On saura dans les prochains jours si le maintien du déplacement des supporters aura été une erreur. Mais parfois dans le doute, quand les conséquences peuvent être dramatiques, on s’abstient. C’est le principe de précaution.
Mais malheureusement le principe de précaution est ici maintenu dans le flou du libéralisme.
Quand on a d’un coté des relativistes et de l’autre des gens qui paniquent, la confusion aggrave la situation. Car remplir un stade avec des personnes à risque, c’est ouvrir les vannes, et laisser dévaliser les pharmacies en ne laissant aucun équipement de protection pour les personnes fragiles. C’est exposer certains de nos concitoyens.
Les mesures collectives permettent justement la diminution de la panique chez certains, car on se dit que cela est géré et qu’on peut suivre le protocole et tout le monde ira bien. Mais il n’y a pas de protocole ni sur les événements publics ni sur les déplacements.
Si on écoute ceux qui disent que le Covid-19 est moins létal que la grippe saisonnière, moins contagieux que le SRAS alors oui on ne fait pas grand-chose et on vit sa vie en s’attendant à ne pas être entravé dans ses activités.
On a pourtant tendance à oublier que, si la grippe tue, c’est bien parce qu’en partie les français refusent massivement la vaccination. Ce mouvement « anti-vaccin » est d’ailleurs né en Belgique contre une possible obligation de vaccination contre la grippe porcine de 2009.
Aujourd’hui, un français sur trois estime qu’il est plus risqué de se faire vacciner que de mourir d’une maladie virale (grippe, rougeole…). Les « antivax » sont comme les gens ne voulant pas de mesures importantes contre le coronavirus, ils ne pensent qu’à eux, n’ont aucun esprit collectif. Si on est en pleine santé, effectivement on a presque rien à craindre, mais il s’agit de penser aux personnes âgées, aux personnes immunodéprimées car greffées ou traitées contre le cancer ou encore les enfants.
Les arguments relativistes ne sont pas l’apanage de quelques individus sceptiques, mais sont aussi diffusés par la presse ou les responsables politiques même s’ils n’ont alors pas la même substance.
Le Monde diffuse ainsi les chiffres montrant que la létalité et la contagiosité du coronavirus sont bas respectivement par rapport au SRAS de 2003 et la varicelle ou la rougeole, donc pas d’inquiétude.
Ce n’est pas prendre en compte une détection difficile car les symptômes se confondent avec la grippe saisonnière ou même une simple angine. Cela peut aussi bien ne pas se déclarer tout en se transmettant. On a donc un risque plus élevé d’avoir des cas contagieux non pris en charge à bon escient, engendrant des cas ne revenant pas de zone à risque et ne pouvant localiser leur transmetteur. Ça a été le cas du patient n°1 en Italie ou de l’instituteur de l’Oise, malheureusement décédé hier.
Le fait qu’il faille être exposé plus d’une heure à moins d’un mètre d’une personne contaminée pour être contaminé à son tour peut donc être contrebalancé par le fait qu’on sait beaucoup moins discerner quelqu’un qui l’a. C’est ainsi que ça s’est répandu en Italie.
Il y a aussi le temps d’incubation dont on pensait qu’il était de 10 jours au début, puis 14, puis peut-être 21 ou 24. En fait les données qu’on a sur le virus sont fluctuantes, on ne doit donc rien considérer comme acquis.
Lorsque le secrétaire d’État aux Transports Jean-Baptiste Djebbari déclare que renforcer les contrôles au frontières «n’aurait pas beaucoup d’intérêt parce que la circulation du virus ne se fait pas selon les frontières administratives», on a aussi la manifestation d’un relativisme de type pragmatique dans une phrase qui n’a aucun sens. Il s’agit de concilier la bonne marche de l’économie avec la santé publique. Un grand écart qui, si la pandémie se confirme, risque d’être intenable.
Deux mesures sont sur toutes les lèvres, celle de procéder à des contrôles sanitaires à la frontière et celle de fermer les frontières communes à l’Italie.
Les deux sont qualifiées d’inefficaces par les autorités, ce qui est incontestablement vrai et justifié par le temps d’incubation pour la première.
Mais les justifications de la seconde sont extrêmement bancales. On se sert même d’études de comportement du virus du sida pour prédire qu’une fermeture de frontière ne servirait à rien. C’est une sorte de blague ? Le virus du sida n’a d’abord rien à voir dans son mode de transmission avec le coronavirus.
Et quand bien même, ce n’est vrai pour ni l’un ni l’autre de dire :
« Pour que cela soit un petit peu efficace, cela nécessiterait une mise en œuvre très compliquée à réaliser parce que les virus n’ont pas de passeport et peuvent passer les frontières. »
Nous devons ces propos à l’épidémiologiste Antoine Flahault, qui semble caractériser ces virus comme voyageant au gré du vent, hors de toute considération scientifique.
Le coronavirus n’est pas un nuage, il se base sur les humains et les humains peuvent être bloqués par un simple barrage routier. Contrôler les gens pour savoir où ils vont, d’où ils viennent ce n’est pas infaisable.
Les surfaces inanimées ne transportant pas le virus plus de 5 jours en moyenne, il serait envisageable de simplement installer des temps de latence dans la livraison des marchandises.
Mais déjà cela dans une société basée sur le flux-tendu, c’est demander beaucoup pour certains, d’autres le mettent déjà en place à l’échelle de leur entreprise. Encore le libre-arbitre…
Voici le réel argument pour ne pas prendre de mesures de frontières : les intérêts économiques s’entrechoquent avec cette idée.
Pour être correct, il aurait fallu supprimer les vols allant et revenant de Chine dès le début de l’épidémie, et faire de même pour chaque pays présentant des nouveaux cas liés aux mondes des affaires, du tourisme notamment. Cela ne permet pas de stopper la crise mais permet un gain de temps, tout est bon à prendre dans la course contre le virus.
Bloqué dans une gestion libérale, forcément que la société va vers le chaos, car chacun va devoir compenser les manquements de l’État par des précautions personnelles, parfois au détriment des autres.