Catégories
Culture Culture & esthétique

Playlist cross over, fusion: oui à l’appropriation culturelle!

La rencontre du punk, du hardcore, du métal… avec le hip hop, le reggae, le jazz, le ska, la funk… et inversement, fut un processus des années 1980 et 1990 à rebours des problématiques identitaires actuelles. Le mélange des genres musicaux, le dédain complet pour la couleur de peau… tout cela était et est encore considéré comme normal par qui sait que le peuple, c’est la fusion.

Il existe en France une obsession pour la couleur de peau et cela depuis une vingtaine d’années. C’est une véritable catastrophe identitaire, qui place les gens dans des cases racistes. Rien de tel qu’une bonne playlist témoignant de l’absurdité de tout cela, avec une rencontre du métal, du hardcore, du rap et du Hiphop, de la funk, du jazz, tout cela dans un mélange de musiciens noirs, blancs, arabes ou on ne sait quoi, et cela ne compte pas.

> La playlist « Cross over » est disponible sur la colonne de droite (version web) ou sous l’article (version mobile), ainsi que sur la page des playlists.

Les années 1990 ont été marquées par ce puissant esprit positif, contestataire, constructif, parfois appelé Cross over, fusion. Le groupe Fishbone est une figure majeure de cette tendance, aux côtés des Bad Brains ; leur admiration est immense dans le milieu des musiciens.

Deux groupes strictement parallèles, les Beastie Boys et les red Hot Chili Pepper auront un succès immense. La vidéo de la chanson Hump de Bump des Red Hot Chili Peppers, tournée par Chris Rock en 2009, témoigne de cet esprit joyeux et plein d’unité populaire.

Tout « postmoderne » considérera par contre forcément cette vidéo comme raciste, « appropriation culturelle », pleine de « clichés », etc.

La chanson Sabotage des Beastie Boys – à la base un groupe de punk hardcore – avec sa vidéo décalée et également très bon esprit, est un autre exemple brillant de tendance cross-over, fusion.

Un groupe classique de Hiphop comme Public Enemy s’appuie parfois ouvertement sur une base rock, chose inconcevable aujourd’hui pour beaucoup d’esprits rétifs, enfermés sur eux-mêmes. Un autre groupe ayant eu un immense succès est Rage against the machine.

La France connut également toute une vague très proche, bien que différente tout de même, avec Lofofora, Silmarils, No one is innocent… au coeur de toute une véritable scène, qui malheureusement fut incapable d’avancer par manque de socle culturel alternatif assez solide.

La vague néo-métal de la fin des années 1990 profite dans une très large mesure de cet esprit « cross over », avec Linkin Park, Korn, Limp Bizkit ou encore dans un esprit différent Papa Roach.

Impossible de ne pas mentionner la chanson Last resort de Papa Roach, éloge de l’esprit contestataire de la jeunesse qui suffoque dans l’impossibilité de s’épanouir. C’était avant que les identitaires et les postmodernes ne torpillent les exigences alternatives avec leur repli identitaire individualiste délirant et fanatique…

Impossible non plus de parler de rencontres culturelles productives sans évoquer la chanson Planet Rock d’Afrika Bambaataa & The Soul Sonic Force qui, en samplant le groupe électronique allemand Kraftwerk, a apporté une contribution énorme à l’émergence de la musique techno.

Le son n’a rien à voir avec le « cross over » ou la fusion, mais l’esprit est le même : le mélange, la rencontre. Pas d’ethno-différentialisme, pas de soupe commerciale « mondialisée » pour autant.

Au milieu des années 2000, le groupe Death Grips est l’un des exemples significatifs de rencontre d’un son abrasif, dans un certain esprit de collage punk, et du Hiphop. Car le processus de rencontre est sans fin et lui seul est productif. Les rencontres ne sont pas productives en soi… mais sans elles, il n’y a rien.

Catégories
Culture

Aswad : Live and direct (1983)

L’album Live and direct du groupe Aswad est un bijou reggae de 1983, qui a été une porte d’entrée à ce type de musique pour beaucoup de monde, par son incroyable accessibilité. C’est vraiment le maître-mot.

Live and direct est connu comme retranscrivant de manière assez unique en son genre toute une ambiance de concert, toute une atmosphère live, avec un son très particulier et beaucoup de chaleur.

Non seulement on s’y croirait, mais la musique colle tellement au public qu’il y a toute une profonde dimension contestataire qui se dégage, et cela pourtant dans un esprit d’introversion mêlé à une ferveur collective.

Le lieu du concert enregistré tient une place particulière, indéniablement. Il s’agit d’un live au carnaval de Notting Hill qui a lieu chaque année à Londres et consiste en toute une expression culturelle immigrée, dans une perspective syncrétique à l’époque.

Les Anglais originaire des Caraïbes d’Aswad présentent ainsi une musique largement teintée de dub, marquée par le jazz, influencée par la soul. C’est une perspective tout à fait représentative de la scène musicale anglaise de l’époque, du moins celle qui n’est pas tournée ou marquée par la cold wave.

Aswad ne va cependant pas vraiment parvenir à maintenir le cap, renforçant la dimension monumentale du Live and direct comme étant l’apogée de toute une démarche.

L’album se situe ainsi entre une période reggae traditionnelle,« roots », avec notamment l’album Showcase (contenant des chansons importantes dans le reggae : « Three Babylon », « It’s Not Our Wish » et l’instrumental « Warrior Charge ») et un tournant pop virant au commercial avec un certain succès, dévaluant particulièrement le prestige d’Aswad.

C’était peut-être le prix à payer pour dépasser le reggae (Steel Pulse conservant davantage son orientation « roots ») et parvenir à captiver un public de toutes origines, dans une ambiance chaleureuse, avec un son mêlant expression populaire et contestation, esprit de communion et haut niveau de technique musicale, tout en restant agréable et plaisant.

L’album Live and direct, à son écoute, témoigne de toute une réalité débordant largement la musique, il est pratiquement une photographie réaliste et en ce sens un grand classique de la musique.

Au début du live, le chanteur demande ce que signifie « live and direct » et il explique que cela veut dire… « live and direct » : jamais une réponse ayant l’air si stupide n’a exprimé pourtant quelque chose de si vrai et si précis.