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Le « Manifeste pour l’accueil des migrants » : antipopulaire par excellence

Les médias de la gauche postindustrielle Politis, Regards et Mediapart ont publié un « manifeste » en faveur de « l’accueil des migrants », signé par 150 figures de la bourgeoisie intellectuelle. Assimilant de manière outrancière migrants et réfugiés, dénonçant comme facho qui propose tout type de régulation, le manifeste exige qu’on accepte totalement un phénomène migratoire considéré comme inéluctable et massif à l’avenir.

Pour juger d’une chose, il faut voir de qui elle vient. Le « Manifeste pour l’accueil des migrants » a comme source des philosophes, des écrivains, des professeurs de grandes écoles, des comédiens, des avocats, des éditeurs, des historiens, des sociologues, des présidents d’associations… Cela veut tout dire.

Face aux phénomènes modernes, la gauche postindustrielle, postmoderne, n’a qu’une seule thèse : accompagner. La PMA, la GPA ? Incontournable, il faut accompagner. Le cannabis ? On n’y peut rien, accompagnons. Les migrations ? Il faut accepter et accompagner… C’est la négation de toute utopie, de toute planification, de toute régulation et surtout de toute autorité de gauche, au profit d’un vrai libéralisme sur le plan de la culture, des mœurs, des normes, des principes.

Le « Manifeste pour l’accueil des migrants » publié par Politis, Regards et Mediapart est un exemple de ce discours. Alors que nous vivons depuis de nombreuses années maintenant dans une Union Européenne qui a fait tomber les frontières pour mieux faire avancer le capitalisme, les 150 signataires de ce manifeste prétendent que ce serait révolutionnaire que de refuser toute régulation :

« Il est illusoire de penser que l’on va pouvoir contenir et a fortiori interrompre les flux migratoires. À vouloir le faire, on finit toujours par être contraint au pire. La régulation devient contrôle policier accru, la frontière se fait mur. Or la clôture produit, inéluctablement, de la violence… et l’inflation de clandestins démunis et corvéables à merci. Dans la mondialisation telle qu’elle se fait, les capitaux et les marchandises se déplacent sans contrôle et sans contraintes ; les êtres humains ne le peuvent pas. Le libre mouvement des hommes n’est pas le credo du capital, ancien comme moderne.

Dans les décennies qui viennent, les migrations s’étendront, volontaires ou contraintes. Elles toucheront nos rivages, et notre propre pays, comme aujourd’hui, aura ses expatriés (…). Nous ne composerons pas avec le fonds de commerce de l’extrême droite. La migration n’est un mal que dans les sociétés qui tournent le dos au partage. »

Cela n’est pas de gauche, la Gauche a toujours historiquement considéré les migrations comme un problème, tant pour les travailleurs qui émigrent et perdent leurs familles, leur propre pays, que pour les travailleurs du pays d’accueil qui voient une main d’œuvre bon marché utilisée comme levier pour affaiblir les salaires et diviser les travailleurs en général.

Sous couvert de solidarité, le « Manifeste pour l’accueil des migrants » ne sert qu’à accompagner le pillage des pays du tiers-monde et le dumping social des patrons. De quel accueil parle-t-on de toutes façons ? Les 150 signataires relèvent d’ailleurs de cette nouvelle Gauche pressée de nier l’existence de la classe ouvrière et vivant confortablement, surtout à Paris. Ce sont des philosophes, des écrivains, des professeurs de grandes écoles, des comédiens, des avocats, des éditeurs, des historiens, des sociologues, des présidents d’associations. Vont-ils accueillir qui que ce soit ?

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Et il y a un autre problème, c’est cette fixation sur les migrations. Les signataires prétendent que les migrations ne sont pas un problème. Pourquoi alors en faire un thème en cette rentrée 2018 ? Les signataires prétendent qu’il y en a qui font des immigrés des boucs-émissaires et des migrations la cause de tous les maux. Soit, c’est ce que fait le Front National, désormais Rassemblement National, depuis près de 40 ans. Est-ce là quelque chose de nouveau ?

Non, en réalité, ce manifeste n’est là que comme contribution au discours en faveur des migrations, en faveur de ce thème de la migration devant empêcher l’émergence de la question ouvrière. Les signataires font d’ailleurs exprès d’assimiler les termes de réfugiés et de migrants, qui n’ont rien à voir.

Les médias favorables à ce manifeste n’ont eu d’ailleurs de cesse ces derniers jours de bombarder de fausses accusations le mouvement allemand Aufstehen de Sahra Wagenknecht, l’accusant d’être une expression raciste à gauche de la Gauche. Scandaleux, vain, ridicule ! Mais qu’attendre de mieux de bourgeois vivant à l’écart du peuple, dans des forteresses intellectuelles entièrement institutionnelles, avec des mœurs n’ayant rien à voir avec celles du peuple, sans parler bien entendu de la vie quotidienne ?

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Peut-on réellement leur expliquer que le capitalisme maintient les frontières tout en les faisant tomber en même temps, car l’expansion du capitalisme est à la fois naturelle, sans frontières, et en même temps vecteur d’une concurrence dont les États sont les cibles ? Peut-on leur dire que lorsque des grandes entreprises à l’esprit conquérant contrôlent des États, cela produit les guerres ?

Non, cela est bien trop dialectique pour eux. Leur raisonnement est qu’il faut soutenir la Gauche post-industrielle, post-moderne, pour les élections européennes. Afin de pouvoir, depuis les cafés parisiens, continuer de donner des leçons de morale au monde entier, et de continuer à ce que soit niée l’existence de la classe ouvrière.

> Lire :  Gauche postindustrielle : le « Manifeste pour l’accueil des migrants »

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Gauche postindustrielle : le « Manifeste pour l’accueil des migrants »

Le « Manifeste pour l’accueil des migrants » a été publié les médias de la gauche postindustrielle Politis, Regards et Mediapart. Notre analyse de ce manifeste : Le « Manifeste pour l’accueil des migrants » : antipopulaire par excellence.

Manifeste pour l’accueil des migrants

Partout en Europe, l’extrême droite progresse. La passion de l’égalité est supplantée par l’obsession de l’identité. La peur de ne plus être chez soi l’emporte sur la possibilité de vivre ensemble. L’ordre et l’autorité écrasent la responsabilité et le partage. Le chacun pour soi prime sur l’esprit public.

Le temps des boucs émissaires est de retour. Oubliées au point d’être invisibles, la frénésie de la financiarisation, la ronde incessante des marchandises, la spirale des inégalités, des discriminations et de la précarité. En dépit des chiffres réels, la cause de nos malheurs serait, nous affirme-t-on, dans la « pression migratoire ». De là à dire que, pour éradiquer le mal-être, il suffit de tarir les flux migratoires, le chemin n’est pas long et beaucoup trop s’y engagent.

Nous ne l’acceptons pas. Les racines des maux contemporains ne sont pas dans le déplacement des êtres humains, mais dans le règne illimité de la concurrence et de la gouvernance, dans le primat de la finance et dans la surdité des technocraties. Ce n’est pas la main-d’œuvre immigrée qui pèse sur la masse salariale, mais la règle de plus en plus universelle de la compétitivité, de la rentabilité, de la précarité.

Il est illusoire de penser que l’on va pouvoir contenir et a fortiori interrompre les flux migratoires. À vouloir le faire, on finit toujours par être contraint au pire. La régulation devient contrôle policier accru, la frontière se fait mur. Or la clôture produit, inéluctablement, de la violence… et l’inflation de clandestins démunis et corvéables à merci. Dans la mondialisation telle qu’elle se fait, les capitaux et les marchandises se déplacent sans contrôle et sans contrainte ; les êtres humains ne le peuvent pas. Le libre mouvement des hommes n’est pas le credo du capital, ancien comme moderne.

Dans les décennies qui viennent, les migrations s’étendront, volontaires ou contraintes. Elles toucheront nos rivages et notre propre pays, comme aujourd’hui, aura ses expatriés. Les réfugiés poussés par les guerres et les catastrophes climatiques seront plus nombreux. Que va-t-on faire ? Continuer de fermer les frontières et laisser les plus pauvres accueillir les très pauvres ? C’est indigne moralement et stupide rationnellement. Politique de l’autruche… Après nous le déluge ? Mais le déluge sera bien pour nous tous !

Il ne faut faire aucune concession à ces idées, que l’extrême droite a imposées, que la droite a trop souvent ralliées et qui tentent même une partie de la gauche. Nous, intellectuels, créateurs, militants associatifs, syndicalistes et citoyens avant tout, affirmons que nous ne courberons pas la tête. Nous ne composerons pas avec le fonds de commerce de l’extrême droite. La migration n’est un mal que dans les sociétés qui tournent le dos au partage. La liberté de circulation et l’égalité des droits sociaux pour les immigrés présents dans les pays d’accueil sont des droits fondamentaux de l’humanité.

Nous ne ferons pas à l’extrême droite le cadeau de laisser croire qu’elle pose de bonnes questions. Nous rejetons ses questions, en même temps que ses réponses.

Personnalités signataires :

Christophe AGUITON sociologue, Christophe ALEVEQUE humoriste et auteur, Pouria AMIRSHAHI directeur de Politis, Ariane ASCARIDE comédienne, Jean-Christophe ATTIAS universitaire, Geneviève AZAM économiste, Bertrand BADIE politiste, Sébastien BAILLEUL DG du CRID, Josiane BALASKO comédienne, Étienne BALIBAR philosophe, Ludivine BANTIGNY historienne, Pierre-Emmanuel BARRE auteur, humoriste, Lauren BASTIDE journaliste, féministe, Christian BAUDELOT sociologue, Edmond BAUDOIN auteur, dessinateur de BD, Alex BEAUPAIN auteur, compositeur, interprète, François BEGAUDEAU écrivain, Yassine BELATTAR humoriste, Hourya BENTOUHAMI philosophe, Alain BERTHO anthropologue, Pascal BLANCHARD historien, Romane BOHRINGER comédienne, Benoît BORRITS chercheur militant, Patrick BOUCHAIN architecte, Alima BOUMEDIENE-THIERY avocate, Rony BRAUMAN médecin, cofondateur de MSF, Michel BROUE mathématicien, Valérie CABANES juriste internationale, Hélène CABIOC’H présidente de l’Ipam, Julia CAGE économiste, Robin CAMPILLO réalisateur, Aymeric CARON écrivain, journaliste François CHAIGNAUD chorégraphe, Patrick CHAMOISEAU écrivan, Paul CHEMETOV architecte, Monique CHEMILLIER-GENDREAU juriste, Mouhieddine CHERBIB Respect des libertés, Jean-Louis COHEN historien, Cristel CORNIL enseignante-chercheuse, Marie COSNAY écrivaine, Annick COUPE syndicaliste Alexis CUKIER philosophe Jocelyne DAKHLIA historienne Jean-Michel DAQUIN architecte Françoise DAVISSE réalisatrice, Philippe DE BOTTON président de Médecins du monde, Laurence DE COCK historienne, Fondation Copernic, Catherine DE WENDEN politologue, Christine DELPHY féministe, Christophe DELTOMBE président de la Cimade, Rokhaya DIALLO journaliste, écrivaine, Georges DIDI-HUBERMAN philosophe, Bernard DREANO président du Cedetim Michel DRU anesthésiste réanimateur Françoise DUMONT présidente d’honneur de la LDH Annie ERNAUX écrivaine, Éric FASSIN sociologue, anthropologue, Corentin FILA comédien, Geneviève FRAISSE philosophe, Bernard FRIOT économiste, philosophe, Isabelle GARO philosophe, Amandine GAY réalisatrice, Raphaël GLUCKSMANN essayiste, Yann GONZALEZ réalisateur, Robert GUEDIGUIAN réalisateur, Nacira GUENIF sociologue, anthropologue, Janette HABEL politologue, Jean-Marie HARRIBEY économiste, Serge HEFEZ psychanalyste, Cédric HERROU militant, associatif Christophe HONORE réalisateur, Eva HUSSON réalisatrice, Thierry ILLOUZ auteur, avocat pénaliste, Pierre JACQUEMAIN rédacteur en chef de Regards, Geneviève JACQUES militante associative, Chantal JAQUET philosophe, JULIETTE chanteuse, parolière, compositrice, Gaël KAMILINDI pensionnaire de la Comédie-Française, Pierre KHALFA syndicaliste, coprésident de la Fondation Copernic, Cloé KORMAN écrivaine, Bernard LAHIRE professeur de sociologie à l’ENS de Lyon, Nicole LAPIERRE anthropologue et sociologue, Mathilde LARRERE historienne, Henri LECLERC président d’honneur de la LDH, Raphaël LIOGIER sociologue, philosophe, Isabelle LORAND chirurgienne, Germain LOUVET danseur étoile de l’Opéra de Paris, Gilles MANCERON historien, LDH, Philippe MANGEOT enseignant, Patrice MANIGLIER philosophe, Philippe MARLIERE politologue, Roger MARTELLI historien, directeur de la publication de Regards, Christiane MARTY ingénieure-chercheuse, Fondation Copernic, Corinne MASIERO comédienne, Gustave MASSIAH altermondialiste, Nicolas MAURY comédien, Marion MAZAURIC éditrice, Caroline MECARY avocate, Philippe MEIRIEU pédagogue, Phia MENARD jongleuse, performeuse, metteur en scène, Céline MERESSE présidente du CICP, Guillaume MEURICE auteur, humoriste, Pierre MICHELETTI médecin, écrivain, Jean-François MIGNARD secrétaire général de la LDH, Véronique NAHOUM-GRAPPE anthropologue, Stanislas NORDEY directeur du Théâtre national de Strasbourg, Ludmila PAGLIERO danseuse étoile à l’Opéra de Paris, Willy PELLETIER sociologue, Fondation Copernic, Nora PHILIPPE auteure, réalisatrice Thomas PIKETTY économiste, Edwy PLENEL journaliste, président et cofondateur de Mediapart, Emmanuel POILANE président du CRID, Thomas PORCHER économiste, Didier PORTE humoriste, Mathieu POTTE-BONNEVILLE philosophe, Olivier PY auteur, metteur en scène et directeur du Festival d’Avignon, Bernard RAVENEL historien, Éric REINHARDT écrivain, Prudence RIFF co-présidente du FASTI, Michèle RIOT-SARCEY historienne, Vanina ROCHICCIOLI présidente du Gisti Paul RODIN directeur délégué du festival d’Avignon, Marguerite ROLLINDE politologue spécialiste du Maghreb, Alexandre ROMANES cirque Romanès, Délia ROMANES cirque Romanès, Paul RONDIN directeur délégué du Festival d’Avignon, Alain RUSCIO historien, Malik SALEMKOUR président de la LDH, Sarah SALESSE avocate, Christian SALMON écrivain, Odile SCHWERTZ-FAVRAT ex-présidente de la Fasti, Denis SIEFFERT président de la SAS Politis, Catherine SINET directrice de la rédaction de Siné Mensuel, Evelyne SIRE-MARIN magistrat, Romain SLITINE enseignant à Sciences Po, Pierre TARTAKOWSKY président d’honneur de la LDH, Lilian THURAM fondation Lilian Thuram-Éducation contre le racisme, Sylvie TISSOT sociologue, Michel TOESCA acteur, réalisateur, Marie TOUSSAINT militante associative, présidente de Notre affaire à tous, Assa TRAORE comité Adama, Enzo TRAVERSO historien, Catherine TRICOT architecte-urbaniste, Aurélie TROUVE altermondialiste, agronome, Fabien TRUONG sociologue, Michel TUBIANA président d’honneur de la LDH, Dominique VIDAL-SEPHIHA journaliste, Jean VIGREUX historien, Thierry VILA écrivain, Arnaud VIVIANT écrivain, critique littéraire, Sophie WAHNICH historienne, Jacques WEBER comédien, Serge WOLIKOW historien.

Associations signataires :

Assemblée citoyenne des originaires de Turquie (ACORT), Auberge des migrants, Bureau d’accueil et d’accompagnement des migrants (BAAM), CCFD – Terre solidaire 93, Centre d’études et d’initiatives de solidarité internationale (CEDETIM), Centre international de culture populaire (CICP), Coalition internationale des sans-papiers et migrants (CISPM), Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT), Coordination 75 des sans-papiers, Coordination 93 de lutte pour les sans-papiers, CSP92, DIEL, Fédération des associations de solidarité avec tous·te·s les immigré·e·s (Fasti), Fédération des tunisiens pour une citoyenneté des deux rives (FTCR), Gisti, Initiatives pour un autre monde (IPAM), La Cimade, Ligue des droits de l’homme, Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie, Roya citoyenne, Syndicat des avocats de France (SAF), Union juive française pour la paix (UJFP), Utopia 56.