Catégories
Écologie

Le muguet assassiné chaque premier mai, au lieu d’être célébré

Les brins de muguet sont partout chaque premier mai, mais cette plante n’est pas célébrée comme elle le devrait. 

Les versions divergent quant à l’origine de cette tradition, mais ce qui est certain est que cette plante aux jolies clochettes blanches est appréciée dans la culture populaire depuis des centaines d’années, et pas seulement en France.

Cela vient probablement du fait, en plus de son odeur agréable et de son apparence élégante, qu’elle s’épanouit avec les premiers « beaux jours » du printemps. Elle symbolise le renouveau, la vie qui entame une nouvelle étape marquée par la fin des gelées hivernales.

On trouve le muguet dans les sous-bois humides des forêts françaises, mais pas sur le pourtour méditerranéen où le temps est trop sec. Cet herbacé vivace profite des premiers rayons de soleils importants de la fin avril au début mai pour fleurir, avant que les autres arbres et plantes de la forêt ne lui fassent trop d’ombre.

Le muguet devrait être célébré, il fait au contraire l’objet d’un véritable pillage dans les forêts, pour être revendu en brins dépérissants. La cueillette devrait être strictement interdite, mais elle est tolérée. Normalement pas plus d’un petit bouquet par personne, mais cela n’est bien sûr pas respecté. Certaines personnes se servent allègrement afin de se faire de l’argent : à minimum 1€ le brin, c’est une affaire rentable…

En plus d’être inacceptable sur le plan culturel, car c’est un rapport à la nature totalement erronée, la cueillette massive du muguet dans les forêts à l’occasion du 1er mai est une menace pour l’espèce. En empêchant les brins de vivre, on empêche les insectes de polliniser ses clochettes pour la reproduction sexuée de la plante.

Le muguet se développe alors massivement sous forme de rhizome, c’est-à-dire en se clonant par-dessous terre, comme les bambous par exemple, ce qui fragilise l’espèce du fait du manque de brassage génétique.

Le muguet est aussi une affaire très rentable pour les maraîchers qui le produisent de manière industrielle dans l’Ouest de la France, particulièrement dans la région de Nantes depuis les années 1970. La récolte est estimée chaque année à 50 à 60 millions de brins. C’est énorme, cela mobilise plusieurs milliers de saisonniers.

Après la récolte, qui est un travail pénible et mal payé, les industriels mènent une course folle contre la nature pour proposer à la vente ces millions de brins pour le premier jour du mois de mai, où les prix s’envolent dans de manière aberrante.

Il existe tout un tas de méthodes pour avoir des brins de muguets prêts à vendre le jour même. Certaines années, il faut accélérer la floraison, d’autre, il faut la retarder à l’aide de serres réfrigérées. Ces « techniques » brutales sont très gourmandes en énergie, tout comme l’ensemble de la chaîne de conditionnement depuis la récolte jusqu’au vendeur, qui nécessite une logistique froide délirante.

Il faut ajouter à ces méfaits les pesticides utilisés, l’eau consommée en grande quantité ainsi que l’espace immense nécessaire à cette culture. Le muguet n’étant récolté que la 3e et la 4e année de culture, cela signifie qu’il faut le double de terres destinées au muguet par rapport à la récolte sur une exploitation. Quelle absurdité, quel gaspillage, quelle terrible manifestation de l’écocide…

Chaque premier mai, les gens croient apprécier une plante, alors qu’ils ne font que l’assassiner sans aucune considération pour ce qu’elle est, ni même pour ce qu’elle représente réellement.

Il suffirait pourtant d’apprécier le muguet tel qu’il existe dans la nature, comme un prétexte de plus à l’ode à la nature que devrait réciter chaque jour l’humanité.

Une société moderne, civilisée, tournée vers l’avenir n’acceptera jamais d’arracher les brins de muguet des forêts ni de forcer les clochettes à se montrer le 1er mai. La cueillette et la vente du muguet est une pratique arriérée.

Il faut célébrer le muguet de manière correcte, dans un esprit socialiste !

Catégories
Écologie

La cymbalaire, également appelée « ruine de Rome »

Le cymbalaire linéaire ou cymbalaire mural est considéré comme « nuisible » par beaucoup de monde parce qu’il peut s’étendre dans de nombreux espaces où l’absence de végétation est attendue.

Cette plante touffue, rampante ou tombante pouvant atteindre 80 cm de long pousse dans de nombreux endroits quelque soit l’exposition au soleil. Ainsi, du nord au sud de la France, le cymbalaire est légion.

Ses tiges très fines s’immiscent dans les murs à ciment calcaire. On peut la rencontrer sur des voies ferrées, sur les ponts ou les édifices.

Sa reproduction est assurée par un astucieux moyen de dispersion. La tige s’allonge et se courbe pour enfoncer le fruit dans les fissures des murs.

Les graines y sont déposées à demeure jusqu’à ce que la pluie en assure leur portage grâce au ruissellement de l’eau.

Dans le Moniteur Universel de 1836, journal crée en 1789 par l’éditeur de l’Encyclopédie Universelle de Diderot et D’Alembert, Théophile Gautier, dans sa nouvelle Avatar publiée en 1836, fait référence à la ruine de Rome en évoquant un caractère envahissant donc repoussant de cette plante.

« Dans les anfractuosités de ces roches, le cactier raquette, l’asclépiade incarnate, le millepertuis, la saxifrage, la cymbalaire, la joubarbe, la lychnide des Alpes, le lierre d’Irlande trouvaient assez de terre végétale pour nourrir leurs racines et découpaient leurs verdures variées sur le fond vigoureux de la pierre ; un peintre n’eut pas disposé, au premier plan de son tableau, un meilleur repoussoir. »

Cette belle plante légère et aérienne se répand très vite dans les interstices des trottoirs et des murs qui ne sont plus entretenus. Son nom vernaculaire évoque d’ailleurs la représentation d’une plante s’épanouissant sur une cité détruite : « la ruine de Rome ».

Par les caractéristiques propres à cette plante, les notions de nature et de culture sont en contradiction apparente. Dans la conception académique de la philosophie, la culture suppose le développement historique de l’humanité par sa sortie de l’état de nature.

Rome est la capitale de l’un des plus grands empires de l’Antiquité. Elle est le symbole de ce qu’est la civilisation : des constructions monumentales représentant la domination de la cité sur la nature.

Dès le moyen-âge, les monuments de l’antiquité romaine sont délaissés jusqu’à tomber en ruines. La vie sauvage apparaît alors, sur les vestiges de la civilisation antique. Le cymbalaire des murs en est le symbole.

Cela en fait sa valeur : admettre que la civilisation humaine ne peut se faire parfaitement sans la nature, rien n’est en dehors de la nature.