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Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et l’Action française

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a fait un clin d’œil à l’Action française, par où il est passé dans sa jeunesse.

De passage à la télévision pour la très populiste émission L’Heure des pros, sur une chaîne Cnews d’ailleurs marquée par une ligne ouvertement pro-Droite, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a mentionné comme en passant l’Action française. Il en parle comme exemple d’une organisation qui lutte contre la République et que celle-ci aurait raison d’accepter afin de montrer sa générosité.

C’est une manière de couvrir cette organisation d’extrême-Droite, alors que lui-même met la pression sur les identitaires, cherchant à les interdire. C’est une manière également de soutenir discrètement l’Action française en en parlant, puisque chacun en France est censé, selon le ministre de l’Intérieur, connaître cette organisation ! C’était le cas en 1921, mais certainement pas en 2021.

Gérald Darmanin était dans sa jeunesse un activiste de la mouvance de l’Action française, ayant écrit en 2008 encore quelques articles pour l’organe Politique Magazine. Ce n’est là nullement un secret et d’ailleurs il est initialement le bras droit de Christian Vanneste, député du Nord, qui a été responsable des jeunes d’Action française à Lille. Gérald Darmanin est né à Valenciennes.

Gérald Darmanin avait, on s’en doute, un pied dans la mouvance de l’Action française et un autre dans la Droite traditionnelle. C’est qu’il y a convergence. C’est comme un écho. Rappelons également qu’il y a quelques semaines, après qu’un dirigeant de La France Insoumise, Eric Coquerel, avait appelé à interdire les identitaires, l’Action française avait demandé à Gérald Darmanin d’interdire… le PCF.

Cette présence de l’Action française ne doit nullement étonner. De toute l’extrême-Droite, l’Action française est la seule qui a réellement un corpus idéologique et une tradition d’organisation. Il y a de plus un arrière-plan de familles traditionnelles de la haute bourgeoisie, avec donc encore des règles et des principes capable de faire tenir la boutique.

De plus, l’Action française a balancé par-dessus bord le racialisme et l’antisémitisme halluciné qui étaient au cœur de son idéologie. L’organisation s’est tronquée, sur le plan des idées, en un néo-gaullisme impérial. Elle a connu un certain renouveau ces dernières années, justement de par cette ligne où il y a un certain style d’extrême-Droite, mais sans avoir à porter tout le bric-à-brac raciste.

Il y a aussi le fait que personne à l’extrême-Droite n’a réussi à proposer autre chose, si l’on omet le Rassemblement national, d’orientation électoraliste. Dans les années 1920-1930, l’extrême-Droite est née par des déçus de l’Action française (Drieu La Rochelle, Bernanos…). Une telle scène n’existe pas aujourd’hui et les nationalistes racistes vivent de toutes façons dans un univers mental païen et apocalyptique.

L’Action française colle en fait à l’esprit de l’époque. C’est de la Droite dure, pro-chasse à courre, avec un nationalisme affirmé cherchant à utiliser les jeunes immigrés comme vecteur d’un rôle impérial de la France. C’est en fait la ligne gaulliste du coup d’Etat de 1958, avec en toile de fond l’immanquable appel à l’armée et un romantisme passéiste dont les zadistes sont un produit indrect.

L’Action française présente donc une menace réelle. C’est, au sens strict, une véritable force fasciste, au sens historique d’une mobilisation populaire tournée vers la Droite, sur la base du nationalisme. Mais comme elle n’est pas raciste, cela implique l’antifascisme réel, celui du Front populaire, pas une caricature anarchiste contre les « fachos ».

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Contre les mesures sanitaires, Jean-Luc Mélenchon veut organiser une «énorme fête»

Jean-Luc Mélenchon a lancé l’idée d’une « fête de la liberté » le 20 mars 2021, pour s’opposer aux mesures sanitaires et donc aussi à l’esprit de collectivité.

Surréaliste. Jean-Luc Mélenchon a expliqué, lors d’une émission télévisée, qu’il souhaite organiser une « une énorme fête » le 20 mars, la veille du printemps. Circonspect, le présentateur Laurent Ruquier lui fait remarquer que d’ici au mois de mars, « ce n’est pas gagné », en raison bien sûr des mesures sanitaires. Mais il n’y a pas de problème selon le député « insoumis », puisque les manifestations ne sont pas interdites, alors il suffit d’organiser une marche revendicative comme prétexte à faire la fête.

« On ferait quelque chose qui ne serait pas comme d’habitude. Bien sûr on aurait nos pancartes, mais surtout on ferait une énorme fête qui marcherait. »

Assumant de n’en avoir rien à faire de la circulation du virus et de la discipline collective nécessaire pour faire face à la pandémie, Jean-Luc Mélenchon se met donc au niveau des gilets jaunes, de l’ultra-gauche et des teufeurs. En effet, ces gens ont pris l’habitude depuis le début de l’année de défiler dans les centre-villes accompagnés de camions sono faisant office de mur de son. Sans aucun respect des gestes barrières ni du port du masque, évidemment.

Il n’y a pas plus anti-social que ça en pleine crise sanitaire, mais Jean-Luc Mélenchon trouve que c’est très bien et s’imagine qu’il y a là un espace à l’expression de son populisme. Ce n’est pas tout à fait absurde, car il existe effectivement en France toute une vague petite-bourgeoise qui devient de plus en plus hystérique face aux mesures sanitaires et aux obligations collectives.

Il est difficile de savoir ce que représentent vraiment ces gens numériquement, à quel point ils imprègnent les mentalités françaises actuellement. Jean-Luc Mélenchon, en tous cas, mise là-dessus en espérant que cela puisse être un levier pour la mobilisation populiste qu’il tente de mettre en place avec la France insoumise.

On est ici très loin des valeurs et de l’histoire de la Gauche, qui ne peut être qu’horrifiée par de tels gens luttant aussi ouvertement contre les mesures sanitaires et l’effort collectif. Car il ne s’agit pas ici de simplement faire la fête – les gens souhaitant faire la fête actuellement ne s’en privent pas puisqu’il suffit de se réunir à quelques amis dans un appartement ou une maison et de rester dormir sur place, l’État n’ayant ni les moyens, ni la volonté d’empêcher cela.

Non, ce que veulent ces gens, et Jean-Luc Mélenchon avec eux, ce n’est pas simplement faire la fête, c’est surtout s’opposer frontalement  à la société et à son élan collectif.

Il est insupportable à leurs yeux de voir que la population française préfère respecter (globalement) les quelques mesures sanitaires prises par l’État, plutôt que d’assumer de faire circuler une maladie décimant les personnes âgées et engorgeant les hôpitaux.

D’ailleurs, si l’État est obligé de prendre des mesures sanitaires, c’est précisément parce qu’il existe une pression populaire. Sans cela le capitalisme prendrait des mesures cyniques.

Cette pression populaire est très faible, éparse, inorganisée. Cela laisse les mains libres au gouvernement, qui n’a toujours pas décrété de confinement malgré la circulation de nouveaux variant du virus, qui n’a pas fermé les frontières (ou alors tardivement et de manière très souples), qui a mis énormément de temps à imposer l’obligation du port du masque, etc.

Mais cette pression populaire, collective, sociale, c’est déjà beaucoup trop pour Jean-Luc Mélenchon et ses amis petits-bourgeois anti-État. Si Jean-Luc Mélenchon réussissait son coup avec sa « fête de la liberté », ce serait un énorme symbole, et surtout une terrible défaite pour la société.

Cela a cependant le mérite de tracer une ligne de démarcation claire et nette entre les populistes anti-sociaux d’un côté, et de l’autre côté ceux voulant réellement la Gauche, c’est-à-dire une société démocratique, sociale, culturelle, portée par des valeurs solides et un élan collectif puissant pour écraser le libéralisme libertaire porté par le capitalisme.

Reste à faire en sorte de polariser pour bien montrer que les populistes n’existent que comme décomposition d’une société française pourrie par le capitalisme, asphyxiée par le libéralisme économique… et le libéralisme culturel.

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Refus des mesures anti-covid: pourquoi Jean-Luc Mélenchon s’aligne-t-il sur l’extrême-Droite allemande?

Par ses propos appelant à une manifestation festive pour s’opposer à de prétendues lois liberticides, Jean-Luc Mélenchon s’aligne sur le populisme de l’extrême-Droite allemande.

Dès les premières mesures collectives mises en place pour lutter contre la pandémie, il y a eu un front tout à fait visible des figures populistes au pouvoir comme Donald Trump et Jair Bolsonaro. Mais il y a également eu une intense recomposition politique en Allemagne et en Suisse, suivie plus tardivement de l’Autriche.

Il y a eu dans ces pays une agglomération de complotistes, de néo-nazis, de petits-bourgeois adhérant à tel ou tel aspect des philosophies New Age, de commerçants et de boutiquiers, de nationalistes… le tout sous le mot d’ordre de « penser en biais ». Il y a eu des rassemblements très réguliers, très suivis, avec un véritable écho sur les réseaux sociaux.

Les commentateurs politiques allemand, suisse et autrichien ont été terriblement marqués par l’émergence, du jour au lendemain, d’une véritable scène dans tout le pays, avec ses figures, ses réseaux, ses initiatives et son impact. La manifestation interdite à Vienne le 30 janvier 2021 s’est maintenue en se transformant en « procession religieuse » de 10 000 personnes. Et le 29 août 2020 les marches du parlement allemand avaient été envahis par les manifestants lors d’une « fête de la liberté et de la paix ».

Pourtant, en France, alors que l’extrême-Droite a beaucoup agité contre les mesures anti-covid (avec Florian Philippot, Alain Soral, etc.), ce sont les anarchistes qui donnent le ton, désormais suivis par Jean-Luc Mélenchon appelant à une « manifestation festive » le 20 mars 2021.

Pourquoi cela ? C’est que tout dépend des mentalités et des formes que prend l’expression de la petite-bourgeoisie.

Parce que, au fond, on a ici une agitation petite-bourgeoise, horrifiée par l’État d’une part, par les mesures collectives d’autre part. Pour la petite-bourgeoisie en panique devant sa situation sans perspective, toute décision impliquant tout le monde est forcément une tendance au communisme, à la toute-puissance étatique, à une société avec des règles et des principes.

C’est la vision du monde d’une couche sociale coincée entre des prolétaires méprisés (mais utiles comme levier politique) et des bourgeois jalousés (sur qui il faut faire pression).

Jean-Luc Mélenchon sait tout cela très bien, mais comme il a choisi le populisme, il tente de surfer sur la vague. Son raisonnement est que c’est une sorte de réédition des gilets jaunes et que cette fois il faut être efficacement de la partie.

On a, au lieu d’une analyse sérieuse des différentes tendances sociales et culturelles, un suivisme total de n’importe quel agitation, au motif que si on donne un débouché politique, tout marchera par miracle.

Mais, en réalité, le suivisme derrière l’agitation petite-bourgeoise anéantit les valeurs et les principes de la Gauche. Il suffit de voir les terribles dégâts qu’ont fait les gilets jaunes. Beaucoup de gens s’imaginent être de gauche et lutter en adoptant des démarches qui n’ont rien à voir avec la lutte des classes, tout cela parce qu’ils copient les gilets jaunes.

Jean-Luc Mélenchon va ici renforcer cette tendance : il veut aligner les restes de la Gauche derrière une petite-bourgeoisie qui ne veut pas de règles, qui veut faire ce qu’elle comme elle veut, convergeant entièrement avec le libéralisme libertaire promu par le capitalisme.

Comment se fait-il, peut-on se demander, que malgré la base petite-bourgeoisie commune, cela soit en phase avec l’extrême-Droite allemande ?

C’est tout simplement que le fascisme c’est avant tout la mort de la société civile. Ce n’est pas du tout une société « totalitaire », mais au contraire une société atomisée où les seules valeurs émergeant sont façonnés par l’État selon les besoins militaristes du capitalisme. En clair, les prolétaires payent la restructuration, la petit-bourgeoisie fait ce qu’elle veut mais ce n’a qu’un temps car la tendance est à la guerre.

Il importe donc peu au capitalisme que l’agitation petite-bourgeoise se dise « penser en biais » et s’appuie sur les illuminés et l’extrême-Droite, ou bien qu’elle soit anarchiste et soutenue par les populistes. Ce qui compte, c’est d’effacer les valeurs, de rejeter la centralité de la société, de nier la lutte des classes.

Tout ce qui empêche la classe ouvrière de se recomposer est utile au capitalisme. Toute affirmation de la petite-bourgeoisie aux dépens de l’organisation des prolétaires est utile au capitalisme. En ce sens, les gilets jaunes ont été un terrible épisode anti-prolétaire, un cul-de-sac porté par la stérilité petite-bourgeoisie et soutenu médiatiquement par la bourgeoisie.

Là, on risque une réédition de cet épisode.

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Intersyndicale: « Toutes et tous, ensemble, mobilisé.es le 4 février »

Voici le communiqué de presse de l’intersyndical CGT – FSU – Solidaire pour la mobilisation du 4 février 2021.

 » Les organisations CGT, FSU, Solidaires, UNEF, UNL, MNL, FIDL se sont réunies en intersyndicale en cette fin d’année, marquée par la pandémie et ses conséquences sanitaires, économiques et sociales. Celles-ci sont aggravées par des décisions gouvernementales désastreuses pour le monde du travail et la jeunesse.

Nos organisations décident d’impulser un processus de mobilisations et d’initiatives tout au long du mois de janvier et début février pour la préservation et le développement de l’emploi et des services publics, contre la précarité.

Ce processus s’appuiera sur les mobilisations professionnelles déjà programmées à l’instar des appels de la santé le 21 janvier, de l’éducation nationale le 26, de l’énergie le 28, engagés également pour la défense et le développement du service public.

Dans ce contexte, et ce n’est pas anodin, les attaques liberticides du gouvernement se multiplient.
Nos organisations continuent de les combattre.

Le plan de relance affiché par le gouvernement n’est en rien un plan de rupture avec les politiques de casse de l’emploi, de pression sur les salaires et sur les conditions de travail et d’affaiblissement de la protection sociale. Il plonge une grande partie de la population et notamment la jeunesse dans la précarité et la pauvreté.

Par contre, les gagnants sont bien toujours les mêmes et ainsi les entreprises les moins touchées par la crise seront celles qui bénéficieront le plus des baisses d’impôt.
Ce constat impose de contrôler et de conditionner socialement et écologiquement les aides publiques. Il faut un véritable plan de relance combinant investissement public massif et soutien des revenus des plus fragilisés ou précaires.

C’est le chemin inverse que prend ce gouvernement.
Rien pour les petits salaires, la ministre du Travail annonce, presque comme une provocation, une revalorisation du SMIC en dessous d’1% pour 2021. Ce qui fera passer le taux horaire de 10,15 à 10,25 €.

Rien non plus pour les 1ers de corvée, exposés depuis le début de la pandémie, toutes et tous devront attendre une hypothétique négociation dans leurs secteurs professionnels fin 2021.
Rien pour les soignants qui dénoncent un plan Ségur au rabais et beaucoup de professionnels oubliés. Rien pour l’ensemble des fonctionnaires dont le point d’indice reste gelé. Rien pour les personnels de l’éducation nationale alors que le simulacre de concertation autour d’un Grenelle de l’éducation déserté par une majorité d’organisations syndicales est au point mort.

Les chiffres sont clairs : 47% des jeunes s’inquiètent pour leur emploi et le taux de chômage des jeunes a dépassé les 20%. Le second confinement les a fait plonger dans l’extrême précarité. Nombre d’entre elles et eux ne mangent pas à leur faim. A cela s’ajoute la difficulté de suivre les cours à distance, la peur de l’échec et une détresse psychologique forte. Avec ses mesures insuffisantes, restrictives et incohérentes, le gouvernement sacrifie toute une génération !

Pas une journée ne se passe sans une nouvelle annonce de plan de suppressions d’emplois, de fermetures d’entreprises ou restructurations et réductions de services.

Les réformes successives, contestées fortement, facilitent les licenciements et les suppressions de postes dans le privé comme dans le public. Là encore, ni plan de relance, ni plan de rupture mais la poursuite du même objectif libéral de casse de l’appareil productif et des services publics.

Nous affirmons, au contraire, que la réponse aux besoins de toute la population, l’avenir de la jeunesse et la réussite de la transition écologique imposent la création de millions d’emplois. Cela passe aussi par le partage et la réduction du temps de travail.

Dans le secteur de la santé par exemple, alors que le gouvernement tergiverse sur les mesures à prendre pour éviter l’engorgement des services de réanimation, c’est 400 000 emplois à créer dans les hôpitaux, les maisons de retraite ou l’accompagnement des malades et des personnes en perte d’autonomie. Les besoins sont importants aussi dans toute la fonction publique.

Il est indéniable aujourd’hui, après la pénurie de masques du printemps dernier, qu’il faut relocaliser une partie de notre production et en particulier notre industrie. Être en capacité de produire des médicaments, du matériel médical et de protection après la période que nous traversons ne peut plus faire débat.

C’est pourquoi, les organisations CGT, FSU, Solidaires, UNEF, UNL, MNL, FIDL proposent un processus de mobilisations et initiatives dès le mois de janvier. Des déploiements locaux, des tractages et des assemblées générales doivent se tenir sur les lieux de travail et dans les territoires. Ils permettront de faire de la deuxième quinzaine de janvier une période de mobilisations professionnelles pour l’emploi avec notamment 3 journées phares dans la santé le 21, l’éducation nationale le 26 et dans l’énergie le 28 janvier.

Les organisations appellent, dans une dynamique de convergences et de renforcement des luttes, à un temps fort commun interprofessionnel de mobilisations et de grève le 4 février 2021. »

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Le cinquantième congrès de « Lutte Ouvrière »

L’organisation trotskiste Lutte Ouvrière a organisé en décembre 2020 son cinquantième congrès, dans un contexte évidemment très particulier.

Le véritable nom de Lutte Ouvrière, c’est l’Union communiste (trotskyste). Lutte Ouvrière est le nom de son journal, un nom qui vient lui-même de l’ancien nom de l’organisation, Voix Ouvrière, née en 1956 et interdite à la suite de mai 1968, comme plusieurs autres structures d’extrême-Gauche.

Cependant, c’est surtout en 1970 que cette organisation a réellement commencé à exister et à s’implanter dans le paysage français. Si les maos français ont eu énormément de mal à se structurer, malgré un grand écho avec la Gauche Prolétarienne, les trotskistes ont su se structurer de manière très rigoureuse et perpétuer leurs activités pendant longtemps.

Ce sont d’ailleurs trois organisations trotskistes qui prédominent à l’extrême-Gauche à partir du début des années 1970 et jusqu’à la fin des années 1990, et Lutte Ouvrière en fait partie. Si on voulait faire du travail syndicaliste à Force Ouvrière ou à l’UNEF, en se tournant vers le Parti socialiste, on allait dans les rangs de l’Organisation Communiste Internationaliste, la plus importante des organisations, vivant cependant à la marge des autres et étant monolithique.

Si on voulait un mode de vie décadent, avec l’amour libre, du romantisme sud-américain en appréciant Che Guevara, avec un activisme débridé en mode blouson de cuir et organisation de bons coup, avec en même temps un droit de tendances très prononcé, on allait à la Ligue Communiste Révolutionnaire.

Si par contre on voulait une approche à la fois sobre et livresque, avec une formation pratique fonctionnant par paliers, un certain sens de la conspiration, l’idée de préparer matériellement le grand soir en se tournant vers les travailleurs, c’était Lutte Ouvrière.

Dans la tête des gens, et même si c’est une caricature, l’OCI c’était une secte, la LCR un bordel efficace, Lutte Ouvrière les moines soldats. Lutte Ouvrière a usé et abusé de cette image en allant recruter à la sortie des lycées les plus prestigieux, avec l’idée de profiter de jeunes bourgeois « trahissant » leur classe.

La fête annuelle à Presles, à 30 km de Paris, relève également d’une mobilisation festive où l’image donnée est celle de quelque chose de très structurée, de très encadrée. Être à Lutte Ouvrière, c’était devoir s’habiller comme les travailleurs, sans aucune extravagance, avec un vocabulaire normé, pour se fondre dans le paysage.

C’était un moule et c’est ce qui fait que de toutes les organisations depuis les années 1970, c’est la seule à disposer d’une continuité impeccable dans sa presse avec Lutte Ouvrière, dans l’organisation des conférences Léon Trotski à Paris, ainsi que dans son organe théorique Lutte des classes ou encore la participation systématique aux élections.

Si ce moule s’est largement libéralisé, les fondamentaux n’ont pas changé. La programmatique reste entièrement fondée sur le programme de transition de Léon Trotski et les réflexes d’ultra-gauche reviennent à la moindre occasion. Lors du 50e congrès, il a été souligné que le confinement face à la pandémie n’était pas une solution, que l’État profitait de la situation pour embrigader et manipuler. De la même manière, Lutte Ouvrière est pour l’amour libre et contre le mariage, rejette la résistance armée anti-nazie pendant la seconde guerre mondiale, rejette l’idée d’un parti dirigeant au profit d’une démocratie ouvrière, etc.

En un certain sens, Lutte Ouvrière est la seule organisation qui a réussi à assurer une continuité depuis mai 1968. C’est d’ailleurs un danger pour elle, car la question qui en découle, c’est : tout ça pour ça ?

Cela n’ébranlera pas les rangs de Lutte Ouvrière, qui s’est toujours posée comme l’organisation en attente que les choses se décantent. Mais était-ce juste ou bien est-ce avoir raté la systématisation du capitalisme dans la société française ces cinquante dernières années ?

Les prochaines années, marquées par la crise, montreront ce qu’il en est : soit Lutte Ouvrière joue un rôle conforme à son orientation prise il y a cinquante ans, soit elle s’effondre pour n’avoir été qu’un accompagnement du capitalisme moderne.

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27 collectivités de «gauche» veulent aider les mafias passeuses de migrants en Méditerranée

Plus de 20 000 personnes ont perdu la vie en Méditerranée depuis 2014 en tentant la grande traversée vers l’Europe. C’est insoutenable et il faudrait de gros moyens pour empêcher cela, en détruisant les mafias de passeurs et en dénonçant ce faux Eldorado que représentent les grandes métropoles capitalistes. Au lieu de cela, 27 collectivités locales liées à la « gauche », ont lancé une plateforme pour mobiliser de l’argent public en faveur de « SOS Méditerranée », cette organisation qui aide les mafias de passeurs dans leur entreprise criminelle.

L’organisation « SOS Méditerranée » est le dernier maillon d’une chaîne criminelle tout à fait connue et extrêmement bien documentée. Il y a des réseaux mafieux très organisés qui font miroiter l’Eldorado européen à de jeunes africains puis les entassent par centaine dans des embarcations de fortune. Cela moyennant des sommes astronomiques pour un tel « voyage », équivalentes à plusieurs milliers d’euros par personne.

Ensuite, un appel de détresse est lancé et les personnes, avec souvent des enfants, sont abandonnées en pleine mer. C’est une loterie sordide. Soit c’est la mort, soit il y a une possibilité de sauvetage, puis de passage vers l’Europe.

Un tel système est inqualifiable, sournois au possible, mais « SOS Méditerranée » ne vise aucunement à le détruire, bien au contraire. L’organisation participe pleinement de ce trafic et d’ailleurs elle devrait voir sa responsabilité criminelle reconnue. Le rôle de « SOS Méditerranée » est en effet déterminant, en faisant régulièrement de gros « coup » pour acheminer des centaines de migrants en Europe, plus de 30 000 revendiqués en 5 ans. Cela donne de la légitimité aux mafias, qui peuvent ainsi justifier de la réussite de leurs opérations de passage.

Les États européens et africains ne font absolument rien pour empêcher cela. Les premiers, car ils ont besoin de ces masses de migrants précaires ayant risqué leur vie pour venir servir le capitalisme ; les seconds, car ils sont totalement corrompus. Le rôle de la véritable Gauche alors est de dénoncer cela, en obligeant les États à intervenir contre les mafias et en faisant respecter les frontières.

La première chose à faire serait d’obliger la Libye à empêcher les embarcations de partir. Mais la Libye ne le veut pas, car la corruption y est énorme et il est profité sur place de la mise en esclavage des candidats à l’immigration, ainsi que des revenus de tout ce trafic. Et de toutes façons, il n’y a plus d’État central, tellement le pays est divisé par les grandes puissances.

La dernière chose à faire en tous cas est d’encourager cet immonde trafic en soutenant « SOS Méditerranée », qui travaille objectivement pour les mafias de passeurs de migrants.

Il faut dénoncer avec force ces collectivités soi-disant de gauche, qui veulent mobiliser de l’argent public en soutien à un tel système criminel. Ces régions, départements et villes se sont regroupés derrière une plateforme « tous sauveteurs ». En voici la liste :

– les régions Occitanie et Bretagne ;

– les départements Loire Atlantique, Hérault, Nièvre, Haute-Garonne, Pyrénées Orientales, Île-et-vilaine et Finistère ;

– Les villes de Paris, Montpellier, Villerupt, Mont-Saint-Martin, Saint-Nazaire, Lille, Grenoble, Villeurbanne, Bordeaux, Rezé, Alba-la-Romaine et Pantin.

Les dirigeants de ces collectivités prétendent aider le monde, mais ils ne font qu’appuyer le capitalisme, qui a absolument besoin de ces milliers de migrants prêt à tout pour tenter leur « rêve américain ». En soutenant « SOS Méditerranée » avec de l’argent public, la fausse Gauche montre sa nature bourgeoise et entièrement corrompue par le capitalisme, elle prouve à quel point elle n’a rien de populaire et encore moins de démocratique.

C’est un véritable désastre et il est grand temps que la Gauche historique revienne sur le devant de la scène pour remettre les choses au clair.

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« La France doit adhérer au traité sur l’interdiction des armes nucléaires »

Voici une tribune initialement publiée dans La Croix mercredi 20 janvier 2021 par 19 associations et organisations françaises s’opposant aux armes nucléaires.

« Le 22 janvier 2021 restera une date historique : un traité multilatéral, le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN), adopté par les deux tiers des pays membres de l’ONU en 2017, entre en vigueur et rend les armes nucléaires illégales, que ce soit leur possession, leur fabrication, ou la menace de leur utilisation, c’est-à-dire la stratégie de dissuasion nucléaire. Le TIAN comble un vide juridique et complète l’interdiction des autres armes de destruction massive, biologiques et chimiques, ainsi que de certaines armes classiques condamnées pour leur impact sur les civils.

Il aura des effets même sur les pays qui le rejettent. La France, qui s’est toujours voulue le pays porteur des valeurs de respect du droit international, ne doit pas tourner le dos à ce processus de démocratie internationale et doit adhérer au TIAN.

Cet accord est le résultat de dizaines d’années d’efforts persévérants de la société civile, à travers des organisations dont de nombreuses ont été regroupées au sein de la Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires (ICAN), lauréate du prix Nobel de la paix 2017, et le Comité international de la Croix-Rouge, en convergence avec plusieurs États, dont le Saint-Siège, l’Afrique du Sud (ancienne puissance nucléaire) et la Nouvelle-Zélande.

Les organisations, gouvernements, Églises, syndicats qui soutiennent l’interdiction des armes nucléaires n’ont pas agi seulement par frustration à l’égard des détenteurs d’arsenaux qui n’ont pas tenu leurs engagements, pris notamment dans le cadre du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).

Le TIAN concrétise le rejet d’un système verrouillé par le veto de ces quelques pays et d’un système de sécurité fondé sur la capacité de perpétrer des massacres de masse de civils.

Les puissances nucléaires, dont la France, ont beau déclarer que le TIAN ne leur imposera aucune obligation, elles ne pourront plus désormais affirmer que leurs armes nucléaires sont légitimes. Elles se comportent comme si le TNP leur accordait indéfiniment un droit de possession et de recours à l’arme nucléaire, en contradiction avec l’esprit et le texte de ce traité. Ainsi tentent-elles de justifier l’injustifiable, à savoir les programmes de modernisation et de renouvellement de leurs arsenaux nucléaires, étalés encore sur plusieurs décennies à coups de centaines de milliards d’euros.

Pourtant, l’article VI du TNP leur fait bien – depuis un demi-siècle – obligation de négocier en vue de « la cessation de la course aux armements nucléaires à une date rapprochée » et d’un « traité de désarmement général et complet » !

Les autorités françaises, comme celles des autres puissances nucléaires, affirment de manière contradictoire que la dissuasion nucléaire exclut tout recours à l’arme nucléaire, alors même qu’elles incluent dans leur doctrine des scénarios d’emploi de l’arme atomique (le « dernier avertissement ») et investissent dans de nouveaux types d’armes nucléaires plus « utilisables », qui abaissent dangereusement le seuil de la guerre nucléaire.

Les puissances nucléaires affirment que la seule solution réaliste vers le désarmement consiste à cheminer « étape par étape », et fixent comme objectif prioritaire la non-prolifération. En fait, toutes les mesures en discussion (interdiction des essais nucléaires ou de la production de matières fissiles militaires, réduction des arsenaux, non-emploi en premier, etc.) sont actuellement bloquées par ces mêmes puissances. De plus, en continuant d’affirmer que l’arme nucléaire est la garantie ultime de leur sécurité, elles la rendent encore plus attrayante et elles favorisent la prolifération qu’elles prétendent combattre.

Le Président de la République doit sortir de trois contradictions dans lesquelles il s’est enfermé : il a fustigé le « désarmement unilatéral », tout en s’enorgueillissant des mesures de réduction que la France avait prises unilatéralement depuis la fin de la Guerre froide ; il prône le multilatéralisme, tout en rejetant les aspirations d’une majorité d’États, dont des membres de l‘Union européenne ; il entend inscrire la protection de l’environnement dans la Constitution alors qu’une guerre nucléaire, même limitée, serait un crime d’écocide compte tenu de ses conséquences catastrophiques sur la planète, ses habitants et les générations futures, ainsi que l’ont démontré plus de 2000 essais nucléaires dont les effets sanitaires et environnementaux se font aujourd’hui encore ressentir sur les populations concernées.

Il est donc grand temps, trois quarts de siècle après l’horreur d’Hiroshima et de Nagasaki, que la France se joigne au mouvement mondial pour l’élimination progressive et multilatérale des armes nucléaires en adhérant au TIAN. La France contribuera ainsi, comme elle l’a déjà fait pour les autres armes de destruction massive, à l’élimination de l’arme la plus destructrice inventée par l’être humain.

Déclaration du 22 janvier 2021- Liste des signataires

Abolition des armes nucléaires – Maison de Vigilance, ADN (Collectif Arrêt du nucléaire)

AFCDRP (Association française des communes, départements et régions pour la paix) – Maires pour la Paix, AMFPGN (Association des médecins français pour la prévention de la guerre nucléaire, affiliée à IPPNW, Prix Nobel de la paix 1987), Amnesty International France (affilié à Amnesty International, Prix Nobel de la Paix 1977), Artistes pour la paix EPP (Enseignants pour la paix, membre de l’Association internationale des éducateurs à la paix – AIEP), ICAN France (affiliée à ICAN, Prix Nobel de la paix 2017), IDN (Initiatives pour le désarmement nucléaire), IPSE (Institut Prospective et Sécurité en Europe), LIFPL France (Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté), Ligue des droits de l’Homme (affiliée à ICAN France), Mouvement de la paix (affilié à ICAN et au Bureau international de la paix, Prix Nobel de la paix 1910), MIR-France (Mouvement international de la réconciliation, affilié à ICAN France), Mouvement national de lutte pour l’environnement

Observatoire des armements, PAX Christi France, PNND France (Parlementaires pour la non-prolifération et le désarmement nucléaire), Pugwash-France (affilié au Mouvement Pugwash, Prix Nobel de la paix 1995). »

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La Gauche doit barrer la route à Montebourg, le Donald Trump français

Arnaud Montebourg se lance pour la campagne présidentielle de 2022, sur une ligne souverainiste – militariste farouchement anti-chinoise.

Arnaud Montebourg ne cesse d’occuper les médias début janvier 2021 : il est littéralement placé sur orbite par les médias et, derrière, par des forces capitalistes possédant ces médias. La raison en est qu’Arnaud Montebourg pose une ligne « ni droite ni gauche » à la fois populiste et rassurante pour les capitalistes. Sa ligne équivaut à celle de Marine Le Pen ou de Jean-Luc Mélenchon, qui veulent tous les deux un État fort et une puissance militaire affirmée, mais pas en cherchant à passer outre le régime, pas en cherchant à construire une contre-opinion remplaçant celle qui est dominante.

Arnaud Montebourg est pour une unification « souverainiste » des forces en place afin d’ouvrir une perspective protectionniste – militariste. Il a expliqué au très droitier Le Point, le 9 janvier 2021, qu’il a assumé de se tourner vers la Droite :

« Qu’est-ce qui vous sépare, aujourd’hui, de la politique prônée par Jean-Luc Mélenchon ?

Qu’est-ce qui vous fait dire que je serais mélenchoniste ? La droite post-gaulliste favorable à la participation, qui défend notre pays et n’est pas favorable à la mondialisation, me paraît tout aussi proche de moi que de nombreuses personnalités de gauche. Ce dont le pays a besoin, c’est d’un compromis historique autour de la refondation de la démocratie et de l’État, mais aussi de la réforme du capitalisme. »

La sénatrice Laurence Rossignol qui le soutient totalement souligne, dans le Journal du Dimanche du 17 janvier 2021, ce refus du clivage Gauche / Droite :

« Le sujet d’Arnaud, ce n’est pas la gauche, c’est la France. Il n’enferme pas sa pensée dans les référentiels de la gauche classique. »

De fait, Arnaud Montebourg s’est vu faire des éloges par Guillaume Peltier, le numéro 2 de Les Républicains, ainsi que par la figure ultra-conservatrice Xavier Bertrand. Dans l’interview au Parisien, Arnaud Montebourg explique d’ailleurs avoir comme modèle Donald Trump, qui comme on le sait a fait passer la Droite américaine dans le populisme.

« La politique commerciale de Donald Trump vous convient-elle ?

Je n’ai aucune sympathie pour lui, mais sa politique économique a fonctionné avant le Covid. Les bas salaires se sont envolés et il a retrouvé le plein-emploi. Sa politique antichinoise est celle que nous devrions avoir. » 

Qui doute que cela fait de lui une figure du militarisme anti-chinois peut consulter une interview d’Arnaud Montebourg au Parisien, en novembre 2020. Il y explique ouvertement qu’il faut attribuer la pandémie à la Chine et la faire payer. C’est là très exactement l’argument justifiant la guerre.

« De nombreux économistes, fonds d’investissement et même, je vous le confie, les services du Trésor travaillent discrètement aujourd’hui sur un scénario d’annulation de la dette par la Banque centrale européenne. Les seuls créanciers possibles qui devraient être spoliés, de mon point de vue, devraient être les Chinois car ils sont responsables de l’expansion de cette pandémie destructrice. Leur responsabilité devra être engagée. »

Les propos d’Arnaud Montebourg impliquent la guerre. Qui veut s’opposer à la guerre doit s’opposer à Arnaud Montebourg. Qui est à Gauche doit combattre Arnaud Montebourg, qui propose une sortie par la Droite de l’impasse François Hollande ! Seule la Gauche historique porte les vraies valeurs dont on a besoin à notre époque : l’appropriation et le contrôle populaire des monopoles, le démantèlement du militarisme, l’écrasement du cannibalisme social, l’affirmation de la culture et des principes de civilisation.

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Journalistes, ultra-gauche et teufeurs manifestent contre les mesures sanitaires

24 personnes arrêtées à Paris, 7 à Lyon, 3 à Nantes et 75 personnes en tout dans le pays. Tel est le bilan des manifestations de milliers de petits-bourgeois, au moins 34 000, qui n’ont rien de mieux à faire en plein rebond de la crise sanitaire que de manifester contre l’État et s’en prendre à la police.

Les manifestations du samedi 16 janvier 2021, qui ont eut lieu dans plusieurs dizaines de villes françaises, étaient appelées par une constellation d’associations de journalistes ou de critiques des médias, auxquelles s’est greffée l’ultra-gauche ainsi que toute une partie du milieu de la musique électronique, particulièrement de la scène des free parties.

La loi « sécurité globale » n’était qu’un prétexte et il fût assumé ouvertement par les manifestants de dénoncer surtout les mesures sanitaires en cours. Les mots d’ordre, les slogans, les pancartes, ne font aucun doute sur la motivation de ces gens, dont l’obsession est de rejeter toute mesure collective, tout engagement collectif, tout effort collectif.

À Paris, les manifestants scandaient : « État d’urgence, État policier, on nous empêchera pas de manifester ! », alors qu’auparavant des camions sono avaient tenté d’organiser une sorte de rave party en accompagnement de la manifestation. À Nantes, Strasbourg ou à Lille, la présence des teufeurs était massive au seins des rassemblements, avec cette même dénonciation sidérante des interdictions de « faire la fête » dues au contexte sanitaire.

D’ailleurs, il y avait parmi les mots d’ordre, partout en France, la défense des organisateurs de la free partie s’étant déroulée en île-et-Vilaine le 31 décembre. Cela paraît incroyable, tellement un tel événement est indéfendable, absolument anti-populaire, violemment anti-social. Mais ces gens ne s’en rendent pas compte, car ils vivent dans une bulle, totalement coupés du peuple et de la réalité concrète et quotidienne de la population française.

Ce qui compterait selon eux serait de défendre des « libertés », car ils s’imaginent que l’État profiterait de la situation sanitaire pour aller contre la population. Cela n’a aucun sens puisqu’en réalité l’État est totalement dépassé et est incapable d’aller au bout des exigences populaires justement. Ce qu’il faut, c’est au moins un confinement strict, avec des restrictions drastiques et une surveillance massive de la population, particulièrement en ce qui concerne la circulation des gens.

Tout cela n’existe pas, car le capitalisme est la norme et en l’occurrence le capitalisme exige des individus atomisés et qui soient entravés le moins possibles en tant que consommateurs. L’État n’en fait pas assez contre le covid-19, et le peu de mesures restrictives qui sont prises le sont seulement car il y a une pression populaire exigeant que des choses soient faites.

Si les capitalistes faisaient entièrement ce qu’ils voulaient, ils feraient comme aux États-Unis ou en Suède. C’est ce que veulent finalement les petits-bourgeois festifs à la française.

Être à Gauche, c’est au contraire assumer qu’il faudrait un État à la hauteur, avec des mesures de grande ampleur pour faire face à l’immense crise sanitaire. C’est là allez dans le sens de la démocratie, avec comme boussole l’intérêt collectif, porté par les classes populaires.

Au contraire, les dizaines de milliers de personnes qui ont manifestées ce samedi 16 janvier 2021 sont des ennemis jurés de la Gauche, de la Gauche authentique, celle du mouvement ouvrier, car ils sont des ennemis de la collectivité.

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Hidalgo, Montebourg et Taubira se placent pour la présidentielle de 2022

C’est de manière indirecte mais tout à fait claire que Christiane Taubira, Anne Hidalgo et Arnaud Montebourg affichent leurs ambitions pour 2022.

Les gens à Gauche veulent un seul candidat lors de la présidentielle de 2022, car ils savent que sinon il n’y a aucune chance d’arriver au second tour. La peur n’est pas tant de voir Emmanuel Macron réélu que celle de voir un succès de l’extrême-Droite ou d’une Droite radicalisée.

La situation va par contre dans le sens inverse. La France Insoumise a déjà annoncé son candidat (Jean-Luc Mélenchon), le PCF compte le faire mais c’est déjà officiellement prévu, et on a désormais trois têtes d’affiche qui mettent en place leurs pions. Sachant que ce serait mal vu de le faire ouvertement, ils agissent de manière voilée, ce qui témoigne de leur incroyable hypocrisie.

On doit ici forcément mentionner Christiane Taubira en premier. Cette ex-indépendantiste guyanaise devenue une centriste, responsable par sa candidature en 2002 de l’arrivée de Jean-Marie Le Pen au second tour, une opportuniste tellement complète qu’il est impossible de savoir par quel bout la prendre. Cela en fait une figure très utile par des institutions n’ayant cessé de la présenter comme une figure humaniste, ce qui était d’autant plus facile que Christiane Taubira ne dit jamais rien de concret. Pour annoncer sa candidature, elle est passée par une pétition en ligne, qui aurait été mise en place de manière indépendante d’elle : Appel citoyen à la candidature de Christiane Taubira pour l’élection présidentielle de 2022.

De manière également hypocrite, on a Anne Hidalgo, qui a bien souligné aux dernières élections municipales qu’elle ne serait pas candidate à la présidentielle, se mettant entièrement au service de Paris. C’était mensonger bien entendu. Elle n’a cessé d’envoyer des signaux lors de la rentrée politique de 2020 et lance une plate-forme, « Idées en commun ». Il ne faut guère s’attendre à grand chose, puisque Anne Hidalgo joue sur deux aspects : qu’elle est une femme, qu’elle a l’habitude des hautes responsabilités. En tant que maire de Paris, avec ses amabilités pour les Qataris, elle a de quoi se faire valoir en effet et le Parti socialiste, notamment par son dirigeant Olivier Faure, la soutient, au grand dam de François Hollande qui aimerait bien revenir.

Arnaud Montebourg sait d’ailleurs qu’Anne Hidalgo a placé ses hommes un peu partout dans le Parti socialiste et pour cette raison, il est dans l’optique de fonder un nouveau mouvement politique. Bien entendu il ne peut pas le faire directement, ce serait mal vu, alors des proches ont fondé « L’Engagement », mouvement reprenant le nom de l’ouvrage publié en 2020 par Arnaud Montebourg ! Aux manettes, on a Vincent Przyluski, chef d’une entreprise spécialisée en hautes technologies et conseiller d’Arnaud Montebourg lorsqu’il était ministre de l’Économie. La ligne est bien entendu un nationalisme de gauche, affirmant l’importance des entreprises nationales, etc.

Il va de soi que personne à Gauche ne peut soutenir de telles initiatives individuelles combinées à des idéologies qui relèvent d’une sorte de capitalisme libéral social au mieux, d’un capitalisme national social de l’autre. Il faut même s’y opposer fermement et l’axe est facilement trouvé. Christiane Taubira et Anne Hidalgo, c’est le retour de François Hollande sous une autre forme. Arnaud Montebourg, c’est du Jean-Luc Mélenchon délavé. Cela représente d’ailleurs les deux principales déviations du moment : la soumission au libéralisme libertaire d’un côté, le passage au nationalisme de l’autre.

Il va de soi qu’il est difficile de contribuer à quelque chose évitant ces deux déviations, car elles ont de puissants soutiens. En même temps, Christiane Taubira et Anne Hidalgo ne peuvent pas plus tenir face à Emmanuel Macron que François Hollande. Quant à Arnaud Montebourg, il ne fait pas le poids face à Jean-Luc Mélenchon. Il est donc possible de les dénoncer, même si évidemment cet important nombre d’opportunistes parasitent terriblement le paysage.

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50 ans après les Black Panthers, les trumpistes prennent le Capitole

En occupant le Capitole, les partisans de Donald Trump révèle la cassure entre l’État américain, corrompu et en faillite, et un peuple qui croit encore pourtant au complexe militaro-industriel.

Le Capitole des États-Unis est le siège du Congrès américain, à Washington ; il se situe à environ deux kilomètres de la Maison-Blanche, alors que deux kilomètres plus loin on trouve le Pentagone.

C’est un lieu essentiel de la gestion interne de la superpuissance américaine. Il est composé de 39 bâtiments, il a son propre métro (avec trois lignes et six stations) ainsi que sa propre police et pour cause : en raison de l’important nombre de secrétaires par élus, on a 30 000 personnes au cœur des magouilles et des arrangements au service du capitalisme américain, avec même cent salles secrètes répertoriées sur aucun plan.

Le Capitole des États-Unis

En l’occupant le 6 janvier 2021 pour empêcher la reconnaissance officielle de Joe Biden comme prochain président, les partisans de Donald Trump ont joué sur une contradiction du Congrès. C’est à la fois un organisme de l’État central et en même temps un représentant de la nature fédérale du régime américain.

En pratique, c’est un lieu de corruption et de décisions reposant sur une représentation des intérêts capitalistes américains, dans le cadre d’un régime très violemment opposé à la Gauche depuis le début du 20e siècle. Impossible pour les partisans de Donald Trump de le reconnaître, aussi ont-ils mené leur occupation en force, qui a duré plusieurs heures, au nom de l’appropriation de ce qui serait à eux. Les plébéiens prennent au sérieux les prétentions du régime capitaliste.

C’est l’incohérence de la révolte américaine : elle est populaire, mais de Droite, elle voit en l’affirmation plébéienne un moyen de secouer le joug d’un État corrompu, affairiste, en faillite, avec des démocrates et des républicains magouilleurs depuis cent ans, etc. Il est significatif que la femme tuée par la police du Capitole ait servi 14 ans dans l’armée américaine, tout autant que les gens présents mêlaient prolétaires déclassés et nazis folkloriques, dans un amalgame pittoresque. Ce sont l’équivalent de nos gilets jaunes, même si en France les révoltés se veulent beaucoup plus anti-politiques, conformément à la tradition anarchiste et syndicaliste révolutionnaire française.

Il est très étonnant en tout cas qu’aucun commentateur n’ait parlé du fait qu’en 1967, les Black Panthers avaient mené une opération contre le Capitole. Cela fit grand bruit et les cadres de la Droite plébéienne autour de Donald Trump ne peuvent pas ne pas connaître cet épisode. Symboliquement, leur occupation est le pendant de celle de 1967.

Tout part d’une loi californienne de 1967 visant à interdire de se promener avec des armes chargées, une action visant à empêcher les Black Panthers de mener des patrouilles à Oakland. Une trentaine de Black Panthers allèrent alors de manière armée au Capitole, la moitié d’entre eux parvenant à la salle de l’assemblée, où ils furent désarmés et arrêtés. Légalement, ils en avaient toutefois le droit et ils furent donc libérés, leurs armes rendues.

Les Black Panthers au capitole

La police procéda toutefois à un contrôle des armes à leur sortie, alors que Bobby Seale lut une déclaration disant notamment que :

« Le parti Black Panther pour l’auto-défense appelle le peuple américain en général et le peuple noir en particulier à prendre note avec attention de la législature raciste de Californie qui envisage une législation visant à rendre les gens noirs désarmés et sans pouvoir précisément alors que les agences racistes de police à travers le pays intensifient la terreur, la brutalité, le meurtre et la répression des gens noirs. »

On remarquera au passage que ce discours, tout à fait juste à l’époque aux États-Unis, est pratiquement repris aujourd’hui par l’ultra-gauche française, ce qui n’a aucun sens. En tout cas, donc, la loi passa tout de même en Californie et par la suite, tout se termina mal pour les Black Panthers. Ceux-ci témoignaient par cette occupation de leur volonté de rester dans le cadre de la légalité, or cela les amènera à se faire arrêter ou exécuter par le FBI dans le cadre du fameux COINTELPRO.

C’est qu’on ne contourne pas le peuple impunément. Et, dans les faits, avec cette histoire de Capitole, on est dans un substitutisme à l’américaine, dont l’équivalent est l’obsession des gilets jaunes pour la marche sur l’Élysée. On est dans le symbole, la course au symbole. C’est le reflet d’une vaste agitation petite-bourgeoise – comme dans les années 1920-1930. Des années de fascisation et de fascisme.

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Occupation du Capitole : Emmanuel Macron et le Parti socialiste en panique

C’est carrément devant un drapeau américain qu’Emmanuel Macron a dénoncé l’occupation du Capitole, le Parti socialiste lui emboîtant le pas dans l’éloge de la superpuissance américaine.

La superpuissance américaine serait une « démocratie »… Que c’est ridicule ! Tout le monde sait à quel point c’est un régime corrompu, où les élections présidentielles sont prétextes aux dépenses de centaines de millions de dollars – la dernière élection présidentielle opposant Joe Biden à Donald Trump, c’est 14 milliards de dollars déversés ! Tout s’achète aux États-Unis, pays gangrené par le capitalisme à tous les niveaux.

Et c’est devant un drapeau américain qu’Emmanuel Macron a raconté ce qu’aucun Français ne peut croire : la démocratie américaine serait un modèle.

Voici son discours :

« WHAT HAPPENED TODAY IN WASHINGTON DC IS NOT AMERICA, DEFINITELY.

7 JANVIER 2021 – SEUL LE PRONONCÉ FAIT FOI

Ce 6 janvier, alors que se tenait une session du Congrès américain devant confirmer la victoire du Président Biden aux élections de novembre 2020, quelques individus violents se sont introduits dans le temple séculaire de la démocratie américaine : le Capitole.

Une femme a été tuée.

Quand, dans une des plus vieilles démocraties du monde, des partisans d’un Président sortant remettent en cause, par les armes, les résultats légitimes d’une élection, c’est une idée universelle – celle d’un homme, une voix – qui est battue en brèche.

Depuis le XVIIIème siècle, les Etats Unis d’Amérique et la France sont liés par un pacte de liberté et de démocratie.

La France, avec La Fayette, a soutenu le peuple américain dans sa quête de liberté et d’indépendance.

La France, avec Alexis de Tocqueville, a reconnu les Etats Unis d’Amérique comme un emblème de la démocratie.

Les Etats Unis d’Amérique, durant le 20ème siècle, lors des deux guerres mondiales, se sont tenus aux côtés de la France à chaque fois que son indépendance, sa liberté, furent menacées. 

Alors aujourd’hui, la France se tient aux côtés du peuple américain avec force, ferveur et détermination, et aux côtés de tous les peuples qui entendent choisir leurs dirigeants, décider de leurs destins et de leurs vies, par ce choix libre et démocratique des élections. Et nous ne cèderons rien à la violence de quelques-uns qui veulent remettre en cause cela.

C’est notre choix, depuis plusieurs siècles, de mettre la dignité humaine, la paix, le respect de l’autre, la reconnaissance de la liberté au-dessus de tout, qui est aujourd’hui menacé dans nos démocraties. 

C’est pourquoi ce soir, je veux dire notre confiance dans la force de la démocratie américaine.

Je veux dire notre amitié à l’égard du peuple et de la démocratie américaine.

Je veux dire notre lutte commune pour que nos démocraties sortent plus fortes de ce moment que nous vivons tous aujourd’hui.

I just wanted to express our friendship and our faith in the United States.

What happened today in Washington DC is not America, definitely.

We believe in the strength of our democracies. We believe in the strength of American democracy. »

Ce qui est grave, c’est que le Parti socialiste soit sur la même longueur d’onde. Au pouvoir, le Parti socialiste disait déjà tout cela. Mais là il s’aligne de lui-même, même hors des « responsabilités », sur un éloge délirant de la superpuissance américaine en perdition. Il montre qu’il ne comprend rien, qu’il est totalement hors-jeu…. Et qu’il a déjà en ligne de mire de proposer pour les prochaines présidentielles Anne Hidalgo, Christine Taubira ou François Hollande. Sa ligne, c’est celle des démocrates américains, avec la modernisation du capitalisme, les valeurs post-modernes, etc.

Voici son communiqué :

« États-Unis : le Parti socialiste salue la victoire de la démocratie contre la violence

Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti socialiste

Jean-Marc Germain, secrétaire national aux Relations internationales

Après la consternation du monde démocratique devant les scènes d’insurrection qui ont interrompu hier au Congrès américain la certification des résultats du 3 novembre 2020, y compris de la double victoire des sénateurs en Géorgie ce 5 janvier 2021, le 46e président des États-Unis est officiellement désigné.
 
En ce jour où la démocratie américaine aura pu mener à son terme son processus électoral malgré le chaos et les violences instigués par le président sortant, le Parti socialiste réitère ses félicitations au président Joe Biden et à sa vice-présidente Kamala Harris. Ils incarnent à la fois la perspective d’un retour à l’apaisement ainsi qu’un nouveau souffle pour l’avenir de la société américaine. Il exprime aussi ses félicitations aux nouveaux élus de Géorgie, Raphaël Warnock et Jon Ossoff. Leur victoire offre à la Maison Blanche et au Parti démocrate les moyens politiques, économiques et législatifs de combattre efficacement les dégâts considérables de la pandémie causés par une gestion irresponsable, mais aussi de mettre en œuvre le programme ambitieux de progrès social et de cohésion sociétale des États-Unis.
 
Le Parti socialiste se réjouit également que l’ère nouvelle qui s’ouvre soit celle du retour de cette nation aux côtés de ses partenaires dans la résolution des grands défis du siècle, à commencer par le sauvetage de la planète face à la menace climatique. Il observe cependant qu’en dépit de la leçon de respect des institutions donnée ce jour à ceux qui souhaitent les abattre, la démocratie s’impose désormais parmi les grandes causes à défendre. Les actes insurrectionnels d’hier et l’investiture prochaine du président Joe Biden constituent ainsi un double message de responsabilité : le devoir de rétablir la confiance en la démocratie face aux mensonges qui la dégradent et l’espoir que les États-Unis reprennent leur place pour s’opposer aux forces qui veulent l’annihiler.

– Jeudi 7 janvier 2021« 

Dans tout cela on sent surtout la panique des bourgeois. Ceux-ci se doutent bien que derrière l’agitation petite-bourgeoise stérile, il y aura le rouleau compresseur prolétarien. Les années 2020 vont aller de crise en crise.

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L’État avoue enfin son fichage politique

De vaines protestations reprochent à l’État de vouloir ficher les opinions. Comme s’il ne le faisait pas déjà !

Il existe depuis quelques semaines une sorte de tourmente quant à la possibilité pour la police et la gendarmerie de ficher certaines données des personnes. On parle ici plus précisément des opinions politiques, des convictions philosophiques et religieuses, des appartenances syndicales. La raison donnée est la sûreté de l’État.

Il y a beaucoup de protestations contre un projet gouvernemental en ce sens, mais lundi 4 janvier 2020 le Conseil d’État a validé le tout, après avoir été saisi notamment par le Syndicat de la magistrature, le Syndicat des avocats de France, la CGT, la CGT-FO, la FSU… qui n’ont pas apprécié le concept de « de porter atteinte à l’intégrité du territoire ou des institutions de la République».

En pratique, on a ainsi :

– le Pasp (prévention des atteintes à la sécurité publique) de la police concernant 60 686 personnes ;

– le Gipasp (gestion de l’information et prévention des atteintes à la sécurité publique) des gendarmes concernant 67 000 personnes ;

– l’EASP (enquêtes administratives liées à la sécurité publique) concernant 221 711 personnes.

Après, il faut être sérieux. Il est évident que l’État fiche déjà les opinions politiques, les convictions philosophiques et religieuses, les appartenances syndicales. L’État n’a également certainement pas attendu cette mesure gouvernementale pour siphonner toutes les publications des réseaux sociaux, tous les commentaires, photos et autres. Il a toujours fait cela, de par sa définition même.

Naturellement, il y a une grande hypocrisie à ce sujet. En Allemagne, il n’y a pas une telle hypocrisie : chaque année, chaque région publie son résumé détaillé des activités des « extrémistes », assumant directement de ficher leurs membres. En France il est pareillement fait, sauf que ce n’est pas ouvertement dit, surtout depuis que les « renseignements généraux » sont censés avoir disparu en 2008.

Ne pas le dire aide à maintenir la fiction d’un État qui serait à l’écart, dépassé, etc. L’État français a en effet la ligne de la désescalade. Il surveille, infiltre, laisse faire, cherche à pourrir de l’intérieur… visant à éviter toute répression ouverte. L’État allemand joue quant à lui la démolition, il perquisitionne massivement, comme en août dernier contre le groupe « Construction rouge » avec 22 personnes arrêtées pour… vandalisme, dans le cadre de perquisitions avec 200 policiers armés jusqu’aux dents.

L’État français préfère lui laisser vivoter les « extrémistes », les maintenir isoler et inconnus, visant à leur épuisement. Il est ainsi risible de parler de violences policières en France alors que cette stratégie de la désescalade est complète et traditionnelle ; on l’a vu en 1968 où il n’y a pas eu de morts (du moins officiellement, en réalité il y a quelques « accidents de la route » en plus) ; on la voit de manière flagrante dans toutes les manifestations des vingt dernières années, etc.

Cela tient beaucoup à la force des centristes en France, avec les radicaux et la franc-maçonnerie, les républicains de gauche… bref toute une scène visant à « neutraliser » les conflits sociaux, tout ramener dans une neutralité tranquille, maintenir une ambiance libérale et pacifiée, etc.

Qu’on ne parle pas des gilets jaunes : ceux-ci ont été des petits-bourgeois hystériques se comportant avec une agressivité forcenée et nihiliste et ils ont plusieurs fois provoqué des destructions significatives dans Paris. Dans tout autre pays ils se seraient tous fait démolir par les forces de l’ordre et condamner à plusieurs années de prison ! La « répression » contre les gilets jaunes relève de la fiction petite-bourgeoise qu’eux-mêmes alimentent.

Et il en va de même pour les protestations aberrantes contre une loi qui ne fait que révéler ce qui se fait. L’État surveille tout, c’est sa fonction. Il a des listes et il sait qu’en cas de crise importante, il doit utiliser ces listes pour empêcher tout risque à l’opinion publique. Il est bien connu que le gaullisme avait ses listes d’activistes de la Gauche à emprisonner en urgence dans un stade : si l’on croit qu’une telle liste a disparu, c’est qu’on ne comprend rien à ce qu’est l’État.

Gouverner, c’est prévoir. Les contestataires contestent, les révolutionnaires veulent la révolution et par conséquent gouverner c’est connaître ceux-ci et envisager ce qui peut se passer. C’est une évidence même. Aux gens de Gauche d’être assez intelligents pour ne pas étaler tout et n’importe quoi n’importe comment.

Ce qui pour beaucoup, de par leur ego, est impossible. Quand on s’imagine que maintenant on trouve sur Twitter et Facebook des gens montrant même que, ô miracle, ils ont collé des affiches ou bien écrit quelque chose sur un mur… et qui présentent cela comme un coup d’éclat ! Dire qu’ils s’imaginent que c’est du « militantisme de terrain » comme ici sur cette image (pour « une société plus juste » qui plus est, peut-on faire plus creux).

Sacrée image où ce qui est banal est un événement parce qu’il faut bien satisfaire l’ego et son culte. C’est certain que pour ces gens-là, tout est fictif, car l’État les surveille et eux-même le savent. C’est du théâtre. De vrais contestataires n’iraient surtout pas raconter ce qu’ils font, afin de se préserver au maximum de la surveillance étatique.

Tout cela est surtout la preuve qu’on vit une époque délirante, où il y a de la fiction vraiment partout dans la société. L’État abandonne une partie de celle-ci en assumant qu’il fiche : tant mieux, au moins c’est autant de clarté en plus !

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Le congrès de Tours et l’importation du marxisme en France

Au-delà des questions de réforme et de révolution, le congrès de Tours c’est surtout le point de départ de l’introduction du marxisme en France.

Le marxisme, au début du XXe siècle, est considéré en France comme une philosophie allemande et si les socialistes français apprécient la critique économique du capitalisme, ils ne vont pas plus loin. Même après le congrès de Tours, les socialistes français devenus des communistes relevant de l’Internationale Communiste n’en ont pas grand chose à faire. Ils préfèrent Lénine en qui ils voient un type rentre-dedans et pragmatique, cherchant des moments décisifs.

Marx ? C’est bien, mais c’est surtout comme référence justifiant le socialisme. Lénine, c’est mieux, il y a un côté rentre-dedans, tout à fait conforme à un esprit socialiste français largement marqué par le syndicalisme révolutionnaire et ses actions coup de poing pour avancer vers la « grève générale ». D’ailleurs, Lénine était d’autant plus pratique que cela permettait aussi bien de se passer de Marx, avec l’idée que l’action remplaçait la théorie.

Le résultat ne se fit pas attendre, comme c’est bien connu : au congrès de Tours les socialistes sont pratiquement 180 000, en 1921 les communistes sont moins de 110 000, en 1923 ils ne sont plus que 55 000, et encore peut-on encore abaisser ces chiffres si l’on compte les gens réellement actifs. Et, surtout, les gens présents sont pratiquement tous nouveaux, tous jeunes.

L’Internationale Communiste a en effet fait comprendre aux socialistes français devenus communistes que désormais, il fallait passer au marxisme. Et il ne s’agissait pas d’un marxisme comme une inspiration, mais bien d’un dogme. On a coutume de dire que cela relève d’une « stalinisation » du marxisme, ce qui est une erreur grossière. Le marxisme était déjà un « dogme » dans la social-démocratie allemande, avec comme figure tutélaire Karl Kautsky. Ce dernier était considéré comme le successeur de Friedrich Engels, ce dernier étant considéré lui-même comme le successeur de Karl Marx.

Karl Kautsky

C’est si vrai que Lénine, pour se légitimer, dut écrire un ouvrage intitulé « La révolution prolétarienne et le renégat Kautsky ». Lénine ne dit pas le réformiste Kautsky, il dit le renégat, car pour lui Karl Kautsky c’était très bien. D’ailleurs, lorsque Lénine explique dans « Que faire ? » le principe de ce qui sera appelé la conception léniniste de l’organisation, il s’appuie directement sur Karl Kautsky.

Le congrès de Tours marqua ainsi une orientation vers le marxisme d’une partie de la Gauche française, avec les communistes. Ce n’est toutefois pas le seul effet du congrès de Tours.

De la même manière, les socialistes restés dans la « vieille maison » comme le formula Léon Blum se tournèrent vers la social-démocratie autrichienne, qui était incroyablement massive dans la ville de Vienne formant son bastion. Son dirigeant, Otto Bauer, était ni plus ni moins qu’un avatar de Karl Kautsky. C’est à Vienne que siégea l’Union des partis socialistes pour l’action internationale, fondée en 1921 et qualifiée par les communistes d’Internationale deux et demie, avec les socialistes français, suisses et espagnols, les sociaux-démocrates allemands et autrichiens, les travaillistes indépendants britanniques.

Cela fit que les socialistes français passèrent également sous l’influence du marxisme. Inconnu au début du siècle, le marxisme devient au début des années 1930 une vraie question de fond en France et cela encore plus au début des années 1950. Dans les années 1960 commença toutefois l’émergence d’une « seconde gauche » cherchant à modifier, dépasser ou réfuter le marxisme, avec Jean-Paul Sartre, Michel Foucault, etc. Ce fut la grande période des « intellectuels », qui dans les faits contrecarraient le marxisme depuis les universités et le Quartier latin parisien.

Cette tendance fut même présente dans le PCF. Le philosophe « officiel », Roger Garaudy, chercha à dépasser le marxisme, tout comme l’économiste « officiel » Paul Boccara remplaça la notion d’impérialisme par celle de capitalisme monopoliste d’État. D’autres cherchent à « moderniser » l’interprétation de l’État, comme Nicos Poulantzas, ou bien l’idéologie marxiste, comme Louis Althusser. Cela prit du temps mais cela donna un post-marxisme dont le PCF se veut aujourd’hui le représentant.

Cela fait que dans les années 1980, le marxisme est déjà délaissé ; à partir des années 1990, il est ouvertement rejeté à peu près partout à Gauche. C’est alors le renouveau des anarchistes et des syndicalistes. Avec en quelque sorte un retour à la case départ si l’on prend le congrès de Tours comme référence. L’alternative étant : soit ce fut un formidable détour et le PCF une aventure, populaire certes, mais une aventure, soit il faut recommencer le processus d’affirmation du marxisme en France, contre l’esprit syndicaliste « révolté ».

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Il y a cent ans au congrès de Tours naissait en France le Parti Communiste

En choisissant de demander à rejoindre l’Internationale Communiste, la majorité des socialistes français donnait naissance au Parti Communiste le 29 décembre 1920.

Au cinquième jour du congrès de Tours, il y a cent ans, se tenait le vote des socialistes français, autour d’une question essentielle à leurs yeux : fallait-il suivre l’appel de Lénine à mener une grande cassure dans les rangs des socialistes français ?

C’était un drame pour beaucoup, car la tradition socialiste française, c’était celle de la « synthèse » entre différentes tendances, allant des tenants de l’alliance avec les bourgeois éclairés aux partisans d’un anarchisme complet. Et au début de l’année 1920, les socialistes français avaient déjà refusé d’aborder en tant que tel la question. Cela les dérangeait, ils avaient toujours pensé être plus efficaces, plus honnêtes, en acceptant tout le monde.

Impossible pourtant à la fin de l’année 1920 de continuer à faire comme si la Russie soviétique n’existait pas, alors que toute l’Europe centrale a déjà connu l’ouragan révolutionnaire, que le capitalisme est instable dans toute une série de pays européens, que la pression continue de monter en France. Alors le soir du 29 décembre, le vote des délégués est très clair, les 3/4 votant pour l’adhésion du Parti socialiste Section Française de l’Internationale Ouvrière à l’Internationale Communiste.

C’était un choix romantique. Des socialistes prônant l’adhésion à l’Internationale Communiste, il ne restera très vite pratiquement personne. Ils partiront ou seront éjectés dans les quelques années suivantes. Ce sont des jeunes qui vont faire vivre ce qui est désormais un « Parti Communiste », aligné sur les choix réalisés par l’Internationale Communiste. Ce sont des jeunes ouvriers du Nord, comme Maurice Thorez, né en 1900. Il deviendra ensuite le dirigeant du Parti Communiste, à l’âge de trente ans.

Ce sont surtout des jeunes ouvriers parisiens qui feront le coup de poing avec l’extrême-Droite dans les années 1930, provoquant la rébellion antifasciste de 1934 qui donne naissance au Front populaire. Au milieu des années 1930, la région parisienne forme la moitié du contingent du Parti Communiste.

Cette question du romantisme est très importante, car le Parti Communiste est en France avant tout une passion, et une passion localisée. Elle n’a pas touché tout le pays, elle n’a pas réussi à s’ancrer dans l’Histoire française. Il y a des lieux où le Parti Communiste a été un formidable lieu de socialisation. Mais il a été comme parallèle à la société française, qui a continué son chemin sans lui.

Contrairement à d’autres pays où le niveau culturel était élevé, avec ainsi une culture façonnant la société au moins en partie, les communistes ont en France toujours considéré que le communisme c’était avant tout un élan, le Parti Communiste une sorte de syndicat, mais politique. Et cette conception doit beaucoup au congrès de Tours de décembre 1920.

Le congrès de Tours de 1920 est donc un événement marquant, mais s’il fut sincère, il reflète une problématique de fond qui est la difficulté de la Gauche en France à dépasser une conception minoritaire et syndicaliste/électoraliste de l’action politique. Encore faut-il d’ailleurs souligner qu’il ne s’agit pas tant de politique que de culture. La Gauche française aime à se précipiter, à être dans le feu de l’action, et pour cette raison le monde entier la regarde souvent. Mais hors ces actions, il y a une incapacité à prolonger le tir, à ancrer une culture, à établir des perspectives.

Tout le mal de la Gauche française se lit bien dans le congrès de Tours de 1920, avec son élan sincère mais volontariste.

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Quelques articles intéressants à l’occasion du centenaire du congrès de Tours

Quelques articles nouveaux pour le centenaire du congrès de Tours marquant la fondation du PCF.

Voici quelques (nouveaux) documents intéressants pour contribuer aux connaissances sur le congrès de Tours de 1920, sur la question des socialistes et des communistes.


  • La ville de Tours présente une exposition virtuelle sur sa situation au moment du congrès. Plutôt bien faite, l’exposition permet d’avoir un aperçu sur le contexte du congrès, ainsi que en un certain sens sur la France de l’époque.

=> l’exposition virtuelle

  • La chaîne de télévision Public Sénat, qui dépend du Sénat français, a publié un documentaire très sérieux, même si évidemment limité, présentant le sens du congrès de Tours.

=> la vidéo Congrès de Tours. 1920 : la naissance des deux gauches


  • La Fondation Jean Jaurès a mis en ligne une vidéo de débat présentant l’intérêt de relire Léon Blum cent ans après le congrès de Tours. Il faut se rappeler ici que Léon Blum jouait un rôle très secondaire chez les socialistes avant le congrès de Tours. En devenant l’opposant le plus acharné de l’Internationale Communiste, il est apparu au premier plan. Ses propos tenus au congrès, consistant en une défense des traditions socialistes – absence de centralisation, droit de tendance, direction reflétant les tendances – forment littéralement le catéchisme socialiste.

=> la page avec la vidéo du débat

  • La Gauche républicaine et socialiste (GRS) a publié un article assez dense intitulé 100 ans de Parti Communiste Français. La GRS est notamment composée des ex-socialistes faisant le choix de s’orienter par rapport à La France insoumise. L’article résume le congrès de Tours en prenant partie pour Léon Blum, tout en réfutant une position anti-PCF, dans l’esprit du programme commun et de François Mitterrand. Il est appelé à une fusion des communistes avec la Gauche républicaine au nom de la disparition du « soviétisme ».

=> l’article 100 ans de Parti Communiste Français


  • Le Monde Diplomatique a publié un article sur « l’essor et déclin du communisme français ». Cette revue exprime le point de vue de l’altermondialisme et l’article explique que le communisme a surtout été un mouvement populaire, qu’il a encore de nombreux restes, notamment au niveau des municipalités. C’est donc une force à prendre en compte.

=> l’article Il y a cent ans naissait un parti authentiquement populaire

  • L’auteur de l’article du Monde Diplomatique est interviewé à ce sujet par Solidaire, l’organe du Parti du Travail de Belgique. C’est un sociologue, publiant un ouvrage sur le centenaire du PCF ; son regard se veut neutre et objectif afin de présenter des faits. On n’y cherchera donc pas un point de vue relevant du mouvement ouvrier.

=> l’interview Il y a 100 ans : La naissance du Parti communiste français


  • Militant, un réseau actif dans La France insoumise, a mis en ligne un mémoire de maîtrise donnant la version trotskiste de la naissance des pro-IIIe Internationale dans les rangs socialistes. Cela exprime la nostalgie sur le fait que les syndicalistes et les trotskistes ne soient pas arrivés à prendre le contrôle du jeune Parti Communiste.

=> le mémoire de maîtrise portant sur « Le Comité de la 3ème Internationale
et les débuts du PC français (1919-1936) »

  • Le rassemblement communiste, avec différents groupes dont la coordination communiste 59/62 issue du PCF des années 1990, a publié une vidéo avec des interventions cherchant à tracer un bilan du PCF à l’occasion du centenaire du congrès de Tours. C’est la combativité sociale qui est soulignée, avec sincérité mais de manière artisanale (les gens s’allongeant sur un canapé à l’arrière-plan, tout de même!).

=> la vidéo à l’occasion du centenaire


  • Le Pôle de Renaissance Communiste en France a publié un court texte, accompagné d’une vidéo, appelant à la reconstitution du Parti Communiste en France. C’est là quelque chose de nouveau, car normalement le PRCF a comme position concernant le PCF d’être un pied dedans un pied dehors. On a là une affirmation très forte, qui se voit associée une proposition d’une candidature à la présidentielle de 2022. Le PRCF entend se présenter comme le parti (patriotique) du combat de classe et considère que le moment est arrivé pour se poser comme la véritable rupture avec le réformisme, le révisionnisme, le gauchisme, etc.

=> l’appel du PRCF Reconstruisons un parti communiste pour faire gagner les travailleurs


  • Le PCF (marxiste-léniniste-maoïste) publie une série d’articles sur la nature du Parti Communiste, ainsi que les dossiers sur le congrès de Tours. On retrouve à l’arrière-plan la conception selon laquelle les communistes français n’ont pas été à la hauteur sur le plan idéologique et culturel. Il ne s’agit pas simplement de lutter ou de refuser le réformisme, tout est une question de vision du monde, qui doit être matérialiste dialectique, matérialiste historique (avec donc Marx, Engels, Lénine, Staline, Mao Zedong).

=> la revue pdf Bolchevik


  • Le Parti Communiste Révolutionnaire de France a publié un court article saluant la fondation du Parti Communiste en 1920, faisant référence à des extraits d’interventions au congrès de Tours en faveur de la transformation du Parti socialiste.

=> le court article avec le pdf contenant les extraits

  • Les Jeunesses Communistes du Bas-Rhin, des Bouches-du-Rhône et de Lyon ont réalisé une déclaration commune, appelant à s’opposer au reniement, voyant en la période 1989/1991 un mauvais tournant.

=> la Déclaration commune

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Le PCF en 1970 : « un sacré bout de chemin »

Le texte « un sacré bout de chemin » trace le bilan du PCF pour son cinquantenaire en 1970 et annonce les perspectives à espérer alors.

Le PCF a publié en 1970 une petite brochure à l’occasion de son cinquantenaire. Intitulée « un sacré bout de chemin… », elle contient un petit historique se concluant par un texte présentant le PCF en 1970, avec ses perspectives. Voici cette partie, qu’il est intéressant de voir depuis décembre 2020, cinquante ans après. Surtout que ce texte de conclusion s’intitule « le but si proche ».

La brochure a été publié comme supplément aux « Cahiers du communisme » de novembre 1970 et sa rédaction par le comité central a eu comme principal acteur Rober Lechêne. Né en 1927, celui-ci a rejoint le PCF en 1946, devenant un des principaux cadres de sa presse. Il fut notamment le rédacteur de la revue Nous les Garçons et les Filles, une sorte de tentative populiste de se tourner vers la jeunesse en gommant toute identité à la jeunesse communiste.

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Charlie Hebdo criminalise l’Union communiste libertaire

Un intolérable article de Charlie Hebdo relève de la criminalisation d’une organisation communiste libertaire.

Le 25 décembre 2020, l’Union Communiste Libertaire a pris publiquement position en réponse à un odieux article paru dans Charlie Hebdo. « Misère d’une chronique (quand Jean-Yves Camus veut s’en prendre à l’UCL) » répond à l’article « Black bloc : sous les pavés, tout et n’importe quoi ». Cet article payant a été écrit par Jean-Yves Camus, un politologue ayant un certain écho à Gauche pour ses analyses sur l’extrême-Droite, alors que lui-même a tout de même la particularité d’être un fervent religieux (il s’est converti au judaïsme, une chose par ailleurs extrêmement difficile). La raison est qu’il y a vrai niveau intellectuel et que les informations sur l’extrême-Droite intéressant toujours. Mais c’est une dénonciation incroyable de populisme que Jean-Yves Camus a écrit dans Charlie Hebdo, au point qu’il est forcément nécessaire que celui-ci soit boycotté et même Charlie Hebdo devient de fait inacceptable.

Le fond de l’article de Jean-Yves Camus est intelligent et raisonnable. Parlant des « black block », il dit : ces gens n’existent pas politiquement, ils ne sont présents que dans les cortèges, pour le reste ils ne sont pas présents dans la société. Il reproche l’attitude de chercher la casse en tournant le dos aux gens, alors qu’il y a tellement à faire.. Tout cela est très bien et c’est le discours classique de la Gauche historiquement.

Cependant, Jean-Yves Camus va plus loin et assimile alors l’Union communiste libertaire aux casseurs et aux apprentis terroristes! Le tout dans une sorte d’amalgame totalement absurde et littéralement incroyable pour quelqu’un s’y connaissant aussi bien que lui. Voici ce qu’il dit :

« La plupart des groupes radicaux qui manifestent contre la loi « sécurité globale » se réclament du communisme libertaire (Union communiste libertaire ou UCL), du municipalisme libertaire ou de l’autonomie, et ceux qui ont étudié cette mouvance se souviennent du slogan « Autonomie et offensive ». Ce dernier terme dit assez que la radicalité ne peut s’accommoder des postures « pacifiques » (…).

Ceux qu’on nomme « casseurs » ne lancent pas un pavé dans une vitrine et n’attaquent pas les policiers avec des cocktails Molotov par jeu : ils le font pour déclencher l’étincelle qui mettra le feu à la plaine. Sauf que cette phrase signée Mao Zedong suppose que « les masses » embrayent sur le mouvement, ce qui ne semble pas le cas.

D’où le risque que de petits noyaux militants, comme celui interpellé le 11 décembre pour projeter une action violente contre des policiers, choisissent de passer à ce qu’il faut bien appeler le terrorisme, habituelle méthode de fuite en avant des avant-gardes militantes dépourvues d’emprise et qui n’arrivent pas à déclencher la révolution. Il faut dire que les bases de la révolte sont confuses, notamment quand il s’agit de faire converger la mobilisation pour les libertés publiques, celle contre l’« islamophobie » et un antiracisme d’inspiration indigéniste.

La figure tutélaire du groupe arrêté le 11 décembre avait combattu au Rojava contre l’État islamique, avec les Unités de protection du peuple. Donc dans l’optique d’un municipalisme libertaire, féministe et antipatriarcal. Or que trouve-t-on sur le site de l’UCL ? Un appel à manifester contre le « confinement autoritaire et ultralibéral », une rubrique « Féminisme » et un communiqué de soutien au Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) ! Sur un pareil mélange, l’extrême gauche restera groupusculaire, malgré la marmite sous pression que constitue la société française. »

Les « groupes radicaux » sont anarchistes donc ils se rattachent à l’Union communiste libertaire et comme il y a une fuite en avant cela revient forcément à l’Union communiste libertaire, qui est ici directement assimilé aux gens arrêts le 11 décembre (voir 7 personnes arrêtées et accusées de bombisme). C’est là :

– inacceptable tant que les personnes arrêtées ne se sont pas exprimées politiquement (avec un certain écho) ;

– une tentative de pousser l’État à réprimer l’Union communiste libertaire en l’assimilant à des gens ayant choisi l’illégalité.

Il n’y a pas là une maladresse. L’Union communiste libertaire vient d’une démarche totalement opposée aux black blocks, sans même parler de l’autonomie offensive de la fin des années 1970 ! Cette organisation vient de la fusion récente d’Alternative libertaire, historiquement (très) proche des trotskistes de la Ligue communiste révolutionnaire et de la Confédération des groupes anarchistes, issue de la Fédération anarchiste (voir La fusion entre Alternative Libertaire et la Coordination des Groupes Anarchistes).

Or, quiconque sait que chez les anarchistes (au sens le plus large), c’est l’Organisation communiste libertaire dont la tradition est historiquement la plus parallèle aux autonomes, certainement pas l’Union communiste libertaire dont les ancêtres s’opposaient aux autonomes et encore plus à l’autonomie offensive, historiquement pro lutte armée (« autonomie offensive – lutte armée – pour le communisme! »).

Dans sa réponse, l’Union communiste libertaire le dit d’ailleurs avec justesse :

« Notre stratégie ne repose pas sur l’émeute et l’insurrection mais bien sur la construction de contre-pouvoirs et l’auto-organisation des luttes sociales. La plupart des membres de notre organisation sont actives et actifs dans les syndicats (à la CGT comme à SUD-Solidaires), dans des associations pour le droit au logement, des associations et collectifs écologistes, féministes, antifascistes, antiracistes. »

On peut tout à fait considérer qu’une telle activité est réformiste et vide de sens, on peut très bien accuser l’Union communiste libertaire d’avoir un discours post-moderne, confus, tout ce qu’on voudra. Mais dire que l’Union communiste libertaire n’a pas de réflexion et sont vélléitaires comme des casseurs, c’est une erreur complète ; les assimiler avec des gens poursuivis par l’État, c’est inacceptable.

Ce qui ne signifie pas qu’il faille accepter pour autant le principe de la dissociation, tout cela relève d’un débat à Gauche, et d’ailleurs de quel droit Jean-Yves Camus se met-il sur le même plan que des groupes de gauche organisés ? En quoi un religieux rigoriste a-t-il à donner des leçons à la Gauche ? En quoi un religieux rigoriste a-t-il à donner des bons et des mauvais points sur les orientations stratégiques de la Gauche ?

Charlie Hebdo a commis une lourde faute en publiant un tel article et il est incroyable d’ailleurs que ce journal, si durement frappé par l’islamisme, tolère qu’on humilie d’un revers de la main une personne définie comme :

« La figure tutélaire du groupe arrêté le 11 décembre avait combattu au Rojava contre l’État islamique, avec les Unités de protection du peuple. »

Que Charlie Hebdo donne la parole à cette personne et qu’on juge sur pièce, plutôt que de le dénoncer alors qu’il est arrêté sans droit à la parole !

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L’interview stratégique d’Emmanuel Macron dans l’Express

Dans son interview à l’Express, Emmanuel Macron affirme la ligne centriste-modernisatrice, en prévision des prochaines présidentielles.

Emmanuel Macron a accordé une interview-fleuve à l’Express, une manière de s’adresser à la bourgeoisie moderniste par l’intermédiaire de cette revue. Quand on accorde une interview à un média en sachant que l’accès à celui-ci sera restreint – autrement dit il faut être abonné ou acheter la revue – c’est qu’on cible particulièrement le message.

Emmanuel Macron a ainsi tenu un discours extrêmement précis aux journalistes de l’Express. Ce discours, construit en prévision des présidentielles, est celui de Valéry Giscard d’Estaing, des centristes c’est-à-dire historiquement des radicaux. Ou, si l’on préfère, de la bourgeoisie moderne et modernisatrice.

On apprend dans l’interview que la France serait en train de se « transformer » sous l’impulsion d’Emmanuel Macron. Il y aurait en France une « tension créatrice », une « énergie politique très rare ». Mais cela va avec une particularité : selon Emmanuel Macron,

« la France naît de la langue et de l’État, les deux piliers de notre Nation. »

C’est évidemment totalement faux puisque c’est le peuple qui fait l’histoire (et ainsi la langue et l’État). Cependant Emmanuel Macron ne va pas défendre une telle perspective, puisque son rôle est de maintenir la fiction d’un État au-delà des classes.

Pour cette raison, la modernisation passerait en particulier par l’État, donc en particulier par Emmanuel Macron, à condition de dépasser la « crise de l’autorité ». Il faut que les hiérarchies se réaffirment, alors qu’il y aurait de nombreuses perspectives, dont l’une est l’immigration en s’appuyant sur « l’intégration » et en rejetant « l’assimilation ».

Nicolas Sarkozy avait raison même si son concept d’identité nationale faisait trop polémique, Pétain et Maurras c’est mal mais ils ont une part de bien, il faut utiliser tout ce qui fait en sorte que la République soit une « transcendance » de gens multiples mais enracinés.

En clair, il faut que l’État maintienne cohérent une société capitaliste qui relativise tout, Emmanuel Macron insistant sur le risque que représente le relativisme pour les institutions. Il se présente donc comme le chef prêt à moderniser de manière permanente et d’ailleurs la France serait l’un des pays s’en sortant le mieux dans la pandémie actuelle, grâce à lui et à sa gestion de l’État. Il ne faudrait donc surtout pas considérer la France comme une « puissance moyenne », bien au contraire.

Bref, c’est de la « comm » associé à de la promotion en vue des prochaines élections. Cela n’a rien de nouveau, à part et c’est important que cela confirme qu’Emmanuel Macron compte se représenter, qu’il engage donc la bourgeoisie moderniste à relancer une opération politique en ce sens.

Il a compris la chose suivante : la Gauche est dans le coma et divisée, les ouvriers ne font rien. L’extrême-Droite n’est pas à la hauteur et le général de Villiers a encore beaucoup de travail pour apparaître comme le sauveur. S’il maintient donc une gestion étatique au moins sans faire de vagues à défaut de merveilles, Emmanuel Macron gagne par défaut.

C’est là illusoire de par les terribles conflits sociaux qui s’annoncent, alors que l’instabilité va prédominer avec la crise. Emmanuel Macron a une position qui reflète ici l’opinion petite-bourgeoisie du pays : le plus dur de la crise serait passé, il y aura simplement des dégâts à gérer, mais on est déjà loin de la crise… Alors qu’en réalité, celle-ci n’est même pas encore arrivée !

Jean-Luc Mélenchon a été ici bien plus fin, puisqu’il se présente déjà, un an et demi avant, en sachant que tout va être mouvementé et qu’il valait mieux s’ancrer tout de suite.

Dans les faits, Emmanuel Macron va donc serrer la vis et l’État va jouer la carte de la dureté, afin de se présenter comme le garant de la stabilité, en niant les faits. Comme dans les années 1930 en Allemagne, la bourgeoisie modernisatrice tente de sauver un capitalisme en perdition, affaiblissant la Gauche et ouvrant malgré elle la voie à l’extrême-Droite.

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Benoit Hamon lance SensTV

Benoit Hamon a annoncé le lancement d’une plateforme streaming nommée SensTv, avec comme slogan « mettons-nous d’accord sur nos désaccords ! ». L’accès est payant, avec un abonnement « sans engagement » à 4€99 par mois.

Voici la lettre de présentation :

« Cher.e.s toutes et tous,

Au croisement d’une année éprouvante et d’une année nouvelle que nous voulons fabriquer plus juste, écologique et bienveillante, je vous annonce que je me lance dans une aventure inédite avec ma chaîne SensTV.

À travers un média qui donne une grande place à l’intelligence collective, à l’argumentation, à la science, à la rigueur intellectuelle, j’ai choisi de poursuivre différemment et compléter une vie d’engagements. SensTV est l’antidote aux chaînes infos et aux réseaux sociaux qui rugissent du tumulte des polémiques et des préjugés.

Témoigner des injustices, montrer des solutions, changer la perspective, ouvrir des débats pour infléchir la trajectoire au désastre vers laquelle glissent nos sociétés productivistes et liberticides, voilà la raison d’être de SensTV.

SensTV est surtout une chaîne qui propose de ralentir le temps, de nous asseoir pour réfléchir, de nous arracher à la tyrannie de l’urgence et de voir si nous pouvons nous mettre d’accord sur nos désaccords.

Joyeuses fêtes de fin d’année à chacun.e d’entre vous.

Fidèlement.

Benoît Hamon »

La plateforme est disponible ici : senstv.fr

Sont déjà mis en avant des « grands entretiens » vidéos, ce qui donne une idée du contenu et de l’orientation du projet :

« 1er Grand Entretien avec Nora Lakheal

Je reçois Nora Lakheal pour le premier entretien sur le thème « La police et la République ». Cette officière est la première femme à avoir rejoint les renseignements généraux, au sein du « groupe islam radical » de la Section Opérationnelle et Recherche Spécialisée (SORS).

2ème Grand Entretien avec Mgr. Matthieu Rougé

Pour le second entretien, j’ai choisi d’échanger sur « Le travail et le christianisme ». J’ai reçu pour cela Mgr. Matthieu Rougé, Évêque de Nanterre et membre du conseil permanent de la conférence des Évêques de France.

Prochains invités pour les Grands Entretiens de janvier :

Lilian THURAM

Alice COFFIN

Michel-Edouard LECLERC »