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Refus de l’hégémonie

Premier élargissement des BRICS

Le groupe Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud (Brics) s’est élargi à l’occasion de son 15e sommet en Afrique du Sud, à Johannesburg, du 22 au 24 août 2023. Un tel événement, une année et demie après le début du conflit armé entre la Russie et l’Ukraine, reflète la vague de fond qui est l’affirmation historique du tiers-monde contre l’hégémonie de la superpuissance américaine. Non seulement il n’y a pas d’alignement sur cette dernière, mais il y a même un soutien appuyé à son concurrent, la superpuissance chinoise.

La raison de cela, c’est que l’incroyable croissance du capitalisme dans la période 1989-2020, désormais brisée par la crise, a produit un développement massif de trop de pays pour que l’équilibre des forces ne soit pas remis en cause. L’affrontement sino-américain ne concerne pas que les États-Unis et la Chine. Tous les pays du monde participent, à leur échelle, à la grande bataille pour le repartage du monde.

Les BRICS forment le camp des outsiders les plus affirmés. Et les pays membres vont être rejoints en 2024 par l’Arabie saoudite, l’Égypte, les Émirats arabes unis, l’Argentine, l’Iran et l’Éthiopie.

L’exemple de l’Arabie Saoudite est très parlant. Son État a été construit littéralement artificiellement par les États-Unis en raison du pétrole. C’est tellement un satellite néo-colonial que lorsque Ben Laden avec Al-Qaïda tente une révolte justement néo-coloniale contre les États-Unis, cela n’a aucun impact véritable. Et vingt ans après les attentats du 11 septembre 2001, l’Arabie Saoudite s’émancipe de la tutelle américaine pour partir à l’aventure.

Autrement dit, des pays à moitié féodaux, largement soumis économiquement aux pays « riches », deviennent tout de même assez riches pour chercher à tirer leur épingle du jeu. En Argentine, le peuple est dans la misère, mais le pays a atteint une masse suffisamment grande pour tenter de rentrer dans le grand jeu.

Tel est l’appel d’air fourni par en priorité la Chine, mais également la Russie (à travers sa taille et ses ressources), à quoi s’ajoutent l’Inde qui est concurrente de la Chine mais a besoin d’espace face aux États-Unis, le Brésil qui se verrait bien dominer l’Amérique du Sud, l’Afrique du Sud qui aimerait bien devenir la puissance dominante dans la partie Sud de l’Afrique.

Les dirigeants des pays des BRICS dans sa version 2023

Toute une série de pays est d’ailleurs à la porte des BRICS. On parle ici des pays suivants en première ligne, même si la liste n’est pas précisément fixe : Afghanistan, Algérie, Angola, Bahreïn, Bangladesh, Biélorussie, Gabon, Indonésie, Kazakhstan, Mexique, Nicaragua, Nigeria, Pakistan, République démocratique du Congo, Sénégal, Soudan, Syrie, Thaïlande, Tunisie, Turquie, Uruguay, Venezuela, Zimbabwe. Les prochains adhérents seront certainement l’Algérie et le Nigeria, l’Indonésie et la Thaïlande.

Il va de soi que l’intégration des prochains pays est déjà programmé. Le fait d’avoir intégré un pays latino-américain, deux pays africains, trois pays moyen-orientaux, est un signal fort. Il s’agissait de souligner un peu l’interventionnisme sur le continent américain (chasse gardée des États-Unis selon la doctrine Monroe en 1823), beaucoup la perspective africaine, à la folie la mise à la disposition des ressources en pétrole et en gaz.

Ce qui est dit, c’est : « nous avons la masse en termes d’habitants, nous avons le grand poids lourd économique chinois et le grand poids lourds en ressources russe, le moyen-orient se moque de qui dominera du moment qu’il est de la partie, vous avez tout à gagner à nous suivre. »

Le conflit armé en Ukraine a fourni la première étape de la grande remise en cause, la question de Taïwan en fournira la seconde. C’est la fin de l’occident qui se joue.

Le président français Emmanuel Macron a tenté de rendre visite au sommet des BRICS : il s’est fait recaler. La France est désormais clairement considérée comme un simple satellite américain. Elle est en première ligne pour l’intégration de l’Ukraine dans l’Union européenne et dans l’Otan. Ce qui est tenté, c’est un partenariat France-Ukraine pour remplacer l’Allemagne comme force principale en Europe. Pour cette raison d’ailleurs, la droite allemande rage totalement du soutien « trop faible » du gouvernement socialiste allemand au régime ukrainien. L’extrême-Droite exige par contre une alliance avec la Russie.

Le président russe Vladimir Poutine n’a pas pu venir au sommet des BRICS non plus, en raison des poursuites pénales promues par l’occident, par l’intermédiaire de la Cour pénale internationale. C’est le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, qui l’a remplacé, afin d’éviter à l’Afrique du Sud de se retrouver dans un imbroglio juridique international.

Les pays membres ou futurs membres des BRICS ne veulent que prendre la place des pays riches. Cependant, ils affaiblissent historiquement l’ordre mondial, ils contribuent à la remise en cause de l’occident. Et ils portent une pierre bien trop lourde pour eux. La remise en cause totale de l’hégémonie américaine n’impliquera pas l’affirmation de la Chine (ou bien de manière très temporaire), mais bien du Socialisme, car c’est l’ensemble du système capitaliste mondial qui sera totalement ébranlé.

C’est la fin de l’occident et cette fin implique la fin du capitalisme. Et si l’occident croit dans sa quasi intégralité que tout restera tel quel, c’est en raison de l’aveuglement propre à une force en décadence. Le monde a totalement changé depuis 2020, il continue de changer et il ne s’arrêtera plus de changer jusqu’à l’effondrement général du capitalisme !

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Guerre

Emmanuel Macron prend en otage la question de l’Amazonie pour servir la puissance française

Avant-hier à la veille du G7 à Biarritz, Emmanuel Macron a opportunément évoqué les incendies en Amazonie, afin de critiquer l’État brésilien et faire pression sur des accords commerciaux. Il en a rajouté lors de son allocution d’hier à Biarritz, laissant entendre qu’il sera à l’origine d’un mouvement d’action en faveur de l’Amazonie, ce qui n’a d’autre fin que de servir les intérêts de la France en tant que grande puissance.

La forêt amazonienne connaît actuellement une série d’incendies de grande ampleur. D’après un spécialiste du Centre européen de prévisions à moyen terme (ECMWF), «  jamais les incendies dans l’État brésilien d’Amazonas n’avaient émis plus de CO2 lors d’un mois d’août, alors que le mois n’est pas encore fini ». Le constat fait par l’Institut national brésilien de recherche spatiale (INPE) va dans le même sens, avec un nombre de départs de feu constaté très supérieur aux années précédentes.

La catastrophe est telle que la ville de São Paulo a vu son ciel complètement obscurci pendant une heure en plein après-midi ce lundi 19 août 2019, du fait de ces incendies. Plusieurs études scientifiques alertent par ailleurs sur un possible point de non-retour qui serait franchi rapidement, empêchant l’équilibre hydrique de la forêt tropicale humide de se maintenir, la faisant devenir une savane.

La situation n’est cependant pas nouvelle, ni isolée : elle correspond à l’état général de la planète, dont la vie est bouleversée en profondeur par l’activité humaine dans le cadre du mode de production capitaliste. La question de l’Amazonie fait ici surtout office de totem, manié par des gens qui ne veulent pas réellement changer le monde et qui s’attachent à des symboles pour prétendre l’inverse.

Les propos d’Emmanuel Macron sur Twitter sont très significatifs de cette posture à propos de l’Amazonie :

« Notre maison brûle. Littéralement. L’Amazonie, le poumon de notre planète qui produit 20% de notre oxygène, est en feu. C’est une crise internationale. Membres du G7, rendez-vous dans deux jours pour parler de cette urgence. #ActForTheAmazon »

Personne ne sait vraiment d’où le Président français tient ce chiffre de 20 %, mais il est en tous cas faux. Parler de poumon de la planète pour l’Amazonie correspond de surcroît à une posture romantique, pas à la réalité scientifique.

Déjà, parce qu’un poumon ne produit pas d’oxygène ! Mais surtout, car il est faux de considérer la planète en séparant les parties du monde et les formes de la vie les unes des autres. La production et le maintient de la teneur en oxygène de l’atmosphère est quelque chose de très complexe, qui concerne l’ensemble de la biosphère. La majorité des émissions d’oxygène provient d’ailleurs des océans, grâce au phytoplancton et non pas des forêts. L’Amazonie, aussi grande soit-elle, ne constitue de toutes manières qu’une partie des forêts mondiales.

Mais ce n’est pas ce qui compte ici puisqu’en réalité Emmanuel Macron entend surtout faire pression pour tirer un avantage plus favorable des accords avec le Mercosur, c’est-à-dire surtout le Brésil et l’Argentine. La situation est très simple : l’Union européenne a signé un accord de libre-échange abolissant presque entièrement les taxes douanières entre les deux marchés communs.

Cet accord, qui est pour l’instant suspendu, est intéressant pour l’industrie allemande, notamment pour l’exportation d’automobiles, et pour le Brésil, pour l’exportation agricole. Il est en partie intéressant pour les exportations françaises, mais entre cependant en concurrence avec les intérêts de l’agro-industrie française, elle aussi très puissante et exportatrice.

La destruction par des incendies volontaires de la forêt amazonienne, qui est un crime barbare contre la vie sur Terre et la vie de la Terre, a pour but de dégager d’immenses espaces agricoles pour l’agro-industrie brésilienne et particulièrement l’élevage. C’est cela que critique Emmanuel Macron, non pas pour des raisons écologiques, mais pour des raisons de concurrence économique, principalement à l’encontre de l’élevage bovin français.

Quand le Président français accuse le Président brésilien d’avoir « menti » sur ses engagements en faveur du climat, il dénonce en fait la possibilité d’une concurrence accrue contre l’agro-industrie française du fait de plus grands espaces agricoles. C’est pour cela qu’il affirme en conséquence vouloir s’opposer à l’application de l’accord avec le Mercosur.

La présidente de la FNSEA, qui représente directement les intérêts de l’agro-industrie française, a immédiatement salué la « décision de sagesse » d’Emmanuel Macron, considérant que ses arguments ont été entendus.

La défense de la forêt amazonienne n’est en effet qu’un prétexte, un mensonge, de la part de celui qui encourageait l’industrie liée à l’extraction d’or dans la forêt amazonienne en Guyane lorsqu’il était au ministère de l’économie. Le président brésilien d’extrême-Droite Jair Bolsonaro a alors beau jeu de dénoncer une instrumentalisation, puisque c’est de cela qu’il s’agit :

« Je suis navré que le président Macron cherche à instrumentaliser une question interne au Brésil et aux autres pays amazoniens à des fins politiques et personnelles. Le ton sensationnaliste avec lequel il se réfère à l’Amazonie (faisant même appel à de fausses photos) ne contribue en rien à régler le problème. »

Remarquons ici que cette polémique bénéficie largement au chef d’État brésilien, qui se pose alors en critique des grandes puissances en plein G7, dénonçant même une mentalité colonialiste :

« Le gouvernement brésilien reste ouvert au dialogue, sur la base de faits objectifs et du respect mutuel. La suggestion du président français selon laquelle les affaires amazoniennes soient discutées au G7 sans la participation de la région évoque une mentalité colonialiste dépassée au 21e siècle ».

Chaque pays cherche à tirer son épingle du jeu dans le cadre de la concurrence économique mondiale. Nous vivons l’époque des Trump, Xi Jinping, Bolsonaro, Poutine, Erdogan, Duterte, du Brexit, de la bataille toujours plus ouverte pour le repartage du monde.

Emmanuel Macron et Angela Merkel eux-mêmes sont des va-t-en-guerre avec leur moteur franco-allemand de l’Union Européenne, qui assume une militarisation accrue. La question de la guerre, couplée à celle de la vie pacifiée de la planète sur le plan écologique, va indéniablement façonner les prochaines années !

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Politique

Présidentielles brésiliennes : le succès ultra-réactionnaire de Jair Bolsonaro

Jair Bolsonaro a été élu avec un large succès à la tête de l’État brésilien. Fanatique anticommuniste, chantre de la religiosité, grand nostalgique de la dictature militaire, anti-écologiste primaire, il est un exemple de plus du grand repli nationaliste et militariste de chaque pays dans le monde.

Jair Bolsonaro a été élu ce dimanche de manière tout à fait nette, avec 55,1% des voix, soit 57,8 millions de votes, contre 44,9% soit 47 millions de voix à Fernando Haddad, qui tentait de maintenir en vie le cycle d’hégémonie du Parti des Travailleurs, qui prônait une Gauche engagée mais n’a dans les faits jamais cherché une quelconque rupture, provoquant un désenchantement profond dans la population.

Et permettant donc à quelqu’un comme Jair Bolsonaro de prendre la tête d’un mouvement de défense de la religion, de la famille et de la propriété privée, avec un véritable engouement en sa faveur. Poignardé lors d’un bain de foule durant la campagne présidentielle, il n’en est devenu que davantage la figure quasi christique du sauveur venant rétablir les valeurs originales, essentielles, d’un Brésil totalement idéalisé.

Ce n’est en effet pas un homme fort plaçant l’armée au centre du jeu qui pourra supprimer une violence sociale endémique à une société déséquilibrée socialement et paralysée économiquement, pourri par les grands propriétaires terriens qui sont d’ailleurs les grands soutiens de Jair Bolsonaro.

Un feu d’artifice a été tiré à Rio pour fêter la victoire de Jair Bolsonaro, alors que le lendemain de celle-ci, le lundi, la bourse de São Paulo connaissait un record, avec l’indice boursier Bovespo gagnant 2,4% dès l’ouverture, l’entreprise pétrolière Petrobras 3,6%, le réal prenant 1,4% face au dollar américain. Jair Bolsonaro est considéré comme l’homme adapté à la nouvelle étape.

Député depuis 28 ans, il aura de fait adhéré en tout à neuf partis différents afin de parvenir à se positionner comme l’homme de la situation, le chef autoritaire d’une énième restructuration du pays. Après la tentative d’une modernisation sociale avec le Parti des Travailleurs de Lula (désormais en prison pour corruption), qui entendait faire du Brésil une grande puissance avec l’appui de la population et à travers l’État, cela sera désormais une stratégie plus traditionnelle, par en haut, sans mobilisation de la base du pays.

Naturellement, Donald Trump s’est réjoui de cette victoire de Jair Bolsonaro et annonce un travail étroit avec lui. Marine Le Pen l’a félicité. Le parti d’Emmanuel Macron, qui est lui modernisateur – libéral, en fait par contre une cible. Une manière de résumer le monde à un affrontement entre libéraux libertaires et nationalistes ultra-réactionnaires.

On voit ainsi encore une fois ce que ne comprennent pas les libéraux. Les médias ont  ainsi largement repris en France les nombreux propos agressifs de Jair Bolsonaro, ses propos odieux sur les femmes notamment, en particulier son « Je ne te violerai pas. Tu ne le mérites même pas »  visant, en décembre 2017, Maria do Rosário, députée du Parti des travailleurs (PT), juste après qu’elle ait rendu hommage aux travaux de la Commission nationale de la vérité sur les crimes commis par la dictature militaire.

Cela est tout à fait inacceptable, mais si Jair Bolsonaro a gagné, c’est surtout parce qu’il a dit qu’un bon bandit est un bandit mort. En cela, il correspond aux attentes d’une population ne pouvant plus vivre dans l’ultra-violence caractérisant le Brésil. Jair Bolsonaro pose le principe d’un Etat de droit, ce qu’une véritable Gauche devrait faire, mais cela signifie accepter le principe de révolution, car seul un nouvel État peut réellement établir l’ordre dans un Brésil corrompu et possédé par les plus riches.

En s’entourant de généraux et en prétendant rétablir un ordre qui en réalité n’a jamais été là, Jair Bolsonaro a mis en place un romantisme capable d’ensorceler une partie majoritaire du pays.

L’avenir du Brésil s’annonce bien sombre et c’est un pays de plus qui tombe dans le giron des partisans du repli nationaliste et du militarisme. Le processus est général et correspond à la mise en place de nouveaux rapports de force, de nouvelles perspectives de guerre, pour le repartage du monde.

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Culture

Prestes Maia, le grand squat de São Paulo

Prestes Maia est un immeuble de São Paulo. Il est situé au centre ville, près de la gare de Luz, dans un quartier qui est littéralement sorti de terre au milieu de la décennie 1950. L’imposant bâtiment est remarquable pour son architecture, mais aussi pour sa destinée récente.

L’immeuble a pour l’essentiel une vocation industrielle. Les deux tours ont abrité à la fois le siège administratif et la principale unité de production textile de la Companhia Nacional de Tecidos (la Compagnie Nationale des Draps). Haut de 22 étages, l’immeuble est construit autour d’une infrastructure de piliers, de poutres et de lintaux de béton armés.

La conception du bâtiment est le fruit du travail de l’urbaniste Francisco Prestes Maia. Ce dernier, polytechnicien de formation, a complètement redessiné la ville de São Paulo à la dimension des grosses berlines US. Il a ainsi été récompensé pour son « Plano de Avenidas » par un prix lors du quatrième Congrès panaméricain des architectes à Rio de Janeiro en juillet 1930. Il sera aussi maire pour trois mandats.

La surface du bâtiment est faite d’un ciment brut bruni par la pollution qui accroche la lumière rasante comme une peau au grain épais. La façade est percée de larges ouvertures vitrées enchâssées directement, sans adoucissement. Au niveau du premier étage commun aux deux tours, en guise de frontispice, le nom de l’usine s’étale en lettres de métal, sur ce qui s’apparente à une corniche. La grande élégance de l’ensemble tient à sa sobriété, à ses lignes claires et épurées.

L’activité industrielle est depuis longtemps abandonnée, mais le bâtiment, quant à lui n’est jamais resté vide. Désaffecté au début des années 1990, bientôt racheté par un homme d’affaire pour un fond spéculatif, l’immeuble officiellement inoccupé est devenu l’un des plus grand squat du continent américain.

Au début ces années 2000, les blocs A et B du 911 Avenida Prestes Maia ont la réputation d’être un infâme coupe-gorge puant tenu par les petits dealers locaux. C’est alors qu’un groupe participant au Movimento dos Trabalhadores Sem Teto (Mouvement des travailleurs sans toit) organise l’occupation des lieux. Pied à pied, hall après hall et étage après étage, les lieux sont nettoyés. Les occupants sont invités à accepter la discipline imposée par le mouvement, faute de quoi ils sont contraints de partir.

A chaque étage, un représentant est élu par les habitants, il est chargé de faire respecter le règlement, d’organiser les travaux communs à l’étage et de faire circuler les informations communes à la communauté entière. La consommation de drogue est interdite, l’alcool est interdit dans les parties communes, il est interdit de faire du bruit passé 22h. Au bas des blocs, des habitants gardent les entrées : il est impossible d’entrer sans avoir été invité par un habitant. L’organisation des lieux est faite pour les familles de travailleurs, celles-ci paient d’ailleurs une participation aux travaux communs.

Les étages sont divisés en « huttes », c’est-à-dire en espaces cubiques plus ou moins de même taille faits de planches de bois enduites de plâtre. Au total, ce sont près de 500 familles, plus de 1600 personnes dont 300 enfants, qui ont trouvé à se loger dans des conditions décentes, le Mouvement garantissant l’eau potable et l’électricité. De nombreuses activités culturelles se déroulent dans l’immeuble : cours de musique pour les enfants, capoeira, gala de danse, etc. Les habitants disposent également d’une bibliothèque contenant 17 000 livres.

Coincé entre d’un côté, un projet de rénovation porté par le propriétaire de l’immeuble et soutenu par la justice, l’État et la Ville qui s’opposent à l’occupation précaire du bâtiment et, de l’autre côté, harcelés par les mafias gérant les réseaux de prostitution, les trafics de drogues et qui convoitent donc les lieux peu policés pour leurs activités antisociales, la communauté des travailleurs de l’immeuble de Prestes Maia est constamment sur le fil. Périodiquement évacué par la contrainte, l’immeuble est le plus souvent regagné par le Mouvement des Travailleurs Sans Toit.