Catégories
Société

Covid-19 : des Français lassés, blasés, régressifs, prêts pour le général Pierre de Villiers

Les Français, corrompus par le capitalisme dans leur vie quotidienne, veulent revenir au monde d’avant, à tout prix. Ils récusent toute remise en cause possible.

Des gens rassemblés devant des bars, des jeunes faisant soirées sur soirées, alors que de toutes façons un grand nombre de libertés sont prises quant au couvre-feu de 18 heures : les villes sont le lieu de comportements anti-sociaux en série. Vivant au rythme d’un capitalisme concernant tous les aspects de la vie quotidienne, les gens n’en peuvent plus, ils exigent de consommer, d’aller au cinéma, d’aller dans les cafés, d’aller au restaurant, etc.

Aucun ne se dit : bon, il faut se poser et comprendre quelle est la nature de la situation. Non, au contraire même, tout est fait pour nier la réalité et faire comme si de rien n’était. Si initialement la question écologique que pose l’émergence de la pandémie était posée, elle a désormais totalement disparu. Tout a disparu d’ailleurs, il n’y a qu’un seul objectif : reprendre sa vie d’avant.

C’est une faillite morale tout autant qu’une faillite intellectuelle. Les gens ont des postures régressives, ils ne veulent pas prendre de responsabilités. Ils veulent payer ou voter pour que des gens décident à leur place. McDonald’s doit décider de ce qui est vendu, TF1 de ce qui est vu et le gouvernement gérer les affaires courantes. Et le capitalisme est si fort que le gouvernement est critiqué pour ne pas obéir autant aux attentes qu’une entreprise le ferait.

En cette fin février 2021, on comprend pourquoi l’État n’a pas décidé d’un nouveau confinement : par ses réseaux, il savait que la société n’était pas prête. On a donc une double peine : une société infantilisée et un État perdant totalement pied dans sa gestion de l’ordre social. Si donc on doit définir l’objectif de la Gauche, cela doit être : changer les gens, changer l’État.

Mais dans quel ordre ? Pour changer l’État, il faut que les gens se bougent, que l’État soit porté par le peuple, pas par une bureaucratie inféodée au capitalisme et surtout aux grandes entreprises. Mais le peuple ne veut rien entendre et rien faire.

On est donc bien parti pour une relance de l’État par l’intermédiaire de l’extrême-Droite, avec le sauveur suprême qui va proposer les solutions clef en main et les Français lui diront : oui, mon général !

Il est déjà prêt, d’ailleurs. Joseph Macé-Scaron, qui vient de l’extrême-Droite et qui est un ancien journaliste du Figaro et de Marianne, va sortir en mai un ouvrage intitulé L’Appel du général. Son personnage principal est le général Pierre de Villiers.

Il ne faut pas se leurrer : c’est là le reflet de ce qui va s’orchestrer. La France dépolitisée, infantilisée, s’en remet au général : comme avec Napoléon Bonaparte, avec Napoléon III, avec Clemenceau, avec Pétain, avec de Gaulle !

Catégories
Politique

Un week-end du 5-6 décembre marquant un tournant à Droite

Il y a des tournants dans les prises de conscience, dans les changements de conception. La Droite a compris, ces 5-6 décembre 2020, qu’il fallait se préparer à des choses très dures.

S’il est une chose très mauvaise, c’est la grande peur des possédants, des puissants. S’ils ont peur pour quelque chose de concret, cela est naturellement une bonne chose ou c’est du moins inévitable. En tout cas, il n’y a pas de surprise. Il n’en va pas de même pour une peur leur permettant d’anticiper très largement, trop largement les faits. Pour parler de manière moins cryptique : si les possédants se disent que la lutte des classes commence, avant qu’elle ait commencé, ils ont un temps d’avance. Ce qui n’est évidemment pas une bonne chose.

Or, la manifestation contre le projet de loi dite de sécurité globale du 5 décembre 2020 a provoqué chez eux un choc. Normalement, ce genre d’événements est très secondaire. Il y a une manifestation, il y a de la casse, rien de bien nouveau en France. C’était d’ailleurs la seconde manifestation, avec moitié moins de monde que la première fois (soit un peu plus de 50 000 personnes dans toute la France, dont 5 000 à Paris, avec de la casse à Paris, Toulouse, Nantes, Lyon, Dijon).

Le contexte n’est toutefois pas du tout le même. Les possédants savent que c’est la crise et on a l’impression d’ailleurs qu’ils sont les seuls à le savoir. Par conséquent, ils sont bien plus tendus que ceux pour qui rien n’a changé par rapport à il y a un an, deux ans, cinq ans. Le décalage est complet entre des manifestants protestant comme d’habitude, des anarchistes cassant comme d’habitude, et des possédants ressentant les choses tout à fait différemment désormais.

Là, les possédants, les dominants se sont dit : il y a des gens prêts à l’affrontement, la preuve 67 membres des forces de l’ordre sont blessés. Et ils se disent, donc : nous allons à la guerre civile. Pierre de Villiers, dans une interview publiée ce week-end par le Parisien, utilise ces mots-là. Et ces mots, ils sont important, car si les manifestants sont finalement des protestataires et si même quand ils cassent, ils ne veulent pas la guerre civile, les possédants ont quant à eux très peur que la lutte des classes reprenne. Ils vont donc se dire qu’il faut qu’ils se défendent, qu’il faut passer même à la contre-attaque. Ils vont assumer la guerre civile… même si elle n’est pas encore là.

Cela fait d’ailleurs des mois que la Droite se lâche de plus en plus, qu’elle est plus hargneuse, plus agressive, plus ouvertement favorable à l’élimination de la Gauche en général. Le passage à une inquiétude généralisée, assumée, était inévitable avec la crise. Et la manifestation du 5 décembre 2020, un classique manifestation symbolique ne rimant à rien au niveau de la société, a servi de détonateur pour passer un cap dans ce processus.

Le problème est très simple à comprendre. Le gouvernement fait comme si la crise est sous contrôle. C’est son rôle. Le problème, c’est qu’il est cru. Les manifestants du 5 décembre 2020 le croient. Ils se comportent donc comme ils le font d’habitude, ils ne voient pas la crise. Ils ne comprennent rien au contexte et d’ailleurs la lutte des classes leur étant étrangère, ils ne s’imaginent même pas qu’il faut prendre en compte ce que font les possédants, les dominants.

Or, que vont faire ces derniers? Eh bien déjà arroser l’extrême-Droite, en particulier les groupes activistes et provocateurs. Ensuite, préparer le terrain pour la Droite « populaire » et « sociale » en accélérant la construction des réseaux pour lancer une offensive pour rétablir l’ordre. Et que va-t-il se passer également? Eh bien il y aura forcément des gens, à l’ultra-gauche, pour prendre au sérieux les discours mythomanes des syndicalistes et anarchistes sur le grand soir. Il faut donc s’attendre à un renouveau du bombisme anarchiste.

C’est le scénario catastrophe, où la Droite prend d’assaut le pays en s’appuyant sur des syndicalistes et des anarchistes n’ayant par définition ni envergure, ni profondeur. C’est naturellement un scénario idéal pour les possédants et les dominants.

Catégories
Guerre

Le général Pierre de Villiers omniprésent en novembre 2020

Encore et toujours présent dans les médias, le général Pierre de Villiers prétend ne pas faire de politique tout en se présentant indirectement comme le seul recours.

Le général Pierre de Villiers n’en finit plus de faire le tour des plateaux de télévision et de la presse. Il était à l’occasion du onze novembre l’invité d’une longue émission sur la chaîne publique France info durant laquelle il a pu s’exprimer en long, en large et en travers. À plusieurs reprise, il lui a été posé la question de son orientation politique, de manière vague d’abord, sur différents thèmes, puis de manière précise ensuite avec Laurent Joffrin (ancien directeur de Libération) mettant les pieds dans le plats en lui demandant s’il est de droite ou de gauche.

Évidemment, Pierre de Villiers ne répond pas, tournant autour du pot, expliquant qu’il est au dessus, et même au-delà, des clivages, que la question ne se pose pas en ces termes selon lui et qu’ils ne fait qu’apporter une « contribution » au débat, etc. Pourtant, il est évident qu’il relève de la Droite, et même de la Droite au sens le plus strict.

Sa vision, qu’il répète à l’envie de manière extrêmement bien formulée, se résume ainsi : ce qui compte avant tout est la nation, il faut l’unité nationale coûte que coûte et l’Armée forme de ce point de vue un modèle idéal qu’il faut appliquer au reste de la société, pour son plus grand bien évidemment. Autrement dit, il faut l’autorité forte venant d’en haut, combinée à la bienveillance sociale de type catholique, afin de maintenir l’ordre social et surtout les hiérarchies sociales.

C’est une formulation de droite tellement classique, tellement « vieille bourgeoisie » si l’on peut dire, que peu de personnes à Droite osaient le formuler aussi ouvertement depuis des années. C’est sa marque de fabrique ; il suffit de voir ses propos sur la radio France Inter, toujours le onze novembre :

« Il faut apprendre aux petits Français à aimer la France »

« Ces jeunes qui partent en vrille, il faut les remettre dans le doit chemin »

Il ne reste plus qu’à chanter la chanson Général, nous voilà… Et c’est bien le message qu’il veut faire passer : je suis consensuel, j’ai l’armée avec moi, je suis capable d’amener une mobilisation en faveur d’une orientation agressive de grande puissance.

Il compte réussir ce que Marine Le Pen n’a pas réussi : former un bloc populaire de Droite, anti-libérale en apparence mais en réalité représentant la haute bourgeoisie et les marchands de canon.

On se rappellera d’ailleurs d’où vient politiquement Pierre de Villiers. Il émerge en tant que figure en 2017, en démissionnant de son poste de chef d’État-Major des armées, assumant un conflit ouvert avec Emmanuel Macron quant au budget des armées. Il a ainsi été le porte-drapeau des militaristes, des expansionnistes, des agressifs.

Mais ce n’est pas tout. Car le sens de la valorisation de l’Armée par Pierre de Villiers, c’est aussi d’empêcher la lutte des classes en mettant la population, et notamment la jeunesse, au rang. C’est pour cela qu’il parle beaucoup de la jeunesse, avec à chaque fois une vision volontairement binaire, présentant deux pôles : d’un côté les « jeunes des cités », de l’autre les « jeunes diplômés ».

Pierre de Villiers le vendéen (frère de Philippe de Villiers) oublie volontairement de parler de la classe ouvrière, c’est la règle, alors que pourtant la Vendée est largement ouvrière, particulièrement dans la jeunesse. C’est révélateur : ce qui compte pour cet homme de la Droite est de neutraliser la conscience ouvrière, au profit du nationalisme.

Son rôle politique, culturel, idéologique est précisément d’empêcher la ré-émergence politique, culturel, idéologique de la classe ouvrière menant la lutte des classes. Son rôle est de prendre la Gauche de vitesse, comme Mussolini, Hitler et Franco hier, comme tous ces mouvements de la Droite populaire venant « restaurer l’ordre », « relever » la nation ou, comme Pierre de Villiers le dit lui-même, « remettre les choses à leur place ».

Catégories
Politique

Pierre de Villiers, c’est La Rocque!

L’affaire de Conflans-Sainte-Honorine a très largement mobilisé la Droite et le militaire Pierre de Villiers en a profité pour se lâcher et pratiquement annoncer sa candidature à la présidentielle de 2022.

La journaliste Ruth Elkrief a invité le 24 octobre 2020 Pierre de Villiers dans son émission et elle a été d’une obséquiosité totale pendant une heure entière. Quant au haut-gradé de l’armée se voyant bien le prochain Napoléon III, le prochain Pétain, le prochain De Gaulle de 1958, voire tout cela en même temps (avec un mélange social, catholique, nationaliste impérial), il a bien tenu une position ouatée de réconciliation de tout le monde avec tout le monde, dans l’esprit de son ouvrage venant de sortir, L’équilibre est un courage.

Il a cependant abattu ses cartes politiques, enfin, et ce sont bien sûr celles de la Droite ultra. Ainsi, Ruth Elkrief lui a demandé s’il prendrait position en cas de duel Emmanuel Macron – Marine Le Pen au second tour des présidentielles : Pierre de Villiers a refusé de répondre, expliquant même que Marine Le Pen avait fait les bons constats. Il lui reproche cependant de ne pas être crédible, alors que lui bien sûr l’est, de par ses fonctions à la tête de l’État, etc., etc., etc.

Ce qu’il reproche aux « patriotes », c’est de vouloir tout tout de suite et de ne pas viser à mobiliser de manière large ; Pierre de Villiers insiste de manière régulière lors de ses interventions sur l’intégration des jeunes d’origine immigrée dans un dispositif militarisé. Il appelle cela le rétablissement de l’autorité, par opposition à l’autoritarisme, car comme il l’a encore dit chez Ruth Elkrief, lui veut que les gens soient comme des soldats et suivent de manière volontaire, etc., etc. etc.

Pierre de Villiers est d’ailleurs monsieur « etc. etc. etc. » ; il a un discours répétitif, toujours le même à part désormais donc pour une ligne de Droite assumée, ce qui en fait un néo-gaulliste au sens strict. On répète la même chose en boucle, en revenant toujours à l’autorité. On voit déjà qu’il se positionne pour être le candidat de la Droite : on pourra dire en 2022 que sa campagne a commencé cette fin octobre 2020.

Impossible de ne pas voir bien sûr que Marion Maréchal est forcément très proche. Chez Ruth Elkrief, Pierre de Villiers a tenu exactement le même « occidentalisme », se revendiquant même de son frère :

« Je pense que sur le thème de l’islamisation de notre société et du danger islamiste, Philippe de Villiers avait eu cette intuition il y a déjà longtemps. »

Le tout est dit en douceur, exactement comme le faisaient les Napoléon III, Pétain, De Gaulle. C’est la dictature ouatée de militaires paternalistes, la douceur de l’étrangleur de la démocratie. Une douceur dont s’extasie parallèlement Paris Match, qui concurrence Ruth Elkrief dans la servitude volontaire. L’article décrit les intervention de l’ex-chef d’état-major des armées aux Mureaux, à 40 km de Paris et connu pour sa situation sociale dramatique.

« Niaki, Roger, Ousmane, Rodrigue, Siham opinent. Le général poursuit. Il faut y croire : dans la prairie de la vie, ils constituent la bonne herbe, et pour que celle-ci ne se laisse pas étouffer par la mauvaise, il n’y a pas à tortiller, il faut tondre ras. Ras et souvent. Le général demande du pain. Personne ne l’entend, il attrape une tranche.

Etonnant combien ce militaire parle doux. Donnait-il ainsi ses ordres quand, à la tête du bataillon d’infanterie mécanisée de la brigade Leclerc, il entra le premier au Kosovo ? Commandait-il gentiment ses 2 500 hommes dans les champs de bataille d’Afghanistan ? (…)

« Je respecte ces jeunes, dit-il, ils sentent mon autorité et mon humanité, je les aime. (…)

Le général de Villiers aime ses lecteurs, les gosses des cités, les gamins des écoles de commerce comme il aime le drapeau, la patrie et comme il aima ses soldats avec lesquels il jouait au foot et enchaînait les footings (…).

Il rejoint sur le terrain voisin Rodrigue, Niaki, Ousmane et les autres. Match de foot. « Je les aime », dit-il encore. Décidément, Pierre de Villiers n’est pas fait pour la politique. »

C’est l’argument principal : le général ne fait pas de politique, il n’est là que pour servir objectivement, pour remettre de l’autorité. Telle est la position du dictateur à la française : il faut le remercier de se sacrifier pour la patrie et d’ailleurs il faudrait faire de même. La bourgeoisie a déjà trouvé son héraut pour ses menées militaristes, impérialistes.

Et même si ce n’est pas Pierre de Villiers, ce sera son clone, car on est là très précisément dans les fondamentaux du fascisme français. Pierre de Villiers, c’est La Rocque, c’est la même Droite que celle des années 1930 : populaire militarisée et national-républicaine, occidentaliste et hiérarchique, avec le même expansionnisme « impérial ».

Préparons nous donc à ce que, comme La Rocque, il trouve face à lui le Front populaire !

> Lire également : Meurtre de Conflans-Sainte-Honorine: le général Pierre de Villiers ne rate pas l’occasion de se placer

Catégories
Politique

Meurtre de Conflans-Sainte-Honorine: le général Pierre de Villiers ne rate pas l’occasion de se placer

Le général Pierre de Villiers est ancien chef d’État-Major des armées et s’est fait connaître en démissionnant avec fracas en 2017, accompagnant cela d’un discours nationaliste faisant de la figure du chef militaire autoritaire un recours pour la France.

> Lire également : Néogaullisme: le général Pierre de Villiers appelle à remettre de l’ordre

Depuis, il intervient régulièrement pour mettre en avant ce discours et se placer lui-même comme la figure potentiellement à même de « redresser » le pays. La Droite adore, notamment celle qui est proche de l’extrême-Droite, et c’est tout naturellement que Le Figaro lui a offert une tribune après l’attentat contre le professeur d’Histoire-Géographie à Conflans-Sainte-Honorine.

Il faut noter que cette tribune est accessible gratuitement en ligne, ce qui est rare pour les articles de ce genre sur le site du Figaro ; il s’agit là de diffuser au maximum la figure du général Pierre de Villiers, qui profite naturellement de la situation pour se placer. Se placer pour quoi ? Pour apparaître comme le sauveur, apolitique et désintéressé bien sûr, dans la grande tradition française des anciens militaires faisant prétendument don de leur personne.

Ce qu’il a à dire est très simple, et extrêmement bien formulé. Il ne faut pas « céder à cette intimidation barbare » et ne pas avoir « peur », il y a trop de « paroles » et pas assez « d’actes », il faut donc une politique nationale forte assumant l’autorité.

Il est donc fait appel à la mobilisation nationaliste, en expliquant que le problème de l’islamisme serait principalement celui de l’agression de la France, comme il le dit en introduction de son propos :

« c’est une attaque à l’existence même de notre nation, de notre civilisation. »

Cela est faux, car ce qui est en jeu est la Raison, l’Humanisme, la culture en général, de manière universelle, et pas la nation française en tant que telle. Mais cela n’intéresse pas Pierre de Villiers, qui relève lui-même de l’arriération religieuse ; c’est un catholique, il le revendique, il a contribué à une formation du très droitier ICHTUS (Centre de formation à l’action civique et culturelle selon le droit naturel et chrétien).

Selon lui, de manière démagogique, il suffirait de renvoyer les imams qui posent problème, tout en ayant une politique militaire française forte. C’est d’ailleurs avec cela qu’il conclut, car le militarisme est sa proposition stratégique, c’est le contenu de son nationalisme, avec l’idée de la France comme grande puissance pesant grâce à son armée, et se régénérant grâce à l’autorité militaire :

« Pendant mes dix dernières années dans les armées, j’ai, à ma place, participer au combat contre le terrorisme islamiste, cette idéologie qui prône la barbarie, car cette dernière n’est pas un moyen mais une fin. Nos soldats, marins et aviateurs contribuent à cette défense de l’avant, notamment en Afrique et au Moyen-Orient. Ils méritent aussi d’en être remerciés. Cette guerre est mondiale. Elle vise la France prioritairement. Plus que jamais, nous devons retrouver notre unité et nous réconcilier, au-delà de nos diversités. L’amour de la France est notre espérance. »

Pour le reste, Pierre de Villiers formule les choses très habilement et avec beaucoup de mesure, dans une perspective politique évidente. Il explique qu’il serait temps « d’aider la communauté musulmane de France à former les imams » et qu’il faut aller chercher les islamistes dans les « cités », où « [les] populations [sont] dans leur grande majorité de bonne volonté. »

> Lire également : Valeurs Actuelles en appelle au militaire Pierre de Villiers pour la tête de l’État

On apprend étrangement au passage que la Mauritanie serait « un exemple », qui aurait « réussi à contenir le terrorisme »… On se demande alors pourquoi le Ministère des Affaires étrangères considère encore la Mauritanie comme à risque à propos du terrorisme, avec plus de la moitié du pays où il ne faut surtout pas se rendre, et une vigilance renforcée à avoir pour le reste du territoire !

Mais ce qui intéresse surtout Pierre de Villiers le militaire, c’est que la Mauritanie (une « république islamique ») est aux mains des militaires, avec le président Mohammed Ould Ghazouani qui est un général ayant succédé à un général ayant pris le pouvoir par la force en 2008, avec des groupes spéciaux d’intervention quadrillant littéralement le pays et un État orientant massivement le budget vers l’armée plutôt que l’éducation ou la santé.

Voilà donc son modèle, qu’il veut transposer en mode catholique pour la France, avec cette prétention, caractéristique de la Droite, à constituer une élite « protectrice » pour le peuple, par l’autorité du chef :

« Il est temps aussi de comprendre que le premier devoir d’un Etat est de protéger ses concitoyens, en donnant à celles et ceux qui en ont la charge les moyens de leur mission. Je pense en particulier aux services de renseignements, aux forces de sécurité, à tous ceux qui de près ou de loin participent à l’éducation de notre jeunesse. »

Tout cela n’amène pas à grand chose… pour l’instant. C’est une manière de s’installer dans le paysage, d’assembler des éléments pour légitimer le recours à un moment donné. Le général dira que depuis longtemps il cherche à contribuer, sans prendre parti, qu’il est inquiet pour la France, etc. Le fait que cela ne soit pas dénoncé dès le départ par la Gauche est une très mauvaise chose, c’est une grosse erreur de par la tradition politique de notre pays où le général, le maréchal, sort souvent de sa boîte pour jouer au sauveur.

Catégories
Politique

Néogaullisme: le général Pierre de Villiers appelle à remettre de l’ordre

L’invitation du général Pierre de Villiers sur RTL en dit long sur la tendance actuelle traversant la société française, celle du coup d’État. Quelle autre raison y aurait-il à inviter l’ancien responsable de l’armée française, qui plus est pour appeler à… « remettre de l’ordre », et cela en pleine mobilisation syndicale ?

« Il faut remettre de l’ordre, ce n’est pas aujourd’hui qu’on peut dire le contraire. On ne peut pas continuer comme ça » nous dit le général. Pas moins. Et la journaliste de RTL lui demande même s’il est prêt à prendre le pouvoir !

Le général a été invité le lundi 16 décembre 2019, la veille d’une nouvelle mobilisation dans les rues en soutien à la grève contre la réforme des retraites ayant commencé il y a douze jours. Il est donc sciemment employé comme contre-tendance au mouvement de grève alors que la période de Noël s’approche.

La première question posée est d’ailleurs :

« C’est la chienlit, mon général ? »

C’est une allusion aux propos de Charles De Gaulle en mai 1968, mais également au fait que la Ve République est née d’un coup d’État rétablissant « l’ordre ». Celui qui fut chef d’État-Major des armées de 2014 à 2017 a répondu de manière démagogique comme il se doit, regrettant que le pays ne soit pas capable de fêter Noël ensemble, ne manquant pas de présenter Noël comme une « tradition sur notre continent européen », ainsi qu’une « tradition française très ancrée ».

Particulièrement brillant dans son calcul, dès la troisième question sur ce que lui inspire la grève, il explique que la situation illustre ce qu’il a expliqué dans son ouvrage « Qu’est-ce qu’un chef ? » : il faut « retisser la confiance » dans le pays. D’ailleurs, le prétexte à son invitation est la sortie au format livre de poche de son ouvrage. Il existe une vaste campagne pour le médiatiser, le populariser, bref pour présenter le général comme un recours.

Le général a souligné que l’armée n’était pas un modèle « transposable », mais un bon laboratoire pour rétablir des corps intermédiaires dans le pays. Ce qui signifie, en clair : développer le corporatisme, caporaliser. Le général explique même que l’armée incarne la nation dans sa globalité et que donc, somme toute, c’est même là d’où il faudrait tirer les recettes pour réussir !

La perspective nationale-catholique est toute tracée, puisque le général reproche que dans notre pays il n’y ait pas assez de fermeté, et pas assez « d’humanité, d’amour ». Le général dit même :

« L’État est chargé d’organiser la vie de la cité. »

« Le rôle de l’État est d’ordonner la vie de la cité. »

Tel est le point de vue de la réaction, effectivement. La Gauche pense le contraire. Et la journaliste Alba Ventura de RTL est une fieffée servante de la réaction. Les dernières questions sont d’une servilité absolue, au point d’étonner le général :

« – Vous pensez qu’un général peut gouverner notre pays ?

– [Un temps.] Je pense qu’un général l’a déjà fait. Mais, si c’est…

– Je pense à vous, puisque vous écrivez des solutions pour notre société, pour notre nation. Est-ce que ça vous titille ?

– [Grand sourire.] J’ai déjà dit que je ne ferai pas de politique, je ne ferai pas de politique. »

Le général nous prend pour des idiots : tout le monde sait qu’un coup d’État se veut un « rétablissement » de l’ordre et non pas une action « politique ». En parlant ainsi, il se place comme « au-dessus » de la politique, et donc précisément comme l’homme du recours, du dernier recours…

Catégories
Guerre

Valeurs Actuelles en appelle au militaire Pierre de Villiers pour la tête de l’État

La revue représentative de la haute bourgeoisie favorable à l’alliance de la Droite et de l’extrême-Droite a publié un article élogieux au sujet de Pierre de Villiers, ancien chef d’État-Major des armées devenu une idole militariste depuis son affrontement ouvert avec les autorités civiles en 2017. On est là dans une logique du coup d’État militaire absolument typique de la culture politique française.

Alors que le chef d’état-major de l’armée de terre Thierry Burkhard pourfend Charlie Hebdo pour son antimilitarisme, Valeurs Actuelles fait une sort d’allégeance à Pierre de Villiers. C’est un signe de notre époque, un signe résolument fort.

Celui-ci a été chef d’État-Major des armées de 2014 à 2017 ; il est connu pour avoir lancé lors du huis-clos de la commission de la Défense de l’Assemblée nationale, en 2017 :

« Je ne me laisserai pas baiser comme ça »

Recadré par Emmanuel Macron, il s’est alors fendu d’une tribune dans Le Figaro (« Soyons fiers de nos armées françaises »), puis d’un long message sur Facebook. Il finit par démissionner avec un message formant une sorte d’appel du pied nationaliste et militariste, alors qu’il est ouvertement soutenu par une lettre ouverte au Président de la République de 15 hauts gradés à la retraite.

Nous sommes alors en juillet 2017 et dès novembre, Pierre Le Jolis de Villiers de Saintignon (c’est son nom complet) publie un ouvrage, Servir. Il publie l’année d’après Qu’est-ce qu’un chef ? et est recruté par le Boston Consulting Group, un cabinet international de conseil en stratégie.

Le président de la partie française, avec 600 personnes, de ce groupe brassant des milliards de dollars, est Guillaume Charlin, l’un des tout premiers soutiens d’Emmanuel Macron.

Puis, à l’occasion des gilets jaunes, Pierre de Villiers y est allé fort, parlant d’une « crise de l’autorité dans notre pays mais aussi dans les démocraties occidentales », du besoin du chef de se tourner « vers le plus faible, le plus petit », etc.

Il n’est pas étonnant donc qu’il soit considéré comme un recours, dans la grande tradition putschiste française ; rappelons que la Ve République est elle-même née d’un putsch militaire !

Après donc des gilets jaunes, des groupes d’extrême-droite, on a désormais la très importante revue Valeurs Actuelles qui s’y met, à l’occasion de la grande offensive actuelle pour présenter l’armée comme « au-dessus » de la politique, comme le seul garant de la nation, etc.

Offensive qui est, bien sûr, strictement parallèle à l’immense pression sociale actuelle. C’est la lutte de classes qui connaît un saut dans son histoire.

Valeurs Actuelles a ainsi publié un article intitulé Élection présidentielle : Pierre de Villiers, candidat rêvé d’une France désespérée. Ce qu’on y lit est d’une clarté limpide :

« Il en est un autre qui n’échappe pas à ce phénomène et qui ne peut plus dire ou écrire sans que ses moindres faits et gestes soient interprétés comme la première pierre d’une hypothétique candidature présidentielle.

La semaine dernière, [le quotidien très à droite] L’Opinion assurait que Pierre de Villiers cultivait les doutes… Diantre… Un militaire bientôt en campagne de France, voilà de quoi alimenter bien des chroniques. La postface que le général cinq étoiles a ajouté à l’édition poche de son Qu’est-ce qu’un chef ?, « nourrira les commentaires en vue de 2022 », ajoute le quotidien avec des airs de gourmandise.

Qu’a donc pu écrire Pierre de Villiers pour qu’on lui prête à nouveau l’ambition de faire de la politique ? (…) « Nos élites sont parfois de bons tacticiens ; ils sont souvent de piètres stratèges. (…) Nos élites manquent de profondeur. (…) Il nous manque des chefs qui incarnent une voix et fixent la voie. »

Il n’en fallait pas davantage pour que ceux qui sont convaincus que le général jouera un jour à nouveau un rôle de premier plan, y voient une sorte d’autoportrait (…).

Reste un problème majeur : si le général a le profil de candidat idéal pour beaucoup, si nombre de Français, à commencer par les lecteurs de Valeurs actuelles, rêvent de le voir jouer un rôle actif (au point de l’imaginer premier ministre pour 16 % d’entre vous, ministre de l’intérieur pour 24 % ou ministre de la Défense pour 45 % dans un gouvernement que vous auriez façonné à votre idée), s’il est l’homme qui a dit non à Emmanuel Macron, Pierre de Villiers n’entend pas être l’homme du recours. »

La fin est un classique : les militaires disent toujours refuser de faire de la politique… avant d’en faire. L’option d’un coup d’État par un maréchal a traversé la France de 1918 à 1940… jusqu’à ce que le maréchal Pétain s’y colle.

En 2019, voici donc Valeurs Actuelles jouant à souffler sur les braises de cette option. C’est tout à fait cohérent. Le fascisme, en France, a nécessairement l’armée au centre de son dispositif, pour contrer le poids démocratique existant dans notre pays.

Le coup d’État du 18 Brumaire en 1799 par Napoléon Ier, celui du 2 décembre 1851 par Napoléon III, celui du maréchal Pétain en 1940, celui de De Gaulle en 1958… Tous ont en commun d’avoir prétendu répondre à l’appel de la nation pour un sauvetage par le haut.

S’il était vraiment un démocrate, Pierre de Villiers combattrait résolument cette tendance, défendrait le principe du pouvoir au peuple. Mais comme on le sait, il veut un chef… Comme d’ailleurs, malheureusement, une bonne partie du pays – et la haute bourgeoisie en premier lieu.