Catégories
Politique

Réforme du baccalauréat et « Parcoursup » : communiqué autour de l’UNEF

Suite à la remise en cause du baccalauréat universel et à la mise en place dès cette année d’un nouveau système d’inscription pour les études supérieures, le syndicat UNEF a mobilisé ces derniers jours.

En voici le communiqué diffusé à l’occasion du premier février et signé par différentes autres mouvements de jeunesse liés à des partis ; on notera l’utilisation de l’écriture inclusive.

Suite au vote de la loi réformant l’accès à l’université en décembre à l’assemblée, le mois de janvier est celui de la mise en place de la sélection dans les universités via la nouvelle plateforme « Parcoursup ».

Afin de trier les dossiers des lycéen∙ne∙s, chaque université se fondera sur des attendus nationaux, déclinés en attendus locaux. Pour des milliers de jeunes, ces attendus auront pour effet de les décourager de poursuivre des études, de leur bloquer la possibilité d’accéder à la filière de leur choix, voire de l’université tout court.

En effet, l’augmentation du nombre de bachelier, combinée à la restriction du nombre de places disponibles dans les universités, vont à terme transformer la majorité des filières ouvertes, en filières « en tension », donc rendues sélectives par la loi.

Par ailleurs, la complexe procédure d’admission, parce qu’elle limite les bachelier∙e∙s à 10 vœux non hiérarchisés, risque de maintenir la plupart des jeunes sur liste d’attente jusqu’à la dernière phase de la procédure.

Pour tous les jeunes sans affectation à l’issue de la procédure, leur seule option sera de faire appel au rectorat, qui leur proposera une unique affectation dans une filière où demeurent des places vacantes, sans garantie que cette affectation soit en cohérence avec leur projet pédagogique et professionnel. Les jeunes n’auront que 24 heures pour répondre à cette proposition, sans quoi perdront toute chance d’accéder à l’enseignement supérieur.

Par ailleurs, le gouvernement souhaite, dans le cadre de cette réforme, remettre en cause l’arrêté licence, texte qui cadre nationalement les droits étudiants du cycle licence, sorte de code du travail et étudiant-e-s. En remettant en cause des protections fondamentales telles que les rattrapages ou encore la compensation entre les matières, et en souhaitant individualiser à outrance les parcours, c’est notre droit à la réussite qui est menacé.

Les étudiant-e-s devront signer un contrat de réussite avec leur établissement, et s’ils n’en respectent pas les termes, leurs bourses pourraient se voir supprimées. Alors que les mauvaises conditions d’études à l’université et la précarité financière sont les premiers facteurs d’échec dans l’enseignement supérieur, le gouvernement se trompe lorsqu’il estime que retirer les bourses des étudiant-e-s en difficulté, c’est-à-dire les sanctionner, les incitera à réussir, cela ne fera au contraire qu’augmenter un taux d’échec d’ors et déjà très élevé en licence.

Le gouvernement souhaite mettre en place une cotisation de 90 euros par étudiant∙e∙s, visant à financer les services de médecine préventive, de vie étudiante, culturels et sportifs des universités. La mise en place de cette cotisation fait un peu plus reposer le financement du service public de l’enseignement supérieur, en grande difficulté du fait du désengagement de l’Etat, sur les épaules de ses usager.e.s. Les contours de sa répartition ne sont par ailleurs toujours pas clairs, ne permettant pas d’avoir de certitude sur ses objectifs et son efficacité réelle.

Cette réforme de l’accès à l’enseignement supérieur se combinera avec la réforme du baccalauréat, qui risque d’entériner la fin du bac comme diplôme national. En mettant en place une modularisation des enseignements secondaires sans cadrage national, qui aggravera les inégalités territoriales entre lycées, il sera créé, de fait, une concurrence entre établissements. Cette concurrence sera d’autant plus grave qu’elle sera prise en compte dans les procédure d’admission à l’université, par l’étude des dossiers des candidat-e-s.

Alors que depuis son élection le président et son gouvernement font sans cesse le choix de politiques qui favorisent les plus riches et les puissants à l’image de la suppression de l’ISF, ici, ce sont une nouvelle fois les classes populaires qui sont visées. Cette sélection va toucher prioritairement les lycéen.ne.s issus des quartiers les plus populaires et les plus en difficulté. Elle laissera sur le carreau des milliers de lycéen.ne.s qui se retrouveront sans diplôme et sans avenir.

Alors que les jeunes ont déjà exprimé leur opposition à l’annonce du plan étudiant depuis plusieurs mois, nos organisations réitèrent leur refus de voir s’instaurer la sélection à l’entrée de l’université, nous réclamons le retrait du plan Vidal. Nous exigeons aussi l’abandon des projets de remise en cause des droits fondamentaux des étudiants, ainsi que la mise en place d’une réforme du bac qui engendrera de profondes inégalités territoriales et sociales.

Il est grand temps d’agir pour qu’un vrai service public de l’information et de l’orientation voit le jour et que des moyens soient injectés afin de permettre à chacune et chacun de maîtriser et de choisir son parcours de vie.

Nos organisations ont déjà formulées de nombreuses propositions alternatives et nous continuerons à les porter de toutes nos forces face à ces projets qui menacent notre avenir.

Nos organisations appellent les jeunes à se mobiliser le jeudi 1er février 2018, à se réunir, dès maintenant pour débattre des réformes, à se mobiliser sous toutes les formes décidées collectivement (grèves, blocages, manifestations, rassemblements, etc), pour alerter sur les dangers des réformes en cours.

Nous réclamons le droit pour toutes et tous (lycéen.ne.s, étudiant.e.s, salarié.e.s). de faire grève, et nous nous prononçons d’ores et déjà contre toute sanction, administrative ou policière, contre celles et ceux qui tenteront d’exercer ce droit légitime.

Une nouvelle réunion réunissant nos organisations se tiendra à la suite du 1er février pour proposer des suites à cette journée de mobilisation.

Signataires :

UNEF – UNL – Solidaires étudiant.e.s – FiDL

Mouvement Jeunes Communistes de France – Ensemble Jeunes – Jeunes Insoumis – Jeunes Générations – MJS Réseau jeune du PG – Union des étudiants Communistes – NPA Jeunes

JOC – MRJC – LMDE

Catégories
Politique

Le cycliste Romain Bardet à propos du sport sur France Inter

Le coureur cycliste Romain Bardet était l’invité de l’émission Par Jupiter sur France Inter jeudi dernier. C’est une émission satirique mais néanmoins sérieuse, typique de l’esprit de la gauche française.

Voici une retranscription d’un échange intéressant concernant certaines pratiques liées au sport.

On peut l’écouter à partir de 44min 30 secondes sur ce lien.

« Charline Vanhoenacker : Voici un sujet sur le sport extrême où les gens veulent se surpasser.

Il y a de plus en plus de salles et d’adeptes de cross-fit, de sports inspirés des méthodes de l’armée américaine et aussi beaucoup de vélo en salle où les gens cherchent à flirter avec le rouge.

Quasiment parfois à la suffocation, certains rendent sur le parquet après le sport. Est-ce que vous comprenez cette démarche de vouloir se surpasser ?

Romain Bardet : Non j’ai un peu de mal je vous avoue. Cela m’est un peu étranger, ce n’est pas la conception que j’ai originel du sport. C’est vrai que le sport m’a été inculqué par mes parents, c’était les grandes randonnées le dimanche à vélo, finir le col avec mon père, profiter des paysages, faire un pic-nique dans l’herbe tout simplement.

C’est découvrir des lieux, être au grand air et pour moi les séances, voilà quand faut rester à l’intérieur, c’est de la véritable torture mentale, parce que ce n’est pas la conception que j’en ai.

On a la chance d’avoir une grosse diversité des paysages en France et pleins de choses à découvrir et je pense que le sport amène aussi ce lâcher prise, quand on va dans des grandes étendues, des grands espaces, les montagnes, moi les volcans en Auvergne, justement propice à découvrir des choses et être en communion avec la nature.

Et voilà vous en parliez c’est vrai qu’il y a une grosse tendance pour ces sports un petit peu extrêmes où les gens dans un temps imparti doivent faire le maximum, un peu à l’image de la société dans laquelle on vit, dans la vie de tous les jours…

Charline Vanhoenacker : c’est vrai dans l’instantané, peu de temps pour le faire…

Romain Bardet : mais aussi il y a un vrai tendance retour à la nature avec le phénomène trail qui se développe énormément où des gens aussi ont besoin de rechercher une certaine quiétude que la nature peut apporter. »

Ceci est très intéressant. D’abord à propos de la nature, mais aussi à propos du sport. À la base du sport, il y a le plaisir et le jeu.

Les sportifs, notamment les cyclistes mais c’est aussi le cas des footballeurs, insistent très souvent dans les interviews sur le fait que cela soit une passion pour eux.

La souffrance n’est pas le but. Ce qui est valorisé par contre est l’effort, la rigueur pour arriver à ses buts. Mais toujours avec à l’esprit le plaisir.

Le plaisir est d’ailleurs collectif, y compris dans l’adversité, puisque l’adversaire dans la grande majorité des cas est respecté et salué pour ses performances, que l’on soit gagnant ou perdant.

Au contraire, les pratiques dénoncées dans l’émissions et qui sont à la mode à Paris et dans les grandes villes françaises sont typiques de la décadence de notre société.

Cela n’a aucun sens et reflète un grand malaise chez les personnes riches et branchées qui vivent dans ces grandes villes.

Catégories
Politique

Delphine Batho : « Mitterrand, réveille-toi, ils sont devenus fous ! »

Le Parti socialiste a rejeté la candidature de Delphine Batho pour le congrès d’Aubervilliers. Pour pouvoir se présenter, le Parti socialiste exigeait deux choses :

– le parrainage par 5% des membres du conseil national ;

– un texte d’orientation d’au maximum 50 000 signes et des thématiques obligatoires : Europe, inégalité, écologie, République et démocratie.

Delphine Batho, députée des Deux-Sèvres, n’a pas eu les parrainages et a tenté de forcer l’acceptation de sa candidature avec un référé au tribunal de grande instance, qui a échoué.

Voici le texte de sa réaction à cet échec, ainsi que son texte d’orientation.

Je prends acte de la décision de la direction de refuser l’enregistrement du texte d’orientation et de la candidature que je souhaitais défendre dans le cadre du congrès.

Cette décision est contraire, pas seulement à l’espoir de nombreux militants, de nombreux élus et citoyens qui nous regardent, mais à l’intérêt collectif du PS et de la gauche.

En ce sens, c’est une décision très grave. Hélas, elle apporte une preuve supplémentaire de la faiblesse d’une direction coupée du réel et de la société, qui n’a plus comme ultime recours que la censure. Mais à l’heure des réseaux sociaux et d’internet, il n’y a plus de censure possible !

De quoi ont-ils peur, ceux qui prédisent un congrès joué d’avance ? Pourquoi empêcher le débat s’ils sont si sûrs d’eux ? Tous les autres candidats, sauf un seul, ont voté pour ce pacte de censure en commission des résolutions.

Ce samedi, c’est en fait une victoire à la Pyrrhus pour la direction du Parti socialiste.

En fait, ils savent bien que rien ne peut résister à la volonté des citoyens lorsqu’ils se mettent en mouvement, c’est désormais une question de temps.

Le débat politique que l’on jette par la porte, il reviendra par la fenêtre, et si la fenêtre se ferme elle-aussi, il passera par le trou de serrure.

Ma campagne était prête. Je vais la poursuivre.

Je vais aller échanger et débattre aux quatre coins de la France avec tous les militants qui le proposent.

Il y aura donc le théâtre d’ombres du congrès officiel, et un peu comme à Avignon, le « festival off ».

Ceux qui croient que j’ai proposé une candidature pour des enjeux de pouvoirs se trompent lourdement sur le sens de ma démarche.

A toutes les militantes et les militants qui espéraient un autre comportement de la direction aujourd’hui, je dis ne vous découragez pas, c’est ce qu’ils espèrent, c’est ce qu’ils attendent ! J’assume ma responsabilité de vous demander de rester comme moi au Parti socialiste parce que l’avenir aura besoin d’une force de transformation sociale et écologique qui s’assume comme un parti de gouvernement.

Nous allons mettre en commun et en partage nos exigences et nos solutions.

D’ores et déjà vous pouvez partager notre texte d’orientation sur les réseaux sociaux, vous en emparer, le signer, le commenter, le critiquer ici. Il est fait pour cela. Faire vivre le débat.

Téléchargez et partagez le texte « Mitterrand, réveille-toi, ils sont devenus fous ! » :
http://myreader.toile-libre.org/uploads/My_5a6c9e0c81226.pdf

Voici le texte d’orientation en question.

Mitterrand, réveille-toi, ils sont devenus fous !

« La pire erreur n’est pas dans l’échec, mais dans l’incapacité de dominer l’échec » François Mitterrand

Chers camarades,

Que valent tous les textes de motions, comparés aux actes ?

Nous voulons la démocratie, mais chez nous des votes internes truqués sont devenus une maladie chronique ;

Nous voulons l’écologie, nous avons même inscrit la « social-écologie » sous notre logo, mais chez nous les dirigeants décident que la position « officielle » du parti est de dénoncer l’abandon du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ;

Nous voulons le féminisme, mais chez nous les femmes se voient toujours dénier leurs capacités de chef politique, subissent des violences inouïes, harcelées et violées dans l’équipe de campagne présidentielle et dans des organismes associés du parti ;

Nous voulons la décentralisation, mais, chez nous, sans la moindre explication, les moyens sont coupés aux fédérations qui doivent licencier leurs permanents et vendre leurs locaux ;

Nous voulons être un parti de militants, mais chez nous, en dehors des échéances électorales où il faut faire campagne, les adhérentes et les adhérents sont affublés d’étiquettes en fonction de choix passés et qualifiés d’ « aubrystes », « hollandais », « ex-hamonistes », « ex-strausskhaniens », « ex-ségolénistes », « exvallsistes »…, pour être catalogués alors qu’ils aspirent à des débats internes où chacun est écouté pour ses idées et qui ne soient plus des rapports de force permanents ;

Nous sommes le parti de l’Unité, dont la raison d’être historique est d’avoir été fondé pour rassembler toutes les sensibilités de pensée de la gauche, mais chez nous les départs massifs, les exclusions et les excommunications, se multiplient.

« Vous devez être le changement que vous voulez voir dans ce monde » disait Gandhi.

Et si, en fait, la crise idéologique de la gauche avait une autre cause que celle que l’on croit ? Et si elle n’était que le résultat implacable de vieilles pratiques et d’une dérive poussée à son paroxysme qui conduit à rejeter toute idée nouvelle, à interdire tout débat de fond honnête, à refuser toute ouverture à la société et aux citoyens dans leur diversité sociologique, à empêcher toute intelligence collective ?

Et si, en fait, cet enfermement conduisait à refouler toutes les demandes sociales émergeantes, qui auraient dû logiquement irriguer notre pensée, mais qui au lieu de cela finissent par être portées par nos concurrents faute de trouver leur place au Parti socialiste.

Et si, en réalité, toutes ces tribunes, tous ces commentaires proclamant ad nauseam la fin du Parti socialiste n’étaient que le paravent de cette autre crise ?

Celle d’une direction politique confisquée depuis des années par les mêmes chefs de courants, de clans, de castes, qui placent leurs intérêts particuliers au-dessus de toute autre considération et pour lesquels les débats d’idées ne sont plus que des postures tactiques – souvent factices puisque les vrais débats traversent tous les « courants » – afin de conserver le pouvoir.

Non l’espérance n’est pas morte.

Non l’injustice n’a pas disparu dans le nouveau monde.

Non les énergies ne manquent pas dans la société pour porter les combats du 21ème siècle pour l’égalité, l’écologie, le travail, le féminisme, la laïcité, la démocratie numérique, la jeunesse, l’émancipation sociale et finalement la dignité humaine.

Oui, la France a plus que jamais besoin d’une force progressiste moderne, porteuse des nouvelles espérances, qui s’assume comme un parti de gouvernement.

Beaucoup de citoyens, déçus des choix qu’ils ont pu faire lors de l’élection présidentielle pour « voter utile » contre nous, se sentent orphelins et nous regardent. Il existe toujours un espace politique et électoral pour une force de gauche et écologiste de transformation, sérieuse et crédible.

A l’heure des réseaux sociaux et de la révolution numérique, c’est en fait un petit groupe de personnes qui parlent et décident pour le plus grand nombre dans notre parti. Leurs manœuvres divisent en permanence et empêchent le rassemblement. En fait, la gauche meurt parce qu’elle est confisquée, infantilisée, caporalisée par cette direction qui veut s’auto-reconduire.

Elle meurt par les faillites morales que sont l’absence de transparence, le sexisme, la reproduction des inégalités en son sein, le conservatisme de dirigeants sûrs d’eux-mêmes. Ce parti-là n’aura pas de nouvelle chance. Le PS que nous connaissons aujourd’hui, même en changeant de nom, ne reviendra jamais aux responsabilités.

Les temps changent, voilà ce que n’ont pas compris nos « dirigeants ». Ou plutôt l’ont-ils si bien compris qu’ils ont décidé de tout sacrifier pour assurer leur présent et leur passif, en transformant l’attendue « refondation » en processus d’enfermement de la direction sur elle-même.

Les temps changent, et la parole se libère, les militantes et militants, les adhérentes et adhérents, les élus locaux, s’émancipent, ne veulent plus d’un système qui les réduit à l’obéissance, aux pressions, aux exclusions, aux ordres. Ils veulent peser sur les décisions.

Des femmes et des hommes libres veulent contester la légitimité, non pas des personnes ou de certains responsables, mais du système lui-même, du fonctionnement du Parti socialiste et de sa dérive.

Sans parrain, sans clan, sans courant, en femme libre, socialiste, écologiste, laïque, républicaine, antiraciste, j’appelle chaque militant à reprendre le pouvoir, sa part de souveraineté socialiste, contre l’enterrement de nos espérances, pour faire de ce congrès, non pas celui d’une prétendue refondation programmatique avec des textes d’orientation grandiloquents, mais d’un big-bang organisationnel et du changement radical dans la gouvernance du Parti socialiste.

C’est le préalable indispensable pour avoir la capacité de bâtir ensemble un nouveau projet solide. Qui peut croire que ce congrès pourrait à lui-seul tout résoudre face à l’effondrement du socialisme démocratique constaté en France comme partout ?

Ce qu’il nous faut décider enfin et tout de suite, c’est de créer les conditions d’émergence d’une nouvelle orientation. Cette vitalité retrouvée est la condition d’un nouvel élan qui, seul, pourra nous permettre de regagner des forces dans la perspective des élections européennes et territoriales.

Si vous pensez que le verrouillage de l’appareil qui dégoûte tant de citoyens de s’engager au Parti socialiste, ça suffit !

Que le sacrifice des espérances des générations actuelles et à venir, ça suffit ! Ensemble, levons-nous pour dire « stop » et pour changer le cours de l’histoire. Après la déroute, les Français n’attendent pas de nous un long et lent processus d’immobilisme. Ils exigent des actes, vite.

LES PREUVES CONCRETES ET IMMEDIATES DE CHANGEMENT :

1. L’abolition des clans et des courants, par la constitution d’une majorité de travail ouverte à tous et émancipée, qui place le respect des militants audessus de tout ;

2. L’élection d’une Première Secrétaire et d’un collectif d’animation (secrétariat national) dont le mandat sera non-reconductible, seule garantie qu’ils se consacreront intégralement pendant 18 mois à la conduite du processus devant remettre le Parti socialiste sur de bons rails, et qu’ils ne viseront pas la conservation d’un quelconque pouvoir interne.

3. Une nouvelle structuration du Parti socialiste, non plus verticale, mais en réseau s’inspirant des nouveaux modèles de l’économie sociale et collaborative, favorisant les coopérations directes entre les territoires, les thématiques de réflexion et les secteurs de militantisme.

4. La démocratie interne, partout, tout le temps, qui seule peut rendre de nouveau attractif le Parti socialiste avec la fin du huis clos dans les réunions de nos instances, la mise en place du vote électronique et l’ouverture aux citoyens de tous les grands choix du parti.

Contrairement aux nouvelles organisations politiques présentées sous forme de « mouvements », qui n’ont de modernes que les apparences puisque conçues comme des marques au service d’un chef, nous voulons reconstruire notre parti comme une organisation démocratique du 21ème siècle.

5. Un processus de remise en ordre et de remise au travail pour créer une dynamique nouvelle posant les jalons de la construction d’un Parti socialiste populaire, ouvert à la société, dont voici le processus sur 18 mois :

LE CALENDRIER DU CHANGEMENT

Avril -> Mai 2018 :

Installation du nouveau secrétariat national, collectif composé de 16 personnes (pour moitié de responsables expérimentés et pour moitié de militants de terrain issus des territoires prêts à prendre des responsabilités), qui ne décide pas à la place des adhérents mais qui est au service des militants et des territoires.

La formation d’un shadow-cabinet en lien avec nos groupes parlementaires pour être la gauche utile aux Français tout de suite dans l’opposition et porter nos contre-propositions à la politique d’Emmanuel Macron, en écho à toutes les forces vives de la société civile.

Rétablissement immédiat des dotations aux fédérations dans l’attente de décisions du Conseil national sur les règles de décentralisation d’une part conséquente des moyens du parti.

– Audit financier sur les cinq dernières années dont les analyses et conclusions seront rendues publiques.

– Saisine de la Haute Autorité Ethique sur la responsabilité morale et politique du parti dans l’omerta entourant les faits de harcèlement et de violences sexuelles commis dans les équipes de campagne et les organismes relevant de nos statuts ; mise en place de procédures opérationnelles de soutien direct à toutes les victimes.

5 Mai -> octobre 2018 :

– Commission d’enquête « vérité et transparence sur le bilan » : On ne peut rien construire sur le déni d’une défaite historique, nous devons prouver aux français que nous avons compris les causes profondes. L’enjeu n’est pas de savoir qui avait tort ou qui avait raison, puisque chacun à sa part d’une responsabilité collective, mais de tirer ensemble et en profondeur, les leçons de l’exercice du pouvoir et de notre déroute électorale pour apprendre et nous rendre plus forts dans la perspective des échéances futures.

La Commission, animée par des militants et des personnalités socialistes qui n’ont pas été directement au premier plan des responsabilités dans le quinquennat, procèdera à l’audition publique des anciens ministres, des responsables du parti et des groupes parlementaires, de nos élus locaux, des syndicalistes, des associations, des candidats aux primaires, de chercheurs, de chefs d’entreprise et de toutes celles et ceux qui ont leur mot à dire.

Toutes les auditions seront retransmises en live sur les réseaux sociaux et le site du parti. Les conclusions de la Commission serviront de lignes directrices pour l’élaboration du projet.

Août 2018 :

– Universités d’été des communs : organisées dans un territoire rural, l’ordre du jour des ateliers de formation, comme des séances plénières de débats et des temps conviviaux, ainsi que les intervenants, seront choisis sur proposition et par un vote en ligne des fédérations et des militants.

Octobre 2018 :

* Congrès extraordinaire de la démocratie ouverte au Parti socialiste : élaboration collective, discussion et adoption de nouvelles règles statutaires, élaborées par une commission composée exclusivement de militants de terrain, plaçant l’adhérente et l’adhérent au cœur de la vie de notre parti, fixant les règles de non-cumul entre les fonctions dans le parti et les fonctions électives, et organisant la participation numérique et pratique de tous les citoyens intéressés à nos choix et décisions. Adoption d’un plan de reconquête des adhérents.

Novembre 2018 -> janvier 2019 :

* Trois conventions thématiques :

– L’émancipation des femmes

– Le travail et la révolution numérique

– La République et la laïcité

6 Février 2019 :

– Convention pour l’Europe écologique, sociale et démocratique : présentation du projet de refondation du projet européen comme un projet de civilisation écologique et sociale dans la mondialisation, et démocratique face à l’influence des multinationales et des lobbies. Mars -> Mai 2019 :  Présentation de nos listes et campagne des élections européennes

Octobre 2019 :

– Congrès de bilan sur la mise en œuvre du calendrier du changement, renouvellement de toutes les instances sur la base des nouveaux statuts, y compris première secrétaire, lancement de l’élaboration du projet et de la campagne des municipales.

Une révolution pacifique, déterminée et généreuse, voilà notre projet. Rejoignez-nous !

#MitterrandRéveilleToi

mitterrandreveilletoi@gmail.com

Catégories
Politique

Delphine Batho « sur le Front de l’Écologie »

Delphine Batho devrait présenter aujourd’hui sa candidature à la tête du Parti Socialiste. Elle assume son opposition face à la direction du parti et dénonce une mafia avec des manœuvres antidémocratiques. Sa candidature sera normalement rejetée pour non respect des nouvelles règles qu’elle conteste, à savoir le fait de devoir être parrainé par 16 membres du Conseil National du parti.

Son positionnement politique est lui aussi assez tranché par rapport à la ligne générale du parti. Elle est très à gauche, avec une réelle vision écologiste. L’entretien qu’elle a accordé à la revue Esprit et intitulé « Sur le Front de l’Écologie » est un bon aperçu.

Delphine Batho y explique que :

« Il y a une confrontation de plus en plus tendue entre la recherche du profit immédiat et l’intérêt général de l’humanité sur la planète.

Cette contradiction fondamentale du système capitaliste aurait logiquement dû être au cœur du combat de la gauche française et internationale depuis des années. »

Elle précise ensuite que :

«  Il y a toujours cette croyance que si les résultats économiques du pays s’améliorent, alors le reste suivra. Pourtant, un taux de croissance ne fait pas un projet de société pour une nation comme la France. »

En d’autre terme, c’est une volonté de véritablement changer la vie, et pas seulement prétendre à des aménagements sectoriels.

Elle fait partie des rares personnes qui affirment le caractère absolument urgent de la question écologique :

« Cette question du rapport au temps est cruciale. Le réchauffement climatique s’accélère, les destructions irréversibles de la biodiversité et la crise sanitaire liée aux produits chimiques aussi.

Quinze mille scientifiques alertent : « Bientôt il sera trop tard », il reste peut-être cinq ou dix ans pour inverser la trajectoire. Et nous répondrions à cette situation en décrivant le monde idéal que nous imaginons pour 2050?

Tant que l’on évoque l’horizon, en général, tout le monde est d’accord. Mais il faut en finir avec ce faux consensus, qui se fait au détriment des décisions concrètes immédiates et du courage politique. Pour la planète, ce qui compte, c’est ce qui est fait maintenant. L’écologie ne doit plus être appréhendée comme une question de long terme ; elle doit se conjuguer au présent. »

C’est une vision globale qui est proposée, avec la conscience du fait que l’enjeu est celui d’une « transformation civilisationnelle » :

« L’écologie est la nouvelle question historique pour l’humanité, comme le socialisme a pu l’être au XIXe siècle. Aujourd’hui, l’accélération inouïe de la capacité de destruction des écosystèmes par l’espèce humaine entraîne une baisse tendancielle de la qualité de vie.

Le défi fondamental de l’anthropocène, c’est de savoir si nous sommes capables de reprendre le contrôle de nos destins, de changer l’architecture de la consommation et de la production. L’écologie porte un nouveau projet global de société. »

On peut regretter cependant le manque de cohérence idéologique par rapport à la compréhension de ce qu’est le capitalisme

C’est insuffisant d’expliquer d’un côté que « l’écologie est la nouvelle ligne d’affrontement avec le capitalisme » et de regretter de l’autre que « la France a des savoir-faire dans de nombreux domaines mais les grands groupes, qui devraient être à l’avant-garde, traînent souvent les pieds. »

C’est une chose d’avoir une vision économique et d’expliquer par exemple que :

« Pour organiser le basculement de nos modes de production, il faudrait quasiment fusionner les ministères de l’Écologie et de l’Industrie.

En fait, la France n’a pas de politique industrielle : il y a des ministres de l’Industrie qui jouent les pompiers sur telle ou telle fermeture de site, mais il n’y a pas de stratégie sur la reconstruction d’un appareil productif tourné vers les technologies de demain. »

Cela en est une autre de savoir qui doit être à la tête de cette industrie justement.

Delphine Batho explique en quelque sorte que la sociale-démocratie a réussi sa mission historique. Selon elle, la plupart des pays sont maintenant démocratiques et les questions sociales y sont posées de manières aboutie, équilibrée, ou du moins peuvent l’être.

Cela n’est pas exact car justement, et c’est là le grand apport historique de la sociale-démocratie, la question démocratique ne peut être dissociée de la question sociale. Cela change tout de savoir qui détient les moyens de productions.

Soit ce sont des groupements privés, soit c’est la collectivité.

Delphine Batho semble penser que cela ne change pas grand-chose puisque selon elle, des entreprises et des grandes entreprises pourraient mener le changement.

Elle dit ainsi :

« Il faut mener la bataille de la crédibilité, économique et sociale, du projet de transformation écologique. Sur ce front, les chefs d’entreprise qui sont à la pointe de l’innovation doivent enfin donner de la voix.

Au moment de la discussion parlementaire sur la loi sur les hydro-carbures, encore une fois, tous les parlementaires ont reçu les argumentaires des industries pétrolières : où étaient ceux des entreprises qui ont tout à gagner à la sortie des énergies fossiles ? »

Cela aboutit au fait qu’elle pense que des choses sont possibles à l’intérieur même des institutions :

« Il faut détruire la légende selon laquelle rien n’est possible. Au gouvernement, j’ai obtenu, par exemple, en 2012, à une époque où pas grand monde pariait sur sa réussite, que la France décide d’accueillir la COP 21.

J’avais également empêché le retour du gaz de schiste, interdit le barrage de Sivens (finalement autorisé par mes successeurs), instauré un moratoire sur les retenues artificielles d’irrigation, baissé la TVA sur les travaux d’efficacité énergétique dans le bâtiment. »

Il y a bien sûr la volonté d’être constructif, efficace. Et c’est assurément une bonne chose. Mais c’est contradictoire avec les constats qui sont faits sur la recherche du profit.

On ne peut pas se satisfaire d’un côté de la COP 21 (« un succès historique ») tout en remarquant de l’autre qu’aucun État n’assume le caractère urgent de la question ni n’envisage de suivre les recommandations des scientifiques pour limiter le changement climatique.

Elle le dit d’ailleurs elle-même :

« Certes, l’accord de Paris reste notre meilleur point d’appui pour une action de la communauté internationale la plus large possible, mais il s’avère insuffisant au regard des réalités scientifiques : les seuls engagements volontaires des États ne permettent pas de contenir le réchauffement sous les 2°C.

L’engagement déterminé et unilatéral d’un groupe de nations pionnières doit pousser les feux de toutes les solutions permettant de sortir des énergies fossiles. »

Sa position est alors compliquée à comprendre.

En quoi la COP 21 est-elle une bonne chose si finalement elle n’a aucune efficacité ?

Pour autant, à côté de ce qui apparaît comme une naïveté par rapport aux possibilités de changer les choses sans bouleverser l’ordre politique, Delphine Batho n’a pas d’illusion quant à la situation.

Elle est assez critique par rapport à la fiction d’une grande stabilité du système, fiction qui était finalement le grand thème de François Hollande, et qui est plus encore maintenant celui d’Emmanuel Macron.

Elle explique très bien que :

« La politique industrielle de l’État est pleine d’ambiguïtés : la France organise la COP 21 et, « en même temps », François Hollande se rend en Alberta pour proposer le concours des entreprises françaises pour l’extraction des hydrocarbures les plus polluants du monde, les sables bitumineux.

La France organise le One Planet Summit et, « en même temps », Emmanuel Macron veut ratifier le Ceta ou encore autoriser la Montagne d’or en Guyane qui va détruire la forêt amazonienne à proximité immédiate de deux réserves de biosphère. Ce n’est plus possible. »

Seulement, le manque de clarté idéologique conduit à une mauvaise interprétation des choses, malgré des constats justes. Il est erroné de répondre ainsi à la question « Comment qualifieriez-vous aujourd’hui la situation de l’écologie en France ? » :

« Forte culturellement, mais faible politiquement. Le hiatus va grandissant entre l’aspiration de plus en plus forte des citoyens à une alimentation saine, au respect du climat et de la biodiversité d’un côté, et la représentation politique de l’autre. »

Cela n’est pas vrai. Globalement, et particulièrement dans la jeunesse, il n’y a pas de véritable mouvement de masse en faveur d’une alimentation saine, de la lutte contre le changement climatique et de la question écologique.

Les jeunes français mangent en masse dans les fast-food et n’envisagent nullement de se passer de l’automobile, pour ne prendre que ces deux exemples typiques.

Delphine Batho souhaite se « consacrer patiemment à l’unification des forces de progrès sur un programme écologique afin de proposer un chemin d’espérance crédible. »

Cette unification est une étape fondamentale, indispensable. Cela d’autant plus que, comme elle le dit, « les forces conservatrices et réactionnaires partout dans le monde sont un obstacle. »

La contribution de Delphine Batho pour faire avancer la gauche sur le plan de l’écologie est indéniable.

Mais pour que cela aboutisse, il faudra de la clarté sur le plan idéologique ainsi qu’une véritable volonté de mener la bataille sur le plan culturel.

En d’autres termes, les constats faits pas Delphine Batho sont bons mais il y a mégarde quant à la nature du mode de production capitaliste ainsi qu’un certain relativisme par rapport au niveau culturel de la société française.

Catégories
Politique

1934, quand la Droite faisait rêver…

Lorsqu’on pense aux années 1930 et que l’on est de gauche on pense spontanément au fascisme et au front populaire de 1936. Mais, en France, l’Histoire s’apprend de manière découpée, en section altérant la compréhension des processus de moyen long terme.

En effet, c’est souvent sous l’angle d’un « moment », celui de mai-juin 1936 qu’on parle du Front Populaire, ce qui met dans l’ombre la dynamique interne globale qui a vu émerger cette expérience populaire de gauche.

Car l’arrière-plan de l’unité populaire en 1936, c’est évidemment le 6 février 1934 des ligues factieuses et plus généralement c’est la montée du fascisme en France alors que le pays a aux frontières deux pays fascistes, l’Allemagne (janvier 1933) et l’Italie (mars 1922). L’extrême droite française connaît alors un développement massif et populaire, tandis que que les forces de gauche sont affaiblies.

En 1933-1934, au plan des forces numéraires, alors que la S.F.I.C compte environ 60 000 membres et la S.F.I.O 120 000 adhérents, l’Action Française compte près de 60 000 membres, il y a 90 000 « Jeunes Patriotes » et 180 000 Croix De Feu. Il faudrait aussi mentionner les chemises vertes d’Hervé Dorgères, rassemblant près de 400 000 « fascistes ruraux » agissant dans les campagnes…

A la pointée de l’offensive fasciste en janvier-février 1934, ce sont 130 000 hebdomadaires de l’Action Française qui sont vendus avec une agitation de rue permanente dans Paris.

Pendant le Front Populaire, malgré le recul momentané des forces d’extrême droite, deux principaux partis se partagent le terrain réactionnaire : le Parti Populaire Français de Jacques Doriot et le Parti Social Français du Colonel de La Rocque. Avec Le PPF on a là une véritable machine fasciste, sur une ligne violemment anticommuniste et national-socialiste, rassemblant en 1937, 120 000 adhérents. Le PSF est quant à lui un véritable monument de la culture politique nationale, parti réactionnaire de masse avec plus 500 000 adhérents en 1938.

A ces deux principales forces parlementaires réactionnaires s’ajoute bientôt un groupuscule clandestin pratiquant une stratégie de la tension à coup d’assassinats et d’attentats, le Comité Secret d’Action Révolutionnaire ou dit « La Cagoule ». Ce groupuscule lié à certains secteurs de la haute bourgeoisie maintient des liens lointains avec des personnalités plus ou moins proches du Colonel De La Rocque.

La valse des intimidations violentes et des attentats menés par « La Cagoule » et la « dédiabolisation » du PSF issu des ligues Croix de Feu créé une tension sociale et politique profonde sur le peuple de gauche. Tout en noyautant l’armée, l’enjeu stratégique fut bien de favoriser une profonde tension à l’intérieur de la gauche (comme en 1937 à Clichy ) afin d’appeler à un retour militaire à l’ordre sous la direction des forces fascistes.

Dans cette ligne, à l’agitation militaire et politique s’ajoute le pilonnage idéologique de la société par des fascistes qui tissent des liens et développent une presse à scandale, basée sur des faits divers montés en épingle et analysés sous un angle raciste et antisémite, rappelant ce que l’on nomme aujourd’hui « fachosphère ».

L’hebdomadaire L’Ami du Peuple, fondé par le parfumeur François Coty et qui revendiquait plus de 3 millions de lecteurs est un bon exemple de cette presse populiste. François Coty fonde d’ailleurs en 1933 son propre mouvement appelé « Solidarité Française » , mouvement qui aura une forte implication dans les émeutes anti-parlementaires du 6 février 1934…

Il serait erroné de saisir cette montée du fascisme comme simple « caisse de résonance » des dynamiques étrangères, car c’est bien une dynamique interne au pays qui l’alimente. Un exemple de cela est l’échec des « chemises bleues » fondées en 1926 par Georges Valois, ancien syndicaliste révolutionnaire puis acquis au nationalisme de l’Action Française. Les « Chemises bleues » qui comptent alors 25 000 membres, disparaissent pourtant en 1927, preuve qu’un simple décalque du fascisme italien ne prend pas dans les mentalités et les valeurs françaises.

Ce qui marchera en France, c’est le national-catholicisme , comme le prouve ensuite la politique du régime de Vichy fondée sur un corporatisme maurassien : défendre le « pays réel » identifié aux villages ruraux cimentés par la morale du clergé et le conservatisme de « La Terre ». La prégnance des « chemises vertes » rurales dans les années 1930 a ainsi fourni l’armature politique et idéologique au pétainisme.

Aborder le Front Populaire de 1936-1938 c’est donc nécessairement prendre en compte la vitalité et l’importance des forces fascistes françaises développées sur une base nationale. Il est peu étonnant que la réaction antifasciste unitaire de 1934 se soit élancée essentiellement des campagnes , comme illustration de l’agitation profonde que connaît le cœur de la société française de l’époque.

Les années 1930 ont été l’histoire de la gauche autant que l’histoire de l’extrême droite, et c’est en cela d’ailleurs qu’elles constituent un puissant miroir de notre époque actuelle…

Catégories
Politique

Parti socialiste : lettre pour l’unité contre Emmanuel Maurel

A l’occasion de la candidature de Luc Carvounas, Stéphane Le Foll et Olivier Faure au poste de secrétaire du Parti socialiste, des élus et des membres de la direction de ce dernier ont signé une « lettre pour l’unité ».

L’initiative part de Rachid Temal, coordinateur du Parti socialiste et représente le courant dominant de ces dernières années, liées à François Hollande. Cet appel à l’unité est, en ce sens, en fait un appel à battre un autre candidat, Emmanuel Maurel, qui représente le courant Maintenant la gauche, qui vient justement de publier un document exprimant sa lligne politique : L’ambition de gagner.

Lettre pour l’unité

Cher Luc, cher Olivier, cher Stéphane, Nous nous adressons à vous en cette veille de congrès car, membres de la majorité sortante comme vous, nous voulons vous transmettre un message.

Nous recevons vos candidatures séparées comme un engagement parce que notre parti, après les défaites historiques qu’il a subies, a besoin de débats, de réflexion et d’abnégation.

Vos initiatives démontrent que des hommes et des femmes pensent encore que notre histoire commune doit continuer pour la Gauche et pour la France. Ceci ne sera possible qu’au terme d’un profond renouvellement.

Si vos candidatures ont provoqué un regain d’attention pour le PS, elles ne peuvent porter que sur le fond et ne doivent pas se transformer en conflit de personnes qui nous ont tant abimés. Nous ne pouvons plus nous le permettre. Le pays a besoin de la Gauche parce qu’il n’est pas sain, pour une démocratie, que l’opposition ne soit portée que par les extrêmes. Sans la gauche, la France n’est plus la France.

Dans un monde incertain, où Trump, Poutine et d’autres illustrent par leurs politiques à quel point la démocratie n’est jamais acquise, le besoin d’Europe et d’une France debout est fort pour humaniser la mondialisation en œuvrant à un développement solidaire et à la paix.

Au moment où le Président de la République veut s’identifier au centre pour ne pas assumer sa politique libérale et Jean-Luc Melenchon veut incarner le peuple contre les élites, seul le PS peut rassembler la gauche. Nos militants et électeurs qui nous font encore confiance attendent beaucoup de nous. C’est pourquoi nous voulons réaffirmer quelques principes, avant l’ouverture de ce débat.

Un certain Parti socialiste est mort dans les urnes en 2017. Une certaine façon de faire de la politique doit bel et bien être enterrée. L’exigence, la sincérité et surtout l’utilité du PS, sa capacité à être humble et en résonnance avec les grands enjeux de société, voilà ce que le pays attend de nous pour pouvoir à nouveau redevenir audible et crédible. Les motions que vous présenterez, leurs analyses et les propositions que vous ferez nous aideront à comprendre ce qui vous distingue sur le fond.

Mais nous voulons vous rappeler un engagement commun : si le prochain congrès doit engendrer un profond renouveau, il ne peut le faire en rompant avec la culture de gouvernement qui est notre bien commun. Il faut mener un inventaire sérieux et lucide des cinq dernières années, au plan national comme au niveau européen.

Il nous faut tourner la page, nous rénover mais aussi assumer ce que nous fûmes au pouvoir. Si ce travail demande distinction et objectivité, on ne peut pas se contenter de la culture d’opposition. Nous avons tranché collectivement cette question.

Nous sommes et restons l’opposition de la gauche responsable. Chaque terme a son importance et son sens. Nous devons aussi travailler à l’autonomie du PS.

Aujourd’hui, aucune alliance politique ne s’impose. Emmanuel Macron construit une orientation de centre-droit, à vocation libérale et installe une autorité verticale toujours refusée par les socialistes.

Nous lui opposons une conception équilibrée de l‘économie, un refus du tout libéral, un renforcement de la solidarité, une décentralisation approfondie et un respect des corps intermédiaires.

L’actuelle crise structurelle du Front National met de côté, provisoirement, l’argument du vote utile face au risque frontiste, même si ses idées sont toujours violemment présentes dans le débat politique et ont dépassé depuis longtemps le cadre strict du parti d’extrême droite.

Quant à Jean-Luc Melenchon, touché par les sirènes populistes, il veut substituer un clivage élite/peuple au clivage gauche/droite, estimant les partis de gauche dépassés. Ne lui donnons pas raison !

Décider d’un type d’alliance, à cet instant de notre débat, reviendrait à nous subordonner, donc à disparaître. La rénovation avant les alliances devrait être notre ligne de conduite.

Cette démarche n’exclut ni les partenariats ponctuels sur certains sujets, ni une relation rénovée avec les autres femmes et hommes de gauche. Nous voulons le rassemblement du peuple de gauche et nous pensons être les seuls à pouvoir pratiquer le et – et : et ceux qui ont voté Macron, et ceux qui ont voté Melenchon et ceux qui se sont abstenus.

Le PS est encore le seul parti à pouvoir proposer ce rassemblement des électeurs de toutes les gauches, y compris dans le cadre d’un débat ouvert et constant au sein de la Gauche. Nous devons procéder de nous-mêmes mais aussi parler à ceux que nous avons déçus et que d’autres ont trompés Nous voulons également réaffirmer notre orientation.

Nous devrons aborder les élections européennes en européens et les élections municipales en décentralisateurs.

Pour cela, il faudra nous engager avec volontarisme et modestie, ne pas s’emballer pour un succès, ni se désespérer pour un revers, parce que la route de la reconstruction ne sera pas linéaire.

Nous vous proposons deux rappels :

– Le congrès qui s’ouvre n’épuise pas les sujets. Il faudra préparer, sous une forme renouvelée, ouverte et participative, les Conventions thématiques qui jalonneront notre reconstruction. Il nous faudra rajeunir, féminiser, représenter les territoires et prendre en compte la réalité sociologique de notre pays.

Notre Parti devra être décentralisé et ouvert. Il devra co-construire avec la société. Il faut un programme de travail dense avec le militant placé au coeur.

– Le Parti Socialiste a besoin d’une majorité claire, ce qui n’exclut pas la minorité. Mais, pour qu’il y ait un travail efficace, il faut que chacun inscrive son action dans un cadre prônant l’efficacité. Le travail en commun ne peut pas être la confusion. Le congrès d’orientation ne peut pas se rejouer sur chaque sujet en débat.

Nous souhaitons que, lorsque ce débat aura été arbitré par les militants, vous vous retrouviez sur les bases alors définies pour constituer une vraie majorité, car il n’y a pas de Parti renouvelé sans majorité assumée.

Premiers signataires : premier-es fédéraux, responsables nationaux et fédéraux ADOMO Caroline, ALARCON Antony, ASSARAF Christian, ARNAUD Samuel, AUGIER Florence, AZZAZ Nadège, AZOULAI Laurent, BERGOUNIOUX Alain, BLATRIX Florence, BRIEN Nicolas, BRUNSCHWIG Xavier, BODIN Nicolas, BOURGI Hussein, BOUAMRANE Karim, BORD Corinne, BRAUD Maurice, BROUSSY Luc, BRUEL Mickael, CANET Michel, CARREIRAS Joël, CLAVEQUIN Maude, CIOT Jean-David, CHANTRELLE Laurent, CHENUT Jean-Luc, CHEVALIER Fabien, COILLARD Stéphane, CONWAY-MOURET Hélène, COUMET Jérôme, DANEL Pierre, DESTOT Michel, DELBOS Olivier, DIOP Dieyneba, DOUCET Philippe, ELKOUBY Eric, FABIANO Patrice, FAGES Marie-Laure, FILLEUL Martine, FINIELS Philippe, FOUILLERE Christophe, GAGNAIRE Franck, Brice GAILLARD, GELLY-PERBELLINI Michel, GERARDIN Annie, GINER Bernard, GUUDUBOIS Elisabeth, GLOANEC-MAURIN Karine, GROSNON Thierry, GUERRIEN Marc, GUILLAUME Sylvie, HADIZADEH Ayda, HARQUET Philippe, HOFFMANN-RISPAL Danièle, IBARRA Stéphane, JEAN BAPTISTE EDOUARD Léon, JOUBREL Yannig, KHADEMI Antoine, LIME Catherine, LE CONSTANT Philippe, LE GARREC Alain, LE MEAUX Vincent, LE MOËL Annaig, LEPRÊTRE Marie, LEPRETRE Patrick, LIOUVILLE Jean-Pierre, MATHELIER Guillaume, MAALOUF Rita, MARECHAL Denis, MAUPAS Valérie, MESSAFTA Lies, MEYSEN Felix, MOINE Philippe, NARASSIGUIN Corinne, NICOLLET Eric, NIEPCERON Loïc, NEUGNOT Michel, ORAIN Frédéric, OUMER Nawel, PAPOT Jean-François, PESCHEUX Victor, PICARD Maxime, POLSKI Olivia, RECALDE Marie, REVAUL D’ALLONES-BONNEFOY Christine, RISPAL Gérard, ROULY Nicolas, ROUILLON Christophe, ROY Isabelle, ROZE Christophe, SAYER Ghislain, SAW Fatoumata, SEVE Patrick, SFEZ Nicolas, SADOUN Marc, SOUMARE Ali, VALENTI Paola, TEMAL Rachid, THOMAS Jean-Jacques, TRIJOULET Thierry, TRIGANCE Yannick, TYSSEYRE Jean-Michel, VIEU Patrick, VENON Boris, VERON Vincent, VINCENT Bernard, WOLF Romain

Catégories
Politique

Emmanuel Maurel : L’ambition de gagner

Emmanuel Maurel, candidat au poste de secrétaire du Parti socialiste, a publié un document exprimant sa ligne politique.

L’ambition de gagner.

Vous pouvez signer ici ou par mail emmanuelmaurel2018@gmail.com

UNE RESPONSABILITÉ HISTORIQUE.

Notre parti, le Parti socialiste, connaît une situation inédite. La double déroute du printemps 2017 n’a en effet pas d’équivalent dans notre histoire politique. En 2012 nous avions tous les leviers pour transformer la société. Cinq ans plus tard, nous n’en avons pratiquement plus aucun. Jamais, sous la Vème République, un parti n’est passé si vite de l’omniprésence politique à la marginalité électorale.

Ce vote-sanction ne saurait s’expliquer par la seule « usure du pouvoir ». Pour nombre de nos compatriotes de gauche, ce quinquennat a représenté une perte des repères spectaculaire. Pacte de responsabilité, loi travail, déchéance de nationalité : les Français ne se sont pas reconnus dans ce que nous avons fait, et, finalement, ne nous reconnaissent plus.

Dans ce paysage politique profondément bouleversé, il serait déraisonnable de penser que nous reviendrons mécaniquement aux responsabilités. Il faudra plus que les fautes des uns ou les échecs des autres pour revenir au pouvoir. La reconquête requiert un travail collectif méthodique, humble, sérieux, et l’ambition assumée de changer la société : pour ceux qui souffrent le plus, la reconquête ne peut pas attendre.

Nous en sommes capables ! Parce que nous continuons à croire à l’actualité du message socialiste.

Parce que, sur le terrain, des milliers de militants et d’élus continuent d’agir sans rien renier de nos principes communs. À celles et ceux qui ont eu le courage de rester, nous proposons de relever la tête, de viser l’horizon et de redonner l’espoir.

1. CE QUE NE DOIT PAS ÊTRE LE CONGRÈS D’AUBERVILLIERS.

Nous n’avons pas le droit ou le luxe de reproduire les figures habituelles. Évitons :

Un Congrès de « gouvernance », dans « l’entre soi », dont l’enjeu serait le choix du prochain syndic de copropriété, uniquement chargé de faire la police du bruit dans les étages du Parti. Au contraire : du bruit, il faudra en faire pour être à nouveau entendus. Et pour faire du bruit, il nous faudra être rassemblé autour d’une voix forte et claire.

Un Congrès « règlement de comptes » refaisant, dans l’indifférence des Français, le match du quinquennat. Bien sûr, nous devons tirer le bilan de l’expérience de 2012-2017.

Mais à quoi bon se renvoyer la balle sur la responsabilité des uns et la faute des autres ? Cela nous ferait oublier qu’un parti vivant doit regarder en avant et pas systématiquement dans le rétroviseur.

Un Congrès « hors-sol », une juxtaposition de slogans creux et de digressions thématiques intéressantes mais sans rapport avec les vraies questions qui nous sont posées au lendemain d’une telle débâcle.

Quelles réponses apporter aux enjeux économiques, sociaux, géopolitiques, régaliens, culturels qui interrogent, voire déstabilisent notre société démocratique ? Les Français ne nous jugeront dignes d’être à nouveau écoutés qu’à la condition de travailler sérieusement ces problèmes.

2. CE QUE DOIT ÊTRE LE CONGRES D’AUBERVILLIERS.

Le Congrès d’Aubervilliers doit constituer une première étape déterminante dans la reconstruction de notre unité et de nos perspectives collectives.

1. Réaffirmer la nécessité d’une voie socialiste distincte du social-libéralisme.

A l’heure où les inégalités se creusent à une échelle jamais observée dans l’Histoire, la social-démocratie se trouve comme paralysée. Alors que sa mission historique était de porter un meilleur compromis entre le capital et le travail au niveau des États-nations, elle semble y avoir renoncé depuis l’avènement de la globalisation.

Pire, elle donne le sentiment de s’accommoder, voire, parfois, d’accompagner un nouvel ordre planétaire inégalitaire, individualiste, marchand.

Ce “modèle” de développement est pourtant condamné. Il détruit les solidarités et les écosystèmes. Il va même jusqu’à corrompre l’intégrité de la personne et de la conscience, sous l’emprise de la marchandisation et du consumérisme. Il est à proprement parler insoutenable.

C’est le paradoxe du moment  que nous vivons : au moment où la gauche peine, nous n’avons jamais eu autant besoin d’un socialisme républicain, antilibéral, écologiste.

2. Assumer clairement les conséquences stratégiques qui s’imposent : opposition à la politique d’Emmanuel Macron, unité des forces de transformation de la société

Le Parti socialiste doit être sans ambiguïté dans le contexte national issu des élections. Nous sommes un parti  d’opposition et certainement pas la force supplétive d’une majorité clairement marquée à droite.

Les six premiers mois du quinquennat (ordonnances Travail, suppression de l’ISF, flat tax sur les revenus financiers, baisse des APL, contrôle des chômeurs…) ont démontré de manière éclatante qu’on ne peut pas être socialiste « et en même temps » dans la complaisance à l’égard de Macron. Le cap a été donné, il ne changera pas. Idéologiquement, politiquement, économiquement, Emmanuel Macron est le Président des riches.

Pendant ce temps, la société civile continue d’évoluer et d’élaborer des revendications nouvelles. Ce faisant elle a produit de nouvelles formes de contestation et d’intervention dans le champ politique : la lutte pour la cause des femmes, les nouveaux comportements de consommation, la dénonciation des paradis fiscaux, la solidarité avec les migrants, la mise en accusation des pollueurs, la révolte devant l’avidité sans limites du capitalisme financier…

Ces nouvelles aspirations ont d’ailleurs été reconnues et prises en compte par la gauche. Dans les collectivités locales, les élus socialistes expérimentent et innovent.

Beaucoup ont choisi les circuits courts face à la grande distribution et la malbouffe, de se battre pour faire reculer la pollution, la précarité ou la désindustrialisation, certains expérimentent le revenu de base… À leur échelle, ils contribuent déjà à la transformation écologique et sociale de la France.

Le Parti socialiste devra reconnaître et étendre ces expériences, tout en leur offrant un débouché politique à l’échelle de notre nation et du continent. C’est pourquoi sa ligne stratégique doit être celle d’un dialogue avec toutes les forces de gauche qui veulent transformer la société en profondeur.

3. Pour renouer avec le corps central de la société

Nous considérons que la renaissance du Parti socialiste implique de renouer avec le corps central de la société, c’est-à-dire les millions d’ouvriers et d’employés qui se sont progressivement détournés de nous à partir des années 2000.

Cela suppose de donner une priorité réelle dans nos programmes à des questions trop souvent esquivées ces dernières années, telles que le pouvoir d’achat des salariés ou la présence des services publics sur les territoires.

Partager les richesses

Le néolibéralisme déstructure et déshumanise, il empêche de bien travailler et sa rengaine de « l’insuffisante compétitivité » ajoute la démoralisation au stress, alors même que la productivité du travail est en France parmi les plus élevées du monde.

Les salariés attendent de nouvelles perspectives sur leur pouvoir d’achat, sur la sécurité sociale, la protection de l’emploi et la démocratie dans l’entreprise. Ils attendent aussi que nous ripostions fermement à la précarisation et l’atomisation sociale dont usent et abusent les entreprises « innovantes » et « disruptives » du monde merveilleux de l’ubérisation.

Aujourd’hui, les socialistes doivent continuer de se mobiliser contre les ordonnances Macron et la loi travail.

Mais c’est aussi leur rôle de mener campagne pour l’augmentation du SMIC (au moment où le mode de calcul de celui-ci est remis en cause), de proposer une « loi islandaise » d’interdiction du moindre écart de salaire entre les hommes et les femmes.

Pour l’écosocialisme

Au risque de l’accaparement des richesses par une minuscule oligarchie, s’ajoute celui d’un désastre écologique et climatique, alors que l’on sait aujourd’hui que les engagements internationaux actuels demeurent insuffisants pour le conjurer, voire juste le limiter.

Qui ne voit, à gauche du moins, que les deux phénomènes, l’ultra-domination économique et financière des « 1% » et la catastrophe climatique, sont inextricablement liés ?

L’extrême polarisation des richesses, les conditions insensées de l’exploitation du travail et des ressources naturelles, la dilatation des rapports de production et des profits dans la sphère financière : tout se tient.

Écosocialistes, nous lions le combat social et le combat écologique en renouant avec nos fondamentaux, et en renonçant à la course effrénée au profit et au productivisme, des périls mortels pour le genre humain.

Pour une relance des services publics

Enfin il n’y aura pas d’égalité sociale – et encore moins d’égalité entre les territoires – sans une relance des services publics. Nous avons laissé transformer La Poste, la SNCF, EDF, GDF, France Telecom, en entreprises sinon complètement privées, du moins complètement livrées à la concurrence.

Faut-il répéter que c’est là un pur non-sens ? Les services publics doivent fournir des services de qualité accessibles partout et à tous, ce que ne permet pas le marché. Ils nécessitent des investissements à 30 voire 50 ans.

Comment pourraient-ils fonctionner correctement dans un cadre concurrentiel dont le long terme se mesure en mois ? Interrompre la marche folle à la marchandisation des services publics : voilà un axe politique majeur – et un sujet sur lequel mettre en scène la réfutation en actes des contraintes européennes.

4. Pour une Europe au service des peuples

En n’ayant pas su associer engagement européen et souveraineté démocratique, la gauche a été punie et il en a résulté une désaffection grandissante des peuples.

Cette crise de confiance suppose de briser la logique austéritaire et inégalitaire de l’Europe et d’en revenir à son ambition initiale : celle d’un espace de solidarité, de prospérité et de protection pour tous.

Mais pour ce faire, nous ne pouvons plus nous payer de mots et d’incantations (« et maintenant l’Europe sociale »). Le risque d’une confrontation doit être assumé clairement, à l’avance, particulièrement pour ce qui relève de la gestion de l’euro, des politiques budgétaires, industrielles et de l’harmonisation sociale.

La France doit cesser de sous-estimer sa capacité d’influence ; elle doit rompre avec l’illusion qu’on n’est « crédible » qu’en se montrant l’élève le plus docile et zélé de la classe européenne.

Notre responsabilité européenne nécessite aussi de s’opposer au règne du libre-échange intégral, sous-tendu ces dernières années par la multiplication de projets d’accords bilatéraux (CETA, Mercosur, Corée du Sud, Vietnam, Australie, Mexique…) dont les conséquences risquent d’être dévastatrices pour nos industries et notre agriculture.

Les autres grands ensembles géopolitiques (USA, Chine…) veillent à leurs intérêts économiques, pourquoi l’Europe serait-elle la seule refuser de le faire ?

Enfin, comme on l’a observé à l’occasion des Panama Papers, Luxleaks et Paradise Papers, l’Europe s’est montrée faible face au pouvoir de l’argent. Certains États-membres, comme les Pays-Bas, le Luxembourg, se comportent en véritables paradis fiscaux.

L’Union européenne est encore trop timide pour lutter contre la fraude. Ce n’est plus supportable. Dans ce domaine aussi, la France doit prendre l’initiative, en assumant le risque de la confrontation.

Les Français veulent se protéger et se projeter : se protéger des menaces de désindustrialisation, de précarisation, de communautarisme et de dérèglement climatique, et se projeter dans l’avenir, comme ils l’ont toujours fait jusqu’ici, en relevant les défis du monde.

Entre d’un côté les partisans, au pouvoir, d’une libéralisation de tout et de tous et, de l’autre, les bonimenteurs du repli sur soi, notre Parti peut incarner cette double mission de protection et de projection. Il le peut, il le doit ; reste à le vouloir. C’est l’enjeu de ce Congrès.

5. Un parti conquérant

La lucidité impose de le reconnaître : parmi les causes de l’échec du quinquennat, il y a le rapport trop peu critique aux institutions de la Vème.

L’acceptation du présidentialisme qui implique que tout soit soumis à l’exécutif, la trop grande influence de la technostructure d’État et de certains milieux d’affaire, ont nui considérablement à notre exercice du pouvoir. Dans le même temps, renonçant à son autonomie, le Parti a été volontairement inaudible.

Or le rôle du Parti socialiste, c’est d’être l’acteur vigilant de la transformation quand nous gouvernons.

Dans l’opposition, il s’engage dans des mobilisations exemplaires (et en premier lieu celle de ses élus locaux qui s’insurgent légitimement contre les premières mesures du nouveau pouvoir) et prépare la reconquête avec méthode.

Nous voulons que les militants soient les acteurs de la reconquête. Pour cela, nous proposons la tenue trimestrielle de grandes conventions, et le recours régulier au référendum militant pour trancher certaines questions essentielles. Il faudra également produire un effort réel pour apporter une forte formation aux militants.

Ensemble, réfléchissons à une nouvelle organisation qui valorise toutes les formes d’implication et d’engagement : local, bien sûr, mais aussi thématique, dans un secteur professionnel ou en entreprise.

Enfin, il faudra mettre en chantier l’élaboration d’un manifeste pour le socialisme des temps nouveaux dont l’objectif sera de confronter les fondamentaux de notre doctrine aux défis contemporains (numérique, biotechnologies, etc.) qui bouleversent l’humanité.

***

L’UNION ET L’ESPOIR !

Le Congrès d’Aubervilliers doit constituer une première étape déterminante dans la reconstruction de notre unité et de nos perspectives collectives.

En 74, un jeune premier, libéral et prétendument surdoué, parvenait à l’Élysée en incarnant l’aspiration au changement, tout en poursuivant une politique plus favorable aux rentiers qu’au monde du travail. La gauche rassemblée le battit dès la fin de son premier mandat.

En 93, le Parti socialiste perdait les trois quarts de ses députés. Par les commentateurs, il était condamné à des décennies d’opposition, voire à une disparition prochaine. Quatre ans plus tard, il dirigeait à nouveau la politique de la Nation, accomplissant la réduction du temps de travail et mettant en place la CMU.

À chaque fois, les conditions du succès furent les mêmes : l’union et l’espoir.

Certes, comme l’expérience militante nous l’a appris, l’union est un combat. Certes, l’espoir ne se décrète pas : il renaît lorsque nous dégageons l’horizon des Français et des Européens, lorsque nous refusons les fatalités qui aliènent, et lorsque nous proposons des mesures qui permettent à chacun d’entrevoir qu’une autre vie, au quotidien, est possible.

L’espoir naît du droit aux bonheurs. Dans quatre ans, si elle redevient elle-même, la gauche gagnera.

À nous d’éclairer le chemin et plus nous serons nombreux, plus vite renaîtra parmi nos concitoyens l’espoir d’un monde différent.

Oui, un nouvel avenir est possible pour le Parti Socialiste et pour la Gauche !

Catégories
Politique

7 janvier 2015 – 7 janvier 2018

Catégories
Politique

Appel des socialistes serbes au monde civilisé (1918)

Le document suivant est un témoignage poignant, les socialistes serbes racontant les dramatiques événements qui frappent leur pays en 1918, alors que des forces étrangères interviennent de manière sanglante.

L’appel au monde civilisé souligne l’importance de l’unité face à la barbarie. La préface est de Camille Huysmans, une figure très connue de la social-démocratie de Belgique, qui fut également notamment nommé secrétaire de la seconde Internationale en 1905.

Cliquer sur le PDF pour le télécharger.

 

Catégories
Politique

PS 31 : « L’Humanisme des Lumières aujourd’hui » ou le socialisme du 21ème siècle

« L’Humanisme des Lumières aujourd’hui » ou le socialisme du 21ème siècle

Pour une société des Nouveaux Possibles

(Réflexion issue des travaux de refondation et des rencontres avec les militant.es de la Haute-Garonne

Sébastien Vincini – 1er Secrétaire fédéral #PS31)

Le PS vient de subir sa plus importante défaite électorale. La seule arithmétique électorale ne peut masquer ce qui est en réalité une défaite politique et idéologique. Cela remet en cause l’idée même de notre utilité voire même notre existence.

Elle clôt un chapitre important de l’histoire des socialistes commencée en 1971. Ce qui frappe dans la séquence électorale de 2017, c’est l’amplitude et la violence de notre défaite. Il s’agit là, en miroir, de la contrepartie de l’espérance que notre accession au pouvoir avait faite naître.

Cela doit nous rappeler que la gauche au pouvoir, c’est plus que la gauche, c’est un symbole.

Comprendre nos défaites, être lucide sur nos échecs et notre aveuglement.

La forme contemporaine du libéralisme, le libéralisme connecté ou libéralisme 4.0 se traduit par des mutations technologiques et sociétales d’une ampleur considérable. Elles s’accompagnent d’une multitude de peurs, de craintes, d’espoirs imprécis et d’un sentiment largement partagé d’être exclus de ses bienfaits potentiels.

Durant le précédent quinquennat, nous n’avons pas su entendre ces peurs et nous les avons même amplifiées en ayant eu une croyance aveugle dans la compétitivité mondiale et dans les seuls outils de régulation qu’offrait alors la pensée sociale-démocrate. Du CICE à la loi travail, nous avons donné le sentiment de nous soumettre à la toute-puissance d’une idéologie technico-financière, oubliant la réalité des gens, la place des citoyens.

Aujourd’hui, Emmanuel MACRON a réussi l’unification de l’ensemble des libéraux, ceux issus de la droite historique et ceux de la gauche, véritables fossoyeurs de la gauche gouvernementale. Le pragmatisme affiché de ce nouveau monde, dépassant en apparence le clivage gauche/droite, n’est que le prolongement d’un libéralisme politique au service de la finance mondialisée et immatérielle.

Nous redéfinir. Nous interroger.

Pour se redéfinir, le socialisme du 21ème siècle doit nommer son adversaire, comprendre les mutations de son temps et retrouver l’idéal humaniste des Lumières, qui assimile le progrès technique au progrès social et humain, et aujourd’hui environnemental.

À qui profitent les fruits de la croissance, même mineure, la création de richesses générées par les progrès technologiques et numériques ? Le constat est implacable… À quelques uns, pour quelques uns… au détriment du plus grand nombre, de l’humanité dans l’universalité de sa dignité, des ressources naturelles de notre unique biosphère.

Nous confronter au réel. Comprendre les douleurs contemporaines.

Le territoire est l’espace de l’activité et de la vie, il porte les stigmates des troubles profonds de notre société, il est le révélateur le plus immédiat que chacun peut constater. La perte de repères, la solitude, la désertification tout autant que la concentration urbaine, la pollution, la précarisation et la ghettoïsation, se traduisent dans sa déstructuration, dans sa fracturation. C’est par lui aussi que s’annoncera la reconstruction. C’est pourquoi il est, et doit être au centre de la refondation du PS. Le territoire, c’est le réel.

Le libéralisme 4.0, cette économie moderne se déploie dans l’urgence et sans avoir été pensée avec suffisamment de profondeur alors que le système actuel présente tous les symptômes de sa fin : inégalités spectaculaires et croissantes dans le Monde, et chômage de masse, précarisation croissante de pans entiers de la société qui se pensaient jusqu’alors à l’abri, délitement des liens et des espaces de solidarité, en France.

Ce libéralisme par sa vitesse, sa force, s’impose avec brutalité. Il se traduit par une double peine de précarité : précarité matérielle et sociale ; précarité onirique (envie d’avoir envie, plus de perspective).

Ce libéralisme abandonne les liens sociaux aux rapports de force, et accroît la fracture de la société entre perdants et gagnants. Il sape le principe d’égalité citoyenne, entre ceux qui vivent une mondialisation heureuse et les laissés pour compte, les oubliés, les exclus.

Les sentiments de frustration, de désespérance, d’injustice, ouvrent des espaces à l’individualisme, au chacun pour soi, mais aussi au repli identitaire, au communautarisme, à l’entre soi, qui fondent le terreau de la montée des populistes xénophobes.

En agissant ainsi, c’est toute la société qui fait fausse route. Nous sommes devant un choc de civilisation. Aimé Césaire l’a dit : « Une civilisation qui s’avère incapable de résoudre les problèmes que suscite son fonctionnement est une société décadente ».

Beaucoup, dans les territoires, se pensent du côté des perdants, éprouvent un sentiment de dépossession et de déclassement ; et aspirent parfois à une pause face à l‘évolution accélérée de l’innovation technologique. C’est ce qu’ils expriment dans des expressions populaires de plus en plus répandues qui revendiquent un « comme autrefois » ou un « comme avant » trop souvent nostalgiquement idéalisés.

Notre société a besoin d’être rééquilibrée entre affichage de la puissance (vitesse, mondialisation, intelligence artificielle) et l’exigence populaire, au risque d’une déchirure irrémédiable du lien social, qui rappelle que le progrès doit être social et partagé et non un facteur de déshumanisation.

La performance ne peut et ne doit pas être un alibi à la revendication de puissance de quelques-uns.

Nous devons en effet affronter une mécanique de spoliation à l’œuvre. Un système d’intelligence artificielle (que résume l’ensemble formé par les données, le big data, le numérique et l’internet des objets) prétend s’imposer à partir de données qui sont pourtant le bien commun, nos données personnelles et collectives.

« Les plateformes et services numériques qui peuplent notre quotidien se multiplient tous les jours. Sociabilité ordinaire, travail, loisir, éducation : la quasi-totalité de notre vie sociale est peu à peu colonisée par des appareils, des réseaux, et des services en ligne qui deviennent les adjuvants utiles mais aussi envahissants de notre vie personnelle, professionnelle et publique. »

Décrivons le processus en cours de captation du pouvoir, des ressources et de la richesse ; l’exemple de la concentration à l’extrême des multinationales numériques que sont les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft). Aujourd’hui, ces géants du numérique régissent le cœur informationnel de nos sociétés.

La libéralisation et le partage des données est le nouveau carburant des nouveaux modèles économiques. A quelle fin ? maitriser nos consommations ? orienter nos cultures ? déployer une économie prédictive ? nul besoin de répondre.

Pour autant, le partage de données, les algorithmes constituent une formidable opportunité de revisiter l’ensemble des stratégies publiques. Les Nouveaux Possibles, qui vont en résulter, sont, de fait, des biens communs. Ils ne peuvent faire l’objet d’une appropriation abusive, d’une spoliation.

Ces « biens communs » concernent en effet l’ensemble du patrimoine de vie des territoires, c’est-à-dire de tout ce que nous partageons en commun, essentiel à la vie humaine : des éléments naturels (l’eau, l’air, la terre) à la culture, en passant par les espaces d’échanges numériques et les mécanismes de solidarité…

Les technologies modernes permettent, grâce aux données qui les contiennent, de construire les nouveaux usages. Ils peuvent déboucher sur les Nouveaux Possibles, des nouveaux modèles de transition énergétique, de gestion de l’eau, de mobilité, de réorganisation du travail, de prévention dans la santé. Les données ainsi maitrisées sont « l’énergie motrice » des projets de territoire résilient.

Il faut définir ces communs, ces nouveaux espaces entre l’opposition binaire de l’Etat et du Marché. Ces « communs » ne peuvent faire d’objet d’une appropriation privée car nous pensons, nous, humanistes qu’il n’y aura pas de progrès de la performance sans progrès social partagé.

Ce besoin de rééquilibrage doit être notre combat politique. Il concerne l’action publique dans les territoires tout autant que le rôle de l’Etat. Plus que jamais sa mission régalienne, au service de la cohésion sociale, de la formation, de la justice et de la sécurité, la réaffirmation des valeurs républicaines et la laïcité, conditionne cette étape contemporaine de progrès.

Mais l’émergence des communs et d’une économie du partage doit aussi nous interroger sur la notion même de service public et de propriété, de ses caractères les plus exclusifs que sont l’usage, l’héritage et la rente.

La reconquête. Inventer les Nouveaux Possibles.

Les territoires, métropoles comme bassins de vie, sont projetés frontalement dans la concurrence internationale. L’Etat doit les soutenir, harmoniser leurs relations au sein de la nation et de l’espérance européenne.

La social-démocratie s’est construite autour d’un modèle économique, d’un marché, qui appelaient régulation et redistribution. Les valeurs de justice et de partage qui la fondent sont toujours d’actualité mais elles doivent être repensées dans ce contexte de choc de civilisation.

Face à ce choc de civilisation, nous avons le devoir de proposer un choc de confiance dans l’avenir. Nous l’avons souligné, les territoires sont les premiers révélateurs de ce « malaise dans la civilisation » (pour plagier l’expression de Freud qui annonçait la grande crise humaine, économique et sociale de la première moitié du 20ème siècle) … Mais ils sont aussi et surtout les territoires de la reconquête :

  • Lieu d’écoute des nouvelles douleurs contemporaines (le réel)
  • Place légitime à reconquérir pour le PS ; la gauche du réel
  • Lieu de l’action concrète, de l’expérimentation, de l’innovation sociale

C’est pourquoi le PS doit proposer un projet de société des Nouveaux Possibles, c’est un modèle de production de confiance dans la maîtrise des mutations en cours, le modèle de confiance productif dans de la mutation écologique.

Notre projet doit être guidé par l’exigence de « vies dignes » pour tous, par l’Homme. Les citoyens attendent qu’on prenne en compte leur envie de « vraies vies » et qu’on réponde à leurs attentes :

  • En leur apportant la protection qui est un droit des « vies dignes » et en renforçant leur confiance par une assistance bienveillante à laquelle ils ont droit (tiers de confiance, intimité numérique)
  • En faisant confiance a priori aux citoyens, en arrêtant de les cliver, en retrouvant la Nation.
  • En les accompagnant dans leur prise de conscience pour des actes responsables (écologie, valeurs éthiques etc.)
  • En traçant un idéal, celui des Nouveaux Possibles auquel ils se sentent associés.

C’est un modèle humaniste d’exigence écologique qui privilégie l’Homme dans l’adaptation au changement climatique.

C’est un modèle horizontal qui valorise l’autonomie et la responsabilité dans les rapports humains en accompagnant les mutations du travail et qui invente de nouvelles formes de gouvernances.

C’est un autre modèle de protection sociale proposant un nouveau contrat social, un modèle de confiance en l’Homme où par exemple les innovations sociales, comme l’expérimentation du revenu de base, pourraient constituer le lien unifiant tous les citoyens, pour faire nation et donner confiance en l’avenir.

C’est un modèle de créativité qui est une valeur essentielle de la société actuelle et le lien entre les générations, entre les divers niveaux de territoires, entre les technologies et l’humain.

Aujourd’hui, la créativité est au centre des métiers du numérique (applications), elle est l’énergie des innovations de terrain, et elle demeure une digue efficace contre les dérives autoritaristes. C’est également l’enjeu stratégique des modèles industriels (Innovation, disruption).

C’est un modèle de démocratie permanente, de souveraineté des citoyens. Nous devons imaginer les outils de la démocratie permanente où le pouvoir des citoyens ne s’exprime pas simplement à chaque élection mais dans la gestion quotidienne des biens communs.

La perte ou le ressenti de perte de libertés individuelles est au cœur du malaise social et de la défiance envers le politique. La construction d’une démocratie permanente devra s’appuyer sur l’autonomie éclairée des citoyens et sur les principes de transparence, de contrôle et d’évaluation.

C’est un modèle d’émancipation et d’accomplissement de chacun par l’accès de tous à l’éducation, à la culture, à l’art, parce que « la liberté commence où l’ignorance finit ». Les socialistes peuvent s’enorgueillir d’avoir mis en place le statut d’intermittent du spectacle qui est envié dans le monde. N’est-ce-pas dans les périodes difficiles qu’il faut justement miser sur la créativité, la culture, les arts ?

Nous devons proposer de bâtir la deuxième phase de l’exception culturelle. A contre courant de l’uniformisation, qui génère pertes de repères et d’identité, il faut approfondir l’exception culturelle. Cela veut dire l’élargir à l’art de vivre, mais également à la toile numérique, vecteur d’uniformisation dans un monde où tout se dématérialise. Et pourquoi pas aux communs ? L’exception culturelle doit être la plus belle réponse dans ces temps de doute et nous sommes légitimes pour cela.

Consensus, efficience et cohésion habitent nos propositions. Pour le PS le travail de réflexion et de recomposition est imposant. Il s’agit, à la fois, de retrouver la confiance et la proximité avec les citoyens en plein doute et d’être capables de leur proposer l’espérance des Nouveaux Possibles.

Les territoires sont l’espace naturel de ce nouvel élan.

Le rôle du politique est de veiller à la gouvernance, à la protection, à la confiance pour instaurer le cercle vertueux d’un progrès social partagé, idéal des Lumières, autour de ces biens communs.

Le Socialisme a une longue histoire. Il change, il évolue, il s’adapte, il se contredit parfois. Mais comment pourrait-il en être autrement ? En paraphrasant Spinoza, « pour persévérer dans son être », dans un monde où tout change, où rien ne demeure, nous devons sans cesse nous rénover, nous renouveler. Soyons les « défricheurs » de Nouveaux Possibles et inventons le socialisme du 21ème siècle.

Partagez cette information !

Catégories
Nouvel ordre Politique

Le programme du Front Populaire (1936)

Le programme de revendications immédiates que publie le Rassemblement populaire résulte d’un accord unanime entre les dix grandes organisations qui composent le Comité national de Rassemblement :

Ligue des Droits de l’Homme,

Comité de Vigilance des Intellectuels Antifascistes,

comité mondial contre le fascisme et la guerre (Amsterdam-Pleyel),

Mouvement d’Action combattante,

Parti Républicain Radical et Radical-Socialiste,

Parti Socialiste S.F.I.O.,

Parti Communiste,

Union socialiste et Républicaine,

Confédération Générale du Travail,

Confédération Générale du Travail Unitaire.

Il s’inspire directement des mots d’ordre du 14 juillet Les partis et organisations, groupant des millions d’êtres humains, qui ont juré de rester unis, aux termes du serment, « pour défendre les libertés démocratiques, pour donner du pain aux travailleurs, du travail à la jeunesse et, au monde, la grande paix humaine » ont cherché ensemble les moyens pratiques d’une action commune, immédiate et continue.

Ce programme est; volontairement limité aux mesures immédiatement applicables.

Le Comité national entend que chaque parti, chaque organisation, participant au Rassemblement populaire, puisse se joindre à l’action commune sans rien abdiquer de sa doctrine, de ses principes, et de ses fins particulières. Il s’est astreint, d’autre part, à présenter des solutions positives aux problèmes essentiels, actuellement posés devant la démocratie française.

C’est ainsi que, dans l’ordre politique, il définit les mesures indispensables pour assurer le respect de la souveraineté nationale, exprimée par le suffrage universel, et pour garantir les libertés essentielles (liberté d’opinion et d’expression, libertés syndicales, liberté de conscience et laïcité) – que, dans l’ordre international, il pose les conditions nécessaires à la sauvegarde et à l’organisation de la paix, suivant les principes de la Société des Nations – et que, dans l’ordre économique et financier, il s’attache à lutter, dans l’intérêt des masses laborieuses et épargnantes, contre la crise et contre les organisations fascistes qui l’exploitent pour le compte des puissances d’argent.

Ces problèmes d’économie et de finance, d’une si haute importance actuelle, le Rassemblement populaire se refuse à les résoudre séparément : il veut atteindre les causes des moins-values fiscales en agissant contre la crise, et compléter son action contre la crise par l’amélioration du crédit public et privé.

Le Rassemblement populaire souligne qu’un grand nombre des revendications qu’il présente figurent déjà dans les plans et programmes élaborés par les organisations syndicales de la classe ouvrière.

Il ajoute que ces revendications urgentes, et par là même restreintes, si elles apportent une première modification au système économique actuel, devront être complétées par des mesures plus profondes pour arracher définitivement l’Etat aux féodalités industrielles et financières.

En tous les ordres de problèmes, le Rassemblement, a cherché des solutions de justice, seules conformes aux principes de la démocratie : justice égale pour tous dans l’application des lois pénales – justice fiscale – justice pour les indigènes dans les colonies – justice internationale, dans le cadre et suivant l’esprit de la Société des Nations.

S’il a été possible au Comité national du Rassemblement populaire d’aboutir à des formules unanimes, c’est que les partis et organisations qui le composent ont collaboré amicalement dans un esprit de conciliation et de synthèse. Aux masses populaires de soutenir à présent ces revendications et de les faire triompher. Quand ce programme commun aura passé dans la réalité, un grand changement sera obtenu : la liberté sera mieux défendue, le pain mieux assuré, la paix mieux garantie.

De tels biens sont assez précieux pour que tout soit subordonné à la volonté de les conquérir.

C’est à cette volonté revendicatrice que le Rassemblement populaire fait appel. Qu’elle se traduise par une cohésion étroite, où se prolonge la fraternité du 14 juillet, et qu’elle signifie à tous, en France et hors de France, que la démocratie est invincible dès qu’elle reprend sa vigueur créatrice et sa puissance d’attraction.

REVENDICATIONS POLITIQUES

I – Défense de la Liberté

1 – AMNISTIE GÉNÉRALE.
2 – CONTRE LES LIGUES FASCISTES :

a) Désarmement et dissolution EFFECTIVE des formations paramilitaires, conformément à la loi.

b) Mise en vigueur des dispositions légales en cas de provocation au meurtre ou d’attentat à la sûreté de l’Etat.

3 – ASSAINISSEMENT DE LA VIE PUBLIQUE, notamment par les incompatibilités parlementaires.

4 – LA PRESSE

a) Abrogation des lois scélérates et des décrets-lois restreignant la liberté d’opinion;

b) Réforme de la presse par l’adoption de mesures législatives :

1° qui permettent, la répression efficace de la diffamation et du chantage ;

2° qui puissent assurer aux journaux des moyens normaux d’existence, qui les obligent à rendre publique l’origine de leurs ressources, qui mettent fin aux monopoles privés de la publicité commerciale et aux scandales de la publicité financière, et qui empêchent enfin la constitution de trusts de presse.

c) Organisation des émissions radiophoniques d’Etat en vue d’assurer l’exactitude des informations et l’égalité des organisations politiques et sociales devant le micro.

5 – LIBERTÉS SYNDICALES :

a) Application et respect du droit syndical pour tous.

b) Respect du droit des femmes au travail.

6 – L’ÉCOLE ET LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE :

a) Assurer la vie de l’école publique, non seulement par les crédits nécessaires, mais par des réformes telles que la prolongation de la scolarité obligatoire jusqu’à 14 ans et la mise en pratique, dans l’enseignement du second degré, d’une sélection indispensable comme, complément de la gratuité.

b) Garantir à tous, élèves et maîtres, la pleine liberté de conscience, notamment par le respect de la neutralité scolaire, de la laïcité et des droits civiques du corps enseignant.

7 – LES TERRITOIRES COLONIAUX : Constitution d’une Commission d’enquête parlementaire sur la situation politique, économique et morale dans les territoires français d’outre-mer, notamment dans l’Afrique française du Nord et l’Indochine.

II – Défense de la Paix

1 – Appel à la collaboration du peuple et notamment des masses laborieuses pour le maintien et l’organisation de la paix.

2 – Collaboration internationale, dans le cadre de la Société des Nations, pour la sécurité collective, par la définition de l’agresseur et l’application automatique et solidaire des sanctions en cas d’agression.

3 – Effort incessant pour passer de la paix armée à la paix désarmée, d’abord par une convention de limitation, puis par la réduction générale, simultanée et contrôlée des armements.

4 – Nationalisation des industries de guerre et suppression du commerce privé des armes.

5 – Répudiation de la diplomatie secrète, action internationale et négociations publiques pour ramener à Genève les Etats qui s’en sont écartés, sans porter atteinte aux principes constitutifs de la Société des Nations : sécurité collective et paix indivisible.

6 – Assouplissement de la procédure prévue par le Pacte de la Société des Nations pour l’ajustement pacifique des traités dangereux pour la paix du monde.

7 – Extension, notamment à l’Europe orientale et centrale, du système des pactes ouverts à tous, suivant les principes du Pacte franco-soviétique.

REVENDICATIONS ÉCONOMIQUES

I – Restauration de la capacité d’achat supprimée ou réduite par la crise

CONTRE LE CHÔMAGE ET LA CRISE INDUSTRIELLE : Institution d’un fonds national de chômage. Réduction de la semaine de travail sans réduction du salaire hebdomadaire. Appel des jeunes au travail par l’établissement d’un régime de retraites suffisantes pour les vieux travailleurs Exécution rapide d’un plan de grands travaux d’utilité publique, citadine et rurale, en associant à l’effort de l’Etat et des collectivités l’effort de l’épargne locale.

CONTRE LA CRISE AGRICOLE ET COMMERCIALE : Revalorisation des produits de la terre, combinée avec une lutte contre la spéculation et la vie chère, de manière à réduire l’écart entre les prix de gros et les prix de détail.

Pour supprimer la dîme prélevée par la spéculation sur les producteurs et les consommateurs ; création d’un office national interprofessionnel des céréales.

Soutien aux coopératives agricoles, livraison des engrais au prix de revient par les offices nationaux de l’azote et des potasses, contrôle et tarification de la vente des superphosphates et autres engrais, développement du crédit agricole, réduction des baux à ferme.

Suspension des saisies et aménagement des dettes.

Mise au point de la révision des billets de fonds de commerce.

En attendant l’abolition complète et aussi rapide que possible de toutes les injustices que les décrets-lois comportent, suppression immédiate des mesures frappant les catégories les plus touchées dans leurs conditions d’existence par ces décrets.

II – Contre le pillage de l’épargne

Pour une meilleure organisation du crédit. Réglementation de la profession de banquier.

Réglementation du bilan des banques et des sociétés anonymes.

Réglementation nouvelle des pouvoirs des administrateurs des sociétés anonymes.

Interdiction aux fonctionnaires retraités ou en disponibilité d’appartenir aux conseils d’administration des sociétés anonymes.

Pour soustraire le crédit et l’épargne à la domination de l’oligarchie économique, FAIRE DE LA BANQUE DE FRANCE, aujourd’hui banque privée, LA BANQUE DE LA FRANCE :

Suppression du Conseil des Régents.

Élargissement des pouvoirs du Gouverneur, sous le contrôle permanent d’un conseil composé de représentants du pouvoir législatif, de représentants du pouvoir exécutif et de représentants des grandes forces organisées du travail et de l’activité industrielle, commerciale et agricole.

Transformation du capital en obligations, des mesures étant prises pour garantir les intérêts des petits porteurs.

III. – Assainissement financier.

Révision des marchés de guerre en liaison avec la nationalisation des industries de guerre.

Répression du gaspillage dans les administrations civiles et militaires.

Institution de la caisse des pensions de guerre.

Réforme démocratique du système des impôts comportant une détente fiscale en vue de la reprise économique, et création de ressources par des mesures atteignant les grosses fortunes (progression rapide de la majoration du taux de l’impôt général sur les revenus supérieurs à 75 000 francs – réorganisation de l’impôt successoral – taxation des profits des monopoles de fait en évitant toute répercussion sur les prix de consommation).

Suppression de la fraude sur les valeurs mobilières, par la mise en vigueur de la carte d’identité fiscale votée par les Chambres, en l’accompagnant d’une amnistie fiscale.

Contrôle des sorties de capitaux et répression de leur évasion par les mesures les plus sévères, allant jusqu’à la confiscation des biens dissimulés à l’étranger ou de leur contre-valeur en France.

Catégories
Politique

« Youpi j’ai compris ! » et l’existence d’Israël

Toute personne de gauche sait très bien que le peuple palestinien connaît une situation humainement extrêmement difficile, de par la raison de la politique de l’État israélien. Même la droite israélienne la plus cynique le reconnaît elle-même.

Le souci qu’il y a, c’est qu’avec l’histoire de l’antisémitisme, Israël est devenu un prétexte pour une sorte de folie furieuse, de véritable passion totalement déconnectée de la réalité.

Ainsi, lorsque Donald Trump a décidé de déplacer l’ambassade américaine à Jérusalem, tous les médias se sont empressés de dire que le président américain avait reconnu cette ville comme capitale israélienne. Le titre du Monde est ainsi « Trump reconnaît Jérusalem comme capitale d’Israël, une décision historique et unilatérale ».

La presse internationale a fait de même. Or, c’est entièrement faux, parce que cela fait bien longtemps que les États-Unis ont reconnu Jérusalem comme capitale d’Israël.

Le congrès américain avait ainsi voté en 1995 un « Jerusalem Embassy Act » annonçant le transfert de l’ambassade américaine dans les quatre ans. Le vote avait été écrasant, tant au Sénat (93 voix contre 5) qu’à la Chambre des représentants (374 contre 37).

Barack Obama avait déjà affirmé que Jérusalem était la capitale d’Israël lors de sa candidature à la nomination comme candidat du parti démocrate, ainsi que lors de sa candidature aux présidentielles. C’était même déjà une promesse électorale de Bill Clinton en 1992.

On peut tout à fait critiquer cela, en disant que cela rentre en conflit avec le projet de partition de l’ONU fait en 1947.

La gauche a d’ailleurs historiquement soutenu cette partition et l’URSS sera le premier pays à reconnaître juridiquement l’État israélien.

Mais si critique il doit y avoir, alors il faut le faire de manière rationnelle, sans quoi, on est dans la mise en scène, pas dans une aide quelconque au peuple palestinien.

Ce qui se passe réellement n’intéresse pas des gens qui ont intérêt à se présenter comme faisant face à une ignominie immédiate, apparue de nulle part, eux-mêmes faisant office de justicier.

Les faits sont niés, pour apparaître comme « radical » – une démarche qui relève historiquement de l’extrême-droite, pas d’une gauche fondée sur les idées. Cela montre à quel point l’antisémitisme est si puissant qu’il se sert de la question israélo-palestinienne pour ses projections.

Un exemple significatif de cette course à l’échalote se trouve dans le dernier numéro du magazine pour enfant de 5-8 ans « Youpi j’ai compris ! », dont Bayard Presse – la grande maison d’édition catholique française, éditrice notamment de Babar, Pomme d’Api, Okapi, J’aime Lire, Phosphore, etc. – a annoncé hier le retrait devant des protestations.

La raison en est que l’existence de l’État israélien est niée, malgré sa reconnaissance par les Nations-Unies en 1948, dans la foulée de la réalisation du plan de partage de la Palestine du 29 novembre 1947.

Tout cela totalement absurde : on peut exiger un État nouveau sous la forme d’une fédération israélo-palestinienne, ou sous la forme d’une République laïque unifiée. Mais nier les faits en disant : cela n’existe pas, cela n’a pas de sens.

Les seuls qui ont adopté cette démarche, ce sont les partisans du panarabisme, du parti Baath comme en Syrie et en Irak, qui ont toujours parlé de « l’entité sioniste ». Avec les résultats que l’on sait : la manipulation démagogique des opinions publiques arabes, l’antisémitisme forcené.

Sans que rien ne change pour le peuple palestinien, qui perd chaque jour davantage du terrain depuis 1947, étant qui plus est dominés par les islamistes ou une OLP totalement corrompue.

Catégories
Politique

Les élections du 21 décembre 2017 en Catalogne

Les élections catalanes se sont tenues hier 21 décembre 2017, suite à la crise provoquée par la tentative d’affirmation d’indépendance par le gouvernement régional. Avec 82 % de participation, la mobilisation a été importante et elles ont été marquées par la victoire de la même majorité, avec cette fois 70 députés contre 72 auparavant.

C’est donc un retour à la case départ, avec cette fois le responsable du gouvernement catalan, Carles Puigdemont, en exil à Bruxelles pour éviter la répression de l’État espagnol. Pourra-t-il revenir ? Pas s’il continue de mettre en avant l’indépendance.

Mais comment mettre en avant l’indépendance si le pays est coupé en deux parts à peu près égales ? Sans compter qu’il y a la question de l’unité de l’Espagne. Si le camp de tradition franquiste est indéniablement encore très puissant, il y a aussi les gens qui ne veulent pas d’implosion d’un pays, de morcellement en toujours plus de petits pays.

Naturellement, être de gauche, c’est se dire qu’après tout, c’est une bonne chose que la monarchie espagnole vacille. Mais le contraire de la monarchie, n’est-ce pas la république ? Mais alors la république pour tout le monde, pas simplement pour les Catalans.

Lors de la guerre d’Espagne, la Catalogne existait sous la forme d’une Généralité catalane, au sein de la République. C’était une composante essentielle du Front populaire, tout en conservant une large autonomie. Les partis socialistes et communistes avaient d’ailleurs fusionné leurs sections locales, devenues indépendantes, en un Parti socialiste unifié de Catalogne.

La Catalogne s’était insérée dans un projet plus global de république portée par les partis de gauche, dans le sens de valeurs résolument ancrées dans les traditions socialistes et communistes. Défendre la Catalogne alors, c’était participer à ses valeurs. C’était la liberté catalane contre la monarchie, l’armée, l’Église. C’était finalement la cause de tout le monde.

La Catalogne ne prend pas du tout aujourd’hui une telle direction. Elle veut être un pays riche dans une Europe composée de petits pays, chacun tirant son épingle du jeu autant qu’il peut. Sous prétexte d’être catalan, tout le monde devrait être ensemble en Catalogne et toutes les questions sociales devraient passer à la trappe.

Les partisans de l’indépendance de la Catalogne sont ainsi contre la monarchie, mais uniquement contre la monarchie pour ce qui les concerne. Ils ne se sentent pas proches des républicains ailleurs en Espagne. Ils veulent leur république, comme si d’ailleurs un tel républicanisme était une fin en soi.

Un tel manque d’universalisme reflète toujours le particularisme, le repli sur soi, l’égoïsme. Alors qu’une cause juste, même particulière, participe toujours à l’universel. Cela pourrait être le cas si la cause catalane avait les mêmes fondamentaux qu’en 1936.

Catégories
Politique

Déclaration d’indépendance de la Catalogne d’octobre 2017

[Document signé par 72 députés formant la majorité du parlement catalan, dont la valeur a été suspendu par le même parlement, afin d’entamer des négociations avec l’Etat espagnol, qui aboutiront en fait sur la répression.]

Au peuple de Catalogne et à tous les peuples du monde,

La justice et les droits humains individuels et collectifs intrinsèques, fondements essentiels qui donnent la légitimité historique et la tradition juridique et institutionnelle de la Catalogne, sont la base de la constitution de la République catalane.

La nation catalane, sa langue et sa culture ont mille ans d’histoire. Pendant des siècles, la Catalogne a été dotée et a bénéficié de ses propres institutions qui ont exercé l’autonomie avec plénitude, avec la Generalitat comme la plus grande expression des droits historiques de la Catalogne.

Le parlementarisme a été, pendant les périodes de liberté, la colonne vertébrale sur laquelle ces institutions ont été soutenues, il a été canalisé par les « Cortes catalans » et a été cristallisé dans les Constitutions de Catalogne.

La Catalogne restaure aujourd’hui sa pleine souveraineté, perdue et largement attendue depuis des décennies lors d’une coexistence institutionnelle honnête et loyale avec les peuples de la péninsule Ibérique.

Depuis l’adoption de la Constitution espagnole de 1978, la politique catalane a joué un rôle clé avec une attitude exemplaire, loyale et démocratique à l’égard de l’Espagne et un sens profond de l’Etat. L’Espagne a répondu à cette allégeance en refusant la reconnaissance de la Catalogne en tant que nation; et a accordé une autonomie limitée, plus administrative que politique et a provoqué une processus de recentralisation; un traitement économique profondément injuste et une discrimination linguistique et culturelle.

Le statut d’autonomie, approuvé par le Parlement et le Congrès et approuvé par la citoyenneté catalane, devrait constituer le nouveau cadre stable et durable des relations bilatérales entre la Catalogne et l’Espagne. Mais c’était un accord politique brisé par la décision de la Cour constitutionnelle et qui a fait émerger de nouvelles plaintes des citoyens.

Reprenant les demandes d’une grande majorité de citoyens de Catalogne, le Parlement, le gouvernement et la société civile ont demandé à plusieurs reprises à l’état espagnol la tenue d’un référendum sur l’autodétermination. Devant la constatation les institutions de l’Etat ont rejeté toutes les négociations, elles ont violé le principe de démocratie et d’autonomie et ont ignoré les mécanismes juridiques prévus par la Constitution, la Generalitat de Catalogne a organisé un référendum pour l’exercice du droit à l’autodétermination reconnu en droit international.

L’organisation et la célébration du référendum ont conduit à la suspension de l’autonomie gouvernementale en Catalogne et à l’application de fait de l’état d’urgence. Les opérations policières brutales de caractère et de style militaires orchestré par l’Espagne contre les citoyens catalan ont touché, en de multiples occasions répétées, leurs libertés civiles et politiques et les principes des droits de l’homme, et a contrevenu aux accords internationaux signés et ratifiés par l’Etat espagnol.

Des milliers de personnes, parmi lesquelles des centaines d’élus, institutionnels et professionnels du secteur des communications, l’administration et la société civile ont été surveillées, détenues, frappées, interrogées et menacées par de sévères peines de prison.

Les institutions espagnoles, qui doivent rester neutres, protéger les droits fondamentaux et arbitrer le conflit politique, sont devenues une partie et un instrument de ces attaques et ont laissé les citoyens de Catalogne sans protection. Malgré la violence et la répression visant à empêcher un processus démocratique et pacifique, les citoyens de Catalogne ont voté majoritairement en faveur de la constitution de la République catalane.

La Constitution de la République catalane se fonde sur la nécessité de protéger la liberté, la sécurité et la coexistence de tous les citoyens de la Catalogne et d’avancer vers un Etat de droit et une démocratie de meilleure qualité et répond à l’interdiction de la part de l’Etat espagnol de rendre effectif le droit à l’autodétermination des peuples.

Le peuple de Catalogne est l’amant du droit, et du respect de la loi est et sera l’une des pierres angulaires de la République.

L’Etat catalan remplira toutes les dispositions conformes à la présente Déclaration et garantira le maintien de la sécurité juridique et le maintien des accords de l’esprit fondateur de la République catalane.

La constitution de la République est une main tendue au dialogue. Conformément à la tradition catalane, nous maintenons notre engagement en faveur de l’accord comme moyen de résoudre les conflits politiques. De même, nous réaffirmons notre fraternité et notre solidarité avec le reste des peuples du monde et en particulier avec ceux avec lesquels nous partageons la langue et la culture et la région euro-méditerrannée pour la défense des libertés individuelles et collectives.

La République catalane est une opportunité pour corriger les déficits démocratiques et sociaux actuels et de construire une société plus prospère, plus juste, plus sûre, plus durable et plus solidaire. En vertu de tout ce qui vient d’être exposé, nous, représentants démocratiques du peuple de Catalogne, dans le libre exercice du droit à l’autodétermination et conformément au mandat reçu des citoyens de Catalogne,

NOUS CONSTITUONS la République Catalane, en tant qu’État indépendant et souverain, de droit, démocratique et social.

NOUS METTONS EN VIGUEUR la loi de transition juridique et fondamentale de la République.

NOUS INITIONS le processus constitutif, démocratique, citoyen, transversal, participatif et contraignant.

NOUS AFFIRMONS la volonté d’ouvrir des négociations avec l’Espagne, sans conditions préalables, visant à établir un système de collaboration au bénéfice des deux parties. Les négociations doivent nécessairement être sur un pied d’égalité.

NOUS PORTONS A LA CONNAISSANCE de la communauté internationale et des autorités de l’Union européenne la constitution de la République catalane et la proposition de négociations avec l’Espagne.

NOUS DEMANDONS instamment à la communauté internationale et aux autorités de l’Union européenne d’intervenir pour mettre fin à la violation continue des droits civils et politiques et de suivre le processus de négociation avec l’État espagnol et d’être témoins.

NOUS MANIFESTONS le désir de construire un projet européen qui renforce les droits sociaux et démocratiques des citoyens ainsi que l’engagement à continuer à appliquer les normes de l’ordre juridique de l’Union européenne et celles de l’Espagne et de la Catalogne autonome qui transposent cette norme.

NOUS AFFIRMONS que la Catalogne a le désir sans équivoque de s’intégrer le plus rapidement possible à la communauté internationale. Le nouvel Etat s’engage à respecter les obligations internationales actuellement appliquées sur son territoire et à continuer à faire partie des traités internationaux auxquels le Royaume d’Espagne est partie prenante.

NOUS APPELONS les États et les organisations internationales à reconnaître la République catalane comme un État indépendant et souverain.

NOUS DEMANDONS au Gouvernement de la Generalitat de prendre les mesures nécessaires pour rendre possible la pleine réalisation de cette déclaration d’indépendance et des dispositions de la loi de transition juridique et fondamentale de la République.

NOUS APPELONS chacun des citoyens de la République catalane à nous rendre dignes de la liberté que nous avons donnée et à construire un Etat qui se traduit par des actions et en conduite des inspirations collectives.

Les représentants légitimes du peuple de Catalogne

Barcelone, 10 octobre 2017

Catégories
Politique

Autriche : l’extrême-droite obtient l’intérieur, les affaires étrangères et la défense

L’Autriche de l’après-guerre a connu un régime marqué par un grand compromis, entre la droite du Parti autrichien du peuple et le Parti social-démocrate.

Les postes étaient partagés, les deux camps coexistant parallèlement, toute la société se divisant suivant cette ligne. Symbole de ce compromis, l’aigle nationale se voyait coiffé d’une couronne en forme de tour, symbole de la ville, du bourg, du bourgeois.

Et, dans ses pattes, il tient un marteau et une faucille, se libérant de chaînes : c’est le symbole de la social-démocratie, de la classe ouvrière, du socialisme.

Ce compromis était contre-nature, mais la social-démocratie l’acceptait, car elle préférait les Etats-Unis au communisme. Il n’a été remis vraiment en cause que dans les années 1980-1990 avec l’irruption du FPÖ, le parti de la liberté d’Autriche, avec à sa tête Jörg Haider.

Mais l’alliance du Parti autrichien du peuple et du FPÖ, en 2000, avait provoqué un cordon sanitaire international, l’Autriche connaissant un isolement diplomatique, l’extrême-droite n’obtenant de toutes façons que des postes ministériels secondaires.

L’époque a changé et le nouveau gouvernement qui vient de se former en Autriche correspond au cauchemar de tous les gens de gauche. Non seulement l’extrême-droite arrive au gouvernement, non seulement elle obtient six ministères, mais en plus parmi ceux-ci il y a l’intérieur, les affaires étrangères et la défense.

C’est très exactement le genre de moment où l’on se dit : cela recommence, ce sont de nouveau les années de crise de l’après-première guerre mondiale, avec tout ce chantage nationaliste, cette crispation de la société.

Quelle personne de gauche ne peut pas trembler à l’idée que le ministre de l’intérieur, le ministre de la défense, le ministre des affaires d’étrangères, soient d’extrême-droite, membres d’un parti fondé par le chef de brigade SS Anton Reinthaler ?

Une extrême-droite dont les parlementaires, lors des sessions, portent un bleuet. Cette fleur était le symbole de reconnaissance des nationaux-socialistes à partir de 1933, année de leur interdiction.

Une interdiction mise en place par… les nationalistes-catholiques autrichiens, ayant comme dirigeant Engelbert Dollfuss, le dictateur de « l’État des corporations » de 1932 à 1934.

Engelbert Dollfuss qui avait encore, jusqu’à il y a quelques mois et la rénovation du parlement, son portrait dans le club parlementaire de la droite !

Cerise sur ce gâteau indigeste, l’annonce de l’alliance formant le nouveau gouvernement, entre le Parti autrichien du peuple et le Parti de la liberté d’Autriche, s’est faite sur le mont Kahlenberg, lieu du camp de base des armées de l’empire ottoman devant Vienne, symbole de leur dernière grande offensive en Europe centrale, mis en échec en 1683.

C’est une alliance contre-nature, puisque le Parti autrichien du peuple, formant la droite, est de tradition nationaliste – catholique, alors que le Parti de la liberté d’Autriche, l’extrême-droite, représente le courant nationaliste – pangermaniste.

Mais les descendants des austro-fascistes et des nationaux socialistes ont su s’entendre, disposant d’une majorité largement suffisante, puisque aux élections législatives la droite a obtenu 31,5 % des voix, l’extrême-droite 26 %.

L’occasion était trop belle et de toutes manières, droite et extrême-droite sont d’accord pour se tourner ouvertement vers la Russie, tout en restant dans l’Union Européenne.

Qui plus est, avec un chancelier de droite, Sebastian Kurz, qui n’a que 31 ans, le gouvernement peut se prétendre comme représentant une Autriche se modernisant, au moyen d’une équipe nouvelle. Le dirigeant d’extrême-droite Heinz-Christian Strache, âgé de 48 ans, est quant à lui vice-chancelier.

L’Autriche s’enfonce donc dans la droite et l’extrême-droite de manière significative.

Catégories
Politique

Un mariage socialiste (1896)

Un mariage socialiste

La revue socialiste

Février 1896

On ‘accuse couramment les socialistes de vouloir tout remettre entre les nuits de l’État. La vérité est que, en rendant à la collectivité, surtout dans le domaine économique, certaines choses qui doivent loi appartenir, ils veulent aussi restituer à l’individu, dans le domaine politique, religieux, civil, beaucoup de prérogatives que l’État leur pare détenir indûment.

Ainsi, beaucoup d’entre eux estiment que l’État non plus que l’Église n’a point â intervenir dans le mariage, du moment qu’il cesse erre l’association de deux fortunes ou de deux positions, afin de redevenir, ce qu’il devrait toujours être pour le bien de l’espèce et des époux, l’union de deux êtres humains qui se, sont choisis en pleine liberté.

Sans empêcher ceux qui le désirent de chercher une consécration officielle, légale ou ecclésiastique, ils réclament le droit de s’en passer, et cela non point dans le désir de diminuer la valeur morale ou de rabaisser l’importance de l’acte accomplir mais, au contraire, en vue d’accroître l’une et de rehausser l’autre.

En fondant la famille sur l’amour, sur la confiance mutuelle, sur un engagement, solennel sans doute, mais affranchi de toute sanction extérieure, ils dégagent la création d’un nouveau foyer domestique des bas calculs d’intérêt et des vilaines idées de chalut qui s’y trouvent trop souvent associés.

On peut, si l’on veut, taxer d’imprudence les parents et les fiancés qui ont une foi aussi profonde dans la parole jurée, bien qu’il faille peu compter pour empêcher la désunion possible sur le lien fragile établi par la loi; mais on ne saurait sans injustice méconnaître ce qu’a de noble et de généreux l’appel exclusif fait en pareille matière à l’honnêteté et à l’affection réciproque.

Tel est le sens de la fête intime qui a eu lieu, le 10 janvier dernier, dans les bureaux de la Revue Socialiste.

Mademoiselle Héna Mink, la plus jeune fille de notre amie Madame Paule Mink, et filleule de notre vénéré maître Benoît Malon, épousait en union libre un jeune et vaillant militant du parti socialiste, Monsieur Henri Jullien.

Devant une assemblée de parents et d’amis, qui remplit la salle décorée de fleurs et de plantes vertes, M. Rodolphe Simon, administrateur de la Revue Socialiste (en l’absence de M. Georges Renard, directeur) reçoit le jeune couple.

La mère de la mariée, Madame Paule Agnis, très impressionnée, dit quelques mots :

« Mes amis, je vous ai priés de vous réunir ici pour vous présenter ma fille et le jeune homme qu’elle aime, le citoyen Henri Jullien, qui désirent se marier en union libre et ont tenu à vous faire part de leur résolution.

Si j’ai consenti à une telle union, qui sera celle de l’avenir, c’est que je connais bien le jeune homme auquel ma fille va s’unir et que je le sais loyal et fier, incapable d’une tacheté et d’une vilenie.

L’union libre est la plus sérieuse de toutes ; car elle n’a pour consécration que la conscience des deux époux, pour sanction que le respect de leur propre dignité. »

Le citoyen Rodolphe Sinton, en quelques paroles émues, félicite les jeunes gens de l’exemple qu’ils donnent et du courage qu’ils montrent en contractant une union libre, « la plus belle et la plus noble de toutes » dit-il.

Il rappelle le souvenir de Benoît Malon et souhaite tout le bonheur possible aux deux jeunes conjoints.

Le docteur Blatin, ancien député, grand-maître de la franc-maçonnerie l’année dernière, se lève alors et fait un discours tout empreint d’une noble et douce philosophie, que nous regrettons bien de ne pouvoir reproduire tel qu’il a été prononcé :

« Jeunes gens, dit-il, en commençant, vous inaugurez une ère nouvelle ; dans le monde social nouveau nous n’aurons besoin ni de maire, ni de curé, ni de notaire pour nous unir, nous ne prendrons conseil que de notre coeur ; la sanction, nous la trouverons dans notre honneur, et le bonheur nous sera donné, parce que nous serons loyaux et bons, sincères et honnêtes en notre amour comme en toutes choses. »

Tous les assistants serrent les mains des jeunes époux et les félicitent. Un lunch est ensuite offert aux mariés, à la famille, aux amis et invités, par M. Rodolphe Simon, et la journée se termine à Auteuil, par un dîner intime chez M. Argyriadès, directeur de la Question sociale.

Catégories
Politique

Jean-Luc Mélenchon dénonce la perfidie et les liens « familiaux », « communautaires » de Léa Salamé

Après le message twitter indéfendable de Gérard Filoche, c’est Jean-Luc Mélenchon dont « la langue a fourché ». Il a tenu des propos en effet très particuliers, dans son compte-rendu critique de son passage le 30 novembre à l’émission « L’Émission politique » sur France 2.

Dans son article Le lendemain de l’émission, publié le 4 décembre, Jean-Luc Mélenchon raconte qu’il a été piégé par la journaliste Léa Salamé et dresse le constat suivant :

 « Je ne me suis pas préoccupé de ses liens familiaux, politiques et communautaires. »

Il a modifié ce passage le lundi à 21h45. Le passage donne alors :

« Je ne me suis pas préoccupé de ses liens familiaux et communautaires politiques. »

Or, des liens « communautaires politiques », cela ne veut rien dire. Jean-Luc a juste déplacé le mot « politique », afin de laisser penser qu’il avait mal tourné sa phrase. Il est évident toutefois que cela n’est pas crédible.

Surtout que, dans les faits, cela ne change pas grand chose, puisque les liens « familiaux » sont censés rester un problème. C’est une allusion au fait que Léa Salamé, journaliste franco-libanaise, est marié à Raphaël Glucksmann.

Impossible de ne pas voir, en la réaction de Jean-Luc Mélenchon, une allusion de type antisémite, une dénonciation masquée des « journalistes juifs ».

Cela est d’autant plus vrai que Jean-Luc Mélenchon dénonce un complot, une manipulation, c’est-à-dire en français, la « perfidie »…

C’est là une véritable accumulation de clichés.

Catégories
Politique

Benoît Hamon fonde Génération⋅s

Juste après les élections présidentielles (où il avait fait 6,36 % des voix au premier tour), Benoît Hamon avait quitté le Parti socialiste et fondé, dans la douleur, le mouvement du premier juillet (2017), le M1717. Il n’y avait ni cadre politique ni socle politique, mais l’idée était de profiter d’un élan de sympathie pour former quelque chose de nouveau.

Benoît Hamon savait avec justesse que, en comparaison à un Parti socialiste très marqué au centre-gauche et à un Jean-Luc Mélenchon populiste au possible, il y avait un large espace pour les gens de gauche.

On en sait désormais davantage, puisqu’il a profité de l’élan du M1717 pour fonder Génération⋅s. 1500 personnes étaient présentes pour cela ce samedi 2 décembre 2017 au palais du congrès du Mans, s’appuyant sur un questionnaire rempli par 28 000 personnes sur les 42 000 s’étant inscrit gratuitement à la plate-forme du M1717.

Le mouvement est composé surtout de cadres supérieurs, d’étudiants (tenant le principal syndicat étudiant, l’UNEF), de gens appartenant au sens très large aux « classes moyennes ».

Il ne se veut pas dans la tradition du mouvement ouvrier et pour cette raison, le nom du mouvement se veut donc résolument « moderne », en opposition complète avec la tradition (un parti centralisé, avec des congrès et des cadres, etc.) et les « gros mots » (socialiste, communiste, socialisme, communisme, ouvrier, etc.).

Les valeurs de Génération⋅s sont définies par conséquent comme suit : « égalité, écologie, démocratie, justice sociale et solidarité, internationalisme ».

Le charte donne comme objectif :

« Nous voulons fonder une nouvelle république démocratique et participative, écologique et sociale, laïque et décentralisée. »

Deux exemples peuvent aider à comprendre la nature du projet. Benoît Hamon a expliqué dans un discours que la nature du nouveau mouvement était la suivante :

« Notre Mouvement doit préfigurer la République que nous voulons, basée sur la démocratie continue »

La « démocratie continue » est un concept inventé par Maurice Thorez, à la toute fin des années 1950. Une citation de lui est très connue pour qui s’intéresse à l’histoire du mouvement ouvrier :

 « La démocratie, création continue, s’achèvera dans le socialisme. »

Sur le Twitter du nouveau mouvement Génération⋅s, on a aussi cette précision :

« Un nouvel espoir jaillit. Rénovons et chérissons cette démocratie en rhizome. »

Un rhizome est une structure qui se meut en permanence dans tous les sens, sans niveaux ni hiérarchie.

Il s’agit d’un concept philosophique inventé par Gilles Deleuze et Félix Guattari, auteurs de Mille plateaux. Cet ouvrage est le grand classique des universités américaines, de la théorie du genre, de « l’intersectionnalité des luttes », etc.

Si le monde est une sorte de gigantesque « rhizome », alors il n’y a plus de société mais des échanges innombrables entre individus. Une « démocratie en rhizome » serait alors une sorte d’alliance gigantesque entre les individus, sur une base de réciprocité.

Le projet de Benoît Hamon est de réguler le capitalisme pour permettre aux individus de s’épanouir en vaquant en quelque sorte à leurs occupations de la manière la plus aisée possible.

Catégories
Politique

Ces gens de gauche qui passent à droite selon Sternhell

Si on se rappelle des travaux de l’historien Zeev Sternhell, on a froid dans le dos sur ces gens de gauche qui, par perte des valeurs de tout un mouvement historique, basculent dans des idées troubles, populistes, nationalistes.

Sternhell dresse un panorama historique montrant que le fascisme est né en tant qu’idéologie portée par les éléments décomposés de la gauche qui, incapables de trouver un chemin de gauche qui convainc et mobilise, cherche ailleurs un chemin qui persuade et agite.

Il l’a fait dans plusieurs ouvrages, dont Ni droite ni gauche L’idéologie fasciste en France, qui lui a valu une haine générale des historiens français, qui ont tous une ligne très simple au sujet du fascisme français « Circulez, il n’y a rien à voir ».

Voici un passage représentatif de ce que dit Sternhell, dans La droite révolutionnaire (Les origines françaises du fascisme, 1885-1914).

« C’est aussi en France que l’on constate dans toute son ampleur ce phénomène-clef du fascisme : le passage de gauche à droite d’éléments socialement avancés, mais violemment opposés à l’ordre libéral.

Car le fascisme est allé puiser tant dans la gauche que dans la droite et, parfois, dans certains pays, beaucoup plus dans la gauche que dans la droite.

Il ne s’agit point ici d’un phénomène spécifique à la France : le comportement du ministre travailliste Oswald Mosley, la pléiade de syndicalistes italiens autour de Mussolini ou l’accueil réservé au nazisme par Henri de Man recoupent les réactions des militants du Parti populaire français ou du Rassemblement national populaire.

Cependant, depuis les radicaux d’extrême gauche, au temps du boulangisme, jusqu’à Déat et Doriot et les milliers de militants socialistes et communistes qui gravitent autour d’eux, en passant par Sorel, Lagardelle et Hervé, nul autre pays que la France n’enregistre de revirements aussi nombreux et aussi spectaculaires. Nul autre parti ne perd en faveur d’un parti fasciste un tel nombre de membres de son bureau politique que le PCF (…).

Un fascisme qui est une révolte contre les bassesses de la vie bourgeoise, contre ses valeurs et son régime, et un fascisme qui découle en droite ligne d’une crise du socialisme, provenant elle-même de l’impuissance du marxisme à répondre au défi que présente la crise du capitalisme.

La littérature fasciste de l’entre-deux guerres – Drieu, Brasillach, Rebatet ou Céline – n’a que fort peu de choses à ajouter aux thèmes développés par Barrès, Le Bon, Drumont, Berth ou Sorel. Mis à part le motif ancien combattant et les références à Rome ou à Berlin, on croirait avoir sous les yeux une version modernisée du Testament d’un antisémite ou des Cahiers du Cercle Proudhon. »

Catégories
Politique

Gérard Filoche est indéfendable

Être de gauche, c’est se mettre au service des gens, vouloir leur bonheur, et réfléchir avant d’agir. Une fois que l’on a dit cela, on sait que dans l’histoire il y a eu des grands combats d’idées, des différences, la plus connue étant celle ayant provoqué la scission suite au Congrès de Tours de 1920.

Dans la tradition socialiste comme dans la tradition communiste cependant, qui puisent à une même source, le mouvement ouvrier, on réfléchit avant d’agir. On choisit ce qu’on fait, de manière rationnelle, après avoir débattu.

C’est le principe du parti, du débat d’idées dans le parti, du fait d’assumer tous ensemble ce qui a été décidé de manière démocratique, de considérer que les idées mises en avant portent le progrès et de se poser comme locomotive de l’histoire.

On sait à quel point tout cela a été galvaudé et l’erreur fatale de Gérard Filoche sonne comme un avertissement. Quand on se coupe des traditions de la gauche historique, quand on n’est pas au niveau culturellement, on bascule du mauvais côté.

Gérard Filoche

C’est un avertissement parce que Gérard Filoche s’est posé justement comme le grand gardien des traditions historiques au sein du Parti Socialiste. Il avait même créé sa propre fraction, « Démocratie & Socialisme », qui prônait une sorte de retour aux sources.

Seulement le problème, c’est que Gérard Filoche est comme Jean-Luc Mélenchon : c’est un tribun. Tant lui que Jean-Luc Mélenchon balancent des idées, des propositions, mais ils ne réfléchissent pas, ils ne pensent pas, ils n’ont pas de socle bien déterminé.

Cela en fait des populistes de gauche, qui au pire apparaissent comme des Don Quichotte de la cause sociale, comme Georges Marchais en son temps, au mieux comme des sortes de nouveaux François Mitterrand.

Gérard Filoche a été d’une grande complaisance avec son propre populisme. Il faisait figure de trouble-fête, pas réellement pris au sérieux par la direction du Parti Socialiste, mais toujours utile pour donner une image de gauche à ce parti gouvernemental.

Acceptant ce rôle, prenant régulièrement la parole dans les médias ou sur son blog, Gérard Filoche a toujours cherché à apparaître comme spontané, emporté, émotif, voire aux bords des larmes même.

On pouvait alors la puce à l’oreille, tout de même, en se rappelant qu’il a une expérience politique énorme, étant l’un des principaux cadres de la Ligue Communiste Révolutionnaire dès les années 1960, appartenant pendant 25 ans à sa direction.

En ce sens, en tant que membre du Parti Socialiste qui plus est depuis 1994, il ne saurait y avoir de hasard dans son choix d’une image à caractère nazi. En publiant une telle image sur tweeter, Gérard Filoche savait pertinemment ce qu’il faisait.

A moins de le prendre pour un imbécile, ce qu’il n’est certainement pas, une autre explication est impossible.

Ayant échoué à rompre sur une base révolutionnaire avec le Parti Socialiste, il ne lui restait plus qu’une option : la fuite en avant de type ultra-populiste. Sa trajectoire est, en fait, une sorte de condensé de ce qu’a fait Jean-Luc Mélenchon sur plusieurs années.

Voir cela en se rappelant ce que raconte l’historien Sternhell sur les gens de gauche qui passent à droite fait très peur quand on voit la nature de l’image qu’a posté Gérard Filoche sur Tweetter, lui valant une exclusion quasi-immédiate du Parti Socialiste. Au grand dam de Gérard Filoche, qui prétend avoir agi vite et mal, mais être de bonne foi, dénonçant un « procès en sorcellerie », une « cabale » (cette expression étant historiquement issue de l’imaginaire antisémite, ce que quelqu’un de cultivé comme Gérard Filoche ne peut pas ne pas savoir).

Nul ne peut prétendre pourtant, comme Gérard Filoche le fait, que « l’image Macron + argent est totalement banale ». Encore moins dans une image associant l’argent, les États-Unis et Israël. On est là dans une argumentation typiquement nazie, tout comme en témoigne ce que Gérard Filoche a lui-même écrit :

« Un sale type, les Français vont le savoir tous ensemble bientôt »

Cette opposition entre « les Français » et les parasites extérieurs est un thème essentiel de l’antisémitisme. On est ici dans l’idéologie du « ni Washington ni Tel Aviv » historiquement porté en France par les courants « nationaux-révolutionnaires ».

Le message posté sur twitter par Gérard Filoche, reprenant une image de propagande antisémite

Par ailleurs, les personnes que l’on voit à côté d’Emmanuel Macron sont le PDG d’Altice Patrick Drahi, le banquier Jacob Rothschild et l’ancien conseiller de François Mitterrand Jacques Attali.

Le choix de leur présence vise à associer Emmanuel Macron à la figure nazie des « banquiers juifs » dont il serait la marionnette.

On a même des billets de banque en arrière-plan, et une planète, avec marqué « en marche vers le chaos mondial », ce qui correspond clairement à l’imaginaire fasciste. Qu’Emmanuel Macron ait un brassard nazi, où la croix gammée est remplacée par un dollar, est bien entendu ici une provocation servant de cerise sur le gâteau.

Que cette image ait été produite par « Égalité & Réconciliation », qui pour une fois a maille à partir avec la justice pour cela (Alain Soral est convoqué au tribunal en janvier pour cela), n’a rien d’étonnant et Gérard Filoche ne pouvait pas ne pas voir la dimension antisémite.

Il a joué avec le feu, il a agi sans réfléchir. Cela l’exclue par définition de la gauche, et encore plus quand cette actions sans réflexion converge avec l’extrême-droite.

Gérard Filoche est indéfendable et pourtant il y en a qui font semblant d’être naïfs, comme dans cette pétition de soutien, également mise en avant dans l’Humanité.

L’honneur d’un militant, Gérard Filoche

Oui, Gérard Filoche a retweeté un montage photo mettant en cause Emmanuel Macron dont, dans la précipitation, il n’a pas immédiatement perçu le caractère antisémite. Il s’est rapidement rendu compte de son erreur, a retiré le tweet, s’est excusé publiquement, a répondu aux journalistes. L’affaire aurait pu s’arrêter là, mais le tweet a été relayé sur la Toile pendant plusieurs jours, au point de devenir une affaire d’État.

Les condamnations, sans la moindre prise de recul, ont abondé. Le PS qui, ces temps-ci, peine tant à parler d’une seule voix, a retrouvé son unité pour exclure à bon compte une de ses dernières voix de gauche, sans autre forme de procès.

Voilà le plus inquiétant : les réseaux sociaux sont devenus le procureur le plus expéditif et le plus implacable, et, derrière eux, certains médias aussitôt aboient à l’unisson. Filoche est donc antisémite : la sentence de Facebook est tombée. Qu’il disparaisse sur-le-champ ! Nous ne pouvons accepter cette accusation scandaleuse, cette atteinte portée à l’honneur d’un militant qui a consacré sa vie entière à défendre les libertés syndicales et le Code du travail, à lutter contre le racisme et l’antisémitisme (il fait partie des fondateurs de SOS ­Racisme).

Cette polémique, comme celle qui oppose Charlie Hebdo et Mediapart, témoigne d’une extraordinaire dégradation du débat public. Journalistes et politiques rivalisent dans la surenchère et dans l’anathème. Il faudrait admettre une bonne fois que Twitter ne favorise pas l’intelligence dans le temps long, qui est celui de toute pensée politique digne de ce nom. Gérard Filoche a aujourd’hui l’occasion cuisante de s’en rendre compte, tandis que ses détracteurs continuent de tapoter furieusement sur les claviers de leurs smartphones.

Pendant ce temps, l’antisémitisme et le racisme répandent leur poison. Manuel Valls, si prompt à dénoncer l’antisémitisme, affirmait cette semaine encore que les musulmans « sont un problème ». Ce n’est pas la première fois, et il n’a jamais été inquiété pour ce type de propos. Ça suffit.

Pour signer ce texte : http://pour-lhonneur-de-gerard-filoche.org

Premiers signataires : Guy Bedos, artiste, Christine Blum, consultante, Jacques Bidet, philosophe, Patrick Brody, syndicaliste, Patrick Chamoiseau, écrivain, Annick Coupé, syndicaliste, Jean-Baptiste Del Amo, écrivain, Christine Delphy, sociologue, Christian de Montlibert, sociologue, Annie Ernaux, écrivaine, Karl Ghazi, syndicaliste, Jean-Marie Harribey, économiste, Anne Hessel, Danièle Kergoat, sociologue, Pierre Khalfa, économiste et syndicaliste, Jean-Marie Laclavetine, écrivain et éditeur, Philippe Marlière, politiste, Gus Massiah, économiste, Gérard Mauger, sociologue, Christiane Marty, altermondialiste, Jean-Pierre Mercier, syndicaliste, Gérard Mordillat, écrivain, Gérard Noiriel, historien, Willy Pelletier, sociologue, Michel Pialoux, sociologue, Michel Pinçon-Charlot, sociologue, Monique Pinçon-Charlot, sociologue, Louis Pinto, sociologue, Patrick Raynal, écrivain, François Ruffin, réalisateur.

Cela n’a pas de sens. Gérard Filoche a choisi une approche populiste, qui a été aveugle sur sa propre nature. Il est indéfendable.