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Refus de l’hégémonie

La convocation sur l’Ukraine à l’Elysée

Après avoir jeté un pavé dans la mare en assumant la possibilité de l’engagement militaire directe de la France contre la Russie, le Président Emmanuel Macron a reçu jeudi 7 mars 2024 les chefs de partis politiques représentés au Parlement.

Nonobstant le fait qu’il n’y a pas de réelle opposition parlementaire – l’alignement sur l’Otan – et la propagande anti-russe – est total en France-, le chef de l’État entend bien encadrer les choses. Le régime français a besoin d’une nouvelle Union sacrée pour faire la guerre à la Russie, alors il doit s’assurer d’un soutien sans faille des partis, et neutraliser toute possibilité d’opposition démocratique et populaire.

La convocation avait donc pour but de préparer les députés et sénateurs au débat et au vote du 12 mars à l’Assemblée nationale et du 13 mars au Sénat.

« Le Président de la République a demandé au gouvernement de faire devant le Parlement une déclaration en application de l’article 50-1 de la Constitution, relative à l’accord bilatéral de sécurité conclu avec l’Ukraine le 16 février 2024 et à la situation en Ukraine, suivie d’un débat et d’un vote ».

On ne saura rien précisément de cette réunion organisée par le président, qui aurait duré trois heures. Aucun article de fond, ni aucune présentation détaillée n’a été faite par qui que ce soit ; il n’y a absolument aucune transparence démocratique sur le sujet.

Les élus convoqués se sont contentés de descriptions vagues et générales sur le fait qu’il y aurait eu des cartes de montrées, un bilan de la situation militaire compliquée en Ukraine, avec l’idée que la France pourrait intervenir si la Russie approchait Odessa ou Kiev.

Le secret-défense a probablement été de mise. Mais ce qui compte, et qui est systématiquement relayé, c’est le fait qu’Emmanuel Macron n’envisage absolument aucune limite à l’intervention militaire, ni aucune « ligne rouge ».

C’est Fabien Roussel du PCF qui en a dit le plus, et surtout qui a dit l’essentiel. Selon lui, « toutes les forces politiques » sont d’accord sur l’objectif qui est « que nous ne voulons pas que la Russie gagne, que tout doit être fait ». Seulement, ajoute-t-il, « notre seul sujet de divergence, ce sont les moyens que nous y mettons ».

Voilà. Tout le monde est d’accord pour suivre les plans de la superpuissance américaine, qui sous-traite maintenant à l’Union européenne la guerre contre la Russie. La France est le nouveau chef de file de ce bellicisme, avec à sa tête Emmanuel Macron qui ne souffre d’aucune opposition réelle dans son pays.

La situation est d’autant plus idéale pour Emmanuel Macron que les fausses oppositions prétendent en toute hypocrisie avoir des divergences, des inquiétudes.

Fabien Roussel du PCF a dit :

« Je trouve ça extrêmement grave et extrêmement dangereux. C’est ce qui s’appelle l’escalade guerrière comme on en a connu en Europe. »

Jordan Bardella du Rassemblement national a dit :

« Nous sommes en faveur, sur le principe, d’un accord bilatéral avec l’Ukraine, mais il faut placer des lignes rouges. »

Eric Ciotti pour Les Républicains rappelle :

« le soutien total des Républicains à l’Ukraine, à une aide financière et à des équipements militaires. Nous le dirons mardi à l’Assemblée, mais en revanche, j’ai redit notre totale opposition à un engagement de troupes au sol. C’est une position inopportune, irresponsable. »

Pour la France insoumise, Manuel Bompard a joué un peu plus la comédie que les autres :

« Je suis arrivé inquiet, et je suis ressorti encore plus inquiet. »

La secrétaire nationale des « écologistes » Marine Tondelier a dit que :

« C’était une réunion utile et nécessaire. »

Du côté du Parti socialiste avec Olivier Faure, c’est un véritable plébiscite en faveur d’Emmanuel Macron :

« Nous avons besoin de maintenir une pression forte sur Vladimir Poutine, lui dire que nous sommes derrière la résistance ukrainienne et que nous ne la lâcherons pas ».

La bourgeoisie française maitrise parfaitement sa partition et encadre minutieusement la préparation de la guerre directe à la Russie, qui est maintenant l’objectif à l’horizon des prochaines années.

Les pseudo-inquiétudes des uns et des autres sont d’autant plus utiles à Emmanuel Macron qu’il peut s’en servir, inversement, pour se montrer lui « réaliste », ayant accès à telle ou telle information, voyant directement les choses, prenant les responsabilités qu’il faut, rejetant le bal des hypocrites, etc.

Face à la guerre mondiale pour le repartage du monde, il ne s’agit pas de faire dans la demi-mesure. Il n’y a que deux camps : celui du peuple, fermement contre l’Otan et contre la guerre mondiale, donc contre tout soutien au régime ukrainien, et celui de la superpuissance américaine qui utilise la question ukrainienne contre la Russie (et indirectement contre la superpuissance chinoise).

Cela n’a rien d’une nuance, c’est une ligne de démarcation très nette et très claire. Car la France est maintenant impliquée au plus haut point dans la guerre face à la Russie, en préparation d’un affrontement militaire direct.

En effet, le même jour la France organisait une nouvelle réunion de ministres des Affaires étrangères et de ministres de la Défense pour l’offensive contre la Russie.

Là encore, c’est très opaque, mais la presse relaie toutefois quelques informations pour assurer la propagande de guerre.

Vingt-huit pays auraient été représentés, dont l’Ukraine, des États membres de l’Union européenne, les États-Unis et le Canada.

Il y aurait été question de huit chantiers, aux contenus très explicites : munitions, principes de déstockage, cyber, protection de la frontière, protection des États vulnérables, déminage, production industrielle sur place en Ukraine et une « 9e coalition » sur les missiles.

Une « source diplomatique » a résumé la chose à la presse en évoquant un « sursaut collectif et un sentiment d’urgence qu’il faut faire plus, faire mieux, faire autrement pour l’Ukraine ».

Toujours via « source diplomatique », il est expliqué dans la presse une chose également très importante, même fondamentale. Il est question directement de l’opinion publique et du fait que nous sommes actuellement à « un moment de bascule » :

« Il y a un travail d’explication très important sur les conséquences que cela provoque en termes de sécurité, de conséquences en termes de marché agricole, de conséquences migratoires et autres… »

Il n’y a donc aucune « inquiétude » à avoir… on est déjà à l’étape d’après. La guerre à la Russie n’est plus une hypothèse, une « ligne rouge », une « escalade ». C’est une opération en préparation.

La France se prépare à la guerre à la Russie et mène en ce moment (pour le compte des États-Unis) une coalition mondiale contre la Russie.

La seule position à avoir est donc aussi claire que nette : il faut saboter les plans français de guerre à la Russie. Il faut dénoncer non pas l’escalade, mais la préparation concrète et pratique de la guerre contre la Russie.

Pour bien appuyer les choses, ont notera également cette tribune le même jour, jeudi 7 mars 2024, dans le journal Le Monde qui est un des principaux relais de propagande du régime français.

Elle est signée par Dmytro Kuleba, le ministre ukrainien des affaires étrangères, qui appelle à une multiplication de la production d’armes et surtout à la fourniture à l’Ukraine d’obus d’artillerie.

Il va extrêmement loin dans la propagande de guerre et l’appel à un engagement forcené contre la Russie.

« Si aujourd’hui l’Ukraine se trouve dans cette situation, c’est parce que nos alliés en Europe et aux États-Unis ont mis des mois à débattre avant de prendre la décision de nous fournir des munitions d’artillerie en quantité suffisante.

Parce qu’ils n’ont pas accéléré à temps leur production d’armement, qu’ils ont traîné les pieds avant de se procurer du matériel militaire auprès de pays tiers et qu’ils ont exporté des obus produits en Europe vers d’autres régions du monde. »

Il explique également, montrant l’importance du rôle de la France dans la nouvelle phase de la guerre :

« Toutes les capitales européennes doivent comprendre cette vérité simple et dure à la fois, que l’on semble déjà avoir comprise à Paris : soit nos alliés (…) aident pleinement les soldats ukrainiens dans leurs batailles pour défendre les villes et les villages d’Ukraine, soit, un jour, ce sera au tour de vos soldats de sacrifier leurs vies dans des batailles pour défendre les villes et les villages des pays d’Europe centrale d’abord et du reste de l’Europe ensuite ».

La population ukrainienne est donc tenue de tenir quelques années, comme chair à canon, en attendant que l’Europe (pour le compte des États-Unis), avec la France à sa tête, s’arme et se prépare militairement à l’affrontement à la Russie.

Il faut mettre à bas ce plan impérialiste : le socialisme doit renverser la 3e guerre mondiale. C’est cela, la réelle actualité historique !

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Refus de l’hégémonie

Silence complet à gauche sur l’alliance militaire franco-ukrainienne

Il est impossible de se voiler la face. La signature de l’accord France-Ukraine dans le cadre du conflit armé entre l’Ukraine et la Russie amène la France à s’impliquer, dans une logique de s’impliquer toujours davantage.

La France forme des soldats, donne des milliards d’euros, alimente en obus et en obusiers, fournit des drones militaires, etc. Et elle compte étendre son armée, clairement pour une intervention.

Si on était dans les années 1930, cela aurait fait naturellement la Une du Populaire et de l’Humanité, les quotidiens des socialistes et des communistes. Nous assumons la filiation quant à cette Gauche historique.

Quant au reste, quel désastre ! L’alliance France-Ukraine semble ne même pas exister. Cela reflète la réalité sociale de la « gauche » qui en réalité accompagne le capitalisme de l’intérieur, dans une version « sociale ».

Le PCF ne dit rien. La France insoumise ne dit rien. Le NPA est divisé en deux factions conservant ce nom, mais aucun ne dit rien. La Gauche républicaine et socialiste ne dit rien, mais l’une de ses principales figures, Marie-Noëlle Lienemann, dit tout de même que le soutien au régime ukrainien est « indispensable ».

Le Parti socialiste ne dit rien, mais sa tête de liste aux élections européennes de 2024, Raphaël Glucksmann, en a profité pour expliquer que l’Union européenne devait… passer en économie de guerre, pour affronter la Russie d’une manière… ou d’une autre.

« Ce que j’estime, c’est que la France devrait augmenter ses capacités de production. On ne va pas livrer toutes nos munitions, par contre ce qu’on va faire, ce qu’on devrait faire si on avait un leadership courageux qui comprend les enjeux, et bien on devrait aujourd’hui passer en mode économie de guerre sur la production.

On devrait passer des contrats à long terme avec nos industriels, ce qui n’est toujours pas fait. On devrait aller écouter le président tchèque qui dit qu’il y a 800 000 obus disponibles sur le marché international et que donc on pourrait les acheter en commun à l’échelle européenne et les envoyer en Ukraine.

Et on ne le ferait pas simplement par solidarité, ou comme vous l’avez dit par morale, on le ferait pas intelligence et par égoïsme même. Parce qu’on sait que c’est notre intérêt vital.

Et je vais vous dire une chose Apolline de Malherbe : si nous le faisons pas maintenant et que le front ukrainien s’effondre, les questions que nous devrons nous poser dans un an ou dans deux ans seront infiniment plus douloureuses que celles que vous me posez.

Les questions qu’on devra se poser c’est « quel type d’homme on envoie crever en Lettonie », ça sera ça les questions qu’on devra se poser.

Donc si vous voulez vous éviter ces questions, si vous voulez vous éviter que des soldats français aient à crever, et bien il faut aujourd’hui aider ceux qui crèvent pour nous autant que pour eux. »

L’Union communiste libertaire ne dit rien, la CNT ne dit rien, la CNT-AIT ne dit rien, la CNT-SO ne dit rien, la Fédération anarchiste ne dit rien, le PCOF ne dit rien, l’UPML ne dit rien, Unité communiste ne dit rien, le PCRF ne dit rien.

Lutte ouvrière se contente d’une brève sur Twitter pour dénoncer les marchands de canon.

Initiative communiste, l’organe du PRCF, ne dit rien non plus, pas plus que Révolution permanente. C’est intéressant, car Lutte ouvrière, le PRCF et Révolution permanente dénoncent normalement l’Otan et la fuite en avant vers la guerre… Mais c’est de l’incantation, ils n’y croient pas vraiment, ils en parlent une fois par mois, et c’est tout.

En fait, personne ne croit réellement en la guerre. C’est une « possibilité », mais c’est considéré comme nullement inévitable. Le capitalisme aurait tendance à aller à la guerre, cependant on ne marcherait nullement, comme des zombies, à la troisième guerre mondiale de repartage du monde.

Nous, qui sommes seuls fidèles à la Gauche historique, qui avons annoncé le conflit en Ukraine six mois avant son déclenchement, sommes fiers de ne pas ressembler à ces gens intégrés dans le capitalisme, fantasmant sur la « république » ou « l’écriture inclusive », les syndicats ou les LGBT.

Nous portons le drapeau rouge et, tout comme Rosa Luxembourg et Lénine, nous soulignons que la guerre est inéluctable à moins que le Socialisme ne l’empêche, et que de la guerre sinon sortira le Socialisme. Les 5-10 années qui viennent vont être folles – folles de militarisme, folles de dépression capitaliste – et il faut être à leur hauteur!

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Événements significatifs

2024, l’année de tous les défis

Il est courant, quand on espère que le monde change, de considérer que l’année qui vient, ce sera la bonne. Eh bien, on peut encore agir ainsi, sauf que l’année qui vient, ce ne sera pas la bonne, mais la mauvaise. Ce sera la bonne quand même, mais pas par le bon angle, parce que le niveau de conscience au niveau mondial est à zéro. La spectaculaire croissance capitaliste depuis 1989 a anéanti la remise en cause du capitalisme.

C’est donc dans un sentiment de dédain et d’effroi que les Français (et le reste du monde) voient arriver 2024, en sachant bien que, cette fois, il ne sera pas possible de couper à la conflagration. Et comme on connaît les Français, parfaitement définis comme « sceptiques à prétention rationaliste », agissons comme Descartes et réduisons tous les éléments au maximum, pour n’avoir que des vérités certaines. La « méthode » n’est pas bonne, mais peu importe, le monde étant ce qu’il est, ça suffira bien !

1. En janvier 2024, il y a la présidentielle et les législatives à Taiwan. On connaît les tensions sino-américaines au sujet de cette île historiquement chinoise. Le résultat électoral va polariser la crise, qui sera de toutes façons inéluctablement militaire à un moment donné.

2. En mars 2024, il y aura la présidentielle russe. C’est Vladimir Poutine qui va gagner, bien sûr. Et une fois cela fait, il aura l’espace politique pour accentuer la pression militaire contre un régime ukrainien exsangue. L’armée ukrainienne demande… 500 000 soldats en plus, alors que l’offensive estivale a abouti à la conquête de deux fois 10 kilomètres au prix d’un sang versé en masse. La défaite ukrainienne va sceller la fin de toute une initiative occidentale et chambouler la situation, à moins que ce soit l’escalade militaire occidentale et là également la situation va être chamboulée…

3. En novembre 2024, c’est la présidentielle aux Etats-Unis, avec également les législatives. On connaît la bataille interne à ce pays, avec des capitalistes pour écraser la Russie d’abord et la Chine ensuite au nom d’un style libéral LGBT (Joe Biden), et des capitalistes isolationnistes pour se focaliser uniquement sur la Chine (Donald Trump). Les élections, à coups de milliards dépensés dans la campagne, vont refléter un affrontement interne capitaliste majeur, aux conséquences énormes. Dans tous les cas, le Mexique est devenu le premier exportateur aux Etats-Unis, devant la Chine réduite au niveau du Canada. La superpuissance américaine forme sa base nord-américaine.

4. En décembre 2024, c’est la présidentielle au Venezuela. Le régime en place vacille, son initiative de conquête de l’Esequibo aux dépens de la Guyana est sa roue de secours. L’instabilité en Amérique du Sud découlant d’une initiative militaire serait d’une ampleur terrible… Et on y coupera pas alors que l’Argentine a une inflation gigantesque et qu’un anarcho-capitaliste pro-américain, Javier Milei, est désormais président.

5. La guerre à Gaza n’est pas terminée et se prolongera, avec la question du régime qui y sera instauré. Car à part les naïfs de la « gauche » opportuniste fantasmant sur la « résistance palestinienne », on est ici en plein repartage du monde avec Israël, la superpuissance américaine, le Qatar, l’Arabie Saoudite, l’Iran… Qui paie Israël, qui paie le Hamas? Sans ces financements massifs, il ne se passerait rien…

6. Enfin, en juin 2024, il y aura les élections européennes. Pour la France, c’est une élection majeure. On va voir à quel point l’extrême-Droite et la Droite sont fortes et parviennent à devenir la tendance de fond. Il y a ici une catastrophe potentielle qui fait froid dans le dos, et qui apparaît comme inévitable, la Gauche s’étant tué avec la participation gouvernementale des socialistes et les ignobles délires populistes de Jean-Luc Mélenchon et de ses alliés. Cela va être très moche…

On peut rajouter à cette liste le dérèglement climatique, l’inflation, la destruction des zones naturelles par la déforestation pour les récoltes ou bien l’urbanisation, l’augmentation mondiale de la consommation de viande, la consommation massive de drogues… Bref, tout ce « bruit de fond » dont on a désormais conscience, qu’on le veuille ou non.

Et il ne faut pas se leurrer : tous ceux au-dessus de 20 ans sont largement corrompus. Ils veulent essayer de « vivre » en grattant. Il n’y a de l’espoir que par les générations qui vont arriver, celles qui ont moins de 18 ans aujourd’hui, qui forment une page blanche, ne croyant en rien et devant trouver leur place dans un monde hostile.

C’est pour ces nouvelles générations qu’il faut établir les idées, la culture, le programme, le style, pour qu’enfin le 21e siècle apparaisse. L’avenir arrive, mais il va sortir d’une situation macabre, il ne faut avoir aucune illusion à ce sujet, à défaut d’un petit effort avant la crise, il faudra d’énormes efforts à travers la crise. Ce qui va se passer va être profondément baroque.

Alors, sans se laisser contaminer par la putréfaction du vieux monde, il faut soutenir les valeurs de l’avenir, qui grandissent immanquablement car le contraire du passé, c’est l’avenir, le contraire du négatif, le positif. Nous entrons dans une ère de bouleversement, dont il faut lire les contours. Pour les lire, il faut être une force de proposition.

C’est cela le travail que nous menons, avec en perspective l’avenir et non un présent instable, moisi, en déchéance, sans substance. La roue de l’Histoire tourne et nous sommes les premiers de demain, et nous nous nourrissons de l’avenir inévitable qu’est la République Socialiste Mondiale, avec une humanité unifiée, métissée, vivant en harmonie avec la planète comme Biosphère !

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Rapport entre les classes

La guerre à Gaza, reflet du crime mondial

Le monde est un vaste drame, où le sang et les larmes forment une partie assumée du quotidien. Il n’y a pas que les guerres, en effet, il y a les crimes. Le monde est une société du crime. Ce crime est à la fois banalisé et masqué, il forme un arrière-plan diffus. C’est une des raisons pour lesquelles les gens ne se rebellent pas : ils ont peur que tout soit pire ensuite, qu’on se retrouve dans une société à la Mad Max.

Le film Mad Max de 1979 dénonce le crime, mais avec une approche glauque, ouvertement d’extrême-droite, à rebours complet des suites

Naturellement, vu de France, on préfère jeter un voile pudique là-dessus. C’est vrai en occident en général, le temple de la consommation. Cela donne au mieux un mouvement comme « me too », qui tente d’arrondir les angles, à coups de protestation symbolique et ciblée. Il dénonce en effet les « débordements » d’hommes abusant de leur situation.

En réalité, le mal est bien plus diffus et ne consiste pas simplement en des acteurs connus, des producteurs de cinéma. En France, dans plus de 90% des viols commis, l’agresseur fait ainsi partie de l’entourage. C’est sordide et ce sordide se répand, dès lors qu’il n’y a pas de civilisation pour encadrer.

Cela, les gens le sentent bien, et c’est pourquoi ils appréhendent des changements sociaux de grande ampleur. Il y a le risque pour eux d’une retombée dans la barbarie. Si on prend la Jamaïque, par exemple, avec une société où il n’y a pas d’ordre fut-il capitaliste ou militaire, où prime le chaos, la grande majorité des femmes a connu des viols.

Cependant, la tendance aux viols s’approfondit dès que l’ordre dominant tombe dans la décadence. Ainsi, au Pérou, il existe un État, ce n’est pas la Jamaïque. Dans la région de Lima pourtant, la majorité des femmes a été violée ; dans la région de Cuzco, c’est autour de 70%. L’inceste est ici un phénomène largement installé.

Cela, les gens ne le voient pas malheureusement, car ils raisonnent de manière binaire. Ils opposent le présent à une situation pire, sans voir que le présent peut conduire à pire, parce que tout s’effondre. C’est en ce sens que la guerre à Gaza est le reflet du crime mondial dans un monde qui s’effondre. Israël qui bombarde Gaza pour raser tous les bâtiments, quitte à ce qu’il y ait des gens dedans, est le pendant du Hamas qui n’a pas hésité à violer et brûler vif lors de son attaque du 7 octobre 2023.


La germano-israélienne Shani Louk dont les images sordides de l’enlèvement ont fait le tour du monde, et son petit ami mexicain Orión Hernández Radoux également enlevé lors du festival le 7 octobre 2023

Il y a en ce sens beaucoup d’hypocrisie dans l’émotion autour de l’offensive israélienne à Gaza, meurtrière et dans un contexte général de barbarie. Car dans quel monde vit-on, ne le découvre-t-on que parce que c’est la « terre sainte »? Ce qui se passe à Gaza n’a aucune « originalité » et seuls les islamistes et les pseudos-gauchistes vrais antisémites y verront une spécificité « sioniste ».

Prenons la Syrie, juste à côté. La guerre civile a commencé en 2011. Elle continue encore. Combien y a-t-il eu de morts ? Plus de 600 000, avec une majorité de civils. On y retrouve la même substance que la guerre entre Israël et le Hamas : terroriser et tuer d’un côté, terroriser et tuer de l’autre. Il n’est pas besoin de souligner le caractère horrible de la violence pratiquée.

Si on prend la même période, ce nombre de morts est… l’équivalent de celui des homicides au Brésil. Il n’y a pas la guerre civile au Brésil, mais c’est le tiers-monde. La guerre terrorise et tue, le crime terrorise et tue ; la guerre et le crime se partagent à peu près le nombre d’homicides chaque année.

Le taux d’homicides dans le monde, selon l’ONU

La guerre à Gaza n’est somme toute que le reflet de la guerre mondiale contre le peuple, du crime comme monstruosité diffuse dont les masses sont toujours les victimes. Armée israélienne, Hamas, armée américaine, cartels colombiens, armée syrienne, islamistes syriens, cartels mexicains, seigneurs de la guerre de l’État islamique…

Alors on peut s’imaginer qu’on peut former pour se défendre une milice locale, comme les zadistes, les zapatistes, les Kurdes de Syrie avec le Rojava… ou qu’on peut partir loin, pour s’isoler, en se repliant sur sa famille, en mode survivaliste. Rien de tout cela n’a de sens, vraiment. L’humanité doit faire son saut, son bond en avant. Elle n’a plus le choix : on s’en sortira tous, ou personne ne s’en sortira. Le Socialisme est la seule option face à l’étalement de la Barbarie !

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Refus de l’hégémonie

Esequibo : second pas vers l’annexion

Après le résultat triomphal du référendum vénézuélien sur l’Esequibo, le président du Venezuela Nicolas Maduro a présenté une carte. L’Esequibo, actuellement une partie de la Guyana, y est présentée comme faisant partie du Venezuela. Nicolas Maduro a demandé à ce que cette carte soit présente désormais partout : dans les écoles, les universités, les lieux publics, etc.

Le nouvel Etat (au sens régional, mais avec de nombreuses prérogatives décentralisées), bien que virtuel, est concerné par trois décisions de la plus haute importance. Tout d’abord, il a désormais un responsable militaire, Alexis Rodríguez Cabello. Celui-ci est désormais « l’autorité unique » de l’Etat dénomme « Guayana Esequiba ».

Alexis Rodríguez Cabello est un partisan de la première heure de Hugo Chavez, le fondateur du régime « bolivarien » vénézuelien à partir de 1999. Il a été notamment le responsable militaire de la Región Estratégica de Defensa Integral de la capitale Caracas et celui de la Garde d’honneur de la présidence. C’est un fidèle parmi les fidèles et sa nomination est résolument une affirmation de jusqu’auboutisme.

Alexis Rodríguez Cabello votant au référéndum

Alexis Rodríguez Cabello est également depuis 2020 député de l’Etat du bolivar, à la frontière avec l’Esequibo. Et dans une ville à l’est de cet Etat, juste à côté de l’Esequibo, va être mis en place un « Servicio Administrativo de Identificación, Migración y Extranjería (Saime) » afin de recenser les habitants du nouvel Etat et de leur fournir des cartes d’identité vénézuéliennes. C’est là un prélude à l’annexion assez clair.

La carte officielle avec le nouvel Etat intégré au Venezuela

Enfin, il a été annoncé la mise en place de la « PDVSA Esequibo », section locale de la PVDSA nationale (Petróleos de Venezuela SA). Elle fournira les licences pour l’exploitation du pétrole, du gaz et des mines (d’or et de bauxite). C’est là une ligne d’affrontement direct avec les entreprises, surtout occidentales mais pas seulement, qui ont investi et se sont mis en rapport étroit avec la Guyana.

Il est intéressant de noter également que la superpuissance américaine avait tout récemment supprimé des sanctions à l’égard du Venezuela dans le domaine pétrolier. Etait-ce une tentative américaine pour freiner le Venezuela dans son expansionnisme? En tout cas, deux choses découlent immédiatement de la décision vénézuélienne.

Le Brésil a ainsi envoyé des véhicules blindés, afin de sécuriser sa frontière. Le spectre d’une intervention est là. Comme il y a la jungle partout dans la zone toutefois, la seconde chose est la plus importante. Il est en effet parlé de plus en plus d’une intervention américaine.

Comme l’offensive du Venezuela passerait forcément par les côtes, c’est par un porte-avions que la superpuissance américaine réagirait le plus facilement.

Cette intervention est naturellement souhaitée par le président de la Guyana, Irfaan Ali, qui parle de « menace imminente ». Il a organisé une manifestation le 5 décembre 2023 dans la capitale, dans le stade national. S’il a qualifié de « bouffonnerie » le référendum au Venezuela, il sait que son pays de 800 000 habitants ne fait pas le poids militairement et qu’une épée de Damoclès pèse sur lui.

On est ici dans le schéma classique de la bataille pour le repartage du monde. Le capitalisme en crise provoque, à l’échelle mondiale, les affrontements pour se maintenir et s’étendre. L’onde de choc qui va être ici provoqué sera d’une immense ampleur, de par son arrière-plan qu’est l’affrontement entre les superpuissances américaine et chinoise, les principaux ennemis des peuples du monde.

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Refus de l’hégémonie

Du tapón del Darién à la guerre pour l’Esequibo

Il n’y a pas de route à la frontière entre le Panama et la Colombie, seulement une jungle marécageuse très dense, à cheval entre les deux pays. On appelle la zone le tapón del Darién, le bouchon du Darien.

Or, les Latino-américains veulent quitter leur pays, c’est une tendance générale. Et pour beaucoup, la voie qui mène aux États-Unis ou bien au Canada, passe par le bouchon, qu’ils franchissent à pied, avec leurs baluchons. 130 000 migrants ont donc traversé la jungle en 2021, contre 11 000 pour toute la décennie précédente. Ils ont été 250 000 en 2022 et 500 000 en 2023.

Le parcours, d’une soixantaine de kilomètres, prend si on survit une semaine environ, avec des extrêmes de deux jours et demi et 25 jours, selon les moyens de payer les passeurs. Les mafias contrôlent en effet totalement la zone, et « taxent », vendent à manger ou à boire, volent, violent et tuent comme bon leur semble.

Il y a également désormais même des migrants provenant de Chine, d’Afghanistan, du Bangladesh. Tel est le tiers-monde dont profite l’occident. L’épisode migratoire du tapón del Darién est l’un des chapitres les plus odieux d’un 21e siècle déjà rempli de massacres et d’horreurs.

De ces migrants, un quart sont des mineurs, surtout des enfants ; un peu plus de la moitié sont des Vénézuéliens fuyant leur pays. Car le Venezuela ne se distingue pas des autres pays, en rien ; c’est la même violence endémique, le règne de l’arbitraire, le patriarcat criminel généralisé, l’exploitation par une bourgeoisie repliée sur elle-même et s’accaparant l’administration et l’armée.

Plusieurs millions de Vénézuéliens ont ainsi émigré depuis vingt ans, et c’est en ce sens qu’il faut comprendre le référendum sur l’Esequibo, prétexte à une intense mobilisation nationaliste. Le Venezuela compte bien annexer cette partie de la Guyana, et l’orchestration du référendum a obéi à tous les codes de la démagogie.

Le président du Venezuela Nicolás Maduro, lors du référendum

La région de l’Esequibo est historiquement il est vrai vénézuélienne, cependant l’initiative du Venezuela s’inscrit dans la bataille pour le repartage du monde. L’affrontement sino-américain ouvert, produit de la crise commencée en 2020 qui a débuté par le conflit en Ukraine, commence à s’étaler au monde entier et l’Amérique du Sud n’y coupera pas.

Les résultats du référendum sont sans appel, avec plus de 95% de « oui » pour chacune des cinq questions, qui fournissent au régime toute légitimité pour récupérer la région « par tous les moyens ».

Le nombre de votants est difficile à évaluer ; le régime parle de 10 millions de votants, soit à peu près une participation de 50% dans le pays (qui a 32 millions d’habitants officiellement, sans doute bien moins), l’opposition dit qu’avec cinq questions il n’y a eu en fait 2 millions de votants.

Cela ne change rien au fond, car le régime bureaucratique, pour se maintenir, doit aller au conflit. Un conflit très difficile d’ailleurs, car l’Esequibo, c’est 160 000 km2 de jungle. Une offensive vénézuélienne demanderait de passer par les côtes et de directement affronter l’armée de la Guyana. Un tel acte serait explosif au niveau mondial.

Mais il y a le pétrole, il y a le régime du Venezuela en crise, et il y a la tendance à la guerre qui l’emporte depuis 2020 et l’ouverture de la crise mondiale. Le nationalisme et la guerre s’étendent immanquablement.

Les choses ne peuvent qu’aller relativement vite, c’est une question de semaines ou de mois, sans quoi le régime perdrait ses acquis nationalistes. Et l’ouverture d’une guerre ajouterait un continent au conflit sino-américain mondial, ouvrant encore davantage la boîte de Pandore de la guerre mondiale.

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Refus de l’hégémonie

Ni Hamas, ni Israël : ni Pékin, ni Washington

On croit mourir pour la patrie ; on meurt pour des industriels : c’est une vérité qu’on sait bien vraie, lorsqu’on est loin des nationalismes et de l’aveuglement causé par le sang versé. L’affrontement entre le Hamas et Israël le montre bien ; plus on est loin de tout ça, plus on se dit que c’est de la folie, de la folie furieuse, de la folie sanglante.

Oui mais, diront avec justesse les soutiens d’Israël, le Hamas a causé des massacres dont le caractère ignoble dépasse l’entendement. Impossible de ne pas vouloir venger des femmes et des enfants coupés en morceaux et assassinés, et encore est-ce là un euphémisme pour ne pas décrire les horreurs commises.

Oui mais, diront en étant dans le vrai les amis des Palestiniens, en quoi la population de Gaza bombardée serait-elle responsable des agissements du Hamas ? En quoi les enfants, qui forment une bonne proportion des 10 000 morts (au moins) à Gaza, sont-ils coupables ? En quoi la destruction de Gaza rattrape-t-elle les 1300 morts israéliens et ramène-t-elle les 300 otages pris par le Hamas ?

Eh oui, tout cela est vrai, et les Russes et les Ukrainiens pourraient dire des choses tout à fait similaires. Et tout cela est irrattrapable, car c’est l’engrenage, un engrenage qui dépasse bien les Palestiniens et les Israéliens, les Ukrainiens et les Russes.

Car les Palestiniens sont sous la coupe du Hamas, le Hamas est financé par le Qatar et armé par l’Iran, deux pays en pleine logique expansionniste et en phase avec la Chine qui veut remettre en cause l’ordre mondial, à son profit bien sûr. Quant aux Israéliens, ils servent de jouet à la politique américaine dans la région, d’où viendraient sinon tout cet argent et cet armement fournis ?

Nikolay Beliaïev, Les heureux. 1949

L’Ukraine est de son côté devenue une colonie américaine pour mener la guerre à la Russie, et cette dernière est passée sous la coupe chinoise. Même si l’Ukraine et la Russie voulaient s’arrêter, ils ne le pourraient pas, pris dans l’élan d’une mécanique inexorable happant les pays les uns après les autres. Il faut d’ailleurs s’attendre à ce que le Venezuela soit le prochain foyer de tension ?

En vérité, l’affrontement Hamas-Israël, celui Ukraine-Russie, et tous ceux à venir, ne sont rien d’autre, dans leur substance, qu’un aspect du grand affrontement mondial entre la superpuissance américaine et son challenger, la superpuissance chinoise.

Croire qu’on défend les Palestiniens en parlant de la Palestine ou qu’on défend les Israéliens en parlant d’Israël est une fiction : dans les faits, on rentre dans un agenda, celui des superpuissances.

Il n’est bien entendu pas facile de se séparer d’un tel agenda, d’agir en toute indépendance. Mais c’est un préalable, qui doit être conscient, assumé, affirmé. Sans cela, on meurt pour bien autre chose que ce pour quoi on croit mourir. Comme les paroles d’Anatole France, écrites dans L’Humanité en 1922, sonnent justes un siècle après !

« Ceux qui moururent dans cette guerre [de 1914-1918] ne surent pas pourquoi ils mouraient.

Il en est de même dans toutes les guerres. Mais non pas au même degré.

Ceux qui tombèrent à Jemmapes [dans les rangs de la République française en 1792 contre l’invasion de la monarchie autrichienne] ne se trompaient pas à ce point sur la cause à laquelle ils se dévouaient. Cette fois, l’ignorance des victimes est tragique. On croit mourir pour la patrie ; on meurt pour des industriels. »

Heureusement, on peut être certain que la majorité des Français a compris cela et voit d’un très mauvais œil les agitations des uns et des autres afin d’embrigader dans une démarche nihiliste. On reproche souvent aux Français d’être passifs, avec raison, mais cette passivité fondé sur le scepticisme rationaliste à la française a parfois son bon.

Il ne faut pas se laisser piéger par les romantismes irrationalistes faisant qu’on se retrouve à la traîne d’aventures nationalistes dont la seule issue est la catastrophe. Le nationalisme, c’est la guerre.

Et il faut lui opposer le romantisme du Socialisme, le romantisme de la paix correspondant avec le progrès, le collectivisme avec l’épanouissement personnel… L’objectif véritable, c’est la République socialiste mondiale, c’est le phare qui doit guider toute action et tout ce qui ne s’accorde pas avec ça doit être rejeté !

Alexandre Samokhvalov, Sergueï Kirov revoit la parade athlétique, 1935
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Refus de l’hégémonie

Le Venezuela entend annexer une partie de la Guyana

La crise a ouvert la boîte de Pandore de la guerre pour le repartage du monde ; aucune puissance n’y échappe, même si à l’arrière-plan tout dépend de la confrontation sino-américaine. L’Amérique latine a échappé jusque-là à une explosion véritable, même s’il est vrai qu’elle connaît une implosion un peu partout, depuis la hausse gigantesque des prix en Argentine jusqu’aux massacres par les cartels au Mexique.

L’initiative du Venezuela fait toutefois passer un cap, puisqu’on est dans un processus d’annexion. S’il a historiquement tout à fait un sens, le contexte est bien évidemment celui du repartage du monde. Voici comment y voir clair.

Voici trois drapeaux nationaux. Ce sont les drapeaux respectivement du Venezuela, de la Colombie et de l’Équateur. Comme on le voit, ils sont très proches.

La raison de cette similitude tient au fait qu’au début du 19e siècle, ils relevaient tous de ce qu’on appelle désormais la « Grande Colombie ». A l’époque cela s’appelait la « République de Colombie ».

Son président était Simón Bolívar et son vice-président Francisco de Paula Santander. On peut pratiquement dire qu’en Amérique latine, si vous n’êtes pas marxiste (dans la ligne du Péruvien Mariatégui qui dénonce le féodalisme latinoaméricain allié au capitalisme étranger), vous êtes soit pour les libertés et le progrès, donc d’orientation libérale (à la Santander), soit pour la centralisation et les grands projets populistes et par la force (à la Bolivar).

Le territoire de la République de Colombie était vaste ; il concernait non seulement donc la Colombie, l’Équateur et le Venezuela, mais également le Panama (qui fut une invention des États-Unis pour contrôler le canal du même nom), une partie du Pérou, une partie du Brésil, et la partie ouest de la Guyana.

La Guyana est un pays anglophone lié au Royaume-Uni ; c’était la « Guyane britannique », à sa droite on trouve le Surinam et à droite du Surinam la Guyane française.

La Guyane britannique avait conquis son territoire oriental sur le Venezuela en 1899. Depuis, le Venezuela exige de le récupérer ; c’est la partie verte sur la carte suivante ; une partie de la Guyana est également exigé par le Surinam, c’est la partie hachurée sur la carte.

Autant dire que la partie réclamée par le Venezuela, dénommée Esequibo, est énorme ; avec 159 500 km2, elle représente les 7 dixièmes de la Guyana.

Le Venezuela a d’ailleurs officialisé en 2015 la mise en place d’un État numéro 25, appelé Esequibo, et en décembre 2023 il y aura un référendum à ce sujet. Le président du Venzuela chauffe le pays à blanc, expliquant que tant les partisans de Chavez (l’ancien président populiste) que ses opposants doivent être unis pour la reconquête.

Le référendum, qui n’est que consultatif, est en fait une opération de guerre psychologique pour mobiliser en faveur de la guerre. Si effectivement, la région relève bien du Venezuela, la démarche rentre totalement dans la bataille pour le repartage du monde.

Il n’existe pas de cause « juste » sans indépendance par rapport à la bataille pour le repartage du monde, et là on est plein dedans avec un Venezuela lié à la Russie et la Chine.

Les questions du référendum seront les suivantes :

1) Acceptez-vous de rejeter par tous les moyens, conformément à la loi, la ligne frauduleusement imposée par la sentence arbitrale de Paris de 1899, qui vise à nous priver de notre Guyane Essequibo ?

2) Soutenez-vous l’Accord de Genève de 1966 comme seul instrument juridique valable pour parvenir à une solution pratique et satisfaisante pour le Venezuela et la Guyane concernant la controverse sur le territoire d’Essequibo ?

3) Êtes-vous d’accord avec la position historique du Venezuela de ne pas reconnaître la compétence de la Cour Internationale de Justice pour résoudre la controverse territoriale quant à l’Essequibo ?

4) Acceptez-vous de vous opposer, par tous les moyens légaux, à la prétention de la Guyane de disposer unilatéralement d’une mer aux frontières en cours de délimitation, illégalement et en violation du droit international ?

5) Êtes-vous d’accord avec la création de l’État d’Essequibo et le développement d’un plan accéléré de prise en charge globale de la population actuelle et future de ce territoire qui comprend, entre autres, l’octroi de la citoyenneté et d’une carte d’identité vénézuélienne, conformément à l’Accord de Genève et le droit international, incorporant par conséquent ledit État sur la carte du territoire vénézuélien ?

Ces questions ne disent pas qu’il faut mener la guerre, mais tout ce qui y est dit l’implique. C’est un pas de plus dans le conflit généralisé pour le repartage du monde.

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Refus de l’hégémonie

Automne 2023 : la mort du Karabagh arménien

L’agonie tragique du Karabagh arménien a pris fin le 20 septembre 2023, presque 9 mois jour pour jour après la mise en place d’un blocus militaire total du régime azerbaïdjanais sur ce qui restait de territoire aux mains des séparatistes. Selon les autorités arméniennes du Karabagh, unilatéralement appelé « République d’Artsakh », ce blocus criminel a causé la mort de 213 personnes, majoritairement des civils, dont notamment des enfants, morts des suites de l’affaiblissement ou de manques de soin, comme conséquence directe du blocus.

Durant 9 mois, l’armée azerbaïdjanaise a entretenu un état de siège meurtrier, en verrouillant la seule route d’accès encore ouverte vers l’Arménie, dans l’indifférence totale de l’armée russe censée la garantir, en asséchant le réservoir qui alimentait la principale centrale électrique, fonctionnant de part une turbine hydroélectrique, et en restreignant à leur strict minimum les entrées de marchandises dans le Karabagh arménien.

Les pénuries se sont très rapidement installées et durant des mois et des mois la population civile a subi un effondrement des services publics, notamment d’éducation et de soin, et un rationnement très strict de sa consommation alimentaire et énergétique.

Le sentiment d’abandon et d’étranglement a progressivement gagné la population, alors que jour après jour, les provocations militaires de l’armée azerbaïdjanaise se multipliaient de manière toujours plus menaçante.

La partie était en fait perdue depuis l’écrasante défaite arménienne en novembre 2020. Depuis lors, les autorités arméniennes n’ont fait que se précipiter toujours plus loin dans une suicidaire fuite en avant, prises au piège dans l’étau de la bataille pour le repartage du monde, dont le peuple arménien est ici une victime malheureuse.

Pour le régime azerbaïdjanais, cela n’est pas encore suffisant toutefois : sa seule issue, de par sa nature même, est nécessairement la fuite en avant génocidaire : tout le régime d’Ilham Alyiev s’est littéralement construit sur la promotion d’un nationalisme raciste anti-arménien tourné vers la « reconquête du Karabagh (Qarabagh en turc azéri) et sur l’écrasement de l’État arménien.

Devant ses partenaires internationaux, le régime peut se payer le luxe de promettre officiellement d’intégrer pacifiquement les Arméniens du Karabagh à « l’État multinational » azerbaïdjanais. Mais il le fait en affirmant qu’il poursuivra et condamnera tous les « terroristes » ayant eu maille à partir avec les autorités séparatistes. C’est-à-dire en soi potentiellement l’ensemble de la population arménienne du Karabagh.

De toute façon, il suffit de suivre, ne serait-ce que quelques minutes, n’importe quelle chaîne ou média d’information lié au régime pour se faire une idée de ce que valent ces engagements, au vu de la propagande nationaliste, brutalement militariste, jouant sur la fibre du pantouranisme, pour subjuguer les masses azerbaïdjanaise dans la nasse d’une haine délirante contre les Arméniens.

De leur côté, les autorités arméniennes du Karabagh comme de l’État arménien en tant que tel n’ont rien été capable de faire en direction des masses turques, d’Azerbaïdjan ou même de Turquie. Tenues à bout de bras par la Russie, elles ont même encore jugé bon de jeter leurs dernières maigres forces pour tenter de se dégager de l’emprise de Moscou en se jetant aux pieds de l’Occident.

Il a été par exemple hallucinant de voir au début du mois de septembre le gouvernement arménien annoncer la programmation de manœuvres avec (mais c’est-à-dire sous le commandement de) l’armée des États-Unis, impliquant 175 militaires arméniens et 85 militaires américains, dans le cadre d’une opération de 10 jours, modeste mais significative, appelée Eagle Partner.

Cela au même moment où l’épouse de Nikol Pashinyan, Premier ministre arménien, a été vue à Kiev, où elle a participé a une rencontre des « premières dames et premiers gentlemen » soutenant l’Ukraine, organisées par la femme du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, alors que son mari prononçait un discours inédit déclarant très ouvertement que l’Arménie devait diversifier ses partenaires stratégiques et mettre fin à la dépendance envers Moscou

Ce rapprochement avec l’Occident, et notamment les États-Unis, est un alignement complet sur les « conseils » de American Armenian National Security Institute (AANSI), dirigé par le général, à la retraite, MacCarley et Appo Jabarian, dirigeant de médias arméniens à Los Angeles, qui a été très actif auprès des autorités dirigeantes de l’État arménien depuis le début du blocus azerbaïdjanais.

C’est d’ailleurs en plein déroulement de l’opération Eagle Partner que l’Azerbaïdjan a déclenché son attaque finale, forcément avec le feu vert de Moscou, qui n’a pas levé le petit doigt bien sûr. Exactement comme en 2020, c’est par le Karabagh que Moscou puni les autorités arméniennes.

C’est ainsi que meurt tragiquement la nation arménienne d’Azerbaïdjan, dont le Karabagh arménien était le dernier noyau. Nous avons été les seuls à documenter ce conflit, sur la base d’une juste compréhension de la période soviétique, et en particulier celle de la Grande Révolution, puis celle de l’URSS conduite par Joseph Staline, comme ayant été la seule expérience démocratique et unitaire, malgré des insuffisances, qui a permis l’existence et le développement de la nation arménienne d’Azerbaïdjan.

Il est en soi significatif que la clique des Alyev s’est installé au pouvoir dès les années 1960, profitant du révisionnisme pour tisser sa toile empoisonnée du nationalisme pantouranien et étrangler implacablement les Arméniens, jusqu’aux massacres génocidaires de Soumgaït et de Bakou, et jusqu’à la guerre de 2020 et la fin définitive de la nation arménienne d’Azerbaïdjan en septembre 2023.

On ne peut que sentir le cœur se soulever de voir l’immonde Ilham Alyiev, ce traitre à l’Azerbaïdjan démocratique, à genou embraser le drapeau des nationalistes azerbaïdjanais dans la ville de Stepanakert, débaptisée « Xanxendi » selon une fantaisiste toponymie raciste.

Rien que cet acte résume à quel point l’Azerbaïdjan est offensé dans son histoire par les pantouraniens comme Alyev : comme nous l’avons dit et répété, Stepanakert porte le nom du plus grand révolutionnaire d’Azerbaïdjan, Stepan Chahoumian, le « Lénine du Caucase », héros de la Commune de Bakou (1917-1918), que le réalisateur soviétique de nationalité géorgienne, Nikolaï Chenguelaia (1903-1943), a notamment célébré dans un film qui a fait sa notoriété : Les 26 commissaires.

On se demande qui peut parler sérieusement des peuples la Transcaucasie sans connaître justement les œuvres de ce réalisateur, dont les films illustrent si puissamment toute la charge démocratique de cette époque. Le film Elisso par exemple, aborde très justement la tragédie de la déportation meurtrière des Tcherkesses du Caucase en 1864, événement dont la brutalité ouvre dans le Caucase l’ère des impérialismes, dont le génocide des Arméniens en 1915 sera le paroxysme, mais non la fin.

En effet, sorti de la période révolutionnaire et stalinienne de l’URSS, l’histoire de la Transcaucasie comme proie des impérialismes se poursuit à nouveau, et se poursuivra aussi longtemps que ne se lèvera pas une nouvelle étoile rouge de la Révolution, balayant les magouilles impérialistes et les régimes nationalistes de la Caspienne à la mer Noire.

Et cela, il sera impossible de le faire sans les femmes. Qui connaît les Arméniens et leur mobilisation sait à quel point, y compris en France, l’engagement des femmes est déterminant, structurant, à la base même de toute organisation. En France, les mobilisations sont très largement organisées, structurées, élancées par des femmes, qui vont ensuite chercher des hommes pour exprimer, se mettre en avant, parler ou prononcer les discours.

De même, en Arménie et spécifiquement au Karabagh, les femmes ont tenu le pays. Pour prendre un exemple, n’importe qui connaissant Stepanakert et son marché a forcément discuté avec les femmes qui préparaient les succulents Jingalov hats, cette spécialité typique des Arméniens du Karabagh, dont les recettes sont l’objet de discussion effrénée et d’échanges enjouée entre familles, les femmes tenant les ficelles et le haut de la scène sur le sujet. On avait là un aspect significatif dont le pittoresque exprimait de manière touchante les ressorts de la psychologie des Arméniens du Karabagh en tant que peuple.

Ce sont aussi largement les femmes qui se sont impliquées dans la pacification du pays après la guerre de séparation avec l’Azerbaïdjan, s’occupant des enfants et des nombreux mutilés de guerre et surtout des innombrables blessés par les mines, très souvent encore les enfants. Le Karabagh reste un des endroits les plus minés au monde, et ce sont des femmes qui se sont formées pour identifier les zones dangereuses, les isoler et désamorcer petit à petit les engins une fois ceux-ci prudemment localisés.

Le Karabagh arménien a existé et tenu de manière objective par les femmes et leur engagement. Mais celles-ci n’étaient pas au poste de commande, leur vision du monde n’a jamais pu affronter celles des nationalistes qui tenaient les institutions et le pouvoir, et qui ont perdu le pays au bout du compte.

Sans participation des masses au pouvoir, sans femmes au poste de commande, rien ne tient, rien ne peut exister. Le Karabagh arménien est mort sous les coups des nationalistes pan-turcs criminels, qui paieront pour leurs crimes devant l’Histoire. Mais il est mort aussi de ne pas avoir su exister comme nation authentiquement populaire et démocratique. Il est mort de s’être laissé intoxiqué à ses propres illusions nationalistes, il est mort de s’être vendu aux uniformes bellicistes des nationalistes, qui ont infesté son imaginaire et sa culture en le coupant de ses autres peuples-frères du Caucase au lieu de cultiver les gigantesques acquis de l’expérience soviétique et le doux sourire de Nina (jouée par l’actrice Natalia Varleï) dans le film La prisonnière du Caucase, à la valeur si suggestive pour qui regarde le Caucase et ses peuples avec le cœur.

Voici donc la situation maintenant que la nation arménienne d’Azerbaïdjan a été liquidée :

  • La Russie a envoyé un message clair aux autorités arméniennes : l’Arménie sera écrasée par l’Azerbaïdjan sans que Moscou ne bouge si les Arméniens ne reviennent pas immédiatement et complètement dans l’orbite russe. Tout rapprochement avec l’Occident, et notamment avec les États-Unis sera vu comme une provocation, avec l’idée aussi que l’Occident n’interviendra pas de toute façon en faveur de l’Arménie.
  • L’Azerbaïdjan a satisfait une partie importante de ses objectifs, profitant du rapprochement de l’Arménie avec l’Occident pour intervenir de manière écrasante avec l’assentiment de Moscou au Karabagh, et cela avant que l’hiver ne transforme le blocus arménien en catastrophe humanitaire. Car c’est là ce sur quoi l’Arménie comptait pour prendre prétexte à une intervention humanitaire de l’Union européenne, et notamment de la France, avec la bénédiction de Washington, qui se serait ainsi implantée dans la région au détriment de Moscou. Le coup est stratégiquement une leçon d’opportunisme, puisque Bakou réussi à occuper un Karabagh vidé sans violence directe de sa population civile, en se débarrassant de Moscou et en empêchant les Occidentaux éventuellement d’y prendre pied, tout en étant soutenu militairement et économiquement par l’Occident et ses alliés, notamment l’État d’Israël.
  • L’Occident échoue a prendre pied dans la région, à l’exception relative des États-Unis, mais continue à entretenir une pression sur l’Azerbaïdjan et indirectement sur la Turquie afin de clarifier de manière conflictuelle les divergences d’intérêts entre ces États et l’Occident sous hégémonie américaine, dans la perspective du conflit gréco-turc qui est la ligne de mire occidentale dans le secteur. La seule place de l’Arménie dans ce dispositif est de ne pas être un complet satellite de Moscou et de rester au maximum possible un coin dans l’expansion turco-azérie, au moindre coût pour les Occidentaux.
  • L’Iran dévolue à l’Arménie finalement le même rôle stratégique de coin à l’expansion turco-azérie, à laquelle elle s’oppose pour d’autres raisons. Pour l’Iran, la ligne rouge est la question du Syunik, qui s’ouvre directement désormais, c’est-à-dire la revendication de l’Azerbaïdjan à ouvrir a minima un corridor à travers cette région arménienne vers son enclave du Nakhitchevan, afin de se relier quasiment directement à la Turquie, voire à annexer cette région, peuplée de 100 000 habitants, selon un scénario de l’étranglement identique à celui du Karabagh. Toutefois, l’Iran a décidé d’ouvrir en octobre 2022 un consulat général, inauguré par Hossein Amir-Abdollahian, le ministre des affaires étrangères en personne, à Kapan exactement sur la route imaginée de ce futur « corridor » par le régime d’Azerbaïdjan. En alternative à celle-ci, l’Iran a même proposée que le « corridor » soit construit sous son contrôle, en passant par le territoire de l’Iran et non de l’Arménie, ce qui permettrait à l’Iran à la fois de garantir le rôle de glacis sacrificiel à l’Arménie, tout en contrôlant directement les échanges turco-azéris.

Pour ce qui est de la France, à part s’aligner sur les États-Unis en soutenant l’Arménie de par son propre appareil de propagande orientaliste, autant dire qu’elle est inexistante. Le régime arménien compte, ou comptait, un peu quand même sur son engagement, dans le cadre de l’Union européenne, au moins pour une intervention humanitaire au Karabagh, qui n’aura pas lieu désormais.

Mais de toute façon, l’empressement français est très relatif. On n’a même pas vu ne serait-ce que quelques propositions d’accueil ou d’envoi d’une aide humanitaire sérieuse pour les plus de 100 000 réfugiés du Karabagh. On se dit tout de même qu’il est bien loin le temps du romantisme du Moussa Dag.

Mais qui, même dans la Gauche française, comprend sérieusement cette question ? Qui l’a sérieusement étudié, et publié des analyses démocratiques sur ce sujet ?

Par contre, la France a promis une aide militaire, dans l’opacité la plus totale, puisque le conflit gréco-turc, que le régime de France a clairement en ligne de mire, n’est pas encore ouvert. À ce stade, il s’agit encore de poser des jalons, mais des jalons dans l’escalade. L’Arménie est écrasée au Karabagh pour les intérêts de la Russie ? Préparons la à un nouvel écrasement, cette fois pour les intérêts de l’Occident.

Voilà la proposition de l’appareil militaro-industriel de l’État bourgeois en France à l’Arménie.

La tâche de la Gauche en France est d’organiser la vengeance des masses arméniennes du Karabagh, en organisant les masses françaises, notamment turques et arméniennes, sur une base démocratique dénonçant l’étau des haines nationalistes, terreau des guerres impérialistes de repartage du monde qui embrassent le Caucase et étranglent les peuples, en Ukraine, en Arménie, en Palestine… et bientôt encore ailleurs aussi longtemps que les masses ne lèveront pas le drapeau rouge.

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Refus de l’hégémonie

Sahra Wagenknecht et l’économie de guerre allemande

La démarche de Sahra Wagenknecht en Allemagne a ceci de pertinent qu’elle se confronte ouvertement avec la marche à la guerre des deux superpuissances, américaine et chinoise.

Il faut bien comprendre qu’économiquement, la première victime du conflit militaire Russie-Ukraine du côté des pays riches est l’Allemagne, son satellite autrichien y compris. Toutes les économies des principales puissances ont été torpillées par la crise commencée en 2020. Mais l’initiative russe a fait de l’Allemagne un maillon faible, comme celle-ci s’est alignée sur la superpuissance américaine.

Sahra Wagenknecht a indubitablement compris que les masses allemandes allaient protester contre la situation et que le grand risque était celui d’une situation comme celle des années 1930, où c’est le nationalisme qui l’emporte. C’est le cas en Autriche, où la Gauche a acquis une position très marquée contre le capitalisme, mais reste dans l’ombre d’une extrême-Droite assumant d’être contre la guerre à la Russie.

Sa ligne est donc de former un mouvement de masse, afin de bloquer l’extrême-Droite et de permettre une initiative de masse sur une base sociale.

« Ses propres intérêts et la paix au lieu de la fidélité vassalisée et la confrontation »

Voici un long extrait du document d’analyse proposée par le mouvement « Aufstehen » (se lever, se soulever) lancé par Sahra Wagenknecht. Ce document fait partie des éléments constitutifs du parti qu’elle met en place fin octobre 2023.

On y trouve des points essentiels de la vision de Sahra Wagenknecht sur la guerre et la situation allemande.

« L’espoir de nombreux électeurs qu’un gouvernement dans lequel davantage de partis de gauche seraient représentés, et qui remplacerait ainsi le gouvernement conservateur en tant que représentant de l’élite, s’est rapidement évanoui.

Depuis le début de la guerre [entre la Russie et l’Ukraine], le gouvernement de coalition, contrairement au reste du monde, a complètement mis de côté les intérêts nationaux par rapport au capital américain et a déguisé moralement son action en opération d’aide à l’Ukraine.

Au lieu d’œuvrer dès le début à une solution diplomatique (le début remonte à 2014 au plus tard), des armes et de l’argent sont fournis sans cesse.

Le chancelier [social-démocrate Olaf] Scholz a amorcé un tournant. Aujourd’hui, c’est la confrontation qui remplace la détente.

La guerre actuelle a été déclenchée par la Russie. Si on veut y mettre fin, on ne doit pas mettre de côté ce qui a précédé.

En toute allégeance aux États-Unis et à nos dépens, la coalition, avec de prétendus objectifs moraux, vise uniquement à écraser la Russie ([référence aux propos de la ministre des affaires étrangères, écologiste, Annalena] Baerbock) et, si possible, à parvenir à un changement de gouvernement dans ce pays.

Surtout, les sanctions et l’embargo pétrolier ont amené notre économie au bord de l’effondrement dans de nombreux domaines et déclenché une vague sans précédent de « fierté coupable » ([l’expert du proche et moyen-orient Michael] Lüders = aveu d’actes répréhensibles contre la Russie avant la guerre).

Ceux qui sont au pouvoir parlent ainsi toujours sous la forme du « nous » et exigent que nous, les contribuables, acceptions la réduction de notre propre « prospérité » par solidarité avec l’Ukraine. Une majorité est pourtant depuis longtemps opposée au prolongement d’un soutien militaire.

Ces sanctions visaient à priver la Russie de sa base financière, même si les importations de pétrole n’ont pas encore été sanctionnées. Dans une obéissance prématurée, [le ministre de l’économie, écologiste, Robert] Habeck les a arrêtés, causant d’énormes dégâts à notre économie.

En tant que société, nous sommes simplement accaparés et, selon lui, nous devons supporter les difficultés.

Le suicide économique et social dû à une augmentation incommensurable des coûts n’a jusqu’à présent fait que prolonger les morts des deux côtés du front dans la guerre injustifiée de la Russie contre l’Ukraine, mais a causé bien moins de dégâts à l’économie russe qu’à la nôtre.

Mais « nous sommes les bons » ! La propagande de guerre s’accompagne d’une autoglorification morale et d’une perte du sens des réalités.

Bush, Reagan, Clinton et Obama ont mené des guerres comme étant du « bon côté ». C’est pourquoi les sanctions n’ont même jamais été ne serait-ce qu’envisagées.

Ainsi, de l’accord de coalition, peu a été mis en œuvre. « Oser faire plus de progrès », tel est le titre du document de 178 pages, empruntant évidemment à la déclaration gouvernementale de Willy Brandt en 1969, dont le slogan était « Oser plus de démocratie ».

A quoi ressemblent ces progrès ?

Avec le début de la guerre en Ukraine, notre économie est entrée dans le déclin.

L’interdiction d’importer du pétrole et du gaz naturel russes a poussé l’économie à ses limites, à l’exception de l’industrie militaire, qui est en plein essor grâce à l’injection de 100 milliards.

Lorsque le pays est entré en récession, le taux d’inflation a parfois dépassé 10% et s’élève au 23 juillet à 6,4%, même s’il dépasse encore 11% pour l’alimentation.

Cela touche particulièrement les groupes à faible revenu, déjà défavorisés.

Malgré une baisse significative des ventes de produits alimentaires, les bénéfices des leaders de l’industrie ont augmenté grâce à des prix abusifs criminels.

Cela signifie que les bénéfices vont aux riches, tandis que l’augmentation des coûts affecte particulièrement la population la plus pauvre.

La demande intérieure a été considérablement ralentie et, tout comme la baisse des exportations, elle a un impact sur la conjoncture négative.

Compte tenu de la hausse des prix des denrées alimentaires allant jusqu’à 20%, le flux vers les banques alimentaires a considérablement augmenté et, dans certains cas, a doublé. de sorte que des arrêts d’admission et des réductions de quantité dans la distribution ont été nécessaires.

C’est une impudence de la part du pouvoir que de confier la prise en charge de la « partie de la population laissée pour compte » à des associations organisées et financées par le secteur privé, sans leur apporter le soutien financier approprié !

En Allemagne, plus de deux millions de personnes dépendent désormais de l’aide alimentaire. Le besoin est probablement encore plus grand, car de nombreuses banques alimentaires ont cessé de les accepter.

Les dividendes des actionnaires ont cependant augmenté. De moins en moins de bénéfices sont restés dans l’entreprise, de plus en plus sont allés aux propriétaires (…).

Notre économie est en récession « technique » depuis le printemps 2023.

La production économique (produit intérieur brut, PIB) a diminué tant au quatrième trimestre 2022 qu’au premier trimestre 2023. Et les perspectives ne se sont pas améliorées depuis.

L’Allemagne connaît cette année la pire situation parmi toutes les grandes économies. Et ce sera probablement la seule grande économie à connaître une contraction. Cela veut dire : le FMI s’attend à une récession pour l’Allemagne.

L’industrie chimique en particulier s’est affaiblie, car les sanctions pétrolières et gazières y ont eu un impact particulier, mais aussi les secteurs des machines-outils et de l’électrotechnique.

Contrairement aux « citoyens normaux », l’économie allemande peut fuir. Une entreprise sur cinq envisage de délocaliser sa production à l’étranger.

Les petits fournisseurs qui ne peuvent pas déménager avec nous seront conduits à la ruine !

Il y a également un exode de travailleurs qualifiés. Environ 1,2 million de spécialistes bien formés et pour la plupart hautement qualifiés ont émigré en 2022.

Le budget fédéral 2024 prévoit des économies dans presque tous les domaines afin de pouvoir financer les dépenses d’armement et de guerre tout en respectant le frein à l’endettement (…).

La démocratie occidentale actuelle est une démocratie d’élite. Elle ne repose pas sur une volonté unifiée de la société, car la société est divisée en raison de différents intérêts économiques et de différentes visions du monde quant au développement.

Les élites comprennent des personnes qui ont beaucoup de pouvoir et qui, socialement, proviennent presque exclusivement des classes les plus riches et les plus capitalisées.

Leur attitude face aux inégalités sociales est essentiellement façonnée par leurs origines sociales exclusives et homogènes : c’est la base de leur pouvoir et de la mise en œuvre des politiques néolibérales !

Cependant, il n’existe pas une élite fermée, mais plutôt différents groupes d’élite, généralement liés les uns aux autres par leurs origines sociales.

Ils vivent dans un monde parallèle depuis leur naissance et ont une culture, une éducation et des opportunités de carrière communes. Cela signifie qu’ils fréquentent des écoles privées d’élite, étudient dans des collèges et universités (privés) d’élite et ont donc déjà un lien avec l’élite au pouvoir. »

Sahra Wagenknecht veut couper l’herbe sous le pied du nationalisme ; le faible niveau politique l’amène à lancer une initiative « sociale » avant tout, mais autour de principes bien circonscrits, comme la paix, le refus de l’OTAN. C’est là ce qui la distingue fondamentalement de gens comme Jean-Luc Mélenchon en France, dont le populisme est sans bornes aucune.

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Refus de l’hégémonie

L’Arménie au bord de l’effacement avant le conflit gréco-turc

L’Arménie connaît une pression énorme, alors que l’Azerbaïdjan a repris ces dernières semaines le contrôle du Nagorny-Karabakh. Autour de 100 000 Arméniens, soit la quasi totalité de la population arménienne locale, ont fui. Désormais, ce qui se trame, c’est l’effacement de l’Arménie, avec un partage du pays par la Russie d’un côté, la Turquie et l’Azerbaïdjan de l’autre, dans le cadre inévitable d’un accord avec l’Iran.

On sait comment tout cela forme un « Orient compliqué » pour les Français, mais il n’est pas difficile de comprendre la carte suivante. Vous avez la Turquie et autour… il y a l’Ukraine, Israël et Gaza, l’Arménie et l’Azerbaïdjan… tous les foyers les plus chauds du moment.

Pour ceux qui veulent approfondir la question turque en tant que telle, il y a l’excellent article « La Turquie, maillon faible de la chaîne des pays dépendants« , qui en 2020 présentait justement la Turquie comme au centre de la nouvelle crise historique qui se joue. La guerre gréco-turque – avec la France alliée « secrète » de la Grèce – s’annonce comme inévitable.

Mais regardons la question arménienne, qui connaît son dénouement. Que restera-t-il de l’Arménie? demandions-nous en septembre 2022. On risque de le savoir très vite malheureusement.

Pourquoi cela? Parce que nous vivons l’époque du repartage du monde et que l’Azerbaïdjan a les moyens de continuer à déstabiliser la région. Son objectif est de parvenir à unifier géographiquement ses régions, une d’entre-elle se situant derrière l’Arménie. Et cela permettrait une jonction avec la Turquie, pays considéré comme frère suivant la théorie employée d’une nation, deux pays.

Quel est le scénario?

Cette unification de l’Azerbaïdjan passerait par tout d’abord la demande d’un « corridor de Zanguezour »… et dans la foulée il y aurait des affrontements militaires ; ce serait tellement le chaos que la Russie serait « obligée » d’intervenir pour agir en tampon…

L’Arménie perdrait des territoires dans le processus et ce qui en reste n’aurait plus qu’un choix pour exister : celui de rejoindre la Fédération de Russie.

Le plan est évident, au point que le premier ministre arménien Nikol Pachinian, de passage au Parlement européen à Strasbourg le 17 octobre 2023, a directement accusé la Russie d’avoir lâché l’Arménie. Depuis plusieurs semaines, il a en ce sens lancé des appels incessants aux pays occidentaux, au point qu’il est considéré du point de vue russe comme un nouveau « Zelensky » en puissance.

La tenaille Russie-Azerbaïdjan est, de fait, une réalité pour l’Arménie, c’est la bataille pour le repartage du monde, une liquidation des acquis de fraternité datant de l’URSS. On notera d’ailleurs que le président d’Azerbaïdjan, Ilham Aliyev, lors de son discours suite à la reconquête du Karabagh, a longuement salué l’époque passée de fraternité entre Arméniens et Azéris au Karabagh. Il était obligé de le faire en raison du prestige historique de l’amitié caucasienne.

Affiche soviétique arménienne des années 1930

Le contexte étant ce qu’il est, les autres puissances se mettent donc de la partie. La France s’est la première lancée et a répondu positivement à l’Arménie. Elle a décidé d’envoyer des armes, le ministre français de la Défense Sébastien Lecornu étant en processus de discussion avec son homologue arménien Suren Papikian. Quelles armes, c’est par contre secret défense, le ministre français ayant même refusé de répondre à ce sujet à des questions du Sénat en octobre 2023.

Le président d’Azerbaïdjan Ilham Aliyev a, en raison de cette vente d’armes, refusé de rencontrer Nikol Pachinian le 5 octobre 2023 à Grenade lors d’un sommet de l’Union européenne. De son côté, Nikol Pachinian a boycotté une réunion de la Communauté des Etats Indépendants, qui regroupe des pays de l’ex-URSS.

Ce qui a provoqué deux réactions. D’abord une déclaration commune du Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, du président du Conseil européen, Charles Michel, du président français, Emmanuel Macron, et du chancelier allemand, Olaf Scholz.

Ensuite, une réponse acide du président d’Azerbaïdjan Ilham Aliyev :

« Maintenant, cela soulève la question : l’Arménie veut-elle la paix ?

Je ne le pense pas, car si elle avait voulu la paix, elle n’aurait pas manqué cette occasion.

Le Premier ministre arménien prend six heures de vol pour Grenade et participe à une réunion incompréhensible où l’on discute de l’Azerbaïdjan sans qu’elle y soit présente, mais il ne peut pas voler pendant deux à trois heures jusqu’à Bichkek [au Kirghiztan]. Il a mieux à faire apparemment. »

Car l’Azerbaïdjan sait que les pays occidentaux sont… loin, très loin. La presse azerbaïdjanaise se moque ainsi de la France et de l’ambassadeur Olivier Decotigny, reprenant les discours anti-occidentaux de la Turquie et de la Russie.

Les pays occidentaux ne peuvent que jouer les trouble-fêtes, et d’ailleurs ils n’ont aucun autre objectif concernant l’Arménie. Ce pays passe par pertes et profits dans les calculs impérialistes. Comme d’ailleurs au final tous les pays dans le cadre de l’affrontement entre les superpuissances américaine et chinoise, la seule vraie actualité.

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Refus de l’hégémonie

Joe Biden en Israël contre Vladimir Poutine en Chine

L’actualité mondiale est la conquête de l’hégémonie de la part des grandes puissances. Cela donne en pratique une guerre larvée, d’influence, en plus des théâtres strictement militaires en Ukraine, en Arménie ou en Palestine. Le 18 octobre 2023 était un jour particulièrement marquant pour la grande bataille pour le repartage du monde, avec le dessin toujours plus net de deux grands blocs opposés.

Le premier, celui mené par la superpuissance américaine, tente de maintenir à tout prix ses acquis et ses positions. C’est pour cela que le président américain Joe Biden était en Israël, afin d’y affirmer son autorité au Conseil de guerre israélien.

Pour la forme, il est fait comprendre que les États-Unis soutiennent fermement Israël… et que ce dernier lui est soumis stratégiquement. Joe Biden a dit :

« À la suite de l’attaque terroriste du Hamas, qui était brutale, inhumaine, inimaginable, ce conseil s’est rassemblé, solide et uni. Je veux que vous sachiez que vous n’êtes pas seuls. Comme je l’ai déjà souligné, nous continuerons de soutenir Israël, alors que vous travaillez à la défense de votre peuple. Nous continuerons de travailler avec vous et les partenaires régionaux pour protéger des civils innocents d’autres tragédies. »

Israël est concrètement une base américaine au Proche-Orient, une base militaire, mais aussi politique et culturelle. Tout doit se définir par là. Alors Israël est prié de ne pas trop faire de vague, pour assurer les intérêts américains.

En début de semaine, le secrétaire d’État américain Anthony Blinken avait déjà assisté à l’intégralité du Conseil de sécurité israélien… qui s’était déroulé en bonne partie en anglais, et pas en hébreu moderne. Jamais un pays réellement indépendant ne pourrait accepter une telle supervision, bien entendu.

Et mercredi 18 octobre, pour affirmer sa main-mise, Joe Biden a expliqué notamment qu’il fallait l’entrée d’une aide humanitaire dans la bande de Gaza « au plus vite ». Il veut surtout limiter au maximum la portée politique néfaste mondialement d’un massacre de masse de la part d’Israël à Gaza.

L’armée américaine, qui a fait de grosses livraisons d’armes et de systèmes militaires à Israël, est donc sur le qui-vive dans la région pour faire en sorte que tout reste sous contrôle… et assumer l’escalade au besoin, mais selon les intérêts américains.

Après s’être rendu à Tel-Aviv, Joe Biden devait se rendre à Amman, en Jordanie pour y rencontrer le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, ainsi que le roi Abdallah de Jordanie et le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi.

Il s’agit là de pays et d’une entité largement alignés en pratique sur les États-Unis, mais qui peuvent vite vaciller dans le contexte international. Et que s’est-il passé justement ? La visite a été annulée au dernier moment, officiellement en raison de l’explosion meurtrière survenue l’avant-veille sur le parking de l’hôpital al-Ahli, à Gaza. Il y a eu plusieurs centaines de morts et blessés graves selon le Hamas, quelques dizaines selon l’Union européenne.

Il y a eu tout un battage médiatique mondial pour accuser Israël, alors qu’en pratique l’attaque dans ces conditions d’une telle cible n’était pas cohérente. Israël explique de son côté qu’il s’agirait d’un tir de roquettes (ciblé ou manqué) de la part des brigades al-Qods, c’est-à-dire la branche armée du Djihad islamique palestinien (JIP), une organisation plus ou moins concurrente du Hamas (et liée à l’Iran, bien que sunnite).

Ce qu’il se passe en tous cas, c’est que les forces réactionnaires du monde arabe poussent de manière forcenée pour provoquer coûte que coûte un embrasement et se servent allégrement de cette tragédie autour d’un hôpital. Il y a notamment d’importants remous à Ramallah en Cisjordanie.

Pendant ce temps, la Chine assumait toujours plus clairement et ouvertement sa concurrence au bloc américain. Le 18 octobre 2023, elle recevait encore une fois Vladimir Poutine, le président russe. En l’occurrence pour des questions économiques, mais il a été rabâché à quel point les deux pays sont alignés, s’entendent sur les questions mondiales et veulent continuer leurs coopérations internationales.

Le président chinois a particulièrement insisté sur le « partenariat stratégique global de coordination sino-russe », expliquant que celui-ci est fondé sur un bon voisinage durable et une coopération mutuellement bénéfique, avec un engagement à long terme.

Le président russe a expliqué de son côté que :

« l’évolution du paysage international prouve pleinement le jugement stratégique du président Xi selon lequel le monde subit des changements sans précédent depuis un siècle. La Russie est prête à travailler avec la Chine pour renforcer la communication et la coordination au sein des BRICS et d’autres mécanismes multilatéraux, défendre le système international fondé sur le droit international et promouvoir la construction d’un système de gouvernance mondiale plus juste et équitable. »

Bien entendu, il a été question de la situation palestino-israélienne. Vladimir Poutine n’y est pas allé de main morte pour critiquer indirectement les États-Unis soutenant Israël, en leur opposant la création d’un État palestinien totalement « souverain et indépendant » et « avec Jérusalem comme capitale ».

Le même jour, mercredi 18 octobre 2023, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov arrivait à Pyongyang en Corée du Nord pour deux jours et la Chine recevait les présidents du Kenya, du Nigeria et de l’Indonésie. La veille, elle recevait les dirigeants de Hongrie, du Chili, d’Éthiopie et du Kazakhstan.

La situation mondiale se tend clairement drastiquement, la guerre mondiale se dessine toujours plus nettement avec la concurrence pour l’hégémonie des deux grandes superpuissances que sont les États-Unis et la Chine (et son premier allié la Russie).

Rien n’échappe à la satellisation par les deux superpuissances à moins d’une ligne d’indépendance, fondée sur les principes de la Gauche historique. On n’y est pas, nulle part, et il le faut pourtant à tout prix pour indiquer le vrai chemin à suivre !

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Refus de l’hégémonie

Le nationalisme ukrainien et l’effacement de la Russie

Avant le conflit entre la Russie et l’Ukraine, agauche.org a pendant six mois alerté de l’imminence de ce drame historique et souligné la menace que cela faisait peser sur l’Ukraine. Le déclenchement du conflit a cependant fait basculer l’Ukraine dans un nationalisme forcené, totalement délirant, voulant effacer la Russie.

Le régime ukrainien n’est nullement actif « en défense » de l’Ukraine ; en réalité, son agenda est celui du nationalisme ukrainien combiné à celui de l’Otan, avec comme but la destruction de la Russie. Les exemples suivants montrent l’ampleur de cette fuite en avant nationaliste, où tombent les Ukrainiens qui espèrent obtenir les armes américaines et l’argent européen à l’infini.

La chanteuse d’opéra Anna Netrebko est une grande cible du nationalisme ukrainien

Prenons le prix Erich-Maria-Remarque, du nom du grand écrivain allemand auteur d’A l’Ouest rien de nouveau. Le prix est décerné par la ville allemande d’Osnabrück, dans une optique qui se veut démocratique-pacifiste. Il y a un prix principal et un prix spécial.

Pour 2023, le prix principal est allé à Lioudmila Oulitskaïa. C’est une Russe, opposante depuis longtemps à Vladimir Poutine (un « criminel »). Écrivain, elle s’est opposée à « l’opération militaire spéciale » (une « honte ») en Ukraine et s’est dans la foulée installée en Allemagne. Elle dénonce la Russie depuis plus d’une décennie comme acculturée, nationaliste, ayant une folie impérialiste des grandeurs.

Eh bien celui qui a reçu le prix spécial, le dessinateur ukrainien Serhi Maidukov, a catégoriquement refusé de recevoir son prix. Hors de question d’être aux côtés d’une Russe ! C’est là qu’on voit le degré de fanatisme du nationalisme ukrainien, qui profite de l’appui massif des occidentaux (Maidukov travaille pour les New Yorker, Wall Street Journal, Washington Post, Zeit, Guardian, des quotidiens bellicistes).

Éloge par Le Monde d’une émission d’Arte racontant avec fierté l’interdiction de ce qui est russe à l’opéra de Kiev (« Kiev, un opéra en guerre« )

La contagion est générale ; elle ne concerne pas que l’opéra où tout ce qui est russe est interdit. Prenons Andreï Kourkov, qui est le romancier ukrainien dont les œuvres ont été le plus traduites à l’étranger. Il est né… dans la banlieue de Leningrad et tous ses romans ont été écrit en russe ! Mais lui-même est pour la suppression de la langue russe désormais. Ce qui ne n’empêche pas qu’il soit dénoncé en Ukraine comme « un collaborateur au long cours » pour ses romans écrits en russe…

Au début de 2023, il y a eu, autre exemple, le festival Prima Vista, en Estonie. C’est un pays fanatiquement anti-Russie également. Néanmoins, des opposants étaient systématiquement invités. Or, cette fois, les poètes ukrainiennes Olena Huseinova et Anna Gruver ont refusé de venir. La raison a tenu à la présence de la poète russe Linor Goralik ! Cela va si loin qu’Olena Huseinova a également dénoncé un poète russe habitant aux Canada ayant pris partie dans ses œuvres pour les « victimes » du conflit à Marioupol et Boutcha. Selon elle, c’est de l’appropriation néo-coloniale.

La romancière Oksana Sabuschko s’est pris une volée de bois vert en disant qu’elle n’avait rien contre le fait que ses œuvres soient traduites en russe, tout comme l’historien Jaroslav Hryzak pour avoir accordé une interview au média russe d’opposition (et interdit) Meduza. Pareil pour le romancier le plus connu en Ukraine, Iouri Androukhovytch, qui a été critiqué pour avoir parlé avec le romancier russe Mikhaïl Chichkine à un festival littéraire en Norvège en septembre 2022. Ce Mikhaïl Chichkine, dont la mère est Ukrainienne, vit pourtant en Suisse depuis 1995, publie dans tous les journaux occidentaux anglophones et dénonce Vladimir Poutine depuis le départ !

Le nationalisme ukrainien est une idéologie qui, depuis sa fondation au 19e siècle, vise à l’effacement de la Russie. Cette dernière ne serait qu’un assemblage artificiel produit par la « Moscovie ». Il n’y a donc rien de « russe » à reconnaître. Et même les Russes opposés à « l’opération militaire spéciale » sont donc dénoncés comme des agents du colonialisme. Tel est le fanatisme du nationalisme ukrainien, dont un exemple terrible est la nomination en septembre 2023 d’un nouveau ministre de la défense ukrainien, après un scandale de corruptions.

On parle ici de Roustem Oumierov, né en Ouzbékistan et Tatar de Crimée, où sa famille est revenue en 1991 : les Tatars avaient été déportés en 1944 par l’URSS en raison de leur soutien à l’Allemagne nazie. On comprend par sa nomination que c’est un symbole de la visée ukrainienne sur la Crimée. Cette dernière est russe historiquement et jamais la Russie ne l’abandonnera : le fait de nommer un tel ministre de la Défense montre qu’aucune solution pacifique n’est envisagée ni envisageable par l’Ukraine.

Roustem Oumierov est passé par les États-Unis, notamment avec le « Future Leaders Exchange ». C’est un agent américain. Mais pas seulement : il parle d’ailleurs turc et on comprend le double jeu de la Turquie, qui compte bien faire un partenariat approfondi avec le belligérant victorieux, que ce soit la Russie ou l’Ukraine. Telle est la bataille pour le repartage du monde.

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Refus de l’hégémonie

Les Etats-Unis remplacent la France au Gabon

La France a été une grande puissance coloniale en Afrique et elle a réussi à maintenir sa domination à différents degrés malgré les « indépendances ». C’est ce qu’on a surnommé la « Françafrique ». Le Gabon était considéré comme l’ex-colonie la plus sous le contrôle français, et en août 2023 un coup d’État surprise a changé la donne. Cependant, ce n’est pas au profit du bloc sino-russe : c’est en fait la superpuissance américaine qui a pris le contrôle du pays.

Le Gabon sur le continent africain

C’est une expression de l’effacement continu de la puissance capitaliste française. Alignée sur la superpuissance américaine, elle est aspirée par celle-ci, satellisée. La France ne peut faire que ce que la superpuissance américaine attend d’elle, comme faire un partenariat avec l’Ukraine pour une union politico-militaire au service des intérêts américains en Europe. Si elle est considérée comme pas assez fiable ailleurs, elle est dégagée.

Car le coup d’État au Gabon rentre dans le contexte de la bataille pour le repartage du monde dans la région. Depuis l’irruption de la crise du capitalisme en 2020, l’Afrique du Centre et de l’Ouest a connu une série de coups d’État au Niger, au Burkina Faso, au Soudan, en Guinée, au Mali et au Gabon. Si on excepte le Soudan, on parle de pays francophones et de passage dans l’orbite sino-russe.

Le coup d’État au Gabon est le fruit d’une logique américaine qui dit : la France perd toutes ses billes en Afrique et il faut la remplacer, exactement comme ce fut le cas pour le Vietnam, où la superpuissance américaine avait remplacé la France.

Il faut dire que la présence française au Gabon relevait d’un néo-colonialisme vraiment à l’ancienne. Omar Bongo, le premier président du Gabon « indépendant », est resté à la tête de pays de 1967 à sa mort en 2009. Il a été de toutes les magouilles militaires et économiques avec la France, ainsi que politiques puisqu’il a arrosé des partis politiques. Il a eu 33 femmes et une cinquantaine d’enfants, plaçant toute sa famille à tous les échelons de l’État, etc.

C’est d’ailleurs son fils Ali Bongo Ondimba qui a prit le relais et le coup d’État a suivi de quelques minutes la réélection de celui-ci pour un troisième mandat, avec pratiquement 65% des voix. C’était tellement invraisemblable, tellement bricolé, qu’à part pour les Français arrogants traditionnellement, il était évident que l’instabilité prévaudrait.

C’est pourquoi ce sont les propres services de sécurité de la présidence qui ont mené le coup d’État. C’est une fausse révolution de palais : pour que rien ne change, tout doit changer.

Voilà pourquoi les réactions sont très différentes de lors des coups d’État favorables à la Chine et à la Russie. Le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union africaine a annoncé la suspension avec effet immédiat du Gabon. Mais il n’y a pas la menace d’une intervention militaire.

La France ne compte pas évacuer ses ressortissants ou couper les fonds des « aides ». Le chef de la diplomatie de l’Union européenne, Josep Borrell, a pratiquement excusé le coup d’État.

« Au Niger, le président était un président démocratiquement élu (…). Au Gabon, quelques heures avant le coup d’État militaire, il y a eu un coup d’État institutionnel car les élections ont été volées (…). Je ne peux pas dire que le Gabon était une vraie démocratie avec une famille qui dirigeait le pays depuis 50 ans. »

Selon lui, le vrai coup d’État « institutionnel » serait même d’avoir truqué les élections ! Autrement dit, rien n’a changé au Gabon à part la puissance tutélaire.

Et tout cela est allé très vite. En juin 2023, Ali Bongo Ondimba etait encore l’invité d’honneur de la rencontre à Paris sur le financement durable, celui-ci étant considéré comme proche par Emmanuel Macron.

Toutefois, il y a eu des signes avant coureurs, surtout l’adhésion du Gabon en 2022 au… Commonwealth ! C’est-à-dire l’union historique de l’empire britannique, et en fait surtout de nos jours une union à caractère anglophone, donc liée de fait à la puissance américaine.

La puissance française a tout simplement été mise de côté. C’est une expression double : à la fois de sa propre décadence et de l’alignement forcé sur les deux superpuissances, américaine et chinoise. On va à la troisième guerre mondiale de repartage du monde et elle a en fait même déjà commencé en Ukraine.

Telle est la réalité historique !

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La nature des Brics et le rôle central de la Chine

Le nom Brics vient de l’acronyme BRICS formé par les initiales du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud (South Africa) ; c’est une alliance informelle entre ces 5 pays, élargie à partir de 2024 à l’Arabie saoudite, l’Égypte, les Émirats arabes unis, l’Argentine, l’Iran et l’Éthiopie.

C’est la Fédération de Russie qui est à l’origine de ce regroupement, en 2006, en marge d’une assemblée générale de l’ONU. Il y a eu ensuite différents jalons en vue des coopérations multilatérales entre ces pays se considérant au même niveau dans l’échiquier mondial : trop faible pour peser directement face aux puissances occidentales historiques, trop forts pour se contenter d’appartenir au tiers-monde.

Le premier véritable « sommet » des Brics n’eut lieu toutefois qu’en 2009, le 16 juin à Iekaterinbourg en Sibérie occidentale (et quatrième plus grande ville de Russie). La déclaration commune à l’issue disait avoir comme but de :

« promouvoir le dialogue et la coopération entre nos pays de manière progressive, proactive, pragmatique, ouverte et transparente.

Le dialogue et la coopération des pays BRIC sont propices non seulement à servir les intérêts communs des économies de marché émergentes et des pays en développement, mais également à construire un monde harmonieux de paix durable et de prospérité commune.

Le document expose une perception commune des moyens de faire face à la crise financière et économique mondiale. »

Cela ne souffre d’aucune ambiguïté : la volonté des Brics est d’exister de manière alternative à l’hégémonie de la superpuissance américaine. De par leur développement économique respectif, l’importance de leur population (plus de 40 % de la population mondiale) et la primauté de leurs ressources naturelles, ces pays entendent exister mondialement sans avoir à se soumettre aux États-Unis, mais tout en s’intégrant parfaitement dans la mondialisation capitaliste.

C’est pour cela que les Brics ne formaient pas, jusqu’au début des années 2020, une alliance formelle, de type militaire ou encore avec une intégration économique commune d’envergure. Il s’agissait normalement surtout d’une alliance de circonstance, pour peser et faire valoir leur puissance économique qui représentait en 2013 environ 27 % du PIB mondial.

La donne a toutefois changé depuis 2020. D’abord, il y a eu la crise sanitaire, qui s’est généralisée sur le plan économique, a changé la face du monde et chamboulé tous les rapports. Ensuite, il y a le conflit militaire en Ukraine, qui a accéléré la contradiction entre l’occident (sous domination américaine) et la Russie, créant un gigantesque clivage politico-diplomatique planétaire.

L’expansion potentielle des Brics

Surtout, la Chine s’est énormément développée durant les années 2010, devenant ouvertement une superpuissance challenger à l’hégémonie de la superpuissance américaine. Impossible dorénavant de considérer les Brics sans prendre en compte l’importance et le rôle de la superpuissance chinoise.

En fait, il faut même dire que l’existence des Brics, sa forme, ses discours, ses prétentions, intègrent totalement la stratégie chinoise d’hégémonie « alternative ». Voici le titre de l’allocution du président chinois Xi Jinping lors du 15e sommet des Brics à Johannesbourg en août 2023, où a été annoncée l’élargissement de l’alliance :

« Rechercher le développement par la solidarité et la coopération et assumer les responsabilités pour la paix. »

Ces mots choisis de manière très précise résonnent très fort dans tous les pays du tiers-monde, qui comprennent qui leur est proposé de suivre une autre voie que celle de la domination habituelle de la superpuissance américaine.

La Chine, particulièrement en Afrique, passe son temps à faire des accords économiques, acheter des terres, vendre des marchandises, proposer des appuis militaires, tout en prétendant ne pas du tout reproduire le schéma américain de domination.

Les Brics consistent essentiellement en ce support à la Chine dorénavant ; c’est une force d’appui à l’hégémonie « alternative » de la superpuissance chinoise. Voici ce qu’expliquait le porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois à Johannesbourg le 24 août 2023, expliquant les propos de son président durant le sommet :

« Les pays des BRICS sont une force importante pour façonner l’échiquier international, a déclaré Xi Jinping.

Le fait que nous choisissons en toute indépendance nos voies de développement, défendons ensemble notre droit au développement et avançons ensemble vers la modernisation représente l’orientation du progrès de l’humanité et influencera certainement en profondeur le cours du monde, a-t-il affirmé.

La coopération des BRICS se trouve à un moment crucial pour ouvrir de nouvelles perspectives sur la base des accomplissements réalisés, a souligné le président chinois.

Suivant la tendance du développement mondial et répondant aux aspirations des peuples du monde entier, le président Xi Jinping a fait une proposition en quatre points sur la coopération des BRICS dans divers secteurs, traçant la voie à suivre pour une croissance saine et substantielle de la coopération des BRICS.

Nous devons approfondir la coopération commerciale et financière pour stimuler la croissance économique.

Nous, pays des BRICS, devons être des compagnons de route sur le chemin du développement et de la revitalisation, et nous opposer au découplage et à la rupture des chaînes d’approvisionnement, ainsi qu’à la coercition économique, a déclaré XI Jinping.

Nous devons étendre la coopération politique et sécuritaire pour maintenir la paix et la tranquillité, a-t-il ajouté.

Les pays du BRICS doivent maintenir le cap du développement pacifique, se soutenir sur les questions relatives à leurs intérêts fondamentaux respectifs et renforcer la coordination sur les grandes questions internationales et régionales.

Nous devons proposer nos bons offices sur les questions brûlantes, en encourageant un règlement politique, a affirmé Xi Jinping. Nous devons intensifier les échanges entre les peuples, promouvoir l’apprentissage mutuel entre les civilisations et préconiser la coexistence pacifique et l’harmonie entre les civilisations, a-t-il proposé.

Nous devons promouvoir le respect de tous les pays dans le choix indépendant de leur voie de modernisation, a ajouté Xi Jinping.

Nous devons défendre l’équité et la justice et améliorer la gouvernance mondiale, a-t-il noté. Les pays du BRICS doivent pratiquer un véritable multilatéralisme, défendre le système international centré sur les Nations Unies, soutenir et renforcer le système commercial multilatéral centré sur l’Organisation mondiale du Commerce (OMC), et rejeter les tentatives de création de « petits cercles » ou de « blocs exclusifs ».

Nous devons faire avancer la réforme des systèmes financiers et monétaires internationaux et augmenter la représentation et le droit à la parole des pays en développement, a déclaré Xi Jinping. »

Les États-Unis, ainsi que tout le bloc occidental aligné sur la superpuissance américaine, sont directement visés. Il est fait allusion de manière très claire à la guerre en Ukraine entre l’Otan et la Russie ainsi qu’à la domination économique américaine au moyen du dollar et des embargos ou sanctions économiques. La République populaire de Chine prépare également très clairement le terrain en vue d’un affrontement direct avec les États-Unis sur la question de Taïwan.

Mais cela va plus loin que cela, car la Chine s’imagine pouvoir peser durablement et mise particulièrement sur le développement de l’Afrique au 21e siècle.

« En se concentrant sur le thème du sommet « Les BRICS et l’Afrique : Partenariat pour une croissance mutuellement accélérée, un développement durable et un multilatéralisme inclusif », les dirigeants des cinq pays BRICS ont eu un échange de vues approfondi et sont parvenus à un large consensus sur la coopération entre les BRICS et les questions majeures internationales d’intérêt commun.

Les parties sont d’avis que les BRICS doivent renforcer leur solidarité, continuer à embrasser l’esprit d’ouverture, d’inclusion et de coopération gagnant-gagnant, accélérer l’expansion des BRICS, rendre le système de gouvernance mondiale plus inclusif, plus juste et plus équitable, et promouvoir la multipolarité dans le monde.

Les BRICS doivent se soutenir sur les questions concernant les intérêts fondamentaux de chacun et respecter les voies de développement choisies indépendamment par les pays et adaptées à leurs réalités nationales.

Les BRICS doivent contribuer à accélérer la réforme du système financier et monétaire international, augmenter la représentation et le droit à la parole des marchés émergents et des pays en développement, faire progresser le développement durable et promouvoir une croissance inclusive. »

Depuis Johannesbourg, avec l’élargissement à d’autres pays, il devient évident que l’alliance des Brics n’est plus un regroupement informel, secondaire et de circonstance ; c’est un outil de développement pour l’hégémonie de la superpuissance chinoise en concurrence avec la superpuissance américaine.

C’est aussi, voire surtout en ce qui nous concerne en France, le marqueur de la dégringolade de la puissance américaine et de la fin de l’occident ! Non pas qu’il faille croire en l’hégémonie chinoise qui serait « meilleure » (si tant est qu’elle puisse se réaliser d’ailleurs), mais il faut se réjouir et appuyer l’effondrement occidental ; ce sera là le salut de la Gauche, la vraie, pour un monde qui doit changer de base!

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Guerre

La Chine entre en scène : acte 2

Elle fait ouvertement concurrence aux États-Unis.

La République populaire de Chine avait marqué l’actualité le 24 février 2023 avec l’annonce d’un « plan » pour mettre fin au conflit entre l’Ukraine et la Russie au moyen du dialogue. C’était le premier acte d’une pièce savamment orchestrée, consistant en le fait de se placer diplomatiquement sur la scène mondiale en concurrence avec les États-Unis dans le cadre de la guerre mondiale pour le repartage du monde.

Cela fût une grande réussite et depuis la Chine n’a eu qu’à attendre que les événements se déroulent en sa faveur. Tant l’Ukraine elle-même que les Européens ont effectivement poussé pour qu’il y ait une communication directe entre la Chine et l’Ukraine, à propos du conflit.

C’est dorénavant chose faite, à l’initiative de l’Ukraine, comme a tenu à le souligner la diplomatie chinoise, appuyant ainsi son statut de superpuissance. Le mercredi 26 avril 2023, le président chinois Xi Jinping s’est en effet entretenu par téléphone avec le Président ukrainien Zelensky.

Ce dernier a parlé d’un appel « long et significatif » (il aurait duré près d’une heure) devant donner une forte impulsion au développement des relations bilatérales entre les deux pays.

Il en ressort deux choses. D’une part, un ambassadeur ukrainien en Chine a été nommé. Il s’agit d’un ancien ministre des Industries stratégiques, Pavlo Riabikine, pour un poste vacant depuis février 2021.

Le régime ukrainien, avec ses illuminations nationalistes s’imagine avoir un quelconque poids dans la scène internationale et pouvoir profiter diplomatiquement de la Chine avec cet ambassadeur ; il se fait encore une fois l’idiot utile du jeu des grandes puissances menant la 3e guerre mondiale.

Ce qui compte vraiment en revanche, c’est qu’il sera envoyé prochainement un « Représentant spécial du gouvernement chinois pour les affaires d’Europe et d’Asie centrale ». Il devra se rendre tant en Ukraine que dans d’autres pays pour, selon le ministère chinois des Affaires étrangères :

« mener des échanges approfondis avec différentes parties sur le règlement politique de la crise ukrainienne. »

On comprend tout de suite que ce médiateur a vocation à se rendre également en Russie pour mener des négociations, celles-ci devant servir non pas à la paix comme but principal, mais au rayonnement international de la Chine face aux États-Unis. Il s’agirait d’ailleurs de l’ancien vice-ministre des Affaires étrangères Li Hui, qui a été ambassadeur de Chine en Russie de 2009 à 2019.

Que ces négociations aboutissent ou non, cela ne change strictement rien à l’affaire car ce qui compte pour la Chine est uniquement de se placer et d’exister en opposition à la superpuissance américaine.

Le communiqué du ministère chinois des Affaires étrangères appuie très clairement sur cette opposition, la superpuissance chinoise se posant en miroir inversée de la superpuissance américaine.

« La Chine n’est pas à l’origine de la crise ukrainienne, ni n’est partie à la crise. Membre permanent du Conseil de Sécurité des Nations Unies et grand pays responsable, elle ne reste pas les bras croisés ni ne jette de l’huile sur le feu, et encore moins en tire profit pour ses propres intérêts.

Ce qu’elle fait est désintéressé et impartial. Le dialogue et les négociations sont la seule solution viable. La guerre nucléaire ne fait pas de gagnant. »

Il faut bien souligner ici que, comme à son habitude, la Chine ne parle certainement pas « d’invasion russe », ni ne prononce le mot « guerre ». La Chine ne fait aucun mauvais coup à son allié russe qui est considéré comme une partie devant discuter.

« Il faut saisir les opportunités pour accumuler des conditions favorables au règlement politique de la crise maintenant que la réflexion et la voix de la raison de différentes parties se multiplient.

J’espère que les différentes parties tireront des enseignements profonds de la crise ukrainienne, et recherchent ensemble par dialogue une voie pour assurer la sécurité et la stabilité de long terme en Europe. »

La réaction de la Russie a été bien entendu très modérée, se contentant de rejeter la faute sur les Ukrainiens et les occidentaux ne voulant pas discuter. Prenant acte de la volonté de la Chine de « s’efforcer de mettre en place un processus de négociation », le ministère russe des Affaires étrangères a surtout dénoncé la partie adverse, ce qui fait directement le jeu de la Chine.

« Les autorités ukrainiennes et leurs soutiens occidentaux ont déjà démontré leur capacité à saper les initiatives de paix ».

De son côté, la superpuissance américaine s’est montrée forcément très ennuyée par le jeu de la superpuissance rivale. Le porte-parole du Conseil de sécurité nationale américain John Kirby a ainsi expliqué à la presse à propos de cet appel téléphonique :

« Nous estimons que c’est une bonne chose. Cela dit, savoir si cela peut déboucher sur une initiative, une proposition ou un plan de paix sérieux, nous l’ignorons pour l’instant. »

Surtout, il rappelle le rôle des États-Unis, qui ont véritablement la main sur le régime ukrainien et qui feront nécessairement tout pour saboter les œuvres chinoises, alors que les chinois font ici tout pour saboter les œuvres américaines.

« [la discussion de paix] ne sera pas viable ou crédible si les Ukrainiens et le président Zelensky, personnellement, n’y sont pas impliqués et ne la soutiennent pas».

C’est un moment marquant de la 3e guerre mondiale qui se déroule et s’amplifie chaque jour.

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Les États-Unis convoquent leurs vassaux à Ramstein

Ils veulent renforcer la guerre à la Russie.

Les États-Unis ont décidé qu’il fallait accentuer la fourniture d’armes et de matériel militaire à l’Ukraine, alors leurs vassaux étaient convoqués vendredi 21 avril 2023. En l’occurrence, il s’agit des pays membres de l’Union européenne et (ou) de l’Otan, ainsi que le Japon par exemple. Cela a eu lieu à Ramstein, sur une base militaire américaine dans le sud de l’Allemagne, symbole de la soumission de ce pays à la superpuissance américaine.

Puisqu’il s’agit de faire la guerre, c’est le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin qui présidait cette 11e réunion du « Groupe de contact de la défense ukrainienne » (qui est surnommé « forum de Ramstein » en raison du lieu).

Il avait à ses côtés le dirigeant de l’Otan Jens Stoltenberg, de retour de Kiev la veille. Pour amuser la galerie et assurer le spectacle, il a été fait comme si ce dernier venait relayer les demandes pressantes du président ukrainien Zelensky à fournir encore et toujours plus d’armes et de matériel militaire, en l’occurrence plus de blindés, d’artillerie, de munitions ainsi que des avions de combat et des systèmes de tirs de longue portée pour les russes derrière la ligne de front.

En réalité, l’Ukraine n’a absolument aucun poids et ce sont évidemment les États-Unis qui décident de tout, c’est-à-dire du rythme, de la nature et de l’organisation de ces livraisons d’armes. C’est précisément ce dont il s’agissait à Ramstein.

En général, il s’est agit de trois sujet clefs : la défense aérienne, les munitions et la coordination. En particulier, les États-Unis et l’Allemagne ont annoncé le début imminent de la formation des ukrainiens à l’utilisation des chars Abrams et Léopard. L’Allemagne a aussi annoncé un accord pour un centre de réparation des Léopard en Pologne. De plus, la question de la fourniture des avions de chasse occidentaux a été discuté une nouvelle fois.

Outre l’aspect technique et logistique, cette réunion (la 11e du genre, donc), avait également un but politique et diplomatique. Autrement dit, les directives américaines doivent être entendues et appliquées !

Lors de son discours d’ouverture, le secrétaire à la Défense Lloyd J. Austin a félicité ses vassaux pour leurs efforts dans la guerre américaine contre la Russie, présentant en détail les apports depuis plus d’un an. Le ton est celui de la bataille de l’occident contre les ennemis de la « démocratie », avec la Russie devant payer cher sa défiance à la superpuissance américaine.

« Mesdames et Messieurs, plus d’un an plus tard, l’Ukraine tient toujours bon. Notre soutien n’a pas faibli. Et je suis fier des progrès que nous avons réalisés ensemble.

Au total, les membres de ce groupe de contact ont fourni plus de 55 milliards de dollars d’aide à la sécurité pour l’Ukraine. C’est dix fois plus depuis notre première rencontre.

Au cours des derniers mois seulement, nous avons fourni l’équipement et la formation nécessaires pour appuyer neuf brigades blindées supplémentaires pour l’Ukraine. Cela a déjà renforcé la position de l’Ukraine sur le champ de bataille.

Ce groupe de contact a également fourni des systèmes de défense aérienne clés pour protéger le ciel, les citoyens et les infrastructures critiques de l’Ukraine. Cela inclut les systèmes Patriot des États-Unis, d’Allemagne et des Pays-Bas, SAMP/T d’Italie et de France et NASAMS du Canada et de Norvège.

Nous avons également amélioré la formation, le maintien en puissance et la puissance de nos bases industrielles.

Et tout au long, nous avons démontré notre unité et notre détermination. Nos efforts communs ont fait une énorme différence pour les défenseurs de l’Ukraine sur le champ de bataille. Et ils soulignent à quel point le Kremlin a mal calculé.

Poutine pensait qu’il pourrait facilement renverser le gouvernement démocratiquement élu de Kiev. Il pensait que le reste du monde le laisserait s’en tirer. Il pensait que notre unité éclaterait.

Mais il avait tort, à tous points de vue.

Alors que nous nous réunissons à nouveau à Ramstein, le monde entend nos voix haut et fort. Le monde voit ce que nous avons accompli ensemble. »

Ce qui compte est donc de continuer et renforcer l’effort de guerre, qui est la 3e guerre mondiale. Le ministre américain a été très clair sur le fait qu’il faille accentuer l’effort.

« Beaucoup d’entre vous ont puisé dans leurs réserves pour aider l’Ukraine. Certains de nos alliés, comme l’Estonie et la Lettonie, ont fait don de plus d’un pour cent de leur PIB à la cause de l’Ukraine.

L’Union européenne a récemment annoncé une importante initiative visant à accélérer la production industrielle de munitions. Et grâce au travail de nos directeurs nationaux des armements, de nombreux autres pays augmentent également leur production de munitions dont l’Ukraine a un besoin si urgent.

Maintenant, plus tôt cette semaine, les États-Unis ont annoncé leur 36e prélèvement présidentiel d’aide à la sécurité pour l’Ukraine, d’une valeur de 325 millions de dollars. Nous avons maintenant fourni plus de 35 milliards de dollars d’aide à la sécurité à l’Ukraine depuis le début de l’invasion russe à grande échelle. Dans ce dernier package, nous avons inclus plus de munitions pour HIMARS, des obus d’artillerie supplémentaires de 155 millimètres et 105 millimètres et d’importantes capacités antiblindées. »

Forcément, c’est l’Otan qui est au cœur de ce dispositif et c’est au dirigeant de l’Otan qu’est revenu le rôle de faire la communication à propos de cette réunion. Ce qu’il a raconté à la presse se résume de la façon suivante : il est très confiant dans le fait que les Ukrainiens sont désormais en mesure de libérer encore plus de terrain, raison pour laquelle il faut accentuer l’effort de guerre contre la Russie.

La guerre occidentale contre la Russie tourne donc à plein régime et va continuer de plus belle. Voici, pour finir, le résumé officiel de cet journée par l’Otan. Le ton et l’approche, ainsi que le contenu, sont très significatifs de la situation actuelle : c’est la 3e guerre mondiale.

« Secrétaire général de l’OTAN à Ramstein : nous devons renforcer le soutien à l’Ukraine

Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a participé à une réunion du groupe de contact de défense ukrainien dirigé par les États-Unis à Ramstein, en Allemagne, vendredi 21 avril 2023, à la suite de sa visite en Ukraine. La réunion était présidée par le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin et le président des chefs d’état-major interarmées, le général Mark Milley.

Le secrétaire général a souligné l’importance d’intensifier l’aide militaire à l’Ukraine alors qu’elle continue de se défendre contre la guerre d’agression brutale de la Russie. « Je viens de rentrer de Kiev hier soir et j’ai rencontré le président Zelenskyy, et son message était qu’il apprécie vraiment et se félicite du soutien solide que les alliés et les partenaires de l’OTAN ont apporté à l’Ukraine, mais compte également sur nous pour continuer à soutenir l’Ukraine dans le futur », a-t-il déclaré.

M. Stoltenberg a remercié le secrétaire à la Défense Lloyd Austin pour son leadership et s’est félicité du nouveau programme d’assistance des États-Unis pour l’Ukraine, comprenant des munitions pour les systèmes de fusées d’artillerie à haute mobilité (HIMARS), des missiles avancés et des missiles antichars. Il s’est félicité des annonces récentes d’autres pays de l’OTAN, dont le Danemark et les Pays-Bas, concernant la livraison de véhicules blindés. Le secrétaire général a également appelé à la poursuite des fournitures de défenses aériennes, de munitions et d’entraînement. Il a ajouté que l’Alliance travaillait en étroite collaboration avec l’industrie pour accélérer la production d’armes et de munitions et reconstituer les stocks alliés.

Le secrétaire général a souligné l’importance d’intensifier l’assistance militaire non létale, notant que le programme d’assistance complet de l’OTAN fournit des fournitures médicales, des systèmes mobiles par satellite et des ponts flottants.

Pendant son séjour à Ramstein, le secrétaire général a également rencontré le ministre ukrainien de la Défense Oleksiy Reznikov et le ministre néo-zélandais de la Défense Andrew Little. »

Sabotez la guerre américaine contre la Russie ! Pour la défaite de l’Otan et la déroute de l’occident !

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Taïwan : la gigantesque opération militaire chinoise

Il n’y aura pas de retour en arrière.

Le ministre chinois de la Défense se rend en Russie dimanche 16 avril 2023 pour une visite officielle. C’est en quelque sorte l’apogée pour la Chine d’une longue séquence d’affirmation diplomatico-militaire les jours précédents.

La République populaire de Chine avait en effet annoncé une opération militaire de grande envergure en représailles de la visite aux États-Unis de la présidente taïwanaise Tsai Ing-wen. Ce fut le cas, du 8 au 10 avril 2023, avec une opération d’encerclement de l’île de Taïwan.

Ce genre « d’exercice » est monnaie courante, mais pas à une telle ampleur, avec une telle sophistication stratégique. L’opération nommée « Épée commune » a consisté en des exercices avec des munitions réelles pour des « frappes simulées » dans le détroit pour non moins que le bouclage de l’île. Soit pour l’isoler, soit pour l’envahir, ou probablement une étude des deux options.

Il s’agit de dizaines de navires et d’avions de chasse J-15, ceux-ci approchant notamment l’île depuis son flanc oriental, ce qui est inédit. Les appareils évoluaient donc probablement depuis le porte-avions Shandong actuellement déployé dans le Pacifique occidental.

Le commandement militaire chinois dit avoir « accompli avec succès diverses tâches » et « testé de manière approfondie sa capacité de combat ». Il s’agissait notamment, voire surtout, de tester les capacités opérationnelles d’un commandement interarmées (terre, mer, air) en conditions réelles.

La 3e guerre mondiale a assurément franchi un cap, car l’escalade guerrière est totale. On est ici à couteaux tirés entre la Chine et, non pas le gouvernement sécessionniste de Taïwan, mais directement les États-Unis qui mettent ouvertement de l’huile sur le feu en se servant de Taïwan.

Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois a réagi au « transit » de Tsai Ing-wen aux États-Unis en pointant directement ces derniers avec des propos très fermes.

« En réalité, les États-Unis et Taïwan sont de connivence. Ils ont utilisé le « transit » comme prétexte pour inciter les sécessionnistes visant l’« indépendance de Taïwan » à s’engager dans des activités politiques aux États-Unis, à mener des échanges officiels et à renforcer les relations de fond entre les États-Unis et Taïwan.

Cette démarche viole gravement le principe d’une seule Chine et les dispositions des trois communiqués conjoints entre la Chine et les États-Unis, porte gravement atteinte à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Chine et envoie un signal erroné aux forces sécessionnistes visant l’« indépendance de Taïwan ».

La Chine est fermement opposée à cette démarche et la condamne fermement. »

De tout cela, la Chine tire une conclusion très claire. S’il faut envahir l’île de Taïwan, elle le fera et assumera la guerre contre les États-Unis.

« La question de Taïwan est au cœur des intérêts fondamentaux de la Chine et constitue la première ligne rouge à ne pas franchir dans les relations sino-américaines.

L’« indépendance de Taïwan » est incompatible avec la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan et constitue une impasse. En réponse aux graves méfaits de la collusion entre les États-Unis et Taïwan, la Chine prendra des mesures fermes et résolues pour préserver la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale. »

D’ailleurs, la Chine menace ouvertement les États-Unis en les exhortant à « éviter de s’engager davantage sur la voie erronée et dangereuse », celle de l’indépendance de Taïwan.

L’opération du 8 au 10 avril 2023 ne fut donc pas simplement des représailles, d’ordre symbolique ou diplomatique, mais véritablement un exercice militaire opérationnel.

Mardi 11 avril, malgré la fin de l’exercice, la pression a d’ailleurs été maintenue sur l’île, avec essentiellement une présence navale (une dizaine de bâtiments) et de nombreuses incursions aérienne (avec une vingtaine d’aéronefs) à proximité immédiate de l’île (le passage le plus étroit entre l’île et le continent ne faisant de toutes façons que 130 km).

Dans ce contexte, la polémique internationale concernant les propos du président français est très significative du degré extrême de tension sur la question. Emmanuel Macron a dit ne pas être « suiviste » de Washington, expliquant que « être allié ne signifie pas être vassal ». Autrement dit, il ne compte pas nécessairement suivre l’escalade américaine sur Taïwan comme il l’a fait pour l’Ukraine.

C’est que l’heure et grave et, que ces propos soient fictifs, irréalistes ou même mensongers, cela ne change rien à l’affaire, car ce qui se profile est un nouvel affrontement militaire de grande ampleur.

Et la France n’est pas en reste. Quoi ce cela puisse signifier, il n’est pas anodin que du 9 au 10 avril 2023, la frégate de surveillance Prairial de l’armée française, donc de l’Otan, a navigué dans le corridor maritime entre Taïwan et le continent. Précisément au milieu de l’opération chinoise.

Certes, ce navire, tout comme le Vendémiaire de la même classe, patrouille régulièrement dans la zone. Et il y a beaucoup de navires militaires français en mer de Chine méridionale.

Mais tout de même. On sait bien qu’il n’y a plus de hasard à ce niveau de conflictualité. Et, de toutes façons, tous les aspects de l’Histoire mondiale sont touchés, de plus en plus subordonnés, à la bataille sino-américaine pour l’hégémonie mondiale.

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Échec diplomatique d’Emmanuel Macron en Chine

La France ne pèse plus rien.

Emmanuel Macron a effectué une visite d’État en République populaire de Chine du 5 au 7 avril 2023. Il avait fait beaucoup de bruit avant sa visite, en prétendant notamment obtenir des choses de la Chine à propos de l’Ukraine. Il n’a rien obtenu du tout, bien au contraire.

C’est un échec très significatif, confirmant largement la nouvelle situation mondiale.

La France n’est plus qu’une puissance mondiale secondaire, bien qu’elle entende maintenir la fiction de son rang et de son indépendance. La Chine s’accommode très bien de ce cinéma, avec l’idée qu’il ne faut jamais insulter l’avenir – le régime français pouvant tout à fait changer et s’aligner un jour sur la Chine, ni insulter le présent – il y a beaucoup d’affaires à faire avec la France et l’Europe de l’ouest.

Mais la Chine regarde la France de très haut et tient tout à fait son rang d’un point de vue international. Ainsi, elle n’a pas changé d’un iota sa position sur la question ukrainienne, alors que la visite française contribue au contraire à renforcer sa crédibilité internationale.

Cela est absolument flagrant à la lecture de l’ensemble des compte-rendu et communiqués officiels publié lors de cette rencontre. C’est particulièrement visible à la lecture des 51 points de la Déclaration conjointe des deux pays publiée le 7 avril 2023, que nous reproduisons ci-après.

La France est membre de l’Otan, elle est entièrement alignée sur la politique américaine anti-russe, elle fournie des armes à l’Ukraine, elle adule le fanatique président ukrainien Zelensky… Mais elle prétend donner des gages de sérieux à la superpuissance chinoise, qui prétend être au dessus du lot et être pratiquement la seule force pour la paix, alors qu’elle vient de conclure une alliance historique avec la Russie !

La position française est non pas seulement un échec (de son point de vue), mais également une farce. Et c’est une farce dont profite habilement la Chine dans son développement en tant que grande puissance. D’autant plus que la France lui donne des gages sur d’autres sujets tels que l’écologie.

On remarquera au passage que la Chine refait dire à la France (et accessoirement à la Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen qui accompagnait Emmanuel Macron) le soutien à la reconnaissance de la Chine unique, ce qui s’oppose à la reconnaissance de Taïwan. C’est même inscrit dès le 6e point de la Déclaration franco-chinoise, bien avant toutes les questions ukrainiennes.

Pour le reste, il y a surtout entre les deux pays beaucoup de considérations économiques avec une fuite en avant total dans le capitalisme qui est assumé de part et d’autre : exploitation animale, nucléaire, aviation, technologie 5G, etc.

La France s’imagine ici probablement s’en sortir en manœuvrant habilement en eaux troubles grâce à son préstige et son porte-monnaie. Mais son échec diplomatique sur la question de l’Ukraine est la preuve qu’on ne peut pas échapper à l’Histoire, donc à la crise, donc à la la grande bataille pour le repartage du monde, donc à la 3e guerre mondial. La France va bientôt se fracasser contre le grand mur de l’Histoire.

La Chine quant à elle développe habilement et sereinement son rang de superpuissance mondiale, prête à l’affrontement avec la superpuissance américaine dans tous les domaines.

Voici donc le document scellant les échanges et accords entre les deux diplomaties à l’issue de cette visite.

« Déclaration conjointe entre la République française et la République populaire de Chine

A l’invitation de M. Xi Jinping, Président de la République populaire de Chine, M. Emmanuel Macron, Président de la République française, a effectué, du 5 au 7 avril 2023, une visite d‘Etat en République populaire de Chine.

A l’approche du 60e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la Chine et la France, les deux Chefs d’État ont rappelé la solidité du fondement des relations entre les deux pays et l’amitié entre les deux peuples. Ils ont évoqué en profondeur leurs vues sur la relation bilatérale, la relation UE – Chine et les grandes questions régionales et internationales et décidé de lancer de nouvelles perspectives pour la coopération franco-chinoise, et de rechercher une nouvelle impulsion pour les relations entre l’Union Européenne et la Chine, dans la continuité des déclarations conjointes adoptées le 9 janvier 2018, le 25 mars 2019 et le 6 novembre 2019.

I. Renforcer le dialogue politique et promouvoir la confiance politique mutuelle

1.La France et la Chine maintiendront des rencontres annuelles entre les deux Chefs d’État.

2.La France et la Chine soulignent l’importance des échanges de haut niveau, de leur dialogue stratégique, de leur dialogue économique et financier de haut niveau et de leur dialogue de haut niveau sur les échanges humains pour favoriser le développement de leur coopération bilatérale, et conviennent de tenir une nouvelle session desdits dialogues avant la fin de l’année.

3.La France et la Chine réaffirment leur volonté de poursuivre le développement continu de leur partenariat global stratégique étroit et solide, sur la base du respect mutuel de leur souveraineté, et de leur intégrité territoriale et de leurs intérêts majeurs.

4.La France et la Chine s’accordent à approfondir les échanges sur les questions stratégiques et notamment à approfondir le dialogue entre le Théâtre Sud de l’Armée populaire de libération de la Chine et le Commandement des forces françaises en Zone Asie-Pacifique (ALPACI), afin de renforcer la compréhension mutuelle des enjeux de sécurité régionaux et internationaux.

5.La Chine, en cette année du 20ème anniversaire de l’établissement du partenariat stratégique global Chine-UE, réaffirme son engagement dans le développement des relations UE-Chine, encourage les échanges à haut niveau afin de favoriser les convergences de vues sur les enjeux stratégiques, d’accroître les échanges humains, de répondre ensemble aux enjeux globaux et de promouvoir une coopération économique de façon proactive et équilibrée. La France, en tant qu’Etat membre de l’Union européenne, partage ces orientations et y apportera sa contribution.

6.La France réaffirme son attachement à la politique d’une seule Chine.

II. Promouvoir ensemble la sécurité et la stabilité dans le monde

7.La France et la Chine, membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies, œuvrent ensemble à la recherche de solutions constructives, fondées sur le droit international, aux défis et aux menaces qui pèsent sur la sécurité et la stabilité internationales. Elles estiment que les divergences et les différends entre Etats doivent être réglés de manière pacifique par le dialogue et les consultations. Elles cherchent à renforcer le système international multilatéral sous l’égide des Nations Unies, dans un monde multipolaire.

8.La France et la Chine réitèrent leur endossement de la Déclaration conjointe des Chefs d’État et de gouvernement de la Chine, de la France, de la Russie, du Royaume-Uni et des États-Unis (P5) du 3 janvier 2022 pour prévenir la guerre nucléaire et éviter les courses aux armements. Comme le rappelle cette déclaration, « une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée ». Les deux pays appellent à s’abstenir de toute action susceptible d’agraver les risques de tensions.

9.Les deux pays entendent renforcer la coordination et la coopération pour préserver ensemble l’autorité et l’efficacité du régime de contrôle des armements et de non-prolifération et faire avancer le processus international de contrôle des armements. La France et la Chine réaffirment leur engagement à promouvoir de manière équilibrée les trois piliers du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) que sont le désarmement nucléaire, la non-prolifération nucléaire et l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire, et à renforcer sans cesse l’universalité, l’autorité et l’efficacité du TNP.

10.Les deux parties soutiennent tout effort en faveur du retour de la paix en Ukraine sur la base du droit international et des buts et principes de la Charte des Nations unies.

11.Les deux parties s’opposent aux attaques armées contre les centrales nucléaires et les autres installations nucléaires pacifiques, soutiennent l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) dans ses efforts pour jouer un rôle constructif dans la promotion de la sûreté et de la sécurité des installations nucléaires pacifiques y compris pour assurer la sureté et la sécurité de la centrale de Zaporijjia.

12.Les deux pays soulignent l’importance que toutes les parties au conflit doivent observer scrupuleusement le droit international humanitaire. Ils appellent en particulier à protéger les femmes et les enfants, victimes du conflit, et à accroître les aides humanitaires aux zones de conflit, et à fournir un accès sûr, rapide et sans entrave de l’aide humanitaire conformément aux engagements internationaux.

13.Les deux pays poursuivront leurs consultations dans le cadre du dialogue stratégique franco-chinois.

14.La conclusion du Plan d’action global commun sur le nucléaire iranien (JCPoA) en 2015 a constitué un acquis important de la diplomatie multilatérale. La France et la Chine réitèrent leur engagement à promouvoir un règlement politique et diplomatique sur le dossier nucléaire iranien. Elles réitèrent leur engagement à œuvrer à la préservation du régime international de non-prolifération nucléaire ainsi que de l’autorité et de l’efficacité des résolutions du Conseil de Sécurité. Elles réitèrent leur soutien à l’Agence internationale de l’énergie atomique dans ce cadre.

15.La France et la Chine poursuivront des consultations étroites sur la péninsule coréenne.

16.Les deux pays conviennent de continuer leurs échanges via le dialogue franco-chinois sur les questions cyber.

III. Promouvoir les échanges économiques

17.La France et la Chine s’engagent à accorder des conditions de concurrence équitables et non-discriminatoires aux entreprises, notamment dans les domaines des cosmétiques, des produits agricoles et agroalimentaires, de la gestion du trafic aérien, de la finance (banques, assurances, gestionnaires d’actifs), de la santé (matériel médical, vaccins), et encore de l’énergie, des investissements et du développement durable. Pour ce faire, les deux pays travaillent à fournir un bon environnement à la coopération des entreprises, à améliorer l’accès des entreprises au marché de l’autre, à améliorer l’environnement d’affaires, et à garantir le respect des droits de propriété intellectuelle de l’ensemble des entreprises des deux pays. Dans le domaine de l’économie numérique, y compris en matière de 5G, la partie française s’engage à poursuivre le traitement équitable et non-discriminatoire des demandes de licences des entreprises chinoises sur la base des lois et règlements y compris en matière de sécurité nationale des deux pays.

18.La France et la Chine entendent continuer de renforcer leur coopération pragmatique dans tous les domaines du secteur des services, et soutiennent les échanges économiques et commerciaux entre les institutions et les entreprises des deux pays sur la base du bénéfice mutuel, en vue de promouvoir le développement du commerce des services. La France est prête à accepter l’invitation à participer à la Foire internationale du commerce des services en Chine (CIFTIS) de 2024 en tant que pays invité d’honneur.

19.La France et la Chine souhaitent intensifier leur partenariat dans les domaines agricole, agroalimentaire, vétérinaire et phytosanitaire. Elles se félicitent de la sécurisation de l’accès au marché des produits porcins, de l’ouverture de marché pour le baby kiwi et pour les protéines laitières en alimentation animale, ainsi que de l’agrément délivré à 15 établissements exportateurs de viande porcine. Les autorités compétentes des deux pays répondront dans les meilleurs délais aux futures demandes d’agrément des entreprises exportatrices de produits agricoles et agroalimentaires, notamment de viande et d’aquaculture, aux demandes d’enregistrement des recettes de lait infantile, qui répondent aux exigences prévues par leurs lois et règlements sur la sécurité sanitaire des aliments, ainsi qu’aux demandes d’ouverture de marché formulées par leurs autorités respectives. Les deux parties poursuivront leurs échanges et leur coopération dans les filières des bovins allaitants et de la viticulture, ainsi que sur les indications géographiques (IG), en particulier pour l’enregistrement des IG des vins de Bourgogne. La France soutiendra la demande que la Chine déposera pour adhérer à l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV) dans les meilleurs délais, ainsi que l’organisation par la Chine d’une conférence internationale sur la filière vitivinicole.

20.La France et la Chine saluent la conclusion d’un « General Terms Agreement » concrétisant l’acquisition par les compagnies chinoises de 160 aéronefs Airbus. Elles étudieront en temps opportun les besoins des compagnies aériennes chinois, notamment en matière de fret et de long-courrier, en fonction de la reprise et du développement du marché du transport et du parc aérien chinoises. Les deux parties saluent le renforcement de la coopération entre l’Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA) et l’Administration de l’aviation civile de Chine (CAAC), et poursuivront l’accélération du processus de certification sur la base de standards de sécurité internationaux reconnus mutuellement, notamment s’agissant des programmes H175, Falcon 8X et Y12F. Elles saluent la conclusion d’un accord entre les entreprises des deux pays sur les carburants d’avion durables. Elles poursuivent par ailleurs la coopération industrielle engagée, notamment le projet de la nouvelle chaîne d’assemblage d’Airbus à Tianjin.

21.La France et la Chine soutiennent la reprise dans le meilleur délai de la connectivité aérienne à son niveau pré-pandémique, de manière coordonnée entre les autorités de l’aviation civile et dans la perspective d’un retour à l’application de l’Accord entre le gouvernement de la République populaire de Chine et le gouvernement de la République française relatif au transport aérien signé le 1er juin 1966 et aux arrangements concernés sur les libertés aériennes. Les compagnies des deux pavillons doivent bénéficier de possibilités justes et égales dans l’exploitation de vols entre les deux pays. Elles soutiennent l’approfondissement des échanges humains et économiques, y compris la facilitation de la délivrance de visas pour les acteurs du secteur privé et de la communauté d’affaires.

22.Les deux parties se félicitent de la coopération entre les institutions spatiales des deux pays concernant la sonde Chang’e 6 et les études conjointes des échantillons extraterrestres.

23.Dans leur volonté commune d’une transition vers un système énergétique décarboné, la France et la Chine développent une coopération pragmatique dans le domaine du nucléaire civil dans le cadre de l’Accord de coopération pour les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire entre les deux gouvernements. Les deux pays s’attachent à poursuivre leur coopération nucléaire sur des sujets de pointe en matière de recherche et de développement, notamment sur la base de l’accord entre l’Autorité de l’énergie atomique de Chine (CAEA) et le Commissariat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives (CEA). Les deux pays soutiennent l’étude par les entreprises des deux pays de la possibilité de renforcer leurs coopérations industrielles et technologiques, notamment sur la question du retraitement des déchets nucléaires.

24.La France et la Chine saluent les résultats obtenus par l’accord intergouvernemental de 2015 sur les partenariats en marchés tiers. Les deux parties œuvrent au suivi et à la mise en œuvre des projets de coopération en marché tiers déjà identifiés. Les deux gouvernements encouragent les entreprises, les institutions financières et d’autres acteurs à explorer de nouveaux projets de coopération économique structurants sur les marchés tiers, sur la base de standards internationaux élevés applicables.

IV. Relancer les échanges humains et culturels

25.Soucieuses de promouvoir la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles dans le monde, la France et la Chine soutiennent I’approfondissement de leur coopération dans le domaine de la création et de la valorisation des œuvres culturelles et favoriseront une reprise dynamique des échanges et coopérations dans les domaines culturel et touristique. Les deux pays saluent la conclusion d’une déclaration d’intention relative à la coopération dans le domaine de la culture entre les deux ministères de la Culture.

26.Les deux parties coorganiseront l’Année franco-chinoise du tourisme culturel en 2024 et soutiennent l’organisation en France et en Chine d’évènements de haute qualité, notamment entre le Château de Versailles et la Cité Interdite ainsi qu’entre le Centre Pompidou et le Musée West Bund. Les deux parties s’engagent à faciliter la circulation des expositions dans le respect des lois des deux pays, notamment dans les aspects douaniers et logistiques, et s’efforceront de garantir l’intégrité et le retour des œuvres exposées au public dans le cadre des expositions soutenues.

27.Les deux parties réaffirment leur volonté de renforcer la coopération dans le domaine des industries culturelles et créatives, et leur potentiel de diffusion au public le plus large, en particulier dans les secteurs de la littérature, du cinéma, du documentaire télévisé, de l’Edition (jeu vidéo compris), de la musique, de l’ architecture et du numérique au travers de coproductions, de partenariats en matière de droit d’auteur, de concours et d’échanges d’artistes.

28.La France et la Chine s’engagent à intensifier leur coopération bilatérale dans le domaine de la protection, de la restauration et de la valorisation du patrimoine culturel. Les deux pays saluent la conclusion d’une feuille de route sur la coopération patrimoniale portant notamment sur la présence d’experts chinois aux côtés des équipes françaises sur le chantier de restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris, sur la coopération en matière de protection, de restauration et d’étude de l’armée de terre cuite, sur les projets de coopération autour du temple de Gongshutang et du tombeau Maoling et sur la promotion du jumelage de sites français et chinois du patrimoine mondial. Les deux pays poursuivront des efforts conjoints pour la prévention et la lutte contre le vol, les fouilles clandestines, l’importation et l’exportation illicites des biens culturels. Ils réaffirment leur plein soutien à la fondation ALIPH pour la protection du patrimoine dans les zones de conflit.

29.La France et la Chine réaffirment l’importance qu’elles attachent à la coopération sur l’enseignement de la langue de l’autre, par laquelle se forgent l’amitié et la compréhension mutuelles. Elles travailleront au renouvellement de l’Accord de coopération linguistique entre les deux gouvernements signé en juin 2015, encourageront le développement de l’enseignement des deux langues dans les établissements scolaires des deux parties et la multiplication des filières bilingues et favoriseront les échanges et la formation de professeurs de langues.

30.La France et la Chine réitèrent leur attachement au renforcement de la coopération en matière d’enseignement supérieur et de formation professionnelle. Elles encourageront le développement des partenariats entre les établissements d’enseignement supérieur, tels que les instituts franco-chinois, et favoriseront ensemble la reprise réciproque de la mobilité des étudiants et des enseignants. Elles faciliteront également les échanges entre les établissements scolaires. A ces fins, les deux parties établissent une procédure facilitée d’obtention de visas pour ces publics. Les deux parties organiseront au plus tôt une nouvelle session de la commission mixte franco-chinoise en matière d’éducation.

31.Les deux Chefs d’État s’accordent pour que se tienne dans les meilleurs délais la prochaine Commission mixte franco-chinoise en matière de science et technologie pour définir les grandes orientations de la coopération scientifique bilatérale mais aussi du « centre conjoint franco-chinois pour la neutralité carbone », destiné à favoriser les coopérations scientifiques et technologiques dans le domaine de la neutralité carbone. La France et la Chine souhaitent promouvoir les échanges de chercheurs, notamment à travers le programme de partenariat scientifique franco-chinois (le partenariat Hubert Curien – Cai Yuanpei). Les deux parties entendent également poursuivre la mise en œuvre du programme « Jeunes Talents France-Chine » afin de renforcer les échanges entre jeunes chercheurs des deux pays et promouvoir la coopération dans les domaines prioritaires et le développement d’activités de recherche conjointes.

32.Dans la perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris en 2024, les deux Chefs d’États souhaitent faire du sport un élément important de la relation bilatérale, notamment en matière d’échanges de jeunes sportifs, de développement d’infrastructures sportives et de partage d’expertise en matière d’industrie du sport.

V. Répondre conjointement aux défis planétaires

33.Dans le contexte de crises alimentaires ayant touché 323 millions de personnes en 2022 selon les Nations Unies, les deux parties s’engagent à préserver la stabilité des marchés, à éviter les restrictions d’exportations injustifiées d’intrants ainsi que de produits agricoles et à fluidifier les chaînes d’approvisionnement alimentaires mondiales, à commencer par la facilitation des exportations de produits céréaliers et d’engrais. Les deux parties œuvrent à la réalisation de ces objectifs, notamment à travers l’initiative Food and Agriculture Resilience Mission (FARM) et l’initiative chinoise pour la sécurité alimentaire globale.

34.La France et la Chine sont convenues de l’importance d’accroître l’appui apporté aux pays les plus affectés par la crise alimentaire, dont leurs partenaires africains, pour construire des systèmes alimentaires résilients et durables. Les deux parties entendent à ce titre promouvoir la coopération internationale contre les pertes et le gaspillage alimentaires et pour la production locale. Elles apportent dans cette perspective un soutien conjoint aux organisations compétentes pour le règlement du problème de l’insécurité alimentaire, notamment l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le Fonds international pour le développement agricole (FIDA), et le Programme alimentaire mondial (PAM) ainsi qu’aux institutions financières et aux bailleurs multilatéraux et bilatéraux.

35.La France et la Chine soulignent leur soutien au système commercial multilatéral centré sur l’OMC et reposant sur des règles, s’engagent à construire un environnement de commerce et d’investissement libre, ouvert, transparent, inclusif et non-discriminatoire, soutiennent la réforme nécessaire de l’OMC et soutiennent que la 13e Conférence ministérielle de l’OMC aboutisse à des résultats positifs.

36.La France et la Chine entendent coopérer pour remédier aux difficultés d’accès aux financements dans les économies en développement et émergentes et pour encourager une accélération de leur transition énergétique et climatique tout en soutenant leur développement durable. La Chine participera au Sommet pour un nouveau pacte financier mondial à Paris en juin 2023. La France participera au troisième Forum « la Ceinture et la Route » pour la coopération internationale.

37.Les deux pays conviennent de renforcer la coopération dans le cadre du G20 pour que le G20 joue son rôle en tant que forum majeur de la coopération économique mondiale et travaille, conformément aux engagements pris par les dirigeants lors du Sommet de Bali, à faire avancer la réforme du système monétaire et financier international.

38.La France et la Chine soutiennent, dans un contexte de fragilisation des pays en développement la mise en œuvre du Cadre commun pour les traitements de dette adopté par le G20 et le Club de Paris qu’elles ont rejoint en novembre 2020. Les deux parties réitèrent leur engagement à la mise en oeuvre du cadre commun en temps opportun, de manière prévisible, ordonnée et coordonnée, ainsi que leur soutien à l’agenda de la dette adopté lors de la réunion des ministres des Finances et des gouverneurs des banques centrales du G20 en février 2023.

39.Les deux parties apprécient que le Sommet du G20 de Bali ait salué les engagements d’affectation volontaires des droits de tirage spéciaux (DTS) et appellent les États-membres du G20 et les États volontaires à accroître leur mobilisation, avec un relèvement de l’effort à hauteur de 30% de DTS mobilisés pour les pays du G20, afin d’atteindre rapidement l’objectif de 100 milliards de dollars américains adopté lors du Sommet du G20 de Rome.

40.Le climat, la biodiversité et la lutte contre la dégradation des terres comptent parmi les priorités partagées par la France et la Chine. Les deux pays s’engagent à poursuivre un haut niveau d’ambition dans la continuité de l’Appel de Pékin lancé en novembre 2019 et dans le cadre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et de son Accord de Paris, ainsi que du Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal (dénommé ci-après « Cadre de Kunming-Montréal »), dont les deux parties saluent l’adoption lors de la deuxième partie de la Convention sur la diversité biologique (COP15). La Chine, assumant la présidence de la COP15 pour les deux ans à venir, entend travailler activement avec la France à la mise en œuvre totale et efficace du Cadre de Kunming-Montréal. La France et la Chine saluent la contribution active du Fonds de Kunming et de la facilité qui sera créée sous le Fonds pour l’environnement mondial au financement de la biodiversité. Les deux pays saluent les travaux qui ont été présentés lors du One Forest Summit à Libreville.

41.La France et la Chine s’engagent à communiquer d’ici la COP16 leurs stratégies et plans d’actions nationaux révisés et alignés sur le cadre mondial pour la biodiversité. La Chine examinera favorablement la possibilité de rejoindre la Coalition de la haute ambition pour la nature et les peuples. Les deux pays contribuent à l’objectif de réduction de 500 milliards de dollars américains par an des subventions néfastes pour la biodiversité.

42.La France et la Chine réaffirment leurs engagements respectifs de neutralité climat/neutralité carbone. La France s’engage à réaliser la neutralité climat d’ici 2050. La Chine s’engage à atteindre le pic des émissions de CO2 avant 2030 et s’efforce de réaliser la neutralité carbone avant 2060. Les deux pays adopteront des politiques et des mesures pour mettre en œuvre leurs objectifs fixés en matière de contributions déterminées au niveau national alignées avec les objectifs de l’Accord de Paris.

43.Les deux parties apprécient hautement les acquis obtenus lors de la COP27 sur le changement climatique, et s’engagent à maintenir d’étroits échanges et coordinations sur le chemin vers la COP28, pour que le premier bilan mondial de l’Accord de Paris soit un succès et que des avancées encourageantes soient enregistrées sur les sujets tels que l’atténuation, l’adaptation, les pertes et les préjudices, ainsi que les moyens de mise en œuvre.

44.La France et la Chine soutiennent la promotion et le développement de financements contribuant à la transition écologique. Elles encouragent leurs secteurs financiers (dont les banques, assureurs, gestionnaires et propriétaires d’actifs) à aligner leurs activités sur les objectifs d’atténuation et d’adaptation au changement climatique, ainsi que ceux de préservation de la biodiversité, de développement de l’économie circulaire, de gestion, de contrôle et de réduction de la pollution ou la finance bleue. La France et la Chine encouragent également les échanges entre les agences et banques de développement, les banques centrales, les régulateurs et les autorités financières en matière de finance verte et durable, dans l’objectif de partager leurs expériences et de promouvoir la mise en place et le perfectionnement des standards, y compris en matière de normalisation de l’information extra-financière. Elles s’engagent à soutenir le développement des marchés de capitaux durables.

45.La France et la Chine, conscientes de la part importante du secteur du bâtiment dans leurs émissions de gaz à effet de serre, étudient activement l’adhésion à l’initiative Buildings breakthrough. Les deux pays renforcent leur coopération pour promouvoir la réduction de la consommation d’énergie et la décarbonation des bâtiments et favoriser un développement urbain durable.

46.La France et la Chine se mobilisent pour la protection de l’Océan. Les deux pays se félicitent de la finalisation par la Conférence intergouvernementale sur la biodiversité marine des zones situées au-delà de la juridiction nationale (BBNJ) d’un texte visant à assurer la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale et continuent à renforcer leurs échanges et leur coordination dans le cadre du processus de suivi de ce texte. Les deux Chefs d’États réaffirment que les deux parties œuvreront à promouvoir la conservation des ressources marines vivantes de l’Antarctique conformément à la Convention sur la conservation de la faune et la flore marines de l’Antarctique et poursuivent les discussions sur l’établissement d’aires marines protégées en Antarctique. La France et la Chine s’engagent dans la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable et ont créé un comité national, respectivement en 2021 et en 2022, afin de souligner l’importance de la connaissance pour mieux protéger les océans. Elles reconnaissent l’importance de la lutte contre la pêche illégale, non déclarée et non réglementée.

47.La France et la Chine se mobilisent pour le succès de la Conférence des Nations Unies sur les océans en 2025 co-présidée par la France et le Costa Rica. La partie chinoise examinera la feuille de route proposée par la partie française et liant leurs présidences respectives de la COP15 de Kunming sur la biodiversité et la troisième Conférence des Nations Unies sur les Océans qui se tiendra à Nice en 2025.

48.La France et la Chine luttent contre la pollution générée par les plastiques (y compris les microplastiques), soutiennent et s’engagent dans les travaux du Comité intergouvernemental de négociations mandaté par les résolutions 5/14 adoptées lors de la reprise de la cinquième session de l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement (ANUE-5.2), œuvrent à l’adoption d’un instrument international juridiquement contraignant.

49.La France et la Chine s’engagent à protéger et gérer durablement les écosystèmes forestiers, à soutenir la recherche scientifique sur des chaînes de valeur plus durables et à lutter contre l’exploitation forestière illégale et le commerce qui y est associé. Elles entendent faire avancer la coopération sur la conservation de la nature ainsi que la protection, la restauration et l’utilisation durable de la steppe. La France et la Chine se réjouissent dans ce cadre de la coopération active entre l’Office français de la biodiversité (OFB) et l’Administration nationale des forêts et des prairies (NFGA) de la Chine.

50.La France et la Chine travailleront de concert pour une transition énergétique plus juste dans les pays en développement à travers des partenariats de transition énergétique juste et d’autres outils.

51.La France et la Chine soulignent l’importance, pour le développement de chaque pays, de la promotion et de la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales conformément aux buts et principes de la Charte des Nations Unies. Fin »

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Guerre

La Finlande intègre l’Otan

Un revirement historique renforçant la guerre.

La Finlande, petit pays de 5 millions et demi d’habitants, avait après la deuxième guerre mondiale, en 1948, signé un « traité d’amitié » et de coopération avec l’URSS. Après 1991, elle maintenait une position de non-alignement, restant systématiquement neutre par rapport à la Russie.

C’est donc un revirement historique qui s’est produit le 4 avril 2023 avec l’officialisation de l’intégration de la Finlande à l’Otan. Plus de neutralité donc, mais une hostilité assumée, en choisissant de se soumettre entièrement à la superpuissance américaine dont l’Otan est l’instrument politico-militaire international.

L’opinion publique finlandaise a été travaillée au corps en ce sens pendant des années par la propagande occidentale. C’était ambigu, en raison de l’officielle « finlandisation » régnante depuis la guerre froide, c’est-à-dire une neutralité affichée, même si en douce derrière l’armée finlandaise s’alignait discrètement sur l’Otan.

Mais la tendance à la guerre a rendu le processus inéluctable. En 2022, après l’invasion russe en Ukraine, ce fut un déchaînement pro-occidental, avec carrément le Premier ministre Sanna Marin annonçant qu’elle allait fournir des armes à l’Ukraine, contre la Russie.

A l’arrière-plan, tout le fond nationaliste du régime finlandais – du même type que celui en Suède, à la fois indirect et absolu – a été systématisé. Les bases idéologiques même de l’État finlandais partent de l’écrasement de la très puissante révolution finlandaise de 1918.

La Finlande était d’ailleurs alliée à l’Allemagne nazie pendant la seconde guerre mondiale. Un fasciste comme Lauri Törni, qui est passé de l’armée nazie à l’armée américaine au Vietnam, est célébré par les institutions finlandaises comme si de rien n’était.

Consciente de la situation avec plus de mille kilomètres de frontières avec l’Otan, la Russie est évidemment très mécontente. L’adhésion finlandaise est vue par elle comme un acte d’hostilité majeure, une « atteinte à sa sécurité ». Des « contre-mesures » ont été promises en retour.

Il ne faut pas se leurrer et nous l’avions expliqué dès mai 2022 : désormais Helsinki est une cible pour les armes atomiques russes, et il suffit de regarder la carte pour le comprendre.

La superpuissance américaine qui s’est arrogée l’Ukraine après s’être arrogée l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie, continue donc sa stratégie d’encerclement et de pression sur la Russie.

La guerre mondiale pour le repartage du monde avance d’un nouveau pas, les blocs se forment, se renforcent et s’affrontent de plus en plus ouvertement.

Voici le communiqué, historique, de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord qui s’en prend ouvertement à Vladimir Poutine, dans le but assumé d’envenimer les choses.

« Ce jour (4 avril 2023), la Finlande est devenue le 31e pays membre de l’OTAN en remettant aux États-Unis, au siège de l’OTAN à Bruxelles, son instrument d’accession au Traité de l’Atlantique Nord. Le protocole d’accession de la Finlande a été signé par les autorités des pays de l’Alliance le 5 juillet 2022 et ratifié ensuite par les 30 parlements nationaux.

« Nous souhaitons à la Finlande la bienvenue au sein de l’Alliance », a déclaré le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, après que le ministre finlandais des Affaires étrangères, Pekka Haavisto, a remis l’instrument d’accession de la Finlande au gouvernement des États-Unis, représenté par le secrétaire d’État, Antony Blinken. Le secrétaire général a ensuite accueilli le président finlandais, Sauli Niinistö, au siège de l’OTAN pour une cérémonie de lever des couleurs afin de célébrer l’adhésion du pays à l’Alliance.

S’exprimant avant la cérémonie, le secrétaire général a remercié le président Niinistö pour ses grandes qualités de dirigeant et pour avoir amené la Finlande à intégrer l’Alliance qui, dans l’histoire, a le mieux réussi.

« Je suis extrêmement fier d’accueillir la Finlande en tant que membre à part entière de l’Alliance, et je me réjouis à la perspective d’accueillir également la Suède dès que possible », a-t-il déclaré.

Et d’ajouter « L’adhésion à l’OTAN est bénéfique pour la Finlande, bénéfique pour la sécurité nordique et bénéfique pour l’Alliance dans son ensemble ». Le secrétaire général a en outre fait observer que l’adhésion de la Finlande montre au monde que le président Poutine a échoué à « fermer la porte de l’OTAN ». « Alors qu’il voulait moins d’OTAN, il a obtenu tout le contraire : plus d’OTAN, et la porte de l’Alliance qui reste grande ouverte », a-t-il déclaré.

L’hymne national finlandais et l’hymne de l’OTAN ont été joués tandis que le drapeau finlandais était hissé pour la première fois au siège de l’OTAN, en présence du président Niinistö, du ministre des Affaires étrangères, M. Haavisto, du ministre de la Défense, M. Kaikkonen, des ministres des Affaires étrangères de tous les pays de l’Alliance et du pays invité, la Suède. Des cérémonies de lever des couleurs ont eu lieu simultanément au Commandement allié Opérations (SHAPE), à Mons (Belgique), et au Commandement allié Transformation, à Norfolk, en Virginie (États-Unis).

Se tenant aux côtés du président Niinistö, le secrétaire général a déclaré : « La Finlande est plus sûre et l’OTAN est plus forte avec la Finlande comme Allié. Vos forces sont conséquentes et très performantes, votre résilience est exceptionnelle, et depuis de nombreuses années des soldats finlandais et des soldats de pays de l’OTAN œuvrent côte à côte en tant que partenaires. À partir d’aujourd’hui, nous sommes solidaires en tant qu’Alliés. » »

Il va de soi que l’idée est de faire intervenir la Finlande sur le terrain – celle-ci se voyant promise une partie de la Russie. L’opinion publique finlandaise ne peut pas ne pas le savoir. C’est là qu’on va comment la marche à la guerre est irrépressible, les éléments se surajoutant, formant un engrenage.