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Australie : « la Chine est comme l’Allemagne nazie des débuts »

C’est une très grave crise politique qui traverse les couches dirigeantes australiennes, avec comme question centrale le rapport à la montée en puissance de la Chine. Il y a au plus haut niveau australien une assimilation de la Chine actuelle aux débuts de l’Allemagne nazie : on aura compris alors qu’une fraction des couches dominantes australiennes exigent un engagement total en faveur de la ligne belliciste américaine.

Le député australien Andrew Hastie a comparé la Chine actuelle avec la montée en puissance de l’Allemagne nazie. Cela signifie que, de manière très claire, ce conservateur annonce une prochaine guerre mondiale, avec un pays cherchant à modifier le partage du monde. Tout comme l’Allemagne cherchait à se développer hier, la Chine actuelle entend exiger un repartage du monde.

Il a formulé son point de vue dans une tribune dans la presse australienne, où il appelle à une remise à plat de tous les rapports avec la Chine, afin de préserver la souveraineté australienne. Nul hasard à cela : la semaine dernière, les gouvernements américain et australien ont également exprimé en commun des inquiétudes quant à l’agrandissement de l’influence chinoise dans la région.

Ses propos ont exigé une mise au point de la part des principaux dirigeants. Le ministre du commerce Simon Birmingham a demandé de la prudence dans les mots, alors que le ministre des finances Mathias Cormann a exprimé des critiques.

Mais le ministre de l’intérieur Petter Dutton a apporté son soutien au député. De manière significative, il est également le dirigeant de la commission parlementaire des services secrets australiens. Andrew Hastie n’est pas non plus n’importe qui à ce niveau. Il est passé par l’armée et il est le dirigeant de la commission parlementaire sur la sécurité.

Dans sa tribune, il compare d’ailleurs l’Australie à la France de 1940. Il explique qu’on sous-estime la capacité de la Chine à se mobiliser en différents points. De fait, il place la question militaire au centre des préoccupations. Cela fait plus que sous-entendre la nécessité d’une alliance ouverte avec les États-Unis en vue d’affronter la Chine.

Andrew Hastie fait également remarquer que la France s’est trompée en croyant que l’Allemagne nazie, de par l’importance des échanges économiques, n’irait pas au conflit. C’est une question essentielle d’ailleurs pour l’Australie, dont la Chine est la principale partenaire. Preuve des tensions stratégiques, Huawei a d’ailleurs été pourtant exclu de la technologie 5G devant être mise en place en Australie.

On aura compris que toute la question est de savoir pour l’Australie s’il faut maintenir la situation telle qu’elle est, car le capitalisme fonctionne bien et cela dans un rapport étroit avec la Chine, ou bien s’il s’agit de prévoir déjà le coup d’après et de commencer la rupture. C’est un choix critique, qui engage tout le pays, dans son positionnement même.

C’est là l’expression de la tendance à la guerre. Il est évident que pour les pays autour de la Chine, cette tendance s’exprime particulièrement brutalement. La Corée, le Japon, le Vietnam, l’Indonésie… tous ces pays connaissent des mouvements de fond dans leur nature même. Ils sont littéralement emportés par la tendance principale, celle de l’affrontement sino-américain à venir.

Il serait bien entendu illusoire de croire que, parce que la France est loin, on échappera d’une manière ou d’une autre à une guerre mondiale. Ce serait criminel même de ne pas vouloir s’opposer à une telle conflagration, inhumaine, meurtrière, criminelle.

La France, riche pays, puissance de premier plan, ne manquera pas de participer à un quelconque conflit. C’est dans sa nature même, c’est dans la logique même de son économie et tout l’État est engagé en ce sens, comme la militarisation des satellites le montre de manière assez franche.

Les généraux veulent la guerre, les actionnaires en ont besoin. Le peuple est passif et ne saisit pas les enjeux, ou ne veut pas les saisir encore. Partant de là, le processus s’enclenche inéluctablement.

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Vers la guerre «indo-pak» avec le Cachemire comme prétexte

Les actuelles tensions « indo-pak » s’approfondissent de jour en jour et l’état d’urgence au Cachemire mis en place du jour au lendemain témoigne de leur gravité. Le statut autonome du Cachemire va ni plus ni moins que disparaître au profit d’une intégration complète dans l’Union indienne.

L’affrontement militaire indo-pakistanais, inéluctable, représente l’un des aspects de la guerre sino-américaine à venir. Tant l’Inde que le Pakistan, pays munis de l’arme atomique, ont focalisé leur identité et leur armée l’un contre l’autre et tous deux sont appuyés par la Chine et les États-Unis, qui en font de puissants pions dans la bataille pour l’hégémonie mondiale.

Du jour au lendemain, l’Inde a annulé le statut particulier du Cachemire, qui en tant qu’État du Jammu et Cachemire disposait d’une vaste autonomie garantie par l’article 370 de la constitution de l’Union Indienne. C’est le ministre de l’intérieur de l’Union indienne, Amit Shah, qui l’a annoncé lundi 5 août 2019, expliquant qu’un décret présidentiel avait été pris en ce sens.

Immédiatement, des centaines de représentants politiques ont été confinés chez eux, tandis qu’ont été arrêtés des activistes, des intellectuels et des figures économiques locales. Les réseaux téléphoniques, fixes comme mobiles, ont été coupés, ainsi bien entendu qu’internet. Cela est valable même pour les hôpitaux.

La ville principale, Srinagar, est totalement occupée militairement, avec checkpoints et barbelés, ce qui n’a pas empêché des révoltes. Aucun journaliste n’a le droit de se déplacer alors que la diffusion de toute presse a été suspendue.

Le jeudi 8 août, le premier ministre Narendra Modi expliquait dans un discours à la nation que l’intégration du Cachemire avait comme but son meilleur développement économique, ainsi que la fin du « terrorisme » et de la corruption. Le statut particulier n’apporterait rien de bon et il faudrait permettre la promotion des intouchables et des tribaux comme dans le reste du pays. Il faut saisir ici l’arrière-plan historique de la question.

Lors de leur colonisation des Indes, les Britanniques ont cherché à diviser pour régner. Ils se sont pour cela appuyer sur la large minorité musulmane et une couche intellectuelle indienne musulmane ayant étudiée en Angleterre, qui a poussé à la formation d’un État indépendant. Après 1947, le Pakistan musulman faisait face à l’Inde ayant grosso modo les 2/3 de sa population hindoue, 1/3 musulmane, avec qui plus est des minorités tels que les Jaïns et les Sikhs.

Il est souvent dit que l’Inde est la plus grande démocratie du monde, mais en réalité c’est une société ultra-communautariste. Le droit privé dépend en effet de la religion de la personne. Les communautés sont donc des blocs fermés ne pouvant se rencontrer. L’hindouisme a l’hégémonie et perpétue un système de castes, y compris à travers le développement récent de villes « modernes », parallèlement aux campagnes arriérées et aux mains de grands propriétaires.

Le Pakistan, quant à lui, était divisé en deux, puisque l’actuel Bangladesh lui appartenait. Il a cherché à maintenir cette possession en pratiquant un immense génocide, avec plusieurs millions de personnes massacrés pour avoir affirmé l’identité propre au Bangladesh. Ce dernier est par la suite devenu indépendant.

La question du Cachemire s’est posée dès la partition en 1947. Les Cachemiris ont leur propre identité historique ; l’hindouisme qui s’y était développé avait pris des formes biens particulières, très mystiques, et l’Islam qui a fini par triompher pratiquement entièrement n’effaçait pas des traits nationaux acquis dans la durée. Seulement c’était un royaume dont le souverain était hindouiste et c’est pourquoi l’Inde l’a revendiqué à la partition.

– partition de 1947 –

Cela n’a pas empêché évidemment l’Inde de s’approprier des zones à majorité musulmane mais à souverain hindouiste. Et, donc, au caractère romantique nationaliste idéaliste abstrait du Pakistan – dont seul le sionisme israélien est sans doute l’équivalent historique – a répondu un chauvinisme expansionniste hindouiste.

Depuis 1947, l’Inde maintient une domination terroriste sur le Cachemire, dont une partie a été occupée par le Pakistan. La Chine a quant à elle récupéré une partie lui appartenant historiquement, mais elle jette de l’huile sur le feu, soutenant le Pakistan. Ce dernier apporte de son côté un soutien logistique à une guérilla harcelant les forces indiennes.

Officiellement, cette guérilla lutte pour l’indépendance du Cachemire, cependant de plus en plus elle est devenue un bras armé du Pakistan. Un autre bras armé du Pakistan, ce sont les Talibans, d’ethnie pachtoune, dont une importante minorité vit au Pakistan. L’Inde sait que les États-Unis veulent négocier avec les talibans pour un accord en Afghanistan et craint un compromis à ses dépens, d’où l’accélération de sa politique expansionniste au Cachemire.

Cette situation a déjà provoqué des affrontements militaires (trois petites guerres dont deux au sujet du Cachemire) et régulièrement des escarmouches, et même en février dernier une bataille aérienne.

Il faut voir ce qui a changé. Auparavant, comme le Pakistan était appuyé par les États-Unis et que l’Inde était appuyée à la fois par les États-Unis et l’URSS, cela ne débordait pas en guerre ouverte. La pression était cependant idéologiquement puissante, le grand symbole étant la fermeture quotidienne de la frontière sino-pakistanaise. Les soldats marchent de manière ostentatoire dans des tenues pittoresques, sous les acclamations nationalistes des gens des deux côtés de la frontière.

L’effondrement du bloc soviétique et de son agressivité très forte dans la région – comme en témoigne l’invasion de l’Afghanistan – a bouleversé la donne et avec l’affrontement sino-américain, la question « indo-pak » prend une tournure explosive. Le Pakistan est appuyé par la Chine, comme contre-poids face à l’Inde, qui est elle de plus en plus liée aux États-Unis depuis l’effondrement de l’URSS.

En réponse aux événements du Cachemire, le Pakistan a expulsé l’ambassadeur indien et annulé tous les échanges, déjà pratiquement inexistants dans les faits. La Chine a qualifié la décision unilatérale de l’Inde d’inacceptable. On a tous les ingrédients pour un conflit militaire d’ampleur, un strict parallèle avec les Balkans en Europe juste avant 1914.

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Nouvelles taxes commerciales américaines contre la Chine

Le 12e round de négociations commerciales sino-américaines a échoué au tout début du mois d’août. Immédiatement, le président américain Donald Trump a annoncé la mise en place, au 1er septembre 2019, de 10% de nouvelles taxes sur 300 milliards de biens importés de Chine. Cela frapperait notamment les smartphones et les ordinateurs portables.

La décision de Donald Trump se produit également le lendemain de la déclaration chinoise affirmant que les États-Unis étaient derrières les vastes troubles en ce moment à Hong Kong. Les citoyens de 47 villes ont aussi eu l’interdiction d’aller à Taïwan, l’État chinois voulant couper court à toute constitution d’un vaste front d’agitation.

Si la diplomatie chinoise déteste une chose, c’est bien le coup d’éclat à ses dépens. La réaction à la décision unilatérale de Donald Trump ne s’est pas faite attendre. Hua Chunying, porte-parole du ministre chinois des affaires étrangères Wang Yi, a réagi de manière très claire :

« Les États-Unis en subiront toutes les conséquences. »

Rien que de plus logique, puisque la vague de mondialisation de ces 30 dernières années se contracte et qu’on va vers la guerre pour les années 2030, avec l’affrontement États-Unis – Chine comme axe principal. Car aucun des deux pays ne reculera dans la bataille pour l’hégémonie.

La nouvelle bagarre commerciale qui s’engage se produit alors qu’il y a une récession de l’industrie en juillet, pour le troisième mois consécutif, dans plusieurs pays (France, Chine, Allemagne, Corée du Sud, Brésil, Royaume-Uni, Italie, etc.). Avec un tel contexte économique plus que morose, beaucoup de responsables américains ne comprennent par conséquent pas la mesure de Donald Trump, celle-ci risquant fortement de frapper la consommation américaine, alors qu’il y a bientôt pourtant de nouvelles élections présidentielles où il espère être réélu.

Mais c’est là l’opposition frontale qui se dessine entre deux Amériques. D’ailleurs, le géant américain Apple est le premier touché par la future mise en place de ces 10 % de taxe. Les experts estiment déjà qu’avec celles-ci, entre 8 et 10 millions d’Iphone en moins seront vendus. à la bourse, à la suite de l’annonce de Donald Trump, l’entreprise a déjà perdu 50 milliards (l’entreprise en vaut 17 fois plus depuis un an). Apple avait déjà expliqué en juin ne pas être favorable aux taxes de Donald Trump.

Seulement voilà, Apple n’existe que par la mondialisation, visant clairement surtout les plus aisés dans le monde. C’est là reposer sur une économie qui n’est pas instable. Il en va de même pour Google ou Facebook. Par conséquent, ces entreprises sont de grandes importance, mais ce ne sont pas des « champions nationaux » au cœur de l’économie américaine.

Comment croit-on que Uber a réussi à s’installer en France ? Personne ne l’a analysé, mais c’est tout simplement par la mondialisation : les Américains aisés venant à Paris avaient déjà l’application, permettant ainsi un rendement immédiat une fois l’entreprise installée. Sans cela, la réalisation pratique aurait été bien plus ardue.

De telles entreprises ne vivent toutefois que dans les interstices de la mondialisation. Pour cette raison d’ailleurs, elles sont d’ardents soutiens aux démocrates américains, au libéralisme culturel, aux valeurs unifiées de consommation mondiale, etc. Elles ne sont pas ancrées dans la réalité économique américaine comme le gigantesque complexe militaro-industriel, l’industrie pétrolière, l’agro-industrie… ou encore les très grands industriels et les très grands banquiers, etc.

Donald Trump a d’ailleurs pris comme prétexte pour les nouvelles taxes le fait que la Chine n’ait pas acheté davantage de produits agricoles américains. C’est là très clairement indiquer quelles sont les priorités, quelles sont les branches privilégiées méritant une rupture ouverte avec la Chine. L’agro-industrie passe avant Apple.

Beaucoup d’entreprises américaines ont compris la situation et ont changé leur fusil d’épaule depuis un an, quittant la Chine pour produire à Taïwan, au Bangladesh, au Vietnam, en Corée du Sud. La tendance est marquée. Quand on sait que Donald Trump a même affirmé que les 10 % de taxes nouvelles pourraient devenir 25 %, on imagine comment toutes les entreprises américaines se cassent la tête sur le problème en ce moment.

Le problème a évidemment marqué les esprits des spéculateurs boursiers. L’annonce de nouvelles taxes n’a pas frappé qu’Apple. Nike a perdu 3,4 %, Mattel 5,9 %, Caterpillar 4,9 %, John Deere 4,4 %. Les représentants de l’industrie de l’habillement et de la chaussure ont immédiatement affirmé que les nouvelles taxes étaient « immensément dérangeantes ».

Car les entreprises peuvent bien entendu reporter le prix des taxes sur les consommateurs. Mais rien que les nouvelles taxes montrent l’ampleur du problème : cela impliquerait 56 dollars en moyenne en plus pour une console de jeu, 70 pour un smartphone, 120 pour un ordinateur portable. Appliquer une telle hausse serait un suicide commercial, les consommateurs fuyant vers la concurrence qui, si elle n’existe pas encore forcément, se précipiterait dans la brèche.

Donald Trump passe en fait à la seconde étape de l’offensive anti-chinoise. Après les taxes sur l’acier et l’aluminium, il vise les produits technologiques courants, mais également d’autres biens de consommation, comme les jouets ou l’habillement. Cela vise à déstabiliser l’économie chinoise, parallèlement à l’appui à toutes les forces centrifuges pouvant servir de marche-pied pour déstabiliser la vie publique chinoise elle-même.

Cela vise aussi à assécher le terrain entre la Chine et les États-Unis, pour préparer la rupture totale, tout en s’alliant d’autres pays das le processus. Le Vietnam est désormais par exemple pratiquement une tête de pont américaine, au même titre que les Philippines. Ce sera d’ailleurs la question des eaux territoriales en Asie qui servira de détonateur à la nouvelle guerre froide, phase inéluctable avant des conflits toujours plus brutaux, toujours plus ouverts, à l’horizon des années 2030.

Il faut vraiment être pétrifié dans la vie quotidienne capitaliste pour ne pas voir la guerre qui se profile.