylindrée : ce genre de comportement est vu comme très dangereux par le peuple. Personne n’a envie de voir son enfant écrasé par un tel énergumène.

Qu’il soit tué par la police, tout le monde admettra que c’est regrettable. Les Français ne sont pas des salauds. Et ils savent que pour certains la vie est très dure. Mais il y a des limites ! La grande majorité des Français pensera donc que c’est tragique, qu’on n’y peut rien, et que c’était à ses parents de s’en occuper.

Les Français se disent : ce n’est pas mon gamin qui roule à 17 ans dans une Mercedes de location pour aller à 7h du matin manger un McDo. Chacun ses responsabilités !

Le gosse est avant tout victime de ses errements et de ses parents, et c’est le policier qui l’a tué qui était lui au mauvais moment au mauvais endroit.

Le peuple voit juste. Malheureusement, politiquement, il est naïf. Les Français vont donc s’empresser de voter à Droite afin de rétablir un certain ordre social, et tant pis pour les discours sociaux de la gauche populiste, qu’il aurait bien aimé suivre. Mais il faut bien choisir ! Entre son gamin dans le libéralisme d’un côté et des acquis sociaux avec des lumpens potentiellement meurtriers de l’autre, les gens ont vite choisi.

Eh oui, c’est pour ça que les gens votent à Droite de par le monde, que ce soit au Salvador ou aux États-Unis, en Corée du Sud ou au Nigeria. Dans une société en panique, les gens préfèrent la sécurité au désordre fut-il potentiellement social. A moins d’une révolution, mais avec qui à l’heure actuelle ?

Naturellement, ce virage à Droite se fera au grand dam de ceux qui font leur fond de commerce d’un pseudo anti-racisme, masque de tentatives communautaires de s’installer dans le capitalisme ou bien de grappiller davantage de points sociaux, ou bien de moderniser le capitalisme en le bousculant un peu, comme le fait le style LGBT.

Quelle étrangeté de voir une idéologie néo-féodale comme l’Islam se conjuguer au capitalisme le plus ultra-libéral. Le turbocapitalisme est vraiment totalement furieux dans sa tentative de tout déconstruire pour élargir les marchés capitalistes au moyen des identités les plus multiples.

Enfin, là, les jeux sont faits. Les marches « progressistes » organisées le 8 juillet 2023 comme tentative unanime de récupération de la crise des cités n’ont rassemblé que 100, 500, 1000 personnes dans quelques villes de France. La déconnexion avec la réalité populaire est complète.

La droitisation de la société française s’annonce massive.

La dictature algérienne n’en rate pas une

Revenons sur un aspect marquant. Les émeutes de banlieue de 2023 ont été d’une violence puissante. Elles ont fait autant de dégâts qu’en 2005, sauf qu’en 2005 cela avait duré trois semaines. En 2023, cela n’a duré que huit jours.

C’est révélateur. En 2005, les émeutes étaient une prise de conscience d’un rapport de force politique. Il y avait toute une ambiance à l’arrière-plan qui confinait à la mentalité insurrectionnelle. La revue Crise au sujet des émeutes souligne avec raison l’importance du film Ma 6-T va crack-er. Non pas que dans les cités tout le monde écoutait du rap ou même avait vu le film, par ailleurs très mauvais. Mais la bande originale du film, sorti en 1995, avait été une énorme référence populaire.

Il y a quelque chose d’assez fou d’ailleurs. Si on prend le film Ma 6-T va crack-er (ou plus exactement sa bande-son) et les émeutes de 2005, on aurait pu se dire qu’une nouvelle génération contestataire allait débarquer. C’était un rêve de jeune homme : la casquette bien vissé sur la tête, le bandana rouge bien serré sur le bas du visage, l’AK 47 et la lutte contre l’État bourgeois. Sauf que ce rêve de jeune homme s’est réalisé, au niveau des masses… en soutien à Alain Soral et Dieudonné pour les uns, en soutien à l’État islamique pour les autres !

Si vous regardez tant les uns que les autres, qui ont eu un immense succès entre 2005 et 2023, vous verrez que le profil de leurs soutiens est celui de ceux qui auraient dû basculer à Gauche en 2005. On parle de jeunes hommes, de milieu populaire ou petit-bourgeois et faisant un effort intellectuel prononcé, soucieux de s’impliquer sur le plan des idées en ayant une énorme méfiance vis-à-vis de l’État et des systèmes de domination.

En raison du patriarcat et de l’antisémitisme, tous ces gens ont cependant basculé dans le romantisme fasciste ou l’islamisme. Ils en ont fait une véritable culture au niveau de la vie quotidienne, empêchant tout retour en arrière. Ils ont façonné leurs mentalités avec des fantasmagories, tel « Comprendre l’empire » d’Alain Soral, sorti en 2011, vendu à plus de 120 000 exemplaires. Quel incroyable gâchis !

En ce sens, les émeutes de 2023 dans les cités ferment une porte. Pour en ouvrir une autre?