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Communiqué des organisations syndicales et étudiantes pour le premier mai

« Le 1er mai 2019, ensemble, résolus et engagés dans les mobilisations

Le 1er mai est une journée d’action et de mobilisation internationale pour les droits des travailleur-se-s, le progrès social, la paix et la solidarité.

Dans la continuité des nombreuses luttes menées, il s’agit de poursuivre et amplifier les batailles pour que les urgences sociales et climatiques soient enfin prises en compte par le gouvernement et le patronat.

Aujourd’hui, 9 millions de personnes vivent avec des revenus en dessous du seuil de pauvreté dont 6 millions sont privé-e-s d’emploi, et de nombreux-ses jeunes sont en situation de précarité. Dans le même temps des dividendes de plus en plus importants sont versés aux actionnaires.

C’est une autre répartition des richesses qu’il faut mettre en œuvre ainsi qu’une fiscalité plus juste et plus progressive. A l’inverse des choix politiques actuels, il est urgent de revaloriser les salaires du privé et du public, les minimas sociaux et les pensions, développer des services publics de qualité sur tout le territoire, gages de cohésion sociale et de plus d’égalité, d’établir une protection sociale de haut niveau, socle de notre modèle social basé sur la solidarité, créer des emplois de qualité dans le privé comme dans le public et assurer l’égalité professionnelle, permettre la réussite de tous les jeunes et l’accès à un haut niveau de qualification à toutes et tous ainsi que l’autonomie de la jeunesse, une éducation émancipatrice, gratuite sans restriction de nationalité.

Les injustices sociales explosent et sont étroitement liées aux risques environnementaux que personne ne peut plus ignorer et qu’il faut prendre en compte. Réchauffement climatique, perte considérable de la biodiversité, épuisement des ressources naturelles, pollutions des océans, usage immodéré de produits phytosanitaires, dissémination de perturbateurs endocriniens…

Les dégradations sont nombreuses et atteignent souvent des seuils d’irréversibilité à court terme. Les conséquences pour les populations sont de plus en plus dramatiques. Il est urgent de prendre les mesures nécessaires pour permettre une transition environnementale juste socialement.

Le gouvernement doit agir sans délai et à grande échelle pour permettre la construction d’une société plus juste, plus solidaire, non discriminante qui réponde aux questions environnementales, sociales et de santé sans les dissocier.Les organisations s’engagent à lutter, avec la même force, au renforcement des libertés publiques et contre toute restriction du droit à manifester, à s’exprimer et à s’organiser.

Elles condamnent les répressions syndicales envers les salarié-e-s et les jeunes organisées par le patronat et le gouvernement. Elles dénoncent fortement les mesures répressives et parfois violentes déployées par le gouvernement dans le but de faire taire le fort mécontentement et la grande exaspération du plus grand nombre.

Décidées à construire les mobilisations unitaires afin d’obtenir des avancées et cesser toutes les régressions sociales et environnementales, lutter contre la montée de l’extrême droite, ensemble et dans l’unité, les organisations CGT, FSU, SOLIDAIRES, UNEF et UNL appellent à une forte journée de mobilisation ce 1er mai sur l’ensemble du territoire, pour l’amélioration des droits des travailleur-se-s, pour le progrès social, la paix et la solidarité internationale.

Les Lilas, 10 avril 2019 »

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Acte XXIV des gilets jaunes : échec d’une pseudo-convergence

Encore moins de monde, et ce malgré la présence de Jean-Luc Mélenchon et le forcing d’une partie de la CGT. Les beaux jours n’auront pas suffi à masquer la vacuité politique des gilets jaunes.

Ce 27 avril 2019 était socialement très important. En effet, les gilets jaunes tenaient leur traditionnelle initiative du samedi après l’intervention d’Emmanuel Macron pour exposer ses propositions de réforme devant le pays. Il y avait donc l’espace d’une réponse par la révolte aux dites propositions.

De plus, toute une partie de la CGT a fait un forcing énorme pour que le 27 avril il y ait une puissante manifestation parisienne, notamment la CGT Commerce et Services. L’objectif déclaré était de faire une démonstration de force qui convergerait avec les gilets jaunes.

On retrouve ici tout l’esprit syndicaliste révolutionnaire propre à la culture française, ce poison anti-politique dont, par ailleurs, les gilets jaunes sont une variante plus ou moins blanquiste. Et comme d’habitude cela fit un peu de bruit pour pratiquement rien. Les gilets jaunes, au nombre de 2600 à Paris, furent rejoints par un petit cortège CGT de 3500 personnes, pour une convergence derrière la bannière « Face à une attaque globale, riposte générale », le tout n’apportant rien car 0 + 0 = 0.

Futé politiquement, le secrétaire général de la confédération Philippe Martinez a soigneusement évité de se montrer. Furent par contre présents à cette faillite Amar Lagha de la CGT-Commerce, Jean-Luc Mélenchon, Adrien Quatennens et Alexis Corbière de La France Insoumise, Philippe Poutou et Olivier Besancenot du NPA.

Le reste des gilets jaunes avait imaginé un forcing d’un autre genre, avec une manifestation « internationale » à Strasbourg. Cela ne donna que la présence de 2000 personnes… Il faut dire que les Allemands ne connaissent pas la déliquescence politique de la France. Le SPD (social-démocrate) a 437 000 membres, les Verts 77 000, die Linke (la Gauche) 61 000. Même la CDU (le parti de la Droite) a 415 000 adhérents. En France, le parti politique avec le plus d’adhérents, c’est le PCF avec 80 000…

La démarche anti-politique va continuer malheureusement, car les gilets jaunes vont parasiter le premier mai. Leur faible nombre pour l’acte XXIV de cette farce a d’ailleurs été justifié de leur côté par le fait que le premier mai est censé être témoin d’une grande initiative de leur part. Les médias prévoient depuis de nombreux jours beaucoup de casse. Non contents de n’arriver à rien, les gilets jaunes comptent faire couler la Gauche avec eux…

Pourtant, ils avaient toutes leurs chances avec l’intervention d’Emmanuel Macron du 25 avril. Sa conférence de presse a été d’une rare nullité. Le grand débat avait été censé récupérer toutes les exigences de la population et ce qu’il en sort, ce sont quelques mesures techniques pour relever ceci, réorganiser cela. Ce sont des choses sans âme, sans profondeur.

Conscient de cela, Emmanuel Macron a d’ailleurs souligné l’importance des frontières et puisé dans les auteurs idéalistes. Dans l’allocution du 15 avril, non diffusée en raison de l’actualité dramatique que fut l’incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris, il faisait référence à la philosophe Simone Weil parlant du « besoin de l’âme humaine ».

Il a cette fois cité Bernanos :

« Est-ce qu’on change jamais ? L’avenir le dira. Comme dit Bernanos, on a sa conscience pour soi. »

Pauvre Bernanos, dont l’exigence morale s’affirmant à travers une exigence spirituelle se voit dégradée à une posture machiavélique politicienne, ce qu’il abhorrait justement.

Emmanuel Macron a par ailleurs multiplié les pics traditionalistes, tout à fait dans l’esprit de son soutien total et absolu aux chasseurs. On a ainsi eu droit au propos suivant notamment :

« L’art d’être Français, c’est être à la fois enraciné et universel. »

Il va de soi que la prochaine étape, pas forcément portée par Emmanuel Macron, sera le fait d’abandonner le côté universel pour se cantonner à la dimension « enracinée ». Même si en attendant, Emmanuel Macron veut une France enracinée et universelle exactement comme le capitalisme français, à la fois national et acteur international.

Car cet « enracinement » ne porte rien de culturel, il est idéologique, comme en témoigne la nomination d’un très haut responsable militaire à la tête de l’organisation de « reconstruction » de Notre-Dame de Paris.

Le capitalisme se crispe toujours plus : Emmanuel Macron devait faire un sauvetage moderniste, avant l’éventuelle carte nationaliste. Et finalement, Emmanuel Macron compose déjà avec les valeurs du Fascisme dont l’ombre se profile toujours davantage…

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CGT : appel à la mobilisation le 13 avril pour la liberté de manifester

Communiqué de la CGT appelant à une mobilisation samedi 13 avril pour la défense des libertés publiques :

UN PREMIER COUP D’ARRÊT
Les dérives autoritaires du gouvernement sanctionnées

Le Conseil Constitutionnel a rendu sa décision hier en jugeant inconstitutionnelle l’une des mesures emblématique les plus contestée: les interdictions administratives de manifester.

En effet, cette disposition permettait d’interdire à une personne de manifester surtout le territoire national sur la base de simples suspicions; un outil dangereux à disposition des Préfets portant atteinte à la liberté fondamentale de manifester de l’ensemble des citoyens.

La CGT se félicite donc de cette censure partielle qui marque indéniablement un coup d’arrêt important aux dérives autoritaires d’un gouvernement resté sourd à l’urgence sociale et climatique.Il est absolument inqualifiable que des parlementaires soient à ce point « aux ordres » qu’ils ne veuillent pas écouter les critiques pourtant profondes et adoptent, à la majorité, une telle mesure inconstitutionnelle portant aussi gravement atteinte aux libertés fondamentales dans une démocratie.

Il aura fallu la pression venant de toutes parts, des plus hautes instances internationales et européennes, de l’ensemble des organisations syndicales, politiques et associatives progressistes et humanistes de défense des droits fondamentaux pour que, finalement, Macron saisisse lui aussi le Conseil Constitutionnel.

Le Conseil constitutionnel déclare donc non conforme à la Constitution les interdictions administratives de manifester. En effet, elles laissent une marge de liberté trop grande au Préfet et pourraient être arbitraires. Le Conseil Constitutionnel valide le reste du texte notamment les fouilles généralisées aux abords des manifestations et la création du délit de dissimulation du visage, des mesures toutes aussi liberticides et dangereuses.

Face à la multiplication de la répression, de la criminalisation des mouvements sociaux, il est indispensable de rester largement et massivement mobilisés pour la défense des libertés publiques.

La CGT appelle donc à participer massivement aux manifestations prévues le 13 avril, sur tout le territoire, aux côtés des forces progressistes.

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Communiqué des organisations syndicales et de jeunesse CGT, FO, Solidaires, UNEF, UNL, UNL SD

Le communiqué de la journée d’action, de mobilisations et de grève de ce 19 mars par la CGT, FO, Solidaires, l’UNEF, l’UNL et l’UNL SD :

« La situation sociale en France est marquée par l’expression diverse et multiple d’un mécontentement social grandissant, par l’aspiration à une véritable justice sociale et fiscale, par la dénonciation des reculs sur les libertés publiques comme individuelles.

Le mouvement des gilets jaunes est l’expression récente de cette profonde crise sociale.

Alors que les annonces faites par le président de la République ou son gouvernement n’ont pas répondu aux attentes, alors que des lois portant atteinte aux libertés syndicales et de manifester sont votées, que les prix des produits de consommation courante continuent à la hausse, que la suppression de l’ISF n’est pas remise en cause, que le chômage progresse… Le « grand débat national » ne peut ni se substituer, ni contourner, encore moins être opposé aux revendications sociales et syndicales.
Pour les jeunes, les difficultés ne cessent de croitre : sélection, réforme du lycée et de la voie professionnelle, hausse des frais d’inscription des étudiant-es étranger-ères hors UE, progression de la précarité étudiante et gel des prestations sociales, ne font qu’attaquer le droit d’étudier.

En parallèle, le patronat, particulièrement celui des grands groupes, porte lui aussi une grande responsabilité dans l’exaspération sociale. C’est dans les entreprises et dans les services publics que les salarié-es sont considéré-es comme un coût et non pour ce qu’ils/elles sont : une richesse. C’est là que les conditions de travail se dégradent.

C’est partout que la précarité s’aggrave…

Dans ce contexte, il s’agit de gagner l’augmentation des salaires, des pensions et des minima sociaux, l’égalité femmes-hommes et un véritable droit à l’éducation et à la formation. Il s’agit aussi de renforcer notre protection sociale et notre système solidaire de retraite par répartition. Il s’agit enfin de répondre aux enjeux climatiques et environnementaux, tout en développant des emplois de qualité… C’est dans ce but que nos organisations appellent à l’élargissement et l’amplification de la mobilisation sociale.

Partout sur le territoire, nos organisations engagent un travail en ce sens via des initiatives diverses dans les entreprises, dans les services publics et en prise directe avec les salarié-es, les retraité-es, les privé-es d’emploi et la jeunesse. Ainsi, nous placerons le débat là où il doit être.

Cette démarche s’inscrit dans le cadre de la construction d’une nouvelle journée d’action, de mobilisation et de grève le 19 mars prochain. Nos organisations -CGT, FO, Solidaires, UNEF, UNL- s’engagent à poursuivre un travail commun donnant des perspectives à la mobilisation sociale. Nos organisations appellent à une puissante journée d’action, de mobilisations et de grève le 19 mars ! »

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Fiasco de la « grève nationale » de la CGT du 5 février 2019

Malgré le fol espoir en les gilets jaunes, la « grève nationale » n’aura finalement concerné qu’entre 137 000 et et 300 000 manifestants, principalement issus du secteur public et sans aucun impact sur l’économie. La prochaine initiative du même type étant pour la mi-mars, on voit aisément que le fiasco est reconnu par la CGT elle-même, au-delà des discours triomphaux usuels.

Hier a eu lieu la « grève nationale » organisée par la CGT : il faut mettre des guillemets, car comme c’est la règle, les travailleurs du secteur privé ne sont pas de la partie. Il ne faut jamais oublier cet aspect essentiel : les discours sur les travailleurs ne sont pas les discours des travailleurs ; ceux-ci ne sont engagés dans leur écrasante majorité ni dans les grèves, ni dans les cortèges, ni dans les syndicats, ni dans les partis de Gauche.

Et, comme on le sait, ce qui est d’autant plus grave, l’extrême-droite a un écho très fort chez eux. Il faut donc enfin du réalisme quand on parle de tout cela, il faut cesser toute auto-intoxication. Car il y a auto-intoxication : de la part des syndicats en général, mais surtout de la CGT, de l’ultra-gauche, des populistes. Leur idée est pratiquement de raconter comme quoi il y aurait quelque chose qui se passe, afin qu’il se passe quelque chose, comme une sorte de prophétie autoréalisatrice, ou plus précisément de mythe mobilisateur.

C’est donc du théâtre, avec peu d’impact. La grève n’a en rien touché l’économie, ni paralysé quoi que ce soit. 5% seulement des enseignants étaient en grève, alors que la RATP n’a à Paris pas connu de perturbations. Le nombre de manifestants est restreint et traditionnel, ce qui contredit la thèse selon laquelle les gilets jaunes auraient révolutionné la France. Il y a eu environ 25 000 personnes à Paris, 10 000 à Toulouse, 6000 au Havre, 5 000 à Marseille, 4 000 à Lyon, 2000 à Caen, Lille et Clermont-Ferrand, 1500 à Strasbourg et à Nîmes, 1000 à Tours, 800 à Beauvais, 500 à Rennes, 400 à Amiens, etc.

Cela ne pèse pas lourd, cela n’apporte rien de nouveau, mais pour correspondre à cet esprit théâtral, le dirigeant Philippe Martinez a affirmé :

« Aujourd’hui c’est un succès qui en appelle d’autres. »

La preuve qu’il ment et qu’il le sait, est que la CGT a appelé à une nouvelle mobilisation… pour la mi-mars. Comme on bat le fer quand il est chaud, autant dire que rien n’est un chaud et que c’est plutôt un fiasco. L’appel pour la mi-mars est là pour sauver la face d’un syndicalisme CGT qui va de défaite en défaite.

Et pourtant, outre le soutien ouvert (et vraiment très forcé dans le ton) aux gilets jaunes, la CGT avait fourni une liste de revendications tapant le plus large possible, au point que le dirigeant de la CFDT, Laurent Berger, l’a qualifié de « liste à la Prévert ». Les voici et on peut facilement voir que c’est une sorte de très vaste et très réformiste dénominateur commun à toute la Gauche :

• une augmentation du Smic de 20% (1800 euros brut), du point d’indice, de tous les salaires et pensions ainsi que des minima sociaux ;
• l’égalité salariale entre les femmes et les hommes ;
• une réforme de la fiscalité par un impôt sur le revenu plus progressif et une TVA allégée sur les produits de première nécessité, le rétablissement de l’ISF et une imposition plus forte des plus hauts revenus et de la détention de capital ;
• le contrôle et la conditionnalité des aides publiques aux grandes entreprises ;
• le développement des services publics ;
• le respect des libertés publiques, tel que le droit de manifester remis en cause par le gouvernement ;
• le renforcement des droits et garanties collectives, des droits au chômage, de la sécurité sociale, notamment de la retraite ;
• une transition écologique juste et solidaire.

Il n’est d’ailleurs pas difficile de voir qu’au sens strict, ces revendications ne relèvent pas du syndicalisme, qui se veut une lutte d’entreprises, de secteurs professionnels. Ici, on a des propositions de type social, des exigences de réformes économiques, qui relèvent de la politique. Quand la CGT parle par exemple du développement des secteurs publics ou de transition écologique juste et solidaire, elle dépasse largement le cadre des revendications directement syndicales. D’un côté, tant mieux ! Mais tout d’abord c’est trop tard, et ensuite c’est traditionnel avant des élections et on a ainsi, à très grands traits, le programme de La France Insoumise et du PCF.

On sait cependant que la CGT est liée au PCF et La France Insoumise a pour cette raison été obligée de la jouer subtil, et même très subtil. On a ainsi vu réapparaître… le Parti de Gauche, disparu totalement des radars depuis que la « marque » La France Insoumise est devenue la norme. L’occasion a été celui d’un communiqué commun paru la veille de la grève dans la revue de gauche Politis, signé également par certaines structures à la même volonté de profiter des gilets jaunes (Groupe parlementaire France Insoumise, Génération.s, Nouveau parti anticapitaliste, Ensemble, Gauche républicaine et socialiste, Fondation Copernic, Alternative libertaire, Solidaires, Sud PTT, Gauche démocratique et sociale, ATTAC, Union départementale CGT 75, Parti ouvrier indépendant…).

On y lit que :

« Pour la première fois depuis le début de la mobilisation, les gilets jaunes ont décidé de se joindre à une grève annoncée par les syndicats le 5 février 2019.

Nous voyons dans cette convergence une possibilité de victoire sociale majeure, en permettant un mouvement d’ensemble durable et reconductible incluant l’ensemble des salarié-es, la population des quartiers populaires et la jeunesse. Nous souhaitons que la grève et les manifestations soient les plus massives possible afin de faire aboutir ces revendications légitimes. C’est pourquoi nous apportons tout notre soutien à cette date. »

Mouvement d’ensemble ? Victoire sociale majeure ? Union des salariés, des quartiers populaires et de la jeunesse ? On est ici dans une fiction complète.

Il faut voir la réalité en face. Toutes les valeurs de la Gauche sont démantelées, l’agitation sociale a une expression patriotique exacerbée, l’extrême-droite a un socle électoral populaire et même ouvrier, l’antisémitisme a contaminé des pans entiers de la société, la fachosphère pullule d’activités depuis des années, l’extrême-gauche est devenue une ultra-gauche post-moderne, le rempli nationaliste est une tendance de fond à l’échelle internationale.

Nous sommes en train d’assister à un véritable suicide politique, alors que l’ombre du Fascisme s’avance sur la France.

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Gilets jaunes, actes 12 : vers un dénouement accompagné par la CGT

Le mouvement des gilets jaunes touche à sa fin, il s’essouffle, se survivant à lui-même en cultivant sa propre image de lui-même. Et il est rejoint par l’ultra-gauche et la CGT, qui y voient le moment pour appeler à la grève générale. Il n’y a pas à dire : la France est un pays étrange où la rationalité semble avoir disparu, tout autant que la culture politique.

Il est toujours étonnant de voir des gens confondre le début de la fin avec la fin du début. Il n’y a pour ainsi dire presque plus personne sur les fameux rond-points et de moins en moins de monde le samedi – près de 60 000 hier selon le Ministère de l’intérieur. Les gilets jaunes se ratatinent à chaque fois davantage et au moment où cela chute sérieusement, il y a toute une vague d’opportunistes ou de naïfs, on ne sait trop, qui interviennent dans l’histoire. Espèrent-ils tirer les marrons du feu ? N’ont-ils rien d’autre de mieux à faire ? Ou bien voient-ils un tournant réel, un moment historique ?

On a ainsi un « Journal des gilets jaunes » qui existe désormais, publié par un groupe de presse côté en bourse, Lafont-Presse, qui entend se faire un peu d’argent facile. Il y a aussi des professeurs, des « stylos rouges », qui persévèrent dans la mode colorée et protestataire. Ils étaient une cinquantaine seulement hier non loin du ministère de l’éducation nationale, avec des revendications qui sont d’une pauvreté affligeante pour des gens censés instruire les jeunes. On a aussi l’ultra-gauche, désormais lyrique sur les gilets jaunes, qui s’imagine que si les choses continuent, elles ne peuvent que déborder, et qu’elle en profitera.

Et il y a les syndicalistes cégétistes qui se sont décidés à entrer en scène, avec l’intention de prendre les gilets jaunes d’assaut et faire de la grève du 5 février le levier pour que cela marche. Avec l’idée de pouvoir relancer un syndicalisme au point mort niveau victoire, alors qu’en plus la CFDT est passée devant la CGT au niveau national.

Ainsi, alors que la CGT a sciemment refusé les gilets jaunes au début – soit par volonté de se conserver son monopole protestataire, soit par véritable esprit de Gauche refusant le style plébéien – elle est désormais totalement en leur faveur :

« Depuis de nombreux mois, les salarié-es, les retraité-es, les privé-es d’emploi et la jeunesse se mobilisent dans notre pays. Depuis la fin de l’année 2018, le mouvement dit des Gilets jaunes mobilise les attentions et révèle un regain de confiance en l’action collective.

La démultiplication des mobilisations s’oppose à la profonde injustice sociale et exige une autre répartition des richesses créées par le travail.

Cependant, plus le temps passe, plus le patronat et le gouvernement méprisent les revendications pour les détourner en détruisant les solidarités, plus les revendications sociales débordent.

Parti de la hausse des carburants, le mouvement des gilets jaunes a évolué. Des exigences nouvelles rejoignent désormais celles exprimées par les salarié-es, les retraité-es, les privé-es d’emploi, avec la CGT. C’est pourquoi, partout où cela est possible, la CGT continuera à travailler les convergences avec les Gilets jaunes. »

On remarquera l’écriture inclusive, preuve de la déconnexion avec les travailleurs et leur réalité. Quoi qu’il en soit, c’est, pour dire les choses franchement, un peu l’intervention commune des « losers », pour utiliser un terme passéiste mais assez évocateur.

Cela n’intéresse d’ailleurs vraiment ce qui reste des gilets jaunes, qui vivent dans leur monde et qui n’ont qu’un seul objectif : faire en sorte de présenter leur mouvement comme étant d’une grande actualité. On reste dans la démarche des classes moyennes cherchant à faire vivre la fiction comme quoi elles sont au centre de la vie sociale française.

Une des expressions de cela a été la « grande marche des blessés » à Paris, qui a exigé que soit mis un terme à l’utilisation des grenades de désencerclement GLI-F4 et GMD et des lanceurs de balle de défense (LBD). Pas moins de 20 personnes ont été blessées grièvement à un œil par LBD, avec la plupart du temps la perte de cet œil. Cependant, il ne faut pas être naïf et croire que les gilets jaunes s’intéressent à la question de la violence inhérente à l’État tel qu’il existe sous une forme bureaucratique, avec des hauts fonctionnaires inamovibles, des préfets, des responsables militarisés, etc.

Leur position rejoint la victimisation de type anarchiste, avec le fantasme petit-bourgeois d’un État terroriste, spoliateur, qui surveille tout le monde, etc. C’est une manière pour les gilets jaunes de chercher à retourner en leur faveur la situation après leur grande vague d’ultra-violence anti-politique à leur début, qui a considérablement ému une partie de l’opinion, et profondément choqué toute une partie de la Gauche, qui a reconnu là l’ombre de la plèbe fasciste.

Les échauffourées restent d’ailleurs la norme, comme hier lors des cortèges à Paris (14 000 personnes) et Valence (6 000), alors qu’il y avait également plusieurs milliers de personnes à Bordeaux, ainsi qu’à Strasbourg et Toulouse, 2 000 à Marseille, 1500 à Nantes, 1 000 à Montpellier, moins encore à Nice, au Mans, à Angers, à Dijon et à Cherbourg. La préfecture a également prétendu qu’à Valence, aux points de contrôle, une centaine d’armes blanches, dont des haches, des sabres, des couteaux, des machettes et des gourdins, auraient été saisies.

Comment résumer tout cela, alors ? Comme le dénouement des gilets jaunes, avec une auto-intoxication particulièrement brutale. C’est tellement énorme même qu’on ne peut pas ne pas se dire que ces gens ne le sachent pas. Ils appliquent forcément, tout au moins pour une partie d’entre eux, le principe sorélien du « mythe mobilisateur ».

Il est en tout cas très clair, du point de vue d’une Gauche qui s’assume, que ces enfants du populisme de Marine Le Pen et de l’ultra-gauche, de la CNT et d’Alain Soral, de la quenelle de Dieudonné et de Johnny Hallyday, de toute la propagande anti-politique, anti-Gauche, ne peuvent pas réaliser quelque chose de bénéfique pour l’Histoire.

La CGT, en embrayant sur les gilets jaunes, assume de sortir entièrement du champ de la Gauche politique : c’est une erreur complète, aux conséquences qui vont s’avérer catastrophiques pour elle.

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L’acte XI des gilets jaunes : un mouvement désormais cristallisé

Après la fin de l’explosivité sociale propre à des couches moyennes ayant la hantise de la prolétarisation, on a donc désormais les gilets jaunes comme mouvement structuré. Ultra-minoritaire, ils restent cependant en phase avec le populisme si fort en France, continuant eux-mêmes à empoisonner les esprits.

gilets jaunes

Le mot d’ordre le plus représentatif de ce onzième samedi des gilets jaunes, c’est bien sûr la « nuit jaune ». On a déjà vu que le mouvement des gilets avait changé de nature, perdant de son explosivité, cessant d’être un moment de crise sociale de couches moyennes saisissant avec effroi le risque de déclassement social. Il est désormais porté par une frange très clairement petite-bourgeoise, avec des lubies ultra-démocratiques, complotistes, anti-politiques, populistes, etc. D’où fort logiquement la tendance à revenir à « Nuit debout », comme la vaine tentative hier place de la Bastille à Paris.

Une vaine tentative montée par Eric Drouet, par ailleurs à l’origine d’un rassemblement à part à l’est de Paris avant de rejoindre le cortège général… Et qui s’inscrit dans le schéma général de cristallisation des gilets jaunes comme mouvement indépendant, structuré, avec une identité propre, même si évidemment diffuse. Il faut ainsi ajouter les deux listes pour les Européennes en train de se monter, une mise en place par la très médiatique aide soignante Ingrid Levavasseur, sous le nom de « Ralliement d’initiative citoyenne », l’autre par le chanteur Francis Lalanne.

De manière concomitante à ce changement de forme, et cela malgré le battage médiatique, le nombre de gilets jaunes se stabilise, en étant à autour de 70 000 hier, avec notamment 1 500 à Lyon, 4 000 à Paris, 5 000 à Bordeaux, 1 500 à Lille, 2 500 à Dijon, 1 500 à Montpellier, 2 000 à Nantes, 300 à Strasbourg, 90 à Coutances (dans la Manche), 4000 à Marseille… Avec les inévitables petits accrochages avec la police et des choses débiles et folkloriques comme un lâcher de lampions sur une plage à Saint-Laurent-du-Var pour essayer vainement (et heureusement) de perturber l’aéroport de Nice !

On notera qu’à Marseille, la CGT a participé au cortège, ce qui reflète toute une grosse problématique chez les syndicats. L’échec complet de la grève des cheminots a été un coup très rude pour eux et l’émergence d’un mouvement populiste comme les gilets jaunes risque d’autant plus de leur être fatal. La première victime des gilets jaunes, ce ne sera pas en effet Emmanuel Macron, qui est bien installé dans un régime lui-même parfaitement ancré, ce sera les syndicats, minoritaires dans le pays depuis toujours, porté par une logique de minorité activiste qui ne marche plus et qui plus est désormais remplacé par les gilets jaunes !

Les syndicalistes n’ont qu’un seul moyen de reprendre l’initiative : balancer par dessus bord la charte d’Amiens et enfin assumer la politisation à gauche. S’ils ne le font pas, ils seront balayés. Les gilets jaunes, avec leur ultra-populisme, leur démagogie sociale sans bornes, leurs propositions relevant du mythe mobilisateur comme le « référendum d’initiative citoyenne », ne feront qu’une bouchée d’eux. Il n’y a d’avenir syndicaliste que dans la liaison étroite avec les valeurs de gauche et cela de manière assumée. Il faut mettre un terme à la démarche française du syndicat au-dessus de la politique et assumer le modèle allemand du syndicat comme expression syndicale d’une orientation politique.

On sait à quel point les syndicalistes ne veulent pas de cela, cependant étant donné que la convergence des gilets jaunes avec l’extrême-droite est évidente, il faudra bien, à un moment donné, assumer dans un sens comme dans un autre.

De toutes manières, l’Histoire a fait son œuvre et on sait désormais que la vraie Gauche consiste en ceux et celles n’ayant pas cédé aux sirènes des gilets jaunes.

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La convergence syndicale avec les gilets jaunes

Les syndicats ont décidé de converger avec le mouvement des gilets jaunes. C’est un cheminement inévitable, l’apolitisme appelant l’apolitisme, le populisme appelant le populisme, le corporatisme appelant le corporatisme.

Mardi 20 novembre, le syndicat FO-UNCP (transport) appelait ses adhérents et sympathisants à rejoindre le mouvement. Le secrétaire général de la branche transports de FO Patrice Clos, qui est candidat pour la direction de FO suite au récent scandale, appelle à venir renforcer les mouvements existants en se posant comme indispensable, menaçant d’un appel à la grève présentée comme une étape supérieure éventuelle.

De son côté, la CGT a lancé un mot d’ordre de manifestation dans ce cadre pour samedi 1er décembre. Elle a changée son fusil d’épaule sous la pression d’une grande partie de sa base, alors que son secrétaire général Philippe Martinez avait refusé de participer aux blocages organisés samedi dernier.

Dans les deux cas, la question est celle du « pouvoir d’achat », avec pour la CGT la revendication d’un SMIC à 1 800 €.

Laurent Berger de la CFDT propose pour sa part une position intermédiaire, s’imaginant là aussi constructif, allant dans le sens de la continuité du capitalisme avec « un pacte social de la conversion écologique » censé être la solution « aux attentes en termes d’aide à la mobilité, au transport, à l’énergie ».

On est là dans une logique qui correspond tout à fait à celle de la Charte d’Amiens, qui au début du XXe siècle faisait de la CGT un syndicat récusant la politique. Le fait que les syndicats se développent non seulement à côté du Parti socialiste, mais même contre lui, a été d’un impact dévastateur sur les mentalités et le niveau de conscience des travailleurs à l’époque, et cela se prolonge jusqu’à aujourd’hui.

Les syndicats prétendent mieux gérer, vraiment représenter ; minoritaires de manière patente dans le monde du travail, ils n’en sont pas moins d’une prétention sans bornes. Et leur esprit est aussi étroit que celui des gilets jaunes, dans la mesure où de la même manière, ils ne voient qu’à court terme, ils ne raisonnent qu’avec des chiffres et selon des critères de la vie quotidienne tout à fait conformes au mode de vie dominant.

C’est d’autant plus grave que si les gilets jaunes se sont formés sur le tas, les syndicats ont une tradition centenaire, des cadres qui réfléchissent, des avantages matériels et institutionnels extrêmement importants. Leur convergence est d’autant plus significative, d’autant plus grave.

Elles montrent qu’une fraction de la population française est d’accord non pas pour discuter de politique, pour faire de la politique, pour choisir politiquement, mais pour justement ne rien faire de tout cela.

Il faudrait non pas transformer la société, mais la régénérer, la remettre sur son socle. Il faudrait en revenir à ce qui serait réel, par opposition à ce qui ne serait qu’une boursouflure provoquant un déséquilibre social.

Il y a un mot pour une telle approche : le fascisme. Le fascisme est la mort de la société civile, la fin de la politique, la réduction de la vie sociale à un conglomérat d’individus s’unifiant sur une seule base : l’hégémonie de leur regroupement national, afin de mieux profiter de tout et ce aux dépens des autres.

Cela ne veut pas dire que les revendications sociales des gilets jaunes ou des syndicats soient erronées, mais justement que celles-ci sont déviées de leur cours naturel comme lutte des classes. Elles sont précipitées dans le gouffre de l’absence de conscience sociale, de l’affirmation de l’apolitisme, du refus de la lutte des classes, de l’absence de confrontation avec la bourgeoisie.

La preuve de cela est bien sûr qu’une partie du patronat a soutenu le mouvement dès le début, que les enseignes de supermarché se sont empressées de communiquer dans le sens du mouvement avec notamment de l’essence à prix coûtant, étant donné que le « pouvoir d’achat » est leur préoccupation.

Tout n’est pas joué encore, évidemment. Cependant, il ne faut pas sous-estimer ce qui commence à se lancer comme processus, par en bas, comme populisme, comme dépolitisation, et surtout comme refus d’aller dans le sens du socialisme.

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CGT : Philippe Martinez a tort d’assimiler les migrants aux ouvriers

En publiant une tribune dans le quotidien Le Monde, le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez s’adresse à la bourgeoisie « de gauche » et lui apporte son soutien quant à l’utilisation des migrants comme thème électoral.

Philippe Martinez CGT

Le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez a publié une tribune dans Le Monde. Mais les ouvriers ne lisent pas Le Monde. Et sur internet, l’article est en accès payant. Est-ce normal ? Absolument pas, et cela d’autant plus qu’il parle au nom de la CGT elle-même :

« La CGT, présente au cœur des entreprises et des services, forte de son expérience en faveur des travailleurs migrants, tient à rétablir un certain nombre de vérités. »

Mais c’est qu’il ne s’adresse pas aux ouvriers, seulement aux bourgeois « de gauche ». Et il leur parle d’immigration justement, avec un discours très similaire au « manifeste pour l’accueil des migrants », publié parallèlement par Politis, Regards et Mediapart.

Selon lui, pareillement, les migrations sont incontournables :

« Le fait migratoire est un phénomène incontournable, stable et continu dans l’histoire de l’humanité. Prétendre que l’on peut stopper ou maîtriser les mouvements migratoires est un leurre politicien et une posture idéologique. Les plus hauts murs n’empêcheront jamais des personnes de fuir, au péril de leur vie, la guerre, la misère économique ou les persécutions. »

Il est sans nul doute très grave qu’un dirigeant syndical mette en avant le thème des migrants dans une optique électoraliste, avec les élections européennes en ligne de mire… Il agit ici de manière bien nette en faveur de la Gauche post-industrielle, post-moderne qui a besoin de « nouveaux sujets » à défendre… Du moment qu’il ne s’agit pas des ouvriers.

On retrouve d’ailleurs, dans le même mensonge que le « manifeste pour l’accueil des migrants », l’assimilation par Philippe Martinez des concepts de migrants à ceux de réfugiés, ce qui est honteux.

Lire également : Le « Manifeste pour l’accueil des migrants » : antipopulaire par excellence

Cela aboutit inévitablement à un populisme tout à fait erroné, qui fournit des armes à l’extrême-droite dans les rangs ouvriers. Car le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez assimile les migrants à des ouvriers.

« Nous ne faisons pas face à une invasion de migrants et notre pays doit accueillir humainement et dignement ceux qui fuient leurs pays. Cela se nomme la fraternité.

Ces salariés font partie intégrante de la classe ouvrière ! »

Or, c’est totalement erroné, car même en admettant que des migrants aillent à l’usine – ce qui ne sera que rarement le cas – cela n’en ferait pas des ouvriers pour autant : formellement, ce serait le cas, mais leur existence serait tout de même coupée encore de la classe ouvrière, de ses traditions. C’est d’ailleurs là l’intérêt de l’immigration pour le patronat.

Ce qui est d’ailleurs valable ici pour les migrants l’est pour toute personne ayant une origine non ouvrière et basculant dans la classe ouvrière : il faut du temps pour prendre ses marques, ses repères, absorber les valeurs ouvrières. D’où les perpétuelles restructurations organisées par le capitalisme pour empêcher la reconnaissance entre ouvriers, l’émergence d’une pensée commune, l’organisation commune.

> Lire également : La lettre de Georges Marchais suite à l’expulsion des maliens du foyer de Vitry

D’où l’immigration, non seulement dans les usines, mais en général, et notamment dans les quartiers populaires. Il en va d’une main d’œuvre bon marché, mais également avec un faible niveau de conscience politique, une coupure avec les réalités du pays. Il faut alors de nombreuses années, voire une vie afin qu’une connexion se fasse.

Cela, la Gauche l’a toujours su… quand elle avait des idéaux, ou plus exactement un idéal : l’instauration du socialisme ! Philippe Martinez est coupé de cette tradition. Mais qu’attendre d’un chef syndical, dans un pays où tous les syndicats se revendiquent de la charte d’Amiens de 1906 qui rejette tout débat politique, réduisant les syndicats à des organes traitant les choses sans envergure, simplement localement, ou par branches, divisant la classe ouvrière et le peuple ?

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Retour critique sur la «marée humaine» du 26 mai 2018

La France connaît une vague de populisme sans précédent, un populisme qui est en train de balayer la Gauche dans toutes ses valeurs historiques, si ce n’est déjà fait.

C’est l’alliance de l’esprit individualiste et du corporatisme, avec un sens aigu de la paranoïa, un goût assumé pour les simplifications et les explications délirantes.

A chaque fois qu’on lit les discours anarchistes ou de la France Insoumise, on croit que la France est à deux doigts de l’insurrection, que la police matraque, torture et tue, que l’apartheid aurait été instauré, qu’il n’y aurait plus de droits sociaux.

La photographie suivante du 26 mai 2018, où Emmanuel Macron est présenté comme un SS, avec les « S » utilisant le logo du dollar, témoigne tout à fait de cela ; c’est le prolongement populiste de la pendaison de l’effigie d’Emmanuel Macron, de la mise au feu de sa marionnette, lors de précédentes manifestations.

Ce relativisme des crimes nazis est inacceptable ; il reflète bien d’une hystérie de gens des couches sociales intermédiaires utilisant un discours outrancier pour prétendre être les victimes absolues et les vrais protagonistes de l’Histoire.

On remarquera aussi ce qui semble bien être le drapeau israélien sur le bras droit, une allusion désormais classique dans la mouvance d’ultra-gauche et de la France Insoumise, avec cet antisémitisme classique comme socialisme des imbéciles.

C’est là en rupture avec toutes les valeurs historiques de la Gauche, et on ne s’étonnera donc pas que Jean-Luc Mélenchon, dans une interview accordée à Libération, récuse le terme de gauche.

– Pourquoi ne voulez-vous plus revendiquer le mot «gauche» ?

Il a été tellement faussé par la période Hollande…

– L’enjeu n’est-il pas alors de le réinvestir ?

Il est réinvesti par les contenus que nous mettons sur la table : planification écologique, Constituante, partage des richesses. Les idées sont des matières vivantes, elles deviennent des forces matérielles si les gens s’en emparent. Tant que le mot «gauche» signifiera «la bande à Hollande», il repoussera plus qu’il n’agrégera.

– Le mot «gauche» ne se réduit pas à Hollande ! Pour beaucoup de gens, la gauche, ça veut encore dire quelque chose…

Je suis un homme issu de la gauche. Tout notre groupe parlementaire de même. Parmi les responsables politiques, je suis sûrement celui qui a le plus écrit sur l’idée de gauche et qui l’a le plus nourrie. Je n’ai jamais dit que ça ne voulait plus rien dire !

Mais dans le combat que nous menons, il faut laisser de côté la fausse monnaie. La gauche, ça n’a jamais été la politique de l’offre ou la soumission aux traités libéraux de l’Union européenne. L’enjeu majeur de 1789 à aujourd’hui, c’est la souveraineté politique du peuple. Le mot «gauche» est né de cela ! Notre stratégie révolutionnaire, c’est la révolution citoyenne par la Constituante.

La Gauche, c’est le mouvement ouvrier, et certainement pas François Hollande… On ne raye pas plus de cent ans d’histoire, d’expériences, de lerçons comme cela! Jean-Luc Mélenchon est un démolisseur, un liquidateur, un fossoyeur.

Et il est terrible qu’il y a une capitulation face à lui, comme en témoigne la très longue liste des soutiens à son initiative de prétendue marée humaine :

Alternative et autogestion – Alternative libertaire – EPEIS -ATTAC – Climat social – Collectif des Associations Citoyennes – Collectif National pour les Droits des Femmes – Collectif La Fête à Macron – CGT – Coordination nationale de défense des hôpitaux et maternités de proximité – Convergence nationale de défense des services publics – DIDF – DIEM25 – Droit au Logement – Ecologie sociale – EELV – Les effronté.es – Ensemble – Femmes Egalité – Fondation Copernic – France Insoumise – Gauche Démocratique et Sociale – MJCF – Mouvement Ecolo – Mouvement National des Chômeurs et Précaires – Nouvelle Donne – NPA – PCF – PG – Parti Ouvrier Indépendant Démocratique – PCOF – PCRF – République et Socialisme – Résistance Sociale – Snesup-FSU – Solidaires  – Syndicat des Avocats de France  – Syndicat de la Magistrature – UEC – UNEF – Union Nationale Lycéenne (ont également appelé la FCPE et la FSU)

Mais de cela, tout le monde se fout, à part les gens liés aux syndicats et à leur corporatisme, ou bien à une sorte de romantisme anarchiste totalement hors sol. Le résultat est ainsi très clair pour la pseudo marée humaine.

La police a compté 21 000 personnes à Paris, le cabinet Occurrence travaillant pour des médias institutionnels en a dénombré 31 700, la CGT 80 000.

A l’échelle du pays, la CGT a revendiqué 250 000 personnes, le ministère de l’intérieur en a compté 93 315 (on remarquera le souci de précision).

En clair, la population française a totalement boudé cette pseudo révolte, ayant très bien compris de quoi il en retournait. Malgré le printemps et la grève des cheminots, la sauce ne prend pas, car personne n’est dupe : c’est le populisme et le corporatisme qui sont à l’oeuvre.

Ainsi que, ne l’oublions pas, le néo-libéralisme culturel, que cette photo de la sénatrice Esther Benbassa résume parfaitement. La nouvelle pseudo gauche prend entièrement l’ancienne Gauche à contre-pied sur le plan des valeurs culturelles.

C’est à cause de cela que de jeunes ouvriers vont chez les nazis, s’imaginant que la Gauche ce serait juste un néo-libéralisme où chacun peut faire ce qu’il veut, sans responsabilités ni devoirs, sans morale ni valeurs.

Une autre photographie est également emblématique : celle où un manifestant tient une pancarte où il est écrit qu’un poulet serait mieux grillé. C’est bien entendu une allusion aux policiers, avec un goût sinistrement morbide.

Cet anarchisme de pacotille – très ironique quand on voit la drapeau d’air France, depuis quand un travailleur assume le drapeau de son entreprise ? – prêterait au mieux à sourire (cela ne sera pas notre cas) si désormais la condition animale n’était connue de tous.

Culturellement, là aussi on voit bien la faillite morale et intellectuelle, au profit de la posture.

Ce populisme, cette négation du contenu, est intolérable et montre bien la nécessité d’en revenir aux fondamentaux du mouvement ouvrier.

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Mai 1968 : de la grève générale aux accords de Grenelle par les syndicats

Le même jour que le meeting de Charléty, le régime sauvait sa tête au moyen des accords de Grenelle. Face à l’agitation « gauchiste » et à la seconde gauche, tant le PCF que le gouvernement et le patronat se retrouvaient être des alliés objectifs.

C’est que depuis le 13 mai, il y a une grève générale, qui finit par toucher huit millions de personnes, soit la moitié des salariés. On est à un point où tout peut changer : les mentalités, les conceptions politiques, les pratiques, les valeurs culturelles.

Le patronat préférait la stabilité, le gouvernement ne pas se faire déborder, le PCF conservait sa position relativement forte, satisfaisant tout à fait l’URSS : l’idée de changement, de socialisme, de révolution, etc. avait disparu.

C’est pourquoi la CGT mit tout son poids pour trouver un accord. Le 25 mai, le premier ministre Georges Pompidou organise une première discussion entre gouvernement, patronat et syndicats.

Les 25 heures de discussion aboutissent le 27 mai aux accords dits de Grenelle, car signés rue de Grenelle au ministère des affaires sociales. Ils ne seront pas signés, ce qui n’empêchera pas le régime de revenir en force quelques jours après.

La contestation de mai 1968 allait bien plus loin, en effet, que la question sociale ou économique. Mais il s’agissait pour le PCF, avec la CGT, d’empêcher une nouvelle situation à tout prix. Le régime intégrait donc ouvertement la CGT, en échange cette dernière venait s’intégrer au dispositif de la cinquième république.

En stoppant toute participation à la contestation par ailleurs rejetée au départ, la CGT permettait au régime de se réaffirmer trois jours après. En fait, la CGT s’est faite entièrement acheté fin mai 1968.

Le point central du dispositif fut la mise en place d’une section syndicale d’entreprise et du délégué syndical dans les entreprises de 50 salariés et plus. C’était là un cadeau en or pour la CGT.

Et ce cadeau fut donné par la droite gaulliste qui triompha entièrement lors des élections de juin 1968, au moyen de la loi du 27 décembre 68.

C’est un compromis historique, en quelque sorte.

Cela avait évidemment un coût pour satisfaire la base : les accords de Grenelle accordent 35 % d’augmentation au salaire minimum, 10 % d’augmentation des salaires, le temps de travail devant passer à 40 heures (et 48 au maximum au lieu de 50 heures).

Mais ce qui comptait surtout, c’était la mobilisation des syndicats de manière franche dans un sens institutionnel. Et cela marcha, puisque les syndicats participèrent entièrement aux différents projets étatiques, de manière décisive, pour cinquante ans.

Voici le document des accords de Grenelle.

Le « Constat » ou les « Accords » de Grenelle Projet de protocole d’accord

Des réunions tenues les 25,26 et 27 mai au Ministère des Affaires sociales sous la présidence du Premier Ministre (Ce texte ne sera pas signé)

Les organisations professionnelles et syndicales, Confédération Générale du Travail, confédération Générale du Travail Force Ouvrière, Confédération Française Démocratique du Travail, Confédération Française des Travailleurs Chrétiens, Confédération Générale des Cadres, Fédération de l’Education Nationale, Confédération Nationale des Petites et Moyennes Entreprises, Conseil Nationale du Patronat Français se sont réunies sous la présidence du Premier Ministre, en présence du ministre des Affaires sociales et du secrétaire d’Etat aux Affaires sociales chargé des problèmes de l’emploi les 25, 26 et 27 mai 1968.

1. Taux horaires du SMIG Le taux horaires du SMIG sera porté à 3 francs au 1er juin 1968.

Le salaire minimum garanti applicable à l’agriculture ne sera fixé qu’après consultation des organisations professionnelles et syndicales d’exploitants et de salariés agricoles et des confédérations syndicales nationales.

Il a été précisé que la majoration du salaire minimum garanti n’entraînerait aucun effet automatique sur les dispositions réglementaires ou contractuelles qui s’y réfèrent actuellement. Le problème posé par ces répercussions fera l’objet d’un examen ultérieur.

La question des abattements opérés en raison de l’âge et applicables aux jeunes travailleurs fera l’objet de discussions conventionnelles.

Le Gouvernement a, par ailleurs, fait connaître son intention de supprimer complètement les zones d’abattement applicables au SMIG.

2. Evolution des rémunérations des secteurs publics et nationalisés Les discussions relatives aux salaires des entreprises nationalisées se sont ouvertes dans l’après-midi du 26 mai, secteur par secteur, et sous la présidence des ministres de tutelle compétents ; la modification des procédures de discussion sera examinée ultérieurement.

En ce qui concerne les traitements des fonctionnaires, une réunion a été organisée le 26 mai après-midi à la Direction de la Fonction Publique pour préparer celle à laquelle participeront le 28 mai à 15 heures, sous la présidence du Premier ministre, les organisations syndicales intéressées.

3. Salaire du secteur privé Les salaires réels seront augmentés au 1er juin 1968 de 7%, ce pourcentage comprenant les hausses déjà intervenues depuis le 1er janvier 1968 inclusivement. Cette augmentation sera portée de 7 à 10% à compter du 1er octobre 1968.

4. Réduction de la durée du travail Le CNPF et les confédérations syndicales ont décidé de conclure un accord-cadre dont le but est de mettre en œuvre une politique de réduction progressive de la durée hebdomadaire du travail en vue d’aboutir à la semaine des 40 heures. Elles considèrent également comme souhaitable que la durée maximum légale soit progressivement abaissée.

Cette réduction progressive sera déterminée dans chaque branche d’industrie par voie d’accord national contractuel définissant les modalités et les taux de réduction d’horaires et de compensations de ressources.

En tout état de cause, et comme mesure d’ordre général, une réduction de 2 heures des horaires hebdomadaires supérieures à 48 heures et une réduction d’une heure des horaires hebdomadaires compris entre 45 et 48 heures interviendra avant le terme du Vème Plan. Une première mesure dans ce sens prendra effet en 1968.

Le principe de mesures appropriées à la situation particulière des cadres est également retenu.

Dans le secteur nationalisé le principe d’une réduction progressive de la durée du travail est admis par le Premier ministre, les discussions devant être menées au sein de chaque entreprise pour en déterminer le montant et les modalités, celles-ci pouvant prendre d’autres formes que la réduction de la durée hebdomadaire du travail.

En ce qui concerne la Fonction publique, les discussions qui auront lieu le mardi 28 mai sous la présidence du Premier ministre, comporteront l’examen du problème, compte tenu des caractères particuliers des différents services.

Le problème d’un assouplissement de l’âge de la retraite, en particulier dans la cas de privation d’emploi et d’inaptitude au travail, a été posé par plusieurs syndicats. Le CNPF a accepté l’examen de la question ainsi posée.

5. Révision des conventions collectives

1° Les représentants des employeurs se sont engagés à réunir dès la fin de la présente négociation les commissions paritaires pour :

– la mise à jour des conventions collectives en fonction des résultats de la présente négociation ;

– la révision des barèmes de salaire minima afin de les rapprocher des salaires réels ;

– la réduction de la part des primes dans les rémunérations par leur intégration dans les salaires ;

– l’étude de la suppression des discriminations d’âge et de sexe ;

– la révision des classifications professionnelles et leur simplification.

2° Les organisations de salariés et d’employeurs se réuniront à bref délai pour déterminer les structures des branches et des secteurs en vue d’assurer l’application de l’accord-cadre sur la durée du travail.

3° Le Gouvernement s’engage à réunir aussitôt après la fin de la présente négociation la commission supérieure des Conventions collectives en vue d’examiner les conditions d’application de l’ordonnance du 27 septembre 1967 concernant le champ d’extension géographique des conventions collectives et de procéder à une étude approfondie du champ d’application des conventions collectives.

6. Emploi et formation Le CNPF et les confédérations syndicales ont décidé de se réunir avant le 1er octobre en vue de rechercher un accord en matière de sécurité de l’emploi et portant notamment sur :

– les mesures de nature à assurer les reclassements nécessaires en particulier en cas de fusion et de concentration d’entreprises ;

– l’institution de commissions paritaires de l’emploi par branches professionnelles et les missions qu’il convient de donner à ces commissions devant fonctionner en principe au niveau national et le cas échéant aux niveaux territoriaux. Ils ont convenu également d’étudier les moyens permettant d’assurer, avec le concours de l’Etat, la formation et le perfectionnement professionnels.

En ce qui concerne les cadres il a été convenu que la recherche d’un accord particulier sera menée par le CNPF et les organisations syndicales.

Le Secrétaire d’Etat à l’Emploi suivra les travaux des réunions prévues et mettra à la disposition des participants l’ensemble des documents nécessaires. Par ailleurs, le Premier ministre s’engage :

– à développer les crédits affectés aux services de l’emploi ;

– à mettre en place de manière prioritaire les moyens d’un développement d’une formation adaptée des jeunes.

7. Droit syndical Le document annexé ci-après, relatif à l’exercice du droit syndical dans les entreprises, sera examiné au cours de réunions avec les organisations professionnelles et syndicales, en présence du ministre des Affaires sociales, en vue d’éliminer les points de désaccord qui subsistent. Sur la base dudit document, éventuellement amendé, le Gouvernement élaborera un projet de loi relatif à l’exercice du droit syndical dans les entreprises.

Le Gouvernement, favorable à la liberté d’exercice de ce droit, entend que ce projet en règle concrètement les modalités. Il est prêt à favoriser, pour sa part, dans le même esprit, le libre exercice du droit syndical dans les entreprises publiques et la Fonction publique, sous réserve d’apporter au projet de loi les précisions et les compléments permettant son adaptation aux nécessités de ces services.

ANNEXE Droit syndical dans l’entreprise

1° La garantie de la liberté collective de constitution de syndicats ou de sections syndicales dans l’entreprise à partir des organisations syndicales représentatives à l’échelon national (les organisations syndicales demandent protection spéciale ; le CNPF estime que le droit commun suffit).

2° la protection des délégués syndicaux sera assurée dans des conditions analogues à celle des délégués du personnel et des membres du comité d’entreprise.

3° Les prérogatives de l’organisation syndicale dans l’entreprise et des délégués syndicaux : ses missions sont celles du syndicat dans l’organisation sociale, notamment la discussion et la conclusion d’avenant d’entreprise (addition proposée par les syndicats : et le droit de déterminer par accord les règles concernant la structure et le montant des salaires, primes et gratifications).

4° Des moyens d’expression de l’organisation syndicale et des délégués syndicaux :

a. Collecte des cotisations à l’intérieur de l’entreprise (pendant le temps de travail – syndicats) ;

b. Liberté de diffusion de la presse syndicale et des tracts syndicaux dans l’entreprise ;

c. Libre affichage des communications syndicales dans des conditions permettant une information effective des travailleurs, avec communication simultanée à la direction (réserve de la CFDT et de la CGT sur les mots soulignés).

d. Mise à la disposition des organisations syndicales d’un local approprié ;

e. Réunion : – un crédit est attribué :

o aux délégués syndicaux (CNPF),

o aux sections syndicales d’entreprise, pour répartition aux délégués syndicaux (syndicats) ;

– droit de réunir les adhérents de la section syndicale une fois par mois (pendant le temps de travail : syndicats ; en dehors des heures de travail : CNPF) ;

– droit de réunir tous les membres du personnel de l’entreprise à des assemblées générales du personnel, ce droit doit s’exercer pendant les heures de travail, une fois par mois (syndicats). 5° Bénéfice du congé éducation payé pour les délégués syndicaux (demande d’examen plus approfondi par CNPF). 6° Interdiction, en cas d’exercice du droit de grève, de tout abattement sur un élément quelconque de rémunération : prime, gratification ou autre avantage au-delà du prorata directe du temps d’absence (syndicats).

8. Sécurité sociale

Le Premier ministre a pris l’engagement d’accepter qu’un débat de ratification des ordonnances relatives à la Sécurité sociale ait lieu avant la fin de la session parlementaire en cours. Par ailleurs, il a décidé de ramener le ticket modérateur applicable aux dépenses médicales de visite et de consultation de 30 à 25%.

Le Gouvernement ne s’opposera pas à une initiative tendant à ce qu’il soit fait référence dans un texte de loi au décret du 29 août 1962 relatif aux règles d’évolution du plafond de cotisation. Le Premier ministre déclare qu’il n’est pas dans ses intentions d’augmenter le nombre de points de cotisations de Sécurité sociale portant sur la totalité des rémunérations.

Le Premier ministre a également indiqué que l’intervention des textes d’application des dispositions législatives réglementant d’une part le versement direct des prestations à des tiers et la participation obligatoirement laissée à la charge de l’assuré était suspendue, compte tenue des discussions en cours entre la Caisse nationale d’assurance-maladie et la Fédération française de la Mutualité. Le Gouvernement souhaite qu’un accord de ces deux organisations règle conventionnellement leurs rapports et rende inutile les dispositions envisagées.

9. Allocations familiales Le Gouvernement étudie un projet d’aménagement des allocations familiales en faveur des familles de trois enfants au moins et prévoyant la réforme des allocations de salaire unique et de la mère au foyer Ces textes seront mis au point à l’occasion de l’établissement du prochain budget.

10. Mesures en faveur de la vieillesse Le Gouvernement augmentera au 1er octobre prochain l’allocation minimum versée aux personnes âgées et aux grands infirmes.

11. Fiscalité Le projet de réforme de l’impôt sur le revenu, qui sera déposé à l’automne par le Gouvernement, contiendra des dispositions tendant à alléger les conditions d’imposition des revenus salariaux. Les principes de la réforme feront l’objet d’une consultation du Conseil économique et sociale, qui permettra aux représentants des organisations syndicales et professionnelles d’exprimer leurs vues avant le dépôt du projet.

Ces organisations seront à nouveau consultées par le Gouvernement sur l’avis rendu par le Conseil économique et social. Il ne sera pas proposé d’assujettir les salariés au régime de la retenue à la source.

12. Le Gouvernement réunira, au mois de mars 1969, les représentants des organisations professionnelles et syndicales, afin d’examiner avec eux, dans le cadre de l’évolution 6 économique et financière générale, l’évolution du pouvoir d’achat des salariés au cours de l’année 1968.

13. Le CNPF a demandé au Gouvernement qu’à compter du 1er juillet 1968, les entreprises françaises , ne soient pas assujetties, en ce qui concerne la détermination de leurs prix, à des contraintes plus strictes que les entreprises concurrentes établies dans les autres pays du Marché commun.

14. Journées de grève Les journées d’arrêt de travail seront en principe récupérées. Une avance de 50% de leur salaire sera versée aux salariés ayant subi une perte de salaire. Cette avance sera remboursée par imputation sur ses heures de récupération. Dans le cas où la récupération n’aurait pas été matériellement possible avant le 31 décembre 1968, l’avance ou son solde sera définitivement acquise au salarié. Ces mesures trouveront leurs répercussions dans le secteur nationalisé et la Fonction publique.

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Des manifestations du 1er mai 2018 entièrement ritualisées

Les manifestations d’hier, premier mai 2018, ont rappelé que mai 1968 a échoué à ébranler la France profonde et que, finalement, nous en sommes encore au 19e siècle sur le plan des idées.

Peut-on faire plus caricatural ?

D’un côté, des syndicalistes défilant pour des revendications sociales et économiques, buvant des bières et mangeant des merguez, ou des kebabs aussi désormais, puisque c’est la mode pour faire « populaire » y compris dans les quartiers chics.

Quelque chose sans âme, avec des mentalités restreintes, prisonnières d’une vie quotidienne sévèrement encadrée par toutes les valeurs dominantes.

Quelque chose sans envergure aucune. D’ailleurs, le nombre total de manifestants, a été de 210 000, contre 280 000 l’année dernière, selon les chiffres de la CGT dans les deux cas. C’est évidemment un recul particulièrement significatif alors que la grève des cheminots a lieu.

Le black bloc, une sorte de divertissement 2.0 pour une contestation ritualisée

De l’autre, les anarchistes qui, a défaut de proposition, essayent de casser quelque chose. Et ils étaient nombreux : 1200. Un cortège de 1200 personnes appelant à la révolte, cela aurait eu un impact évident…

Mais ils ont préféré faire n’importe quoi, avec à la clef 200 arrestations, un chiffre très important qui montre le degré de désorganisation.

Il ne s’agit pas de regretter le saccage d’un Mc Donald’s : qui le regrette n’a rien compris à l’enjeu écologiste de notre époque, à la question animale de notre époque, au principe de surexploitation de notre époque.

Qui va au Mc Donald’s et tolère l’existence d’une telle monstruosité n’a pas compris les attentes de notre époque.

Ian Brossat, un carriériste bien inséré dans la mairie parisienne

On n’est donc certainement pas obligé de pleurnicher comme Ian Brossat, qui vit comme un grand bourgeois comme conseiller PCF de Paris et adjoint à la maire de Paris chargé du logement, de l’habitat durable et de l’hébergement d’urgence, après avoir fait le lycée Henri IV et l’ENS de Lyon.

Cependant, on se doute bien que les casseurs n’ont pas fait cela par écologie ou par véganisme, ni même par lutte contre l’exploitation la plus féroce. On est dans la casse symbolique, dans un appel mystique à « autre chose ».

Ce qu’on doit reprocher, c’est qu’il n’y a rien derrière : ni culture, ni propositions, ni valeurs, ni programme.

En fait, il n’y a même rien du tout. C’est du nihilisme, tout à fait conforme à notre époque. C’est une fuite en avant, une sorte d’équivalent destructeur du populisme de Jean-Luc Mélenchon. Ce qui oblige ce dernier à nier les faits, jusqu’au ridicule.

Même Le Figaro se moque de lui !

« Le leader de la France insoumise dénonce des « violences insupportables contre la manifestation du 1er mai ». Avant de tenter : « Sans doute des bandes d’extrêmes droite. »

Pourtant, ces manifestants se revendiquent des « black blocs », une mouvance anarchiste et violemment anticapitaliste. Ils s’attaquent aux symboles de l’économie libérale, comme les fast-food ou des devantures de banques. Dans leur cortège, on pouvait par ailleurs apercevoir un drapeau communiste. »

C’est tout simplement ridicule de la part de Jean-Luc Mélenchon. C’est absurde. Et d’ailleurs, que diable peut faire un drapeau communiste au milieu des anarchistes ? C’est une aberration aussi !

Tout cela témoigne de la confusion des idées à notre époque. La génération facebook fonctionne à l’instinct, à l’image. On peut se croire à peu près n’importe quoi tout en n’y connaissant rien, car personne n’y connaît rien et, surtout, tout le monde s’en fout !

Ce qui montre bien, en dernier ressort, que tout ce petit monde fait confiance à l’État et au capitalisme pour se réguler de manière ou d’une autre. Personne ici ne croit en la crise, personne ici ne croit en le fascisme, personne ici ne croit au réchauffement climatique.

On est dans la théâtralisation de la contestation, avec des rôles entièrement préétablis… Et c’est humainement à la fois frustrant, intolérable, vide de sens.

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Bilan des 8-9 avril et CGT cheminots : la logique actuelle du groupe SNCF

La grève des cheminots maintient son cap et bien entendu difficile d’avoir des chiffres suffisamment précis et corrects. Hier 9 avril, le taux de grévistes étaient de 24.9%, mais de 43 % si l’on ne prend que les gens s’occupant des trains, avec 13 212 cheminots présents aux assemblées générales, soit 2000 de plus que le 4 avril.

Chez les conducteurs la grève concerne 75% du personnel (74% la semaine passée), chez les contrôleurs 71% (contre 77%), chez les aiguilleurs 35% (contre 46%).

4 000 cheminots se sont également réunis sur l’esplanade des Invalides à Paris, 500 cheminots à Lille, 250 à Fougères, 500 à Dijon, 300 à Nancy.

Avant-hier 8 avril, un dimanche les chiffres ne sont pas clairs, mais il semble bien que la mobilisation ait été d’environ 35 %.

Pour rebondir également sur la question de la nature de la SNCF – secteur public ou multinationale? – abordée ici dans un article à l’occasion de la tribune de Bernard Thibault, voici la position de la fédération CGT des cheminots.

Ce long article est tiré d’un document intitulé « ensemble pour le fer » (ici en pdf), publié début mars 2018 et consistant en rapport « sur l’avenir du Service Public ferroviaire et contre le statu quo libéral ».

Il dit, de manière paradoxale, longuement la même chose que l’article publié sur agauche.org, à savoir que la SNCF n’est plus un secteur public que pour « l’imaginaire collectif », qu’il s’agit d’une structure clairement capitaliste dans son organisation…

Tout en expliquant en même temps et finalement, dans l’esprit de Bernard Thibault, qu’il y a « un abandon des obligations et missions de service public », alors qu’il a été dit précédemment que cela ne ressemble plus du tout à un secteur public !

Il y a là une incohérence qui est tout à fait révélatrice de l’ambivalence de la position de toute une gauche, qui voit le libéralisme marcher de manière triomphale, mais est hostile à la confrontation, vivant dans une nostalgie de l’Etat-providence et d’un capitalisme n’ayant pas connu d’accélération (ce qui était pourtant inévitable).

LA LOGIQUE ACTUELLE DU GROUPE SNCF

La SNCF emploie des agents (les cheminots) sous un statut social particulier afin d’assurer un service public de transport pour répondre aux besoins de la Nation et des usagers. Dans l’imaginaire collectif, la « vieille dame » est toujours envisagée comme une compagnie ferroviaire d’Etat, voire une administration de l’Etat.

Cette représentation ignore les restructurations intervenues depuis une vingtaine d’années. Derrière la façade de l’opérateur public réputé intégré, se déploie un groupe commercial internationalisé, formé de plus d’un millier de filiales de droit commun, dont certaines de taille imposante comme Geodis, numéro un français du transport routier et de la logistique, ou Keolis, un des leaders mondiaux des transports urbains.

Ces Sociétés Anonymes, au capital parfois ouvert à des investisseurs privés, agissent aussi bien dans le mode ferroviaire (Thalys, Eurostar, VFLI, Systra, Akiem…) que dans des modes concurrents, tels le camion (Geodis Calberson), l’autocar (Ouibus), le covoiturage (IDvroom) ou la 16 location de voiture (Ouicar).

La SNCF détient également des firmes spécialisées dans l’immobilier, la gestion de parkings et même les drones.

Le projet du groupe SNCF ambitionne de réaliser 42.8 milliards de chiffre d’affaires en 2025, dont 50% aux activités à l’international.

On constate ainsi que l’EPIC SNCF sert de banque pour financer le développement des filiales routières en France ainsi que l’expansion à l’international. La SNCF a racheté par exemple l’activité messagerie du groupe international routier GIRAUD.

L’activité historique de transport ferroviaire de marchandises s’est peu à peu délitée au sein de SNCF GÉODIS, dont la vocation principale est le transport routier.

En fait, les centaines de millions d’euros investis dans des sociétés étrangères (logistique OHL aux USA pour 717 millions, bus ATE en Australie pour 113 millions…) font augmenter la taille du Groupe et son chiffre d’affaires, mais ne dégagent quasiment aucune marge, voire sont sources de pertes (-29,3 millions pour Keolis Boston en 2015).

Ces investissements constituent en vérité un sacrifice de l’entreprise publique de service public SNCF pour lui substituer un groupe international de mobilités, dans lequel l’activité ferroviaire publique française est appelée à devenir minoritaire. En d’autres termes, c’est un détournement des moyens normalement dévolus au service public au service d’un groupe à dominante privée.

A ce jour, les filiales réalisent la moitié des 32 milliards de chiffre d’affaires annuel du groupe SNCF.

Leurs effectifs progressent régulièrement alors que le nombre de cheminots embauchés par les établissements publics (EPIC) décline depuis quinze ans (environ 145 000 cheminots sur 280 000 salariés au niveau du groupe).

La perspective d’une extension de l’ouverture à la concurrence du rail concernant le transport intérieur de voyageurs – le fret étant libéralisé depuis mars 2006 – risque de porter un nouveau coup aux EPIC au bénéfice de sociétés privées, fussent-elles incluses dans le groupe SNCF.

Symbole de cette stratégie, SNCF Mobilités vient de sous-traiter l’exploitation d’un nouveau tram-train, dont elle est directement attributaire et circulant sur le Réseau Ferré National en Seine-Saint-Denis, à une filiale majoritairement contrôlée par Kéolis (Transkéo).

La SNCF envisage ainsi sa politique de groupe non pas sous l’angle d’une complémentarité utile (Transports urbains-Transport ferroviaire de proximité), mais en organisant la concurrence de l’EPIC par ses filiales et en encourageant le dumping social. L’infrastructure ferroviaire n’est pas épargnée par cette intrusion des intérêts privés dans la sphère publique. Sur ce terrain, les géants du BTP sont à l’offensive, décidés à tirer profit du programme de modernisation du réseau ferré et des 46 milliards de travaux prévus sur la prochaine décennie.

Les groupes de la construction se positionnent non seulement sur les phases de régénération de lignes, mais aussi, plus durablement, sur la maintenance ou l’exploitation de pans entiers du rail français. Ils se saisissent des contrats en Partenariat Public-Privé (PPP), comme dans le cas de la Ligne à Grande Vitesse Tours-Bordeaux, ou de contrats de partenariats industriels portant sur de gros chantiers, comme la rénovation des caténaires de la ligne C du RER.

En toute discrétion, Vinci, Eiffage et quelques autres héritent de la conception et de la réalisation de missions entières, entraînant, au détriment de SNCF Réseau, des transferts massifs de charges de travail, de technologies, de compétences et, au final, d’emplois potentiellement dévolus aux cheminots.

D’aucuns présentent cet effacement de la propriété et maîtrise publiques d’un Etablissement de l’Etat comme un gage de meilleure performance.

Pour les 17 tenants de « l’Asset Management », la valorisation des actifs devient la seule manière d’être d’une entreprise efficace. C’est oublier un peu vite que dans le régime de la propriété lucrative (celui de la Société Anonyme), la recherche d’efficacité se focalise sur la survaleur attendue par les détenteurs du Capital, ceux-là même qui prélèvent leur tribut sur le travail, notamment à travers la vente des marchandises produites. Ces exigences conditionnent les choix de gestion.

Dans les faits, le recul des biens et investissements publics s’accompagne de surcoûts financiers virant parfois au fiasco, et d’une dégradation, qualitative et quantitative, du service public rendu et des conditions d’emploi des cheminots.

La dilution de l’EPIC dans un groupe « champion » mondial des services de mobilités et de logistique s’accompagne d’un abandon des obligations et missions de service public comme cadre de référence autour de la réponse aux besoins pour tous les citoyens sur tout le territoire.

Le groupe est cimenté sur des valeurs uniquement commerciales et autour d’un objectif prioritaire de compétitivité, notion qui renvoie directement à des impératifs d’adaptation à la concurrence.

Le dossier se conclut de la manière suivante :

DÉVELOPPER LE SERVICE PUBLIC SNCF

Enfin, il faut capitaliser en termes de service public l’expérience acquise par les régions politiques pour ancrer encore plus le ferroviaire comme colonne vertébrale de l’organisation d’un service public des transports en proximité tout en s’appuyant sur la cohérence nationale de la SNCF.

Pour la CGT, il faut une nouvelle étape de conventions, l’État doit être présent en tant que financeur principal et garant de la cohérence nationale et la SNCF doit être représentée au double titre de l’infra et de l’exploitant.

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Succès de la grève des cheminots du 4 avril 2018 et tribune de Bernard Thibault

Le second jour du premier moment de grève des cheminots a été un succès encore une fois. S’il y a eu un peu moins de grévistes que la veille, avec 29,7 % contre 33,9 %, il y avait cependant davantage d’aiguilleurs que la veille (46 % au lieu de 39%), ainsi que davantage de contrôleurs (77 % au lieu de 69%).

La part de conducteurs reste grosso modo stable (74 %, 77 % la veille) et l’impact est tellement significatif que même pour la reprise du travail, la désorganisation est importante (seulement 3 transiliens et TER sur 4, 3 Intercités sur 5, 3 RER C sur 5, 1 RER E sur 2).

Un fait important a également été la publication dans Le Monde d’une tribune (payante) de Bernard Thibault, qui a été secrétaire général de la Fédération CGT des cheminots de 1993 à 1999, puis général de la CGT de 1999 à 2013.

Hier, l’article d’agauche.org soulignait le manque d’envergure sociale des revendications des cheminots de la CGT, au sens où tout était étroitement corporatiste, avec une dimension « on sait mieux gérer que les autres ».

La tribune de Bernard Thibault aborde directement cette question, le titre étant par ailleurs « La grève des cheminots porte l’intérêt général », alors que la conclusion est extrêmement lyrique, avec les cheminots présentés comme une sorte d’avant-garde des droits sociaux :

« Accuser les cheminots d’être responsables du désastre des politiques publiques est un comble. Cette humiliation a la réponse qu’elle mérite. Il est à leur honneur de poursuivre l’action de leurs prédécesseurs pour une certaine idée du service public et des droits sociaux pour les générations futures.

Il est des grèves qui portent l’intérêt général, d’où jaillit la lumière, et ce n’est pas en cet anniversaire de celles de 1968 qu’on pourra nous dire le contraire. »

Il faut cependant rappeler ici qu’en 1968, la CGT a été contre le mouvement de contestation et a cherché à tout prix à ce qu’il soit étouffé, participant en première ligne avec l’État pour qu’il y ait des négociations salariales et que le mouvement soit enterré.

Le résultat est bien connu : l’isolement fatal de la gauche voulant changer le monde, le raz-de-marée électorale de la part de la droite.

Bernard Thibault se moque bien de cela, puisque son objectif est en réalité de faire un chantage disant : aucune revendication n’est possible si un bastion du service public tombe.

Sauf qu’il dit en même temps que « la SNCF appartient à la nation » et qu’il s’agit d’une « multinationale qui possède près de 1 300 filiales dans le monde ». Et c’est là que tous les problèmes se révèlent au grand jour.

Car la SNCF est un groupe qui consiste ni plus ni moins qu’en du capitalisme d’État. De par son organisation, ses méthodes, ses objectifs, ses perspectives à l’échelle mondiale, etc., il s’agit de capitalisme tout ce qu’il y a de plus classique.

Que ce groupe, né en 1937-1938, ait profité de l’élan social de 1945, puis de l’intégration de la CGT au projet d’un État-providence fort, tout le monde le sait. Que cela ait pu profiter aux salariés de la SNCF, tant mieux.

Mais à un moment, il faut voir les choses en face et on ne peut pas dire en même temps qu’il s’agit d’une multinationale et d’un secteur public.

C’est pourtant ce qu’ont fait tant le Parti socialiste et le Parti communiste français depuis longtemps, c’est vrai. Cependant, c’était là une faillite intellectuelle, morale et culturelle sur le plan des idées de gauche, et en 2018 une telle incohérence est une bombe à retardement.

Si Bernard Thibault disait : la SNCF devrait être un secteur public, il serait cohérent. Mais ni lui ni la CGT ne le font et ne veulent le faire, car cela serait révéler leur effroyable compromission historique. Ils ont participé à la naissance d’un monstre, au moyen de l’État, qui inévitablement sera repris par la suite par le capitalisme de la manière la plus directe…

Vu ainsi, il n’est pas vrai de dire que « la grève des cheminots porte l’intérêt général », il faudrait dire qu’elle le pourrait… si on passait du corporatisme à la lutte des classes, de la défense d’acquis au sein d’un capitalisme d’État en voie de privatisation à celui d’acquis en général face au capitalisme.

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Succès de la grève des cheminots du 3 avril 2018 et étroitesse d’esprit syndicale

La grève d’hier a été un succès certain à la SNCF. Les grévistes ont été de 77 % chez les conducteurs, 69 % chez les contrôleurs, 39 % chez les aiguilleurs, 40 % chez les agents d’escales et du matériel.

C’est une expression de capacité de lutte significative. Et le fait que les cheminots aient déposé dix-huit préavis de deux jours (avec une grève de deux jours sur cinq), témoigne d’une combativité certaine, ce qui rassure ceux et celles n’osant pas lutter mais éprouvant de la sympathie.

Il y a ainsi un frémissement social certain, un esprit de recomposition élémentaire mais réel.

Au point qu’il y a nettement un bloc réactionnaire qui apparaît et voit en la lutte des cheminots le symbole de la lutte des classes, la boîte de Pandore de la confrontation sociale. Le premier ministre Edouard Philippe s’est donc posé en défenseur de « ceux qui veulent aller travailler veulent continuer à bénéficier de leur liberté constitutionnelle d’aller et venir ».

Il est vrai ici que, malheureusement, le gouvernement est aidé par l’esprit étroitement corporatiste de la Fédération CGT des cheminots, qui ne sort pas de l’esprit de collaboration avec les institutions, dans l’esprit de la CGT depuis les années 1950.

Voici par exemple les positions de la Fédération sur la lutte actuelle ; on y retrouve une mentalité nullement de gauche mais ayant tout à voir avec un esprit néo-gaulliste de cogestion, avec la revendication d’une meilleure efficacité au service de l’économie et du pays, etc.

Ce n’est certainement pas avec cela que les gens vont sympathiser avec la lutte et accepter que leur vie quotidienne ou leur capacité à aller travailler soient perturbés au plus haut point…

L’incapacité à formuler les choses autrement que de manière étroite, corporatiste – au final, syndical – est révélateur de l’absence de réflexion réelle sur ce qu’est la lutte de classes au sens réel du terme… Ou plus exactement de comment la CGT, comme déjà en 1968, n’entend que vouloir participer à la gestion, sans vouloir en rien changer la vie.

DETTE ET FINANCEMENT

La dette du système ferroviaire doit être reprise par l’Etat sans contrepartie. Elle est de sa responsabilité. Des financements pérennes doivent être apportés pour assurer le développement du service public ferroviaire (marchandises et voyageurs).

C e q u e l a C G T p r o p o s e :

• Création d’un pôle financier public pour donner la priorité à l’emploi, à la création de richesses dans les territoires et à la préservation de l’environnement, et non plus à la recherche de la rentabilité des capitaux. • Création d’une Caisse d’Amortissement de la Dette Ferroviaire de l’Etat (CADEFE) afin de libérer le système ferroviaire de ce poids (1,7 Md€ d’intérêts par an).

• Nationalisation des autoroutes et utilisation des profits pour alimenter la CADEFE.

• Mise en œuvre de l’Eco Taxe poids lourds. Ces nouvelles ressources financières permettraient également d’apurer la dette.

• L’utilisation de la Taxe Intérieure de Consommation sur les Produits Energétiques (TICPE) pour le financement des infrastructures de tous les transports (routes, voies navigables, ferroviaire – 6Mds consacrés pour le réseau ferré national-).

• La création d’un Versement Transport Régional (VTR) additionnel qui permettrait de doter les régions d’une ressource provenant du secteur économique, principal bénéficiaire du système des transports régionaux.

• Arrêt des Partenariats Public-Privé (PPP) qui ne servent que l’intérêt de groupes du BTP (Vinci, Bouygues, Eiffage).

RELANCE DU TRANSPORT DE MARCHANDISE S PAR FER

Le Fret ferroviaire SNCF ne doit pas être filialisé. Une véritable politique de relance et de report modal doit être décidée, appuyée par des moyens, notamment pour répondre aux enjeux environnementaux et ne pas laisser dépérir l’activité à petit feu.

C e q u e l a C G T p r o p o s e :

• Préservation et modernisation des emprises ferroviaires. La SNCF doit s’appuyer sur son groupe, pour se mettre au service de cette ambition.

• Développement des ports qui doit s’appuyer sur davantage d’acheminements ferroviaires.

• Pour la distribution urbaine, il faut s’intéresser aux acheminements en amont et définir les infrastructures nécessaires (hôtels logistiques, plateformes intermodales ou Cross-Dock…).

• Internalisation des coûts externes propres à chaque mode (supportés par la collectivité) par une tarification du fret à son juste coût. La CGT se prononce pour une Tarification Sociale Obligatoire (TSO).

• Conditionnement des aides publiques aux entreprises industrielles et de service à l’utilisation d’un mode de transport vertueux.

STATUT DE L’ENTREPRISE

La SNCF doit rester sous statut d’EPIC, propriété de la Nation et non objet de tractation et de spéculation financière.

C e q u e l a C G T p r o p o s e :

• Regroupement de SNCF Réseau, SNCF Mobilités et l’EPIC SNCF (dit « de tête ») au sein d’un seul EPIC SNCF en veillant à la séparation comptable entre l’opérateur et le gestionnaire de l’infrastructure, seule obligation imposée par les textes européens.

ORGANISATION DE LA PRODUCTION Une réorganisation complète de la production doit mettre fin au cloisonnement par activités, réactiver une véritable coopération opérationnelle entre les cheminots et assurer le retour à la qualité de service qu’exigent les usagers.

C e q u e l a C G T p r o p o s e :

• Une entreprise unique et des établissements multi-activités (voyageurs grandes lignes/proximité et Fret le cas échéant) décloisonnés au sens des activités, mais reposant sur la reconnaissance des métiers, garants de la qualité et de la sécurité. Ils doivent être renforcés dans l’animation, les qualifications, les formations…

• La mutualisation des moyens, des personnels et des informations, source d’efficacité.

RÉ INTERNALISATION DES CHARGES DE TRAVAIL

C e q u e l a C G T p r o p o s e :

• Les activités externalisées doivent être réintégrées (charge de travail et les personnels qui en ont la charge) dans le triple objectif de mettre fin au surcoût de la soustraitance, d’améliorer le statut social des salariés et de regagner la maîtrise complète de la production pour en assurer la qualité et la sécurité.

OUVERTURE A LA CONCURRENCE

La concurrence est un mauvais système qui se base uniquement sur le dumping social, qui n’est pas adapté aux contraintes techniques de l’exploitation ferroviaire et qui ne permettra pas de développer le service public ferroviaire. La situation de Fret SNCF, libéralisée depuis 10 ans, est significative d’une dégradation de la qualité de service du transport de voyageurs annoncée si la concurrence se mettait en place.

C e q u e l a C G T p r o p o s e :

• L’Etat doit transposer les dispositions du 4e paquet ferroviaire dans le droit national en décidant de l’attribution directe de l’exploitation des services ferroviaires à la SNCF sur l’ensemble du réseau ferré national. Cette décision est conforme à l’article 5 – paragraphe 4 bis du règlement Obligations de Service Public (OSP) qui prévoit des exceptions à la mise en concurrence en regard des caractéristiques structurelles géographiques, de la complexité du réseau, ainsi que de la qualité de service et d’un meilleur rapport coût-efficacité.

DROITS SOCIAUX DES CHEMINOTS/GARANTIES SOCIALES

Le statut doit être confirmé comme la règle, y compris pour les futurs embauchés. Il doit être amélioré ainsi que les droits des contractuels. Les droits des cheminots font partie intégrante de l’équilibre entre droits et devoirs liés au service public. Ils doivent être préservés. Une véritable augmentation générale des salaires et pensions doit être annoncée.

C e q u e l a C G T p r o p o s e :

• Maintien et amélioration du statut dans le cadre d’une SNCF intégrée et publique. Admission au statut de tous les personnels de la SNCF qui remplissent les conditions.

• Liées à la Convention Collective Nationale de la branche ferroviaire, les garanties sociales doivent être revues à la hausse, pour que le patronat ne puisse pas renforcer le dumping social entre l’entreprise publique et les entreprises ferroviaires privées. Les voies ferrées d’intérêt local et la restauration ferroviaire doivent y être intégrées.