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Société

Covid-19: il y a beaucoup plus que 6633 personnes infectées en France

Officiellement, les personnes touchées par le Covid-19 en France étaient 6633 hier, lundi 16 mars 2020. En réalité, le nombre de personne contaminées est bien plus élevé et les autorités devraient donner l’estimation de ce nombre, pas simplement les cas connus officiellement. Cela aurait permis une meilleure prise de conscience collective et peut être l’établissement de mesures plus précoces, pour éviter la situation catastrophique actuelle.

Lors de sa seconde allocution, Emmanuel Macron a déploré l’attitude de nombreux français n’ayant pas respecté les consignes de distanciation sociale. Il a eu raison de faire ce reproche, mais il est aussi responsable du fait que la population n’avait pas forcément les moyens de prendre la mesure de l’ampleur de la crise sanitaire en n’expliquant pas suffisamment la réalité.

On peut très bien être porteur du Covid-19 et n’avoir aucun symptôme, en tous cas pas tout de suite. Par définition, les personnes dans ce cas ne sont pas comptabilisées. Il y a même maintenant dans certaines régions françaises de nombreuses personnes ayant des symptômes, mais ne pouvant être testées, faute de moyens.

Il y a donc bien plus que 6633 porteurs du virus en France.

Le gouvernement et les institutions sont habituées à fonctionner avec des statistiques pour tout un tas de cas, sondages, audiences médiatiques, prévisions économiques, etc. Il n’y a donc pas de raisons qu’elles ne le fassent pas dans le cas de la crise sanitaire en cours, d’autant plus que les épidémiologistes savent faire ce genre de projections, et qu’ils le font probablement déjà.

On peut en effet tout à fait envisager les choses en comparant avec la situation chinoise. Ce graphique publié par le Journal of the American Medical Association le 24 février dans un article analysant la situation est très instructif :

 

On y voit en jaune les cas diagnostiqués chaque jour dans la région du Hubei. Il faut ainsi lire par exemple : le 10 février, près de 3000 cas sont diagnostiqués.

On y voit également en gris, la date déclarée (donc après coup) par les malades du jour de survenance des symptômes. Il faut ainsi lire par exemple : le 23 janvier, les symptômes se sont déclarés chez 2500 personnes (dont le diagnostique a ensuite été confirmé).

Ce jour correspond à la date du confinement dans la région.

En regardant la barre jaune, on voit que ce même jour environ 400 personnes ont été officiellement diagnostiquées.

Cela donne une première indication et permet une première possibilité d’estimation.

Il y a 1210 cas qui ont été diagnostiqués sur la journée d’hier en France, soit quatre fois plus que la journée du 23 janvier dans le Hubei, où les nouveaux cas réels (de personnes ayant des symptômes, donc pas seulement des personnes contaminées) étaient de 2500.

Un simple rapport de proportionnalité permet de penser qu’il peut y avoir eu hier 10 000 personnes contractant des symptômes, soit une avancée de l’épidémie quatre fois plus importante que dans le Hubei à une date équivalente (décision de confinement). Cela cependant n’est qu’une extrapolation statistique et n’est pas satisfaisante, bien que la taille du bassin soit équivalente (59 millions d’habitants pour le Hubei).

Une autre différence est que les mesures sanitaires ont été rapidement efficaces, alors que les Chinois avaient déjà à la base des comportements sanitaires beaucoup plus responsables qu’en France, puisqu’ils portent systématiquement un masque en cas de rhume ou d’état grippal.

En France, où les comportements ne sont pas appropriés, on peut donc largement supposer que la situation est pire.

Un autre exercice statistique est possible avec le graphique du Hubei. En s’intéressant à la période d’avant le confinement et en choisissant la date du 22 janvier comme limite :

– en additionnant les barres orange, on a environ 450 cas ;

– en additionnant les barres grises, on a environs 12 000 cas.

Le nombre de cas officiels en France le 15 mars (le « orange » sur le graphique), veille des mesures de confinement, était de 5 423 cas, soit plus de dix fois plus. Un simple rapport de proportionnalité permet d’estimer le nombre de cas réels actuellement à environs 150 000 personnes. C’est énorme, d’autant plus que beaucoup de choses permettent de supposer que c’est plus.

Les autorités françaises ont beaucoup trop tardé à prendre des mesures, ont même refusé d’en prendre au début et le pays va en payer très cher le prix. Le système de santé, déjà saturé dans l’Est, et engorgé en Île-de-France et dans le Nord, ne pourra pas supporter le nombre de malades qui va encore exploser.

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Société

Le coronavirus COVID-19 et les multiples crises qu’il implique

Le coronavirus COVID-19 fait peur en France, mais la nature de la crise est mondiale et touche pratiquement tous les aspects de la vie. C’est encore un signe que rien ne va plus pour une planète toujours plus malade du capitalisme et des humains le diffusant.

Paranoïa et réelle crise sanitaire, crise de l’utilisation des animaux à la fois de manière artisanale et hyper-industrielle, perturbations économiques, chaos administratif et réelle supervision à la fois opaque et bureaucratique… Le coronavirus COVID-19 a été la boîte de Pandore de toute une série de contradictions, dont on ne voit pas la fin.

Il va de soi que le fait que la crise du coronavirus COVID-19 parte de Chine, l’usine du monde, renforce d’autant plus le véritable choc mondial. Un choc dont on n’entrevoit pas la fin : qui peut savoir comment une maladie d’origine animale, ayant sauté la barrière des espèces, comme le SRAS et Ebola, va se comporter ?

On est en effet ici dans une crise provoquée par le grand chambardement planétaire provoqué par les activités humaines. Si en Chine on ne capturait pas des centaines et des centaines de milliers d’animaux sauvages, dans les conditions les plus sordides, pour les amener vivant et les tuer sur le marché, pour les consommer comme aliments, la crise du coronavirus COVID-19 n’aurait pas existé. C’est aussi simple que cela.

Naturellement, cela n’inquiète guère les médias, qui préfèrent distiller la peur et engager une réflexion inquiète sur les conséquences pour l’économie mondiale. Le capitalisme se nourrissant du capitalisme toujours plus grand, toujours plus étendu, le ralentissement général lui est contre nature. Cela ne sera pas sans conséquences, mais quelle sera leur dimension ?

Et la Chine s’en remettra-t-elle ? Ce pays vise à être une superpuissance et son affrontement avec les États-Unis est déjà programmé, de part et d’autre. Mais son statut de colosse aux pieds d’argile est déjà flagrant. Wuhan, avec ses onze millions d’habitants, désormais connu mondialement comme lieu source du coronavirus COVID-19, reflète l’incroyable décalage chinois entre une avancée à pas de géant et une arriération terriblement profonde.

Si 400 millions de Chinois voient leur niveau de vie augmenter, tel n’est pas le cas pour un milliard d’ouvriers, de paysans, affrontant des conditions de vie misérable. Les 3/4 des Chinois n’ont même plus d’assurance-maladie, le système ayant été démantelé pour laisser libre la voie au capitalisme le plus effréné. Quant à l’hôpital censé être sorti du sol en dix jours, c’est un simple assemblage de préfabriqués, lui-même symbole de l’absence initiale d’infrastructures.

Ce qui est inversement d’autant plus étonnant, c’est le gigantesque stress qui est né en France. Il y a pourtant beaucoup d’infrastructures, une capacité sanitaire parmi les meilleures mondiales. On voit cependant à quel point tout est atomisé et il n’y a aucune confiance nulle part. Le coronavirus COVID-19 est prétexte à un repli sur soi, à un retour dans une bulle d’autant plus trompeuse qu’elle exige l’individualisme le plus complet.

Il y a tellement d’aspects dans cette crise qui commence seulement que, finalement, il est inévitable de la considérer comme propre à une époque, celle de la fin d’une civilisation, incapable de se saisir rationnellement des questions posées, de s’organiser de manière constructive, à l’échelle planétaire d’ailleurs.

Oui, il faut être visionnaire, par les temps qui courent. Sans quoi la fin de la civilisation capitaliste sera la fin de la civilisation tout court.

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Guerre

Vers la guerre: l’affrontement sino-américain à la conférence de Munich de 2020

La conférence internationale de Munich, traitant de la sécurité, a vu les États-Unis viser clairement la Chine en la présentant comme la grande menace pour la division du monde telle qu’elle existe actuellement. Le challenger est officiellement présenté et on marche toujours plus clairement vers la guerre.

Mike Pompeo est le responsable de la diplomatie américaine et il a donné le ton ces derniers mois. En octobre 2019, il avait accusé la Chine d’être « ouvertement hostile » aux États-Unis. En novembre, il a avait expliqué que la Chine portait une « nouvelle vision de l’autoritarisme ».

Courant janvier 2020, il avait demandé aux entreprises de la Silicon Valley de faire en sorte que « nos sociétés ne concluent pas des contrats qui renforcent l’armée de notre rival ou favorisent sa répression dans certaines parties de ce pays». A la fin du même mois, lors d’une rencontre avec Dominic Raab, le responsable des affaires étrangères du Royaume-Uni, il avait dit que « Le Parti communiste chinois représente la principale menace de notre époque ».

Lors de la 56e conférence de Munich sur la sécurité à la mi-février 2020, où étaient présents 150 chefs d’État et de gouvernement, il a affirmé que :

« La Chine empiète sur les zones économiques exclusives du Vietnam, des Philippines et de l’Indonésie. Et sur ce point, la Chine a eu un différend frontalier ou maritime avec presque tous les pays qui la bordent (…).

Et parlons une seconde de l’autre domaine, la cybersécurité. Huawei et d’autres entreprises technologiques chinoises soutenues par l’État sont des chevaux de Troie pour le renseignement chinois. »

Mark Esper, secrétaire à la Défense, a dit quant à lui qu’il fallait « se réveiller face aux défis présentés par la manipulation chinoise de l’ordre international au long cours, avec ses règles », et que la Chine était le principal souci pour le Pentagone.

Les Chinois n’étaient évidemment pas très contents et cela d’autant plus que la conférence de Munich avait comme thème « westlessness », terme signifiant grosso modo « déclin de l’occident ». Mike Pompeo, venu avec deux autres secrétaires d’État, s’est d’ailleurs empressé de dire que l’occident était en train de gagner.

Emmanuel Macron a déclaré en réponse que « l’ère des policiers mondiaux américains omniprésents est révolue », tout en soulignant en même temps que son ouverture appuyée récente à la Russie avait comme but de sortir celle-ci d’un rapprochement fort avec la Chine. Car de toutes façons, on ne sort pas de l’affrontement sino-américain, et Le Figaro titrait son article :

« À Munich, la rivalité entre les États-Unis et la Chine éclate au grand jour »

Les Chinois ne répondent rien, car ils ne veulent pas encore se présenter comme le challenger, même si leurs documents stratégiques disent évidemment tout autre chose. On est pour l’instant encore dans la mise en place, avec le jeu d’alliances qui se forme, mais qui peut connaître de grands changements. L’Allemagne notamment n’apprécie guère tout cela, car cela nuit à sa propre affirmation, qui exige une Europe renforcée, ce qui n’est guère possible si tout passe soit par les États-Unis, soit la Chine.

Le multilatéralisme n’est en fait que le renforcement des contradictions entre les puissances et ce n’est que reculer pour mieux sauter. Les États-Unis ne veulent pas de changements dans la division du monde, ou alors en leur sens – la Chine veut un nouveau partage. Les autres se placent prêts à en profiter, car ils ont tout autant besoin d’aller de l’avant pour tenir. Le capitalisme porte en lui la guerre, sans quoi il ne peut pas se maintenir.

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Société

Coronavirus: le rapatriement des français de Wuhan, une grande légèreté

Depuis le mois de décembre, une épidémie de coronavirus sévit en Chine. Le décompte hier soir 28 janvier 2020 était de 106 décès, tandis que des cas se déclarent dans de nombreux autres pays, y compris en France où 4 cas sont recensés. Le nombre important des français voulant rentrer de Wuhan, le foyer de l’épidémie, tout comme les précautions sanitaires insuffisantes de la France, montrent un bas niveau de l‘esprit collectif dans notre pays.

La ministre de la santé Agnès Buzyn a annoncé dimanche 26 janvier l’organisation du retour des français de Wuhan souhaitant quitter le sol Chinois. Finalement, ce sont deux avions qui ont été annoncé par la Commission européenne pour rapatrier 250 Français et une centaine d’autres citoyens européens, avec un premier départ aujourd’hui.

Ce sont donc presque 800 français qui vivent et font des affaires à Wuhan qui souhaitent maintenant rentrer, pas peur du virus mais aussi parce qu’il est dur de supporter les contraintes de l’isolement lorsque l’on est habitué à un mode de vie de type affairiste/mondain.

Le fait que, parmi les gens qui demandent à rentrer, il existe des personnes qui hésitent à rentrer « en raison du confinement » illustre bien une absence de l’esprit collectif, social, nécessaire pour limiter le risque de contamination au reste de la population.

Ce n’est pourtant pas étonnant d’avoir ce genre de mentalité chez les « expatriés », des gens travaillant dans le vin, la mode, l’industrie automobile, c’est à dire une bourgeoisie française bien éloignée des considérations de bien commun.

Pour ce qui est des retours de séjours « courts », depuis quelques jours, les états renforcent les contrôles sanitaires des avions arrivant de Chine. Pour de nombreux pays comme la Russie ou la Turquie, il s’agit de détecter à la caméra thermique les personnes pouvant avoir de la température.

La France, de son côté, est pointée du doigt pour la légèreté de ses contrôles qui n’en sont pas. Il s’agit en fait de prévention, les mêmes précautions que ce qui peut être vu ou entendu aux informations.

Le relativisme qui caractérise les français s’exprime ici, avec Agnès Buzyn qui balaye d’un revers de la manche les dispositifs de détection de température, au prétexte qu’ « une personne ayant pris du Doliprane ne présentera pas de fièvre ».

Cet argument est d’une grande bêtise assumant de passer à côté de personnes fiévreuses ne ressentant pas encore de gêne au prétexte que d’autres seraient indétectables.

Il y a donc logiquement une méfiance dans la population française à l’égard du retour des expatriés, car le principe de quarantaine c’est justement de minimiser au maximum les axes de contagion de ce coronavirus.

Les rapatriements ne sont pas des mesures sanitaires mais un compromis entre diplomatie, droit individuel et salubrité collective.

Aussi, lorsque l’on voit le manque de sérieux des contrôles sanitaires à l’arrivée des vacanciers en provenance de Chine, on se demande si la quarantaine des expatriés sera bien solide.

La question de la gestion du coronavirus en France dépasse le simple aspect technique du manque de moyens dans les contrôles.

Il y a aussi une question culturelle, qui est celle du relativisme à la française. On le voit par exemple dans le rapport des français à la bise. Même en plein épisode viral, impossible de faire l’impasse sur la bise aux collègues, aux amis… Alors que ce serait la plus sage décision à prendre.

On ne verra par contre jamais un français ayant la grippe mettre un masque pour ne pas la transmettre, il ira même au travail avec de la fièvre pour prouver qu’il est plus fort que cela.

Mais dans une société il y a des personnes pour qui des petits virus deviennent des menaces de mort. Mais ces gens là n’existent pas dans une société basée sur la compétition et l’individualisme.

Ne pas succomber à la légèreté face aux petites et grandes épidémies, c’est au contraire faire preuve d’un esprit socialiste. Et c’est cela que doit porter la Gauche.

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Écologie

Transfert d’orques d’Antibes vers la Chine: la lettre de la biologiste Ingrid N. Visser au président

Quatre orques appartenant au Marineland d’Antibes seraient en partance pour un autre parc d’attraction en Chine, où l’on craint légitimement pour leur sort du fait des conditions de détention. Le transfert pourrait avoir lieu ce mois-ci depuis un avion cargo au départ de Nice, un « voyage » lui-même d’une grande folie et totalement inacceptable. 

L’association One Voice a initié une pétition soutenue par de nombreuses associations dont Anymal, Sea Shepherd France ou encore C’est assez! : « Sauvons nos orques! Pour elles, un sanctuaire, pas la Chine!  »

On remarque au passage qu’il est incroyable que des parcs tels le Marineland d’Antibes existent encore en France et que des gens y emmènent leurs enfants… On est en 2020 : les adultes d’aujourd’hui n’auraient donc pas été émus par le film Sauvez Willy, qui date de 1993 ?

En attendant, il faut s’intéresser au sort des orques détenues en France et réclamer le meilleur pour elles. C’est l’objet d’une lettre mise en avant par One Voice et adressée au Président Emmanuel Macron par la docteur en biologie Ingrid Visser. Elle connaît très bien son sujet et explique pourquoi les parcs chinois se tournent vers l’achat d’orques déjà captifs du fait de la situation en Russie où des orques et bélugas capturés pour la Chine ont été relâchés en mer par les autorités grâce à l’opinion public.

Voici cette lettre :

« Objet: les orques au Marineland Antibes, en partance pour la Chine

Monsieur le Président de la République,

J’ai appris récemment que Parques Reunidos (entreprise espagnole possédant plus de 60 parcs d’attractions à travers le monde, dont le Marineland d’Antibes) tente actuellement de transférer ses orques (Orcinus orca) de France vers un établissement chinois. À ce stade, on ne connaît pas exactement la nature de l’établissement en question, mais étant donné que Parques Reunidos possède aussi des parcs en Chine, il est probable qu’il s’agit d’un transfert interne à l’entreprise.

J’ai visité le Marineland d’Antibes et constaté le mauvais état de santé des orques, en particulier d’Inouk, le mâle adulte. Sur la base de mes observations, j’ai déposé un rapport auprès de l’ONG One Voice, association de défense des animaux basée en France. J’ai également visité un certain nombre d’installations en Chine détenant des cétacés captifs (baleines, dauphins et marsouins) et j’ai trouvé que leurs conditions de vie y étaient encore pires qu’au Marineland d’Antibes. Je joins par exemple à cette lettre une série de photographies illustrant quelques-uns des problèmes constatés. L’une montre un certain nombre de poissons morts agglutinés au sommet de la grille au fond du bassin des orques, ce qui indique une mauvaise hygiène, une mauvaise alimentation ou des comportements anormaux de la part des orques (ou une combinaison de tous ces facteurs). La régurgitation, qui peut expliquer la présence des poissons morts, a été documentée par SeaWorld comme un signe de stress chez les cétacés maintenus en captivité. Dans la même installation chinoise, j’ai répertorié des orques aux yeux rendus rouges par la piètre qualité de l’eau, et d’autres pourvues de cicatrices dues aux défauts de conception des bassins. J’ai remarqué des ecchymoses sur le menton de certaines orques, qu’elles se sont faites à force de se cogner la tête contre le béton.

Il convient également de noter qu’il n’existe aucune loi sur le bien-être animal en Chine offrant ne serait-ce qu’un minimum de protection aux cétacés qui y sont détenus en captivité. Pour le moment, et bien que les conditions de vie des orques au Marineland d’Antibes ne soient pas bonnes, celles-ci bénéficient au moins de la surveillance des ONG et d’un certain niveau de protection grâce aux lois françaises et européennes.

Une fois qu’ils seront en Chine, les animaux peuvent (et vont certainement) être élevés afin d’être vendus aux divers établissements du pays. À l’heure actuelle, plus de 70 installations ont été construites pour la détention des cétacés, afin de les exposer au public et de leur faire faire des tours de cirque. Vous avez sans doute eu vent de ce qu’il s’est passé récemment en Russie, où 10 orques et 90 bélugas, qui avaient été capturés dans la mer d’Okhotsk à destination du marché chinois, ont été libérés à la demande du public et sur décision du président Poutine. J’étais l’une des rares scientifiques à avoir accès à cette installation et j’ai pu constater à quel point les conditions de détention étaient mauvaises pour les orques réservées par les établissements chinois. Avec mes collègues, nous avons rendu compte de la situation sur place et recommandé que les animaux soient relâchés dans l’océan. C’est chose faite depuis quelques semaines à peine, mais à présent que cette source d’approvisionnement est tarie, les Chinois se tournent activement vers les établissements détenant des orques en captivité.

Il est clair que le déplacement de tout cétacé de la France vers la Chine échappera à tout droit de regard et mettra également toute entreprise possédant ces animaux à l’abri de la surveillance des ONG et du gouvernement. Je vous recommande de lire les rapports de la China Cetacean Alliance [1] sur ces situations et les conditions épouvantables auxquelles les cétacés sont confrontés.

Je vous demande respectueusement, en tant que scientifique et biologiste spécialiste des cétacés, mais aussi en tant que témoin ayant dûment constaté les conditions de vie déplorables imposées aux animaux dans les aquariums chinois, d’interdire l’exportation de chacune des orques détenues en France afin de garantir qu’elles puissent continuer à bénéficier des protections qui leur sont accordées en vertu des lois françaises et européennes. Naturellement, je serais heureuse de discuter de la situation avec vous si vous avez des questions.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de ma très haute considération,

Dre Ingrid N. Visser (PhD)

1- http://chinacetaceanalliance.org/ pour les détails caractéristiques du parc et http://chinacetaceanalliance.org/wp-content/uploads/2019/06/19-CCA-Report-English-FINAL.pdf pour un rapport de synthèse. »

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Guerre

Vers la Guerre: les tensions militaires dans le détroit d’Ormuz

Depuis ce vendredi 27 décembre, un vaste exercice militaire conjoint entre l’Iran, la Russie et la Chine a lieu en mer d’Oman. L’exercice doit durer plus de quatre jours et sonne comme un nouveau avertissement quant aux jeux d’alliances entre puissances qui tendent à faire basculer le monde dans un conflit généralisé.

C’est une nouvelle épreuve de force que l’exercice de coopération navale militaire entre l’Iran, la Chine et la Russie qui se déroule entre le 27 et le 30 décembre dans le détroit d’Ormuz.

La Russie a dépêché trois de ses navires, dont une frégate, un pétrolier et remorqueur. La Chine en a, quant à elle, profité pour renouveler les tests sur l’un de ses redoutables destroyer, le Xining 052D mis en route en janvier 2017 et composé de missiles guidés.

Cela n’est pas anodin puisque ce type de destroyer, considéré comme l’un des meilleurs au monde et le plus moderne de l’armée chinoise, a été lancé à la construction en 2012 avec l’objectif d’en détenir à l’horizon 2030 une douzaine, le Xining 052D étant le cinquième mis en service.

Le partenariat militaire de la Chine dans cette zone est capitale pour s’assurer d’une totale souveraineté commerciale vis-à-vis des États-Unis, stratégie consolidée par la militarisation des îles en mer de Chine orientale et l’ouverture d’une « nouvelle route de la soie » à l’ouest du pays.

Cet exercice militaire a ainsi été salué par l’Iran, y voyant là la constitution d’un « nouveau triangle de pouvoir maritime », taclant les États-Unis sur le fait que le pays ne pouvait « être isolé ».

C’est une question essentielle pour l’Iran, rongé par une contestation intérieure contre le régime à la suite de l’élévation du prix du carburant (notamment à cause de l’embargo américain).

Tirant sa position de la rente pétrolière, la fraction au pouvoir en République islamique d’Iran vacille. Il lui faut assurer son pouvoir, en assurant un leadership militaire régional et cela passe par l’unité militaire et nationale pour contre-carrer les pressions populaires intérieures.

Il faut dire que depuis 2018, la tension est des plus fortes dans le détroit d’Ormuz, véritable poudrière en tant que carrefour stratégique pour le transit d’un cinquième du pétrole mondial.

Après la sortie unilatérale des États-Unis en 2018 de l’accord de Vienne signé en 2015 afin d’encadrer le programme nucléaire Iranien, de nouvelles sanctions économiques contre l’Iran ont mis en difficulté le pays.

À cela s’est ajoutée l’attaque de pétroliers par des mines flottantes au large de l’Iran le 13 juin 2019, suspectée par les États-Unis d’être commanditée par l’Iran. Les États-Unis avaient ainsi renforcé leur présence locale en débarquant mille nouveaux soldats.

Bref, avec cette opération de coopération navale en mer d’Oman, on assiste à la constitution d’un bloc militaire supervisé par la Chine opposé au bloc militaire de l’OTAN supervisé par les États-Unis.

Ce nouveau bloc militaire s’était déjà rendu visible avec l’opération Vostok en septembre 2018, un immense exercice entre Extrême-Orient russe rassemblant la Russie, la Chine et la Turquie. Ce furent plus de 30 000 soldats, un millier d’engins aériens, 36 000 véhicules terrestre, et 8 navires qui participèrent à cette manœuvre.

Ces deux blocs sont bien évidemment traversés par des contradictions, comme lorsque les États-Unis ne parviennent pas à convaincre le Japon ou l’Allemagne de constituer une coopération navale dans la zone du moyen-orient.

La guerre générale prend une tournure toujours plus réelle, toujours plus concrète, alimentée par des poudrières régionales et dont les contours relèvent de plus en plus d’un affrontement entre ces deux blocs.

Ce qui se joue, c’est la mécanique infernale des jeux d’alliance entre puissances sur fond d’aiguisement de la concurrence économique et de tensions sociales. Cette mécanique est terriblement connue comme celle ayant fait basculer le monde dans d’atroces guerres mondiales au siècle dernier.

Il est temps que la Gauche et l’ensemble des forces démocratiques se ressaisissent pour construire une mobilisation populaire contre cette nouvelle guerre qui vient.

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Guerre

La Déclaration de Londres de l’OTAN

Voici la déclaration de Londres publiée par l’OTAN ce 4 décembre 2019. C’est un document historique puisque la Chine y est pour la première fois ouvertement désignée, ainsi que la conquête spatiale militaire. La Russie est quand à elle considérée de manière très hostile, mais avec une volonté affichée de la voir se soumettre rapidement au bloc formé par l’OTAN.

> Lire également : Vers la guerre: l’OTAN assume la Chine comme menace principale

« Déclaration de Londres

publiée par les dirigeants des pays de l’OTAN à leur réunion tenue à Londres les 3 et 4 décembre 2019

Aujourd’hui, nous sommes réunis à Londres, là où l’OTAN a établi son premier siège, pour célébrer le 70e anniversaire de l’alliance la plus solide et la plus réussie de l’histoire, ainsi que pour commémorer le 30e anniversaire de la chute du rideau de fer. L’OTAN garantit la sécurité du territoire de nos pays et celle de leurs citoyens, au nombre d’un milliard, ainsi que notre liberté et les valeurs que nous partageons, parmi lesquelles la démocratie, la liberté individuelle, les droits de la personne et l’état de droit. La solidarité, l’unité et la cohésion sont des principes fondamentaux de notre Alliance. Alors que nous œuvrons ensemble à prévenir les conflits et à préserver la paix, l’OTAN reste le fondement de notre défense collective et le forum essentiel pour les consultations et la prise de décision en matière de sécurité entre Alliés. Nous réaffirmons le lien transatlantique qui unit durablement l’Europe et l’Amérique du Nord, notre adhésion aux buts et principes de la Charte des Nations Unies, ainsi que notre engagement solennel, inscrit dans l’article 5 du traité de Washington, selon lequel une attaque contre un Allié est considérée comme une attaque contre nous tous.

Nous sommes résolus à partager le coût et les responsabilités qu’implique notre sécurité, qui est indivisible. Grâce à notre engagement en matière d’investissements de défense, nous augmentons ces investissements pour nous conformer aux seuils de 2 % et de 20 % qui y sont définis, nous investissons dans de nouvelles capacités et nous fournissons plus de forces pour les missions et opérations. Les dépenses de défense hors États-Unis ont augmenté pendant cinq années consécutives ; un montant supplémentaire supérieur à 130 milliards de dollars des États-Unis est investi dans la défense. Conformément à notre engagement inscrit dans l’article 3 du traité de Washington, nous continuons de renforcer notre capacité individuelle et collective de résistance à toute forme d’attaque. Nous accomplissons des progrès appréciables. Nous devons et nous allons faire davantage.

Nous sommes confrontés, en tant qu’Alliance, à des menaces et défis distincts, qui émanent de toutes les directions stratégiques. Les actions agressives de la Russie constituent une menace pour la sécurité euro-atlantique ; le terrorisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations demeure une menace persistante pour nous tous. Des acteurs étatiques et non étatiques mettent à mal l’ordre international fondé sur des règles. L’instabilité observée au-delà de nos frontières favorise aussi la migration irrégulière. Nous sommes confrontés à des menaces cyber et hybrides.

L’OTAN est une alliance défensive et ne représente une menace pour aucun pays. Nous adaptons nos capacités, notre stratégie et nos plans militaires dans l’ensemble de l’Alliance conformément à notre approche à 360 degrés en matière de sécurité. Nous avons pris des décisions afin d’améliorer la disponibilité opérationnelle de nos forces pour qu’elles puissent répondre à tout moment à n’importe quelle menace, d’où qu’elle vienne. Nous restons déterminés dans notre engagement à lutter contre le terrorisme et nous agissons ensemble avec une plus grande fermeté pour en venir à bout. Nous agissons et continuerons d’agir d’une manière mesurée et responsable face au déploiement par la Russie de nouveaux missiles de portée intermédiaire, qui sont à l’origine de l’extinction du traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) et qui font peser des risques importants sur la sécurité euro-atlantique. Nous intensifions notre action pour protéger nos libertés, en mer et dans les airs. Nous renforçons encore notre aptitude à assurer la dissuasion et la défense par une combinaison appropriée de capacités nucléaires, conventionnelles et de défense antimissile, que nous continuons d’adapter. Aussi longtemps qu’il y aura des armes nucléaires, l’OTAN restera une alliance nucléaire. Nous sommes pleinement attachés à la préservation et au renforcement d’un système efficace de maîtrise des armements, de désarmement et de non-prolifération, compte tenu de l’environnement de sécurité du moment. Les Alliés sont fermement attachés à la pleine mise en application du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) dans tous ses aspects, à savoir le désarmement nucléaire, la non-prolifération et les utilisations de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques. Nous restons ouverts au dialogue, et à la perspective d’établir une relation constructive avec la Russie lorsque les actions de cette dernière le permettront.

Nous nous employons à accroître la sécurité pour tous. Nous avons renforcé les partenariats dans notre voisinage et au-delà, approfondissant le dialogue politique, le soutien et la collaboration qui s’exercent avec les pays partenaires et les organisations internationales. Nous réaffirmons notre engagement en faveur de la sécurité et de la stabilité à long terme en Afghanistan. Nous accroissons notre coopération avec l’Organisation des Nations Unies ; des progrès sans précédent sont enregistrés dans la coopération OTAN-UE. Nous sommes attachés à la politique de la porte ouverte de l’OTAN, qui renforce l’Alliance et a apporté la sécurité à des millions d’Européens. La Macédoine du Nord, présente à nos côtés en ce jour, deviendra bientôt le tout nouveau membre de notre Alliance. Nous sommes déterminés à assurer la réussite de toutes nos opérations et missions. Nous rendons hommage à tous les hommes et à toutes les femmes qui ont servi au nom de l’OTAN, et nous honorons la mémoire de tous ceux qui ont sacrifié leur vie pour préserver notre sécurité.

Pour maintenir notre sécurité, nous devons regarder ensemble vers l’avenir. Nous prenons en compte l’éventail et l’étendue des nouvelles technologies pour conserver notre avance technologique, tout en préservant nos valeurs et nos normes. Nous continuerons d’accroître la résilience de nos sociétés, ainsi que de nos infrastructures critiques et de notre sécurité énergétique. L’OTAN et les Alliés, dans les limites de leurs compétences respectives, sont déterminés à garantir la sécurité de leurs communications, y compris la 5G, conscients de la nécessité de recourir à des systèmes sécurisés et résilients. Nous avons déclaré l’espace en tant que milieu d’opérations de l’OTAN, reconnaissant ainsi son importance s’agissant de préserver notre sécurité et de relever les défis en la matière, dans le respect du droit international. Nous étoffons nos moyens d’action face aux cyberattaques, et nous renforçons notre aptitude à assurer la préparation, la dissuasion et la défense face aux tactiques hybrides visant à porter atteinte à notre sécurité et à nos sociétés. Nous développons le rôle de l’OTAN en matière de sécurité humaine. Nous sommes conscients que l’influence croissante et les politiques internationales de la Chine présentent à la fois des opportunités et des défis, auxquels nous devons répondre ensemble, en tant qu’Alliance.

Compte tenu de l’évolution de l’environnement stratégique, nous invitons le secrétaire général à présenter aux ministres des Affaires étrangères une proposition approuvée par le Conseil pour que soit mené, sous les auspices du secrétaire général, avec le recours à l’expertise pertinente, un processus de réflexion prospective visant à renforcer encore la dimension politique de l’OTAN, y compris la consultation.

Nous exprimons notre gratitude au Royaume-Uni pour l’accueil généreux qui nous a été réservé. Nous nous réunirons de nouveau en 2021.

En des temps difficiles, nous sommes plus forts de par notre Alliance, et nos populations plus en sécurité. Le lien qui nous unit et notre engagement mutuel garantissent nos libertés, nos valeurs et notre sécurité depuis 70 ans. Nous agissons aujourd’hui afin de faire en sorte que l’OTAN soit la garante de ces libertés, de ces valeurs et de cette sécurité pour les générations à venir. »

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Vers la guerre: l’OTAN assume la Chine comme menace principale

Il y a eu la passe d’armes diplomatique extrêmement violente entre la France et la Turquie ces derniers jours, preuve d’une concurrence acharnée entre pays dans le repartage du monde. Mais en assumant de reconnaître ouvertement de la Chine comme menace principale, l’OTAN admet aux yeux de tous que le centre de la prochaine guerre mondiale sera l’affrontement sino-américain.

La France entend jouer sur tous les tableaux : celui de l’aventure individuelle, celui du moteur franco-allemand, celui de l’OTAN. C’est là propre à la mégalomanie du capitalisme français, qui existe depuis bien longtemps puisqu’elle a mené aux défaites en 1871 face à la Prusse, en 1940 face à l’Allemagne nazie, puis à l’effondrement de son immense empire colonial.

Grâce au gaullisme, elle a su se placer entre les deux blocs de la guerre froide, mais là il est difficile pour elle de jouer des épaules. En expliquant il y a peu que l’OTAN était en « mort cérébrale » à la suite de l’intervention turque en Syrie contre les forces kurdes, Emmanuel Macron a cherché à renforcer la ligne autonome de la France.

Hier, au sommet de l’OTAN à Londres, le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg, parlant de la position d’Emmanuel Macron, en a donc profité pour rappeler à la France sa dimension réelle :

« C’est très insultant. Il y a un très haut niveau de chômage en France. La France ne va pas bien du tout économiquement. C’est une déclaration très dure quand vous avez de telles difficultés. Vous ne pouvez pas faire des commentaires comme ça. C’est très irrespectueux (…). Personne n’a plus besoin de l’OTAN que la France. Faire une déclaration comme celle-là est très dangereux. »

C’est une manière de rappeler à la France qu’elle n’a pas les moyens de sa mégalomanie, car ce sont les États-Unis qui sont la superpuissance disposant de l’hégémonie. Comme il n’y a pas de moteur franco-allemand puissant, la France ne peut pas se permettre de saborder sa position dans l’OTAN.

Tout à fait conscient de cette situation française, le président turc Recep Tayyip Erdogan avait adressé à Emmanuel Macron des propos violents :

« Fais d’abord examiner ta propre mort cérébrale. Ces déclarations ne siéent qu’à ceux dans ton genre qui sont en état de mort cérébrale. »

Des propos qui sidèrent, mais qui sont permis par la faiblesse française, comme d’ailleurs de toutes les puissances intermédiaires, y compris la Turquie qui reste d’ailleurs largement arriérée malgré son hypertrophie militariste. Car l’arrière-plan qui définit principalement les choses et qui détermine la tendance à la guerre, c’est l’hégémonie américaine et le besoin de la Chine d’exiger un repartage du monde.

Pour cette raison, le texte qui va être signé par les 29 membres de l’OTAN prévoit de reconnaître que l’influence grandissante de la politique chinoise forme tant des chances que des défis, à quoi il faut répondre en tant qu’alliance.

Le fait d’assumer de faire de la Chine la principale menace est un pas de plus vers la guerre. C’est une manière de dire : oui il peut y avoir des contradictions, comme entre la France et la Turquie, cela compte, cela joue, mais c’est secondaire et il ne faut pas perdre de vue l’essentiel.

Et plus ces contradictions secondaires vont se renforcer, plus cela va accentuer la cristallisation de l’affrontement sino-américain. Plus le capitalisme sombre dans la crise, plus cela s’accélérera.

La guerre, ce monstre engendré inévitablement par la concurrence, la compétition entre pays, détermine toujours plus cours des choses.

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Tendance à la guerre : appel australien à la militarisation accentuée contre la Chine

L’université de Sydney en Australie dispose d’un United States Study Center, qui a produit un rapport en cette fin août 2019. Les bases américaines en Asie seraient sous la menace d’un attaque rapide menée par la Chine, il faut donc militariser bien davantage et organiser un front militaire unifié américano-australien.

Le rapport de l’United States Study Center est vraiment très clair. Il est tout à fait franc dans ses objectifs, à savoir maintenir l’hégémonie américaine, avec son allié australien et empêcher la Chine de vouloir poser un repartage du monde. On est ici dans une logique militariste tout à fait assumé.

Le document, relativement long, expose la chose suivante : la clef est l’Australie.

Pour comprendre cela, il faut saisir l’arrière-plan. Il y a de nombreuses bases américaines autour de la Chine, à la base pour tenter d’exercer une pression sur la Chine communiste de Mao. Aujourd’hui la Chine n’a rien à voir et se pose comme grande puissance conquérante.

Or, selon le rapport australien, les bases américaines seraient détruites à 70 % si la Chine mène une attaque surprise. Voici une carte montrant comment le rapport voit les choses :

L’Australie, par contre, est suffisamment protégée d’une attaque surprise. Le rapport la place donc au cœur de la stratégie américaine « nécessaire ». L’Australie doit devenir la tête de pont américaine.

Cela est prétexte à toute une évaluation du matériel militaire américain, de ses capacités budgétaires, etc. Et là on a droit à tout un catastrophisme accompagné d’une exigence de militarisation, sur une ligne d’affrontement futur.

Le rapport de l’United States Study Center insiste ainsi très lourdement sur le fait que les États-Unis ne disposent pas d’un plan de budget suffisant pour maintenir leur hégémonie dans le Pacifique. Ils devraient impérativement s’organiser pour relancer l’ensemble de leur militarisation. Pour cela, ils doivent se réorganiser.

Ainsi, il est appelé à renforcer les forces sous-marines, afin d’être en mesure de contrer aux missiles chinois. Le rapport appelle également ouvertement l’Australie et le Japon à assumer militairement le « trou » laissé par la pseudo incapacité américaine à suivre la Chine militairement. D’ailleurs, il devrait y avoir un seul front organisé, unifié, des États-Unis et de ses alliés dans le Pacifique.

Le rapport parle également du sens des exercices militaires Talisman Saber de cette année. Ceux-ci ont lieu tous les deux ans en Australie depuis 2005 et ont regroupé 35 000 soldats cet été, avec des forces américaines, australiennes, canadiennes, japonaises et néo-zélandaises. Il s’agissait cette fois de s’entraîner à une opération d’envergure en mer de Chine.

Il est même parlé de « l’aventurisme chinois », ce qui est déjà un signe annonciateur du mot d’ordre du Japon, de l’Australie et des États-Unis pour l’affrontement futur avec la Chine. Au début de l’année 2019, dans son rapport annuel, le département de la défense des États-Unis annonçait d’ailleurs que la Chine était en train de devenir « la puissance prévalente dans la région indo-pacifique ».

On l’aura compris, les cartes sont désormais distribuées. Le cœur de la guerre mondiale future, ce sera la zone indo-pacifique. L’affrontement indo-pakistanais sera son à côté inévitable. L’Europe cherchera à bien se positionner, mais elle ne coupera pas elle non plus à l’affrontement.

Dans tous les cas, le capitalisme mondial vacillera de manière générale, comme ce fut le cas au moment de la première guerre mondiale. Personne ne pourra échapper à l’impact d’une guerre dévastatrice, produite par l’affrontement de la principale puissance et de celle venant la concurrencer.

Une guerre produite inévitablement par le capitalisme posant la concurrence, la compétition, comme norme à tous les domaines, et avec un système économique fondé sur l’accroissement toujours plus grand des richesses financières, ce de manière exponentielle et à tout prix.

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Australie : « la Chine est comme l’Allemagne nazie des débuts »

C’est une très grave crise politique qui traverse les couches dirigeantes australiennes, avec comme question centrale le rapport à la montée en puissance de la Chine. Il y a au plus haut niveau australien une assimilation de la Chine actuelle aux débuts de l’Allemagne nazie : on aura compris alors qu’une fraction des couches dominantes australiennes exigent un engagement total en faveur de la ligne belliciste américaine.

Le député australien Andrew Hastie a comparé la Chine actuelle avec la montée en puissance de l’Allemagne nazie. Cela signifie que, de manière très claire, ce conservateur annonce une prochaine guerre mondiale, avec un pays cherchant à modifier le partage du monde. Tout comme l’Allemagne cherchait à se développer hier, la Chine actuelle entend exiger un repartage du monde.

Il a formulé son point de vue dans une tribune dans la presse australienne, où il appelle à une remise à plat de tous les rapports avec la Chine, afin de préserver la souveraineté australienne. Nul hasard à cela : la semaine dernière, les gouvernements américain et australien ont également exprimé en commun des inquiétudes quant à l’agrandissement de l’influence chinoise dans la région.

Ses propos ont exigé une mise au point de la part des principaux dirigeants. Le ministre du commerce Simon Birmingham a demandé de la prudence dans les mots, alors que le ministre des finances Mathias Cormann a exprimé des critiques.

Mais le ministre de l’intérieur Petter Dutton a apporté son soutien au député. De manière significative, il est également le dirigeant de la commission parlementaire des services secrets australiens. Andrew Hastie n’est pas non plus n’importe qui à ce niveau. Il est passé par l’armée et il est le dirigeant de la commission parlementaire sur la sécurité.

Dans sa tribune, il compare d’ailleurs l’Australie à la France de 1940. Il explique qu’on sous-estime la capacité de la Chine à se mobiliser en différents points. De fait, il place la question militaire au centre des préoccupations. Cela fait plus que sous-entendre la nécessité d’une alliance ouverte avec les États-Unis en vue d’affronter la Chine.

Andrew Hastie fait également remarquer que la France s’est trompée en croyant que l’Allemagne nazie, de par l’importance des échanges économiques, n’irait pas au conflit. C’est une question essentielle d’ailleurs pour l’Australie, dont la Chine est la principale partenaire. Preuve des tensions stratégiques, Huawei a d’ailleurs été pourtant exclu de la technologie 5G devant être mise en place en Australie.

On aura compris que toute la question est de savoir pour l’Australie s’il faut maintenir la situation telle qu’elle est, car le capitalisme fonctionne bien et cela dans un rapport étroit avec la Chine, ou bien s’il s’agit de prévoir déjà le coup d’après et de commencer la rupture. C’est un choix critique, qui engage tout le pays, dans son positionnement même.

C’est là l’expression de la tendance à la guerre. Il est évident que pour les pays autour de la Chine, cette tendance s’exprime particulièrement brutalement. La Corée, le Japon, le Vietnam, l’Indonésie… tous ces pays connaissent des mouvements de fond dans leur nature même. Ils sont littéralement emportés par la tendance principale, celle de l’affrontement sino-américain à venir.

Il serait bien entendu illusoire de croire que, parce que la France est loin, on échappera d’une manière ou d’une autre à une guerre mondiale. Ce serait criminel même de ne pas vouloir s’opposer à une telle conflagration, inhumaine, meurtrière, criminelle.

La France, riche pays, puissance de premier plan, ne manquera pas de participer à un quelconque conflit. C’est dans sa nature même, c’est dans la logique même de son économie et tout l’État est engagé en ce sens, comme la militarisation des satellites le montre de manière assez franche.

Les généraux veulent la guerre, les actionnaires en ont besoin. Le peuple est passif et ne saisit pas les enjeux, ou ne veut pas les saisir encore. Partant de là, le processus s’enclenche inéluctablement.

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Nouvelles taxes commerciales américaines contre la Chine

Le 12e round de négociations commerciales sino-américaines a échoué au tout début du mois d’août. Immédiatement, le président américain Donald Trump a annoncé la mise en place, au 1er septembre 2019, de 10% de nouvelles taxes sur 300 milliards de biens importés de Chine. Cela frapperait notamment les smartphones et les ordinateurs portables.

La décision de Donald Trump se produit également le lendemain de la déclaration chinoise affirmant que les États-Unis étaient derrières les vastes troubles en ce moment à Hong Kong. Les citoyens de 47 villes ont aussi eu l’interdiction d’aller à Taïwan, l’État chinois voulant couper court à toute constitution d’un vaste front d’agitation.

Si la diplomatie chinoise déteste une chose, c’est bien le coup d’éclat à ses dépens. La réaction à la décision unilatérale de Donald Trump ne s’est pas faite attendre. Hua Chunying, porte-parole du ministre chinois des affaires étrangères Wang Yi, a réagi de manière très claire :

« Les États-Unis en subiront toutes les conséquences. »

Rien que de plus logique, puisque la vague de mondialisation de ces 30 dernières années se contracte et qu’on va vers la guerre pour les années 2030, avec l’affrontement États-Unis – Chine comme axe principal. Car aucun des deux pays ne reculera dans la bataille pour l’hégémonie.

La nouvelle bagarre commerciale qui s’engage se produit alors qu’il y a une récession de l’industrie en juillet, pour le troisième mois consécutif, dans plusieurs pays (France, Chine, Allemagne, Corée du Sud, Brésil, Royaume-Uni, Italie, etc.). Avec un tel contexte économique plus que morose, beaucoup de responsables américains ne comprennent par conséquent pas la mesure de Donald Trump, celle-ci risquant fortement de frapper la consommation américaine, alors qu’il y a bientôt pourtant de nouvelles élections présidentielles où il espère être réélu.

Mais c’est là l’opposition frontale qui se dessine entre deux Amériques. D’ailleurs, le géant américain Apple est le premier touché par la future mise en place de ces 10 % de taxe. Les experts estiment déjà qu’avec celles-ci, entre 8 et 10 millions d’Iphone en moins seront vendus. à la bourse, à la suite de l’annonce de Donald Trump, l’entreprise a déjà perdu 50 milliards (l’entreprise en vaut 17 fois plus depuis un an). Apple avait déjà expliqué en juin ne pas être favorable aux taxes de Donald Trump.

Seulement voilà, Apple n’existe que par la mondialisation, visant clairement surtout les plus aisés dans le monde. C’est là reposer sur une économie qui n’est pas instable. Il en va de même pour Google ou Facebook. Par conséquent, ces entreprises sont de grandes importance, mais ce ne sont pas des « champions nationaux » au cœur de l’économie américaine.

Comment croit-on que Uber a réussi à s’installer en France ? Personne ne l’a analysé, mais c’est tout simplement par la mondialisation : les Américains aisés venant à Paris avaient déjà l’application, permettant ainsi un rendement immédiat une fois l’entreprise installée. Sans cela, la réalisation pratique aurait été bien plus ardue.

De telles entreprises ne vivent toutefois que dans les interstices de la mondialisation. Pour cette raison d’ailleurs, elles sont d’ardents soutiens aux démocrates américains, au libéralisme culturel, aux valeurs unifiées de consommation mondiale, etc. Elles ne sont pas ancrées dans la réalité économique américaine comme le gigantesque complexe militaro-industriel, l’industrie pétrolière, l’agro-industrie… ou encore les très grands industriels et les très grands banquiers, etc.

Donald Trump a d’ailleurs pris comme prétexte pour les nouvelles taxes le fait que la Chine n’ait pas acheté davantage de produits agricoles américains. C’est là très clairement indiquer quelles sont les priorités, quelles sont les branches privilégiées méritant une rupture ouverte avec la Chine. L’agro-industrie passe avant Apple.

Beaucoup d’entreprises américaines ont compris la situation et ont changé leur fusil d’épaule depuis un an, quittant la Chine pour produire à Taïwan, au Bangladesh, au Vietnam, en Corée du Sud. La tendance est marquée. Quand on sait que Donald Trump a même affirmé que les 10 % de taxes nouvelles pourraient devenir 25 %, on imagine comment toutes les entreprises américaines se cassent la tête sur le problème en ce moment.

Le problème a évidemment marqué les esprits des spéculateurs boursiers. L’annonce de nouvelles taxes n’a pas frappé qu’Apple. Nike a perdu 3,4 %, Mattel 5,9 %, Caterpillar 4,9 %, John Deere 4,4 %. Les représentants de l’industrie de l’habillement et de la chaussure ont immédiatement affirmé que les nouvelles taxes étaient « immensément dérangeantes ».

Car les entreprises peuvent bien entendu reporter le prix des taxes sur les consommateurs. Mais rien que les nouvelles taxes montrent l’ampleur du problème : cela impliquerait 56 dollars en moyenne en plus pour une console de jeu, 70 pour un smartphone, 120 pour un ordinateur portable. Appliquer une telle hausse serait un suicide commercial, les consommateurs fuyant vers la concurrence qui, si elle n’existe pas encore forcément, se précipiterait dans la brèche.

Donald Trump passe en fait à la seconde étape de l’offensive anti-chinoise. Après les taxes sur l’acier et l’aluminium, il vise les produits technologiques courants, mais également d’autres biens de consommation, comme les jouets ou l’habillement. Cela vise à déstabiliser l’économie chinoise, parallèlement à l’appui à toutes les forces centrifuges pouvant servir de marche-pied pour déstabiliser la vie publique chinoise elle-même.

Cela vise aussi à assécher le terrain entre la Chine et les États-Unis, pour préparer la rupture totale, tout en s’alliant d’autres pays das le processus. Le Vietnam est désormais par exemple pratiquement une tête de pont américaine, au même titre que les Philippines. Ce sera d’ailleurs la question des eaux territoriales en Asie qui servira de détonateur à la nouvelle guerre froide, phase inéluctable avant des conflits toujours plus brutaux, toujours plus ouverts, à l’horizon des années 2030.

Il faut vraiment être pétrifié dans la vie quotidienne capitaliste pour ne pas voir la guerre qui se profile.

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L’effondrement des investissements chinois en Europe et aux États-Unis

La Chine monte en puissance sur le plan technologique et industriel, et les États-Unis ne comptent pas accepter d’abandonner leur position de force. On va vers un conflit armé pour le repartage du monde et l’effondrement des investissements chinois en Europe et aux États-Unis est un reflet de cette montée de tension à l’échelle mondiale.

Les journaux économiques mondiaux ont beaucoup parlé ces derniers jours des chiffres concernant les investissements chinois aux États-Unis et en Europe. On sait en effet que Donald Trump a lancé la guerre commerciale américaine contre la Chine ; tous les observateurs de « géopolitique » ont compris que les États-Unis ne comptaient pas attendre passivement que la Chine devienne une grande puissance militaire, ce qu’elle n’est pas encore.

La situation est donc de mauvaise augure et savoir si les investissements chinois se prolongent ou pas est un bon critère pour savoir quelle est la tendance de fond. Va-t-on vers la guerre ou bien les échanges continuent-ils comme avant, indiquant par conséquent qu’il y a au mieux des frictions ?

Il apparaît qu’on va au désastre : les investissements chinois aux États-Unis et en Europe se sont effondrés de 73 % par rapport à l’année dernière, passant de 111 à 30 milliards de dollars. La Chine ne se désengage pas : elle a des positions très fortes dans certains pays comme la Grèce. Sa présence continue également de croître en France, en Espagne, en Allemagne, ainsi qu’au Canada (de 80 % l’année dernière).

Mais elle sait qu’il n’est pas dans son intérêt de mettre l’accent de ses investissements dans ce qui risque de se retourner contre elle. La preuve de cela apparaît quand on sait que 66 % des investissements chinois vont en Asie, 12 % en Amérique latine, qu’il y a une présence chinoise massive en Afrique.

L’Europe et les États-Unis ne sont que des choix secondaires pour les investissements chinois et le repli chinois montre bien qu’on va vers un affrontement pour le repartage du monde.

Les États-Unis ne comptent évidemment pas attendre que la Chine se soit renforcée au point de parvenir à un éventuel équilibre militaire. D’où la guerre commerciale américaine contre la Chine, d’où l’arrestation d’une dirigeante de Huawei au Canada (et sa libération sous caution au bout d’un certain temps), d’où l’arrestation d’un cadre de Huawei en Pologne pour espionnage.

Huawei est en termes financiers la sixième plus grande entreprise de technologie, avec 170 000 employés ; les États-Unis ne comptent pas laisser cette entreprise continuer sa croissance. Il faut également penser à ZTE, qui fournit des entreprises de télécoms et des gouvernements dans 160 pays.

C’est parce qu’il représente la ligne de l’affrontement que Donald Trump a été élu, de même que Bolsonaro a été élu au Brésil, que le Brexit est devenu la ligne du Royaume-Uni, que des forces isolationnistes – protectionnistes – nationalistes sont au pouvoir ou au gouvernement en Italie, en Hongrie, en Autriche, en Pologne, etc. Il faut bien entendu aussi prendre en compte la Russie, qui met de l’huile sur le feu. On aurait tort d’ailleurs de penser que la France ne relève pas de ce petit jeu, surtout avec sa présence massive en Afrique.

Dans un tel panorama, ne pas voir que la guerre est une tendance inexorable serait de la naïveté. Penser que la France, avec l’Union Européenne, pourrait éviter la guerre, serait également du cynisme, ou bien un espoir vain.

Il appartient à toutes les forces de Gauche de prendre conscience de ce à quoi amène la compétition mondiale sur le plan économique, et de prendre l’initiative pour faire face à la guerre qui vient. Il y a ici une responsabilité historique et ne pas l’assumer serait un crime !