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Lyon: feu d’artifice illégal activiste pour «la Vierge Marie»

Le gigantesque feu d’artifice illégal qui a été tiré à Lyon mardi 8 décembre 2020 illustre parfaitement l’hégémonie réactionnaire dans cette ville. C’est une action coup de force réalisée au nom de « la Vierge Marie » qui est typique de la Droite ultra dans sa version activiste catholique, disposant ici de grands moyens et d’un réseau vaste et très soudé pour organiser cela au nez et à la barbe des autorités.

Pendant des jours, l’information a circulé sur des groupes fermés WhatsApp, en toute clandestinité.

« Chers amis, le Gouvernement ne volera le 8 décembre ni à la Vierge, ni aux Lyonnais ! Infos pratiques au dernier moment… restez à l’écoute ! Invitez vos amis lyonnais en partageant ce lien.»

Le 8 décembre aurait du avoir lieu l’habituelle « Fête des lumières », mais elle a logiquement été suspendue en raison du contexte sanitaire. Les activistes de la Droite ultra ont donc sauté sur l’occasion pour s’opposer à l’État et à la municipalité, en marquant leur hégémonie sur la ville, car cette fête est justement la leur.

L’État n’a rien vu venir, ou en tout cas n’a pas été en mesure de l’empêcher. Les activistes ont déployé partout dans le centre de la ville des dizaines et des dizaines de feux d’artifices, en pleine rue, sur des places, à différents endroits stratégiques. Ils ont tous été tiré au même moment à 21h, pour un résultat forcément spectaculaire.

Les « Bad gones », les supporters ultras du club de football de la ville, ont partagé la vidéo de l’action mine de rien, pour la revendiquer sans la revendiquer, alors que la vidéo est publiée par une page « Lyon Fans » à l’esthétique tout à fait similaire à la leur.

Le message des « Bad gones » est alors grandiloquent, jouant à fond la fibre du romantisme catholique transcendant la réalité :

«  Nous vous partageons la dernière vidéo qui a été publiée, on ne s’en lasse toujours pas…

Montez le son et asseyez vous confortablement devant un grand écran !

….

Depuis hier dans les rues de Lyon, la question est sur toutes les lèvres…

Qui a fait ça ???

Qui est responsable de ce feu d’artifice aux quatres coins de notre belle cité ???

Des supporters de L’OL ?

Des amoureux de la capitale des Gaules ?

Des artificiers amateurs ?

L’opération du saint-esprit ?

Peut-être un peu de tout ça…. Mais qui sait…

Ce qui est sur c’est que les Lyonnais et la Vierge Marie se souviendront longtemps de ce 8 décembre 2020.

La clameur qui est montée des rues à la fin du spectacle en témoigne !

Dans la pure tradition populaire de cette fête centenaire, sans touristes sans sponsors et sans artifices commerciaux, des gones (et peut être aussi des fenottes [= de femmes supportrices]) ont rendu hommage à la protectrice de la ville et ont paré cette dernière de ses plus beaux atours !!

Qui que ce soit, qu’ils en soient ici loués !!!

Vive Lyon, vive le 8 décembre et Merci Marie !!! »

La vidéo (visible ici) est montée de manière très professionnelle, avec des prises de vue de haute qualité, montrant que tout à été préparé minutieusement, avec de grands moyens. Le tout se terminant de manière épique par un ridicule « Merci Marie ».

On a là tout un romantisme typiquement identitaire, jouant sur la pseudo-tradition de la « fête des Lumière » existant depuis 1852. Chaque 8 décembre en effet, il est censé falloir « illuminer la ville » et monter sur la colline de Fourvière pour… rendre hommage à la « Vierge Marie » et à sa « protection » contre les épidémies.

« 1852 », c’est-à-dire le XIXe siècle, c’est-à-dire plus de 50 ans après la Révolution française et l’avènement de la bourgeoisie, en pleine révolution industrielle, après le siècle des Lumières. Il ne s’agit donc là évidemment pas d’une tradition populaire, mais bien d’une construction idéologique réactionnaire montée de toute pièce par l’Église catholique, pour préserver sa domination culturelle contre la modernité portée par la bourgeoisie et la classe ouvrière émergente.

L’Église catholique a d’ailleurs fait ériger une basilique quelques années plus tard au sommet de cette colline de Fourvière, alors qu’en 1854 était choisi justement le 8 décembre pour fêter « l’Immaculée Conception ».

Il s’agit là d’une conception particulièrement délirante, mais hautement symbolique, voulant que « Marie » aurait enfanté Jésus, mais sans avoir été « souillée » du péché originel, c’est à dire de l’acte sexuel. C’est une façon de rejeter la nature, la réalité concrète et immédiate, au profit d’un mysticisme transcendant.

C’est donc un symbole très important pour la Droite ultra, qui a besoin justement de ce genre de romantisme mobilisateur. Il a donc été mis le paquet sur cette date, en profitant du confinement pour trouver un prétexte afin de s’opposer à l’État et apparaître comme rebelle, anti-système, etc., dans la plus pure tradition de l’extrême-Droite française.

Cela a forcément coûté très cher et a nécessité une logistique complexe. On comprend immédiatement à l’esthétique de la vidéo et aux images qu’il y a à l’origine de ce coup d’éclat des ultras, qui ne peuvent s’empêcher de se montrer avec un vêtement de marque « North Face » et des fumigènes. Mais forcément, pour un tel ouvrage, ils n’ont pas agi seuls et disposent d’une assise particulièrement forte dans le centre de la ville.

La Droite a d’ailleurs immédiatement soutenu l’opération, alors que celle-ci relève d’un délit très grave en raison de sa dangerosité. Pierre-Damien Gerbeaux, conseiller municipal LR de Caluire-et-Cuire, commune jouxtant Lyon, a trouvé l’idée « lumineuse », en prétendant à une « ingéniosité populaire » et moquant « le maire écologiste qui, vexé, après avoir fait la chasse au Tour de France, fait la chasse aux pétards ».

Béatrice de Montille, conseillère municipale LR à Lyon a pour sa part totalement assumé :

« dans le contexte de crise sanitaire et de confinement, cette opération a fait du bien ».

Un tel événement rappelle un problème de fond avec les trois grandes villes françaises. Marseille est inexistante politiquement de par son arriération dans le triptyque football – mafia – misère. Paris est présente avec le triptyque bobo – soirées branchées – consommation stylée. Lyon est quant à elle présente avec le triptyque bourgeois traditionnel – identitaire – catholicisme.

Dans un tel panorama, avec la crise en cours, Lyon risque donc de donner le ton d’un nouvel activisme, conforme aux besoins de la « Droite populaire » en cours de formation. Celle-ci étant appuyée intellectuellement par Marion Maréchal et son école « Science po » de droite, implantée à Lyon justement. C’est une vraie menace, que la Gauche de cette ville est incapable de freiner malheureusement.

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Pour Jean-Luc Mélenchon, les présidentielles de 2022 valent bien une encyclique

Dans une tribune au magazine La Vie, le dirigeant de La France Insoumise propose ouvertement une alliance au catholicisme. Il a bien sûr en vue les élections présidentielles de 2022.

La Vie est un hebdomadaire catholique, qui appartient au groupe Le Monde. Le quotidien Le Monde, comme Télérama, relève en effet historiquement du milieu et de l’idéologie « catholique de gauche », spiritualiste critique du matérialisme, tout comme d’ailleurs la CFDT, prolongement du syndicat catholique, la CFTC.

Autant dire que pour les gens authentiquement de gauche, tout ce milieu de Le Monde, Télérama, des « cathos de gauche »… est considéré comme sympathique, mais pris avec des pincettes, car la dimension religieuse à l’arrière-plan est massive et d’autant plus pernicieuse qu’elle est indirecte.

Cela relève très clairement de l’agenda du Vatican, qui adapte son discours selon les pays et les situations. Ouvertement pro-repli sur soi-même en Pologne, l’Église catholique prône l’accueil massif des migrants en Autriche comme « ouverture au monde » ; catho de gauche en France, l’Église catholique n’est évidemment pas comme ça en Espagne, etc.

On ne peut qu’être ainsi profondément choqué de la tribune publiée par Jean-Luc Mélenchon dans La Vie. C’est une valorisation d’un prétendu « anticapitalisme » qu’on trouverait dans l’encyclique du pape François, Fratelli tutti, publié en octobre 2020. Catholiques et anticapitalistes, même combat, nous dit Jean-Luc Mélenchon. Le titre de la tribune est sans ambiguïté aucune :

« “Fratelli tutti”, une vision partagée entre croyants et incroyants »

La présentation de la tribune par La Vie montre que l’hebdomadaire participe à ce petit jeu :

« Le député des Bouches-du-Rhône et leader de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon, lecteur attentif des encycliques promulguées par les papes, a lu Fratelli tutti, dont le thème de la fraternité lui a inspiré ce texte confié à La Vie. »

Lui a « confié »… tel un message personnel, somme toute : La Vie souligne une certaine intimité et Jean-Luc Mélenchon est même présenté comme un « lecteur attentif » des encycliques publiées par « les » papes. Jean-Luc Mélenchon serait-il un catholique en secret depuis plusieurs décennies ? Il adorait en même temps François Mitterrand et Jean-Paul II ?

Surtout que Jean-Luc Mélenchon va très loin dans la valorisation du catholicisme. Rien que les propos suivants l’excluent totalement de la Gauche :

« Le titre Fratelli tutti rappelle la vocation universaliste du catholicisme. Elle entre en écho avec celui de l’humanisme né en Europe avec la Renaissance. L’âpreté du rejet de celui-ci par l’Église de l’époque n’efface pas l’effet de parenté que le temps long a confirmé. »

La scandale ici n’est pas seulement d’affirmer que l’Église aurait une parenté avec l’humanisme, ce qui est une aberration totale, puisque c’est le protestantisme qui a une parenté avec l’humanisme, certainement pas le catholicisme. D’ailleurs, le catholicisme lance le « baroque » et les jésuites contre l’humanisme.

Jean-Luc Mélenchon contribue ici à l’idéologie catholique qui, après avoir écrasé le protestantisme, combattu le protestantisme et les Lumières, prétend être leur égal sur le plan moral et intellectuel. Il aide la réaction religieuse à se parer d’une aura civilisationnelle.

Et ce qui est tout autant monstrueux, c’est de dire que l’humanisme serait né en Europe avec la Renaissance. C’est tout à fait inexact. L’humanisme naît à partir de la réception des textes philosophiques arabes se revendiquant d’Aristote. Quant à la Renaissance, ce n’est pas elle qui produit l’humanisme, c’est le contraire : la Renaissance est un produit de l’humanisme.

En sachant d’ailleurs que l’humanisme et le protestantisme – grosso modo allemand, néerlandais, tchèque – se distinguent profondément de la Renaissance italienne, ce semi-humanisme qui d’ailleurs s’effondrera sur elle-même en raison de la force du catholicisme.

L’humanisme et le protestantisme, cela donne les Pays-Bas (le premier pays capitaliste du monde), cela donne la formation des États-Unis d’Amérique sur une base libérale (au sens positif du terme), cela produit les Lumières et la Révolution française.

La Renaissance ne donne rien du tout et est récupérée par le Vatican. Et on sait comment la France est à 50/50 depuis l’écrasement du protestantisme : à 50 % travaillé au corps par le catholicisme et l’idéologie de la « Renaissance » version Vatican, à 50 % penché vers l’humanisme, les Lumières.

Normalement, Jean-Luc Mélenchon est franc-maçon et relève des seconds 50 %. Il a ici entièrement retourné sa veste.

Alors, naturellement, en révisant l’Histoire comme le fait Jean-Luc Mélenchon, on peut effectivement voir en le catholicisme une force positive et le pape un ardent défenseur de l’universalisme, un allié contre le libéralisme. On peut même s’imaginer, pendant qu’on y est, que la dénonciation féodale du capitalisme par le catholicisme est révolutionnaire et finalement saluer Maurras, Péguy et Bernanos.

Paris valait bien une messe pour Henri IV, alors la présidentielle de 2022 vaut bien une encyclique pour Jean-Luc Mélenchon, qui s’imagine un grand destin.

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Le sondage IFOP «les Français et l’IVG»

Alors que le gouvernement compte allonger le délai pour la possibilité de réaliser un IVG, de 12 à 14 semaines de grossesse, un sondage rappelle ce qui est évident : personne ne considère l’IVG comme un acte banal.

C’est l’histoire d’un hold-up par les libéraux. On connaît l’escroquerie qu’est l’assimilation des migrants aux réfugiés, on a pareillement l’assimilation du droit à l’avortement à l’acceptation de l’avortement comme un acte totalement banal. Cette assimilation est un hold-up car elle s’appuie sur une situation socialement misérable pour imposer comme seule solution le « choix » relevant du marché.

Or, l’avortement n’est pas un acte banal et ce pour une raison très simple : le fœtus se développe très rapidement. À 6 semaines, l’embryon mesure 5 mm. Mais à sept semaines, ses bras commencent à se former ; à dix semaines il a des yeux, un nez, une bouche, ses doigts sont séparés, ses orteils commence à former, il bouge d’ailleurs ses membres. À 14 semaines, il fait 8,5 cm ; à 22 semaines, il fait 19 cm.


Un fœtus âgé à trois mois de grossesse

On comprend donc que, forcément, un médecin n’ait pas obligatoirement envie de prescrire des médicaments pour dissoudre le fœtus ou d’utiliser un aspirateur pour le désagréger et balancer le tout à la poubelle, car c’est ainsi que cela se passe. Ce n’est pas une question « religieuse » comme le prétendent les libéraux, mais une question de rapport à la vie et à la nature. Le fameux serment d’Hippocrate de la Grèce antique interdit de mener un avortement ; le fondateur du Front de Libération Animale (ALF), Ronnie Lee, se définit logiquement comme « pro life » puisqu’il se positionne en la défense de toute vie.

La Gauche historique n’a d’ailleurs somme toute jamais vu les choses autrement. C’est le libéralisme, transformant la vie en matière consommable, qui a changé les mœurs. Les Français sont ainsi travaillés au corps, mais ils restent heureusement au fond cohérents au sujet de l’avortement : malheureusement on ne peut pas faire autrement parfois, donc il faut accepter l’avortement, mais si on peut éviter tant qu’à faire, c’est mieux.

C’est là qu’intervient le sondage IFOP, dans un contexte de prolongation de la durée de la possibilité l’IVG de 12 à 14 semaines de grossesse, comme escroquerie religieuse. Ce sondage pose d’ailleurs les mêmes questions qu’un sondage IFOP de 2016 et relève pareillement d’une enquête demandée par l’Alliance Vita, le prolongement de la « manif pour tous ».

Les questions sont en effet biaisées de telle manière à ce que l’avortement ne soit pas considéré comme une question naturelle et sociale, pour faire croire que les Français seraient en partie en phase avec le mysticisme catholique.

Le processus est le suivant. D’abord on fait passer aux personnes sondées le message qu’il y a 230 000 avortements en France, au moyen d’une question bidon. Le nombre est immense et frappe forcément.

Puis la personne sondée est amenée indirectement à prendre partie au moyen d’une question à la réponse évidente :

« Pensez-vous qu’un avortement laisse des traces psychologiques difficiles à vivre pour les femmes ? »

Une fois la personne sondée interpellée et mobilisée, on lui pose une question piège. Voici cette question :

« Pensez-vous que la société devrait davantage aider les femmes à éviter le recours à l’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) ? »

La question est ordurière, littéralement, car on ne sait pas s’il s’agit d’éviter l’IVG en amont, par une meilleure contraception pour les femmes, une contraception masculine… ou s’il s’agit de nier la réalité sociale de l’IVG et de la réfuter unilatéralement, donc religieusement. Ici on a 72 % de oui car les gens ayant un problème avec l’avortement, mais ayant conscience des réalités sociales, sont happées dans une négation abstraite.

Vient alors le coup de massue catholique, avec l’appel à une intervention programmatique sur une base catholique forcément :

« A ce jour, le livret officiel d’information remis aux femmes enceintes qui consultent en vue d’une IVG, comporte uniquement des indications sur les démarches pour avorter. Une proposition a été faite pour modifier ce livret en y intégrant le détail des aides aux femmes enceintes et aux jeunes mères comme cela était fait jusqu’en 2001. Êtes-vous très favorable, plutôt favorable, plutôt opposé ou très opposé à cette proposition d’intégrer dans ce livret officiel le détail des aides aux femmes enceintes et aux jeunes mères ? »

On a alors 84 % de oui ce qui donne une « légitimité » à l’Alliance Vita pour demander, forcément, à avoir une influence sur un tel livre officiel. Puis le sondage termine par une question visant à asseoir sur une base pseudo-démocratique cette pseudo légitimité :

« La France détient un taux élevé d’avortement soit une IVG pour un peu plus de trois naissances. Pourtant la France est l’un des pays du monde où les femmes ont le plus recours à la contraception. Si les pouvoirs publics lançaient une véritable prévention de l’avortement et conduisaient une étude pour analyser les causes, les conditions et les conséquences de l’avortement, y seriez-vous personnellement… ? »

On a ici 88 % de réponse favorable, ce qui est tout à fait en phase avec le point de vue démocratique consistant à dire : l’avortement, oui, mais si on peut éviter…

L’avortement est d’ailleurs un thème exemplaire. Les gens ont une opinion, formant une opinion démocratique, mais les seuls à s’exprimer sont les religieux fanatiques et les libéraux (qu’ils soient de droite, bobos de gauche ou d’ultra-gauche) pour qui un fœtus est un objet dont on peut faire ce qu’on veut.

Ce qui donne des situations intolérables, avec des attentats contre les médecins pratiquant l’avortement aux États-Unis, ce qui est un terrorisme directement dirigé contre les femmes, ou bien un avortement jusqu’à 24 semaines de grossesse au Royaume-Uni, ce qui est totalement fou quand on sait à quoi ressemble un fœtus à 24 semaines.

Vivement que le peuple s’affirme, enfin, et ne laisse plus la parole seulement aux religieux et aux libéraux. Il en va de la condition féminine : le peuple doit appuyer matériellement les femmes, c’est à lui d’organiser une société où le meilleur ressort toujours.

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L’encyclique Fratelli tutti du pape

La nouvelle encyclique du pape a une forte résonance sociale, sans réelle originalité et montre surtout l’incapacité à aborder les vraies questions de fond.

Le pape François s’est rendu samedi 3 octobre sur la tombe de « saint » François d’assise, afin de signer une nouvelle encyclique, intitulé Fratelli tutti (Tous frères), un long texte programmatique en 287 paragraphes dont le sous-titre est « Sur la fraternité et l’amitié sociale ».

Il est très important, car il expose la stratégie catholique romaine, qu’il s’agit de combattre et ce n’est pas évident, car l’ennemi est intelligent et tenace. Déjà, il sait faire front, le pape exprimant un esprit d’alliance religieuse :

« Si pour la rédaction de [la précédente encyclique] Laudato si´  j’ai trouvé une source d’inspiration chez mon frère Bartholomée, Patriarche orthodoxe qui a promu avec beaucoup de vigueur la sauvegarde de la création, dans ce cas-ci, je me suis particulièrement senti encouragé par le Grand Iman Ahmad Al-Tayyeb [cité par ailleurs plusieurs fois dans l’encyclique] que j’ai rencontré à Abou Dhabi pour rappeler que Dieu « a créé tous les êtres humains égaux en droits, en devoirs et en dignité, et les a appelés à coexister comme des frères entre eux ». Ce n’était pas un simple acte diplomatique, mais une réflexion faite dans le dialogue et fondée sur un engagement commun. »

Toute la fin de l’encyclique consiste d’ailleurs en une sorte de présentation du rôle des « religions au service de la fraternité dans le monde »

Cela n’a cependant rien de nouveau et les Français connaissent ce front, dont s’est par ailleurs toujours moqué Charlie Hebdo. Non, ce qui est bien plus pernicieux, c’est la démagogie anti-capitaliste du catholicisme romain, sa dénonciation des grandes entreprises capitalistes et de l’idéologie postmoderne qui va avec.

Le pape François paraphrase le discours de la Gauche historique, pour évidemment tout ramener à une question « spirituelle », la religion étant présentée comme le seul vrai refuge d’un monde anonyme, individualiste et cynique.

« ‘‘S’ouvrir au monde’’ est une expression qui, de nos jours, est adoptée par l’économie et les finances. Elle se rapporte exclusivement à l’ouverture aux intérêts étrangers ou à la liberté des pouvoirs économiques d’investir sans entraves ni complications dans tous les pays.

Les conflits locaux et le désintérêt pour le bien commun sont instrumentalisés par l’économie mondiale pour imposer un modèle culturel unique. Cette culture fédère le monde mais divise les personnes et les nations, car « la société toujours plus mondialisée nous rapproche, mais elle ne nous rend pas frères ».

Plus que jamais nous nous trouvons seuls dans ce monde de masse qui fait prévaloir les intérêts individuels et affaiblit la dimension communautaire de l’existence. Il y a plutôt des marchés où les personnes jouent des rôles de consommateurs ou de spectateurs.

L’avancée de cette tendance de globalisation favorise en principe l’identité des plus forts qui se protègent, mais tend à dissoudre les identités des régions plus fragiles et plus pauvres, en les rendant plus vulnérables et dépendantes. La politique est ainsi davantage fragilisée vis-à-vis des puissances économiques transnationales qui appliquent le ‘‘diviser pour régner’’.

C’est précisément pourquoi s’accentue aussi une perte du sens de l’histoire qui se désagrège davantage. On observe la pénétration culturelle d’une sorte de ‘‘déconstructionnisme’’, où la liberté humaine prétend tout construire à partir de zéro.

Elle ne laisse subsister que la nécessité de consommer sans limites et l’exacerbation de nombreuses formes d’individualisme dénuées de contenu. »

Il faut cependant bien que l’Église catholique romaine trouve des ressorts : il ne suffit pas de paraphraser, il faut des vecteurs. Ici, il y a des choses nouvelles et des choses traditionnelles. Pour ces dernières, on retrouve le combo classique désespoir/espérance : les migrants vont être de plus en plus nombreux et sont une heureuse allégorie de l’humanité en quête d’Espoir, il faut donc suivre l’appel à l’amour du nouveau testament, etc.

C’est le style « minimaliste », frugal, anticapitaliste romantique traditionnel, dont voici une illustration :

« Lorsque nous parlons de protection de la maison commune qu’est la planète, nous nous référons à ce minimum de conscience universelle et de sens de sollicitude mutuelle qui peuvent encore subsister chez les personnes.

En effet, si quelqu’un a de l’eau en quantité surabondante et malgré cela la préserve en pensant à l’humanité, c’est qu’il a atteint un haut niveau moral qui lui permet de se transcender lui-même ainsi que son groupe d’appartenance.

Cela est merveilleusement humain ! Cette même attitude est nécessaire pour reconnaître les droits de tout être humain, même né ailleurs. »

À lire l’encyclique on voit d’ailleurs très bien comment une large partie de la gauche et de l’ultra-gauche consiste en fait en des cathos de gauche, tellement le thème des migrants y est omniprésent (dans une tradition catholique de plus d’un siècle d’ailleurs concernant ce thème bien précis).

Parmi les thèmes nouveaux, en tout cas remarquables pour une encyclique, on a : une forte insistance sur la dénonciation des mafias, la critique appuyée des réseaux sociaux sur internet, une série de considérations approfondies sur le localisme et ses avantages, la réalisation d’une civilisation de l’amour par l’amour social et politique et la discussion publique, l’appel à mettre la personnalité individuelle au-dessus de tout.

Le pape reprend en fait toute la rhétorique du « personnalisme » du philosophe catholique français Emmanuel Mounier (1905-1950), pour qui la transcendance religieuse est ce qui préserve le noyau dur de la personnalité contre le totalitarisme du collectivisme.

Le pape François cite d’ailleurs à ce sujet le pape Jean-Paul II du même esprit et visant très clairement la lutte des classes, le Socialisme.

« Dans ce sens, je voudrais rappeler un texte mémorable : « S’il n’existe pas de vérité transcendante, par l’obéissance à laquelle l’homme acquiert sa pleine identité, dans ces conditions, il n’existe aucun principe sûr pour garantir des rapports justes entre les hommes. Leurs intérêts de classe, de groupe ou de nation les opposent inévitablement les uns aux autres.

Si la vérité transcendante n’est pas reconnue, la force du pouvoir triomphe, et chacun tend à utiliser jusqu’au bout les moyens dont il dispose pour faire prévaloir ses intérêts ou ses opinions, sans considération pour les droits des autres. […]

Il faut donc situer la racine du totalitarisme moderne dans la négation de la dignité transcendante de la personne humaine, image visible du Dieu invisible et, précisément pour cela, de par sa nature même, sujet de droits que personne ne peut violer, ni l’individu, ni le groupe, ni la classe, ni la nation, ni l’État.

La majorité d’un corps social ne peut pas non plus le faire, en se dressant contre la minorité » [St. Jean-Paul II, Lettre enc. Centesimus annus (1er mai 1991)]. »

Ce qui est frappant c’est que n’importe qui de la « gauche » postmoderne sera ici tout à fait d’accord avec les papes François et Jean-Paul II dans cette défense de « l’individu » unique en son genre contre l’horrible totalitarisme universaliste.

Cela en dit long également sur comment le pape François est un produit marketing jésuite, qui fait passer la même camelote religieuse mais en présentant de manière « inclusive ». Les deux derniers paragraphes de l’encyclique valent ici le détour.

Le pape François fait l’éloge de Martin Luther King, Desmond Tutu, Mahatma Mohandas Gandhi pour appuyer son long propos sur… Charles de Foucauld (1858-1916), un Français ancien militaire à l’esprit colonial basculant dans le fanatisme catholique et allant jouer les ermites au Sahara !

« Dans ce cadre de réflexion sur la fraternité universelle, je me suis particulièrement senti stimulé par saint François d’Assise, et également par d’autres frères qui ne sont pas catholiques : Martin Luther King, Desmond Tutu, Mahatma Mohandas Gandhi et beaucoup d’autres encore.

Mais je voudrais terminer en rappelant une autre personne à la foi profonde qui, grâce à son expérience intense de Dieu, a fait un cheminement de transformation jusqu’à se sentir le frère de tous les hommes et femmes. Il s’agit du bienheureux Charles de Foucauld.

Il a orienté le désir du don total de sa personne à Dieu vers l’identification avec les derniers, les abandonnés, au fond du désert africain. Il exprimait dans ce contexte son aspiration de sentir tout être humain comme un frère ou une sœur, et il demandait à un ami : « Priez Dieu pour que je sois vraiment le frère de toutes les âmes […] ».

Il voulait en définitive être « le frère universel ». Mais c’est seulement en s’identifiant avec les derniers qu’il est parvenu à devenir le frère de tous. Que Dieu inspire ce rêve à chacun d’entre nous. Amen ! »

On remarquera pour conclure que l’encyclique n’aborde la pandémie simplement qu’en passant et qu’elle n’est jamais abordée telle quelle comme une actualité. C’est intellectuellement paradoxal car l’encyclique précédente traitait d’écologie… Mais en même temps le pape ne peut pas assumer le réalisme et constater que la crise sanitaire vient d’un rapport désaxé à la nature : son but est d’amener à la spiritualité.

C’est là d’ailleurs un très bon argument. La crise sanitaire pose la question du rapport à la nature, notamment aux animaux, et le pape parle d’amour social et des migrants. C’est totalement déconnecté de ce que l’époque nous impose comme réflexion.

 

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Le grand orgue détruit dans l’incendie de la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Nantes

L’incendie survenu au cœur de la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Nantes ce samedi 17 juillet a ému le pays, ravivant la plaie encore béante de l’incendie de Notre-Dame-de-Paris il y a un peu plus d’un an. Cette fois, c’est surtout un orgue datant de 1620 qui a été ravagé par les flammes d’un incendie qui est très probablement d’origine criminelle.

Une personne se serait introduite dans la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Nantes ce samedi 17 juillet en début de matinée, pour y lancer méticuleusement trois feux et créer un incendie. C’est l’hypothèse privilégiée par le procureur de la République de Nantes, qui a ouvert une enquête pour incendie volontaire. Trois foyers ont été retrouvés : « un au niveau du grand orgue, un à droite et un autre à gauche de la nef ».

Ce sont des passants qui ont alerté les pompiers en constatant les flammes à 7h45, le feu n’ayant finalement été circonscrit qu’à 10 heures. Il y a des dégâts, mais c’est surtout le grand orgue qui a été ravagé ainsi que la plateforme sur lequel il se situe.

L’instrument était d’une grande valeur et sa perte est qualifiée d’inestimable par l’administrateur diocésain en charge de la cathédrale. Sa construction avait d’abord été l’œuvre du facteur d’orgue Jacques Girardet en 1620. Il sera ensuite augmenté à deux reprises, notamment par François-Henri Clicquot dans les années 1780.

Ce dernier était facteur d’orgues du roi Louis XVI, tandis que son grand-père l’avait été pour Louis XIV, son oncle puis son père pour Louis XV. François-Henri Clicquot porta l’orgue nantais à 49 jeux sur 6 claviers, ce qui en faisant une pièce très importante.

Quatre ans après la fin des travaux de restauration, ce fut la Révolution française et l’orgue faillit être détruit, de par son rôle clef dans les offices religieux. Le site d’une association dédiée à l’ancien titulaire de cet orgue Félix Moreau (de 1954 à 2012) explique ainsi :

« Le Comité Révolutionnaire avait en effet décidé sa destruction. Mais l’habileté de l’organiste Denis JOUBERT le sauva. Il sut convaincre les autorités que l’orgue pouvait encore être utile et ajouter à l’éclat des fêtes révolutionnaires qui se déroulaient à la Cathédrale transformée en « temple décadaire ».

Voici que sous le Directoire, encore en période révolutionnaire, une circulaire, datée du « 25 prairial, an 7 de la République » (13 juin 1799), émanant du Ministre de l’Intérieur, réclamait « la conservation et l’emploi des buffets d’orgues » (sic). « Accoutumé au son de cet instrument, le Peuple s’en voyait privé avec peine : c’était d’ailleurs un moyen d’intérêt ôté aux fêtes républicaines ».

JOUBERT avait vu juste ! »

En effet, la présence de cet instrument dans les églises et les cathédrales de France est un élément majeur du patrimoine national, en raison de la grande puissance culturelle qu’a eu le catholicisme dans le pays, et qu’il a toujours largement. Aujourd’hui encore, le son de l’orgue est connue de tous et évoque forcément beaucoup d’émotion chez les gens de culture, c’est-à-dire finalement chez presque tout le monde.

Voici l’extrait d’un concert datant de 2006, illustré par des images de la cathédrale et de l’instrument :

Le grand orgue de la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Nantes avait survécu à une explosion détruisant les vitraux et les chapelles de la nef collatérale sud au début du 19e siècle. Bien qu’affecté, il avait aussi survécu aux bombardements de septembre 1943 et juin 1944 touchant l’édifice. Enfin, lors du grand incendie de la cathédrale nantaise en janvier 1972, alors qu’il venait d’être restauré, l’instument avait été sauvé in extremis comme le raconte le site internet du lieu :

« Seuls le courage et l’abnégation des compagnons de la « Manufacture Beuchet-Debierre », rappelés de nuit, Joseph Beuchet fils à leur tête, et de l’abbé Félix Moreau, lui aussi présent, agissant en concertation avec les pompiers, permirent de sauver le grand orgue ».

En 2020, l’instrument n’a cette fois pas survécu, pas plus que la tribune accessible par 66 marches sur laquelle il fallait monter pour y accéder. Penser que quelqu’un puisse être capable d’un tel crime contre l’Histoire et le patrimoine historique fait froid dans le dos, car il faut être un véritable monstre pour en arriver là. Malheureusement, on sait très bien que de notre société produit de tels monstres et qu’un tel crime n’a rien d’inimaginable.

Face à une telle décadence, face à une telle agression, c’est à la Gauche de porter hautement et fièrement le flambeau de la civilisation, en faisant vivre le patrimoine, en l’entretenant, en le défendant hardiment. La bourgeoisie pour sa part est de plus en plus incapable de le faire, après l’incendie nantais de 1972, après l’incendie de Notre-Dame-de-Paris en 2019, et alors que la grande majorité des cathédrales de France ne sont pas en bon état. Selon un rapport parlementaire récent, sur les 87 cathédrales d’État, « seules 22 peuvent être considérées comme étant en bon état, 47 dans un état moyen, et 15 en mauvais état ».

> Lire également : Cathédrale Notre-Dame de Paris : la France dans la stupeur

Une telle situation est inacceptable, indéfendable. Rien que cela justifie le fait qu’il faille de grands changements sociaux, un grand bouleversement politique et culturel dans ce pays à la dérive.

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La crise sanitaire et le droit des croyants à croire en le monde

En mettant de côté la religion lors de la première vague de déconfinement, l’État français provoque une crise terrible. C’est surtout vrai pour l’Église catholique, pour qui le dimanche a une dimension mystique essentielle, que l’État ne comprend d’ailleurs même plus.

Le grand compromis entre l’État et les religions – la laïcité – est très puissamment ébranlé par le refus d’intégrer les lieux de culte dans le déconfinement. Ce qui compte, c’est évidemment l’économie capitaliste. Peu importe les croyances.

Il ne s’agit nullement ici de faire de l’anti-cléricalisme primaire, comme le font les anarchistes, l’ultra-gauche en général. La religion ne disparaîtra pas : elle s’éteindra, quand les croyants comprendront que ce en quoi ils croient n’est en réalité qu’une puissante réflexion sur la réalité qui a été déviée vers le ciel.

Il y a ainsi beaucoup de dignité dans les croyances religieuses et il faut bien dire dans les croyances, pas dans les rites, les croix en pendentifs, les hidjabs ou les kippas. Lorsque les religions parlent de la réalité, elles parlent de manière déformée. Il y a de l’idée, mais accepter pour autant tous les fétiches réactionnaires… ce n’est pas possible.

Tout cela demande évidemment beaucoup de culture et le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, est dépassé, parce que la bourgeoisie décadente, passé dans l’ultra-modernité, ne comprend tout simplement plus rien à part ce qui relève, au sens strict, de l’accumulation de richesses.

Invité du Grand Jury sur LCI dimanche dernier, son propos a depuis fait scandale :

« Je pense que la prière elle se fait dans un rapport à celui que l’on accompagne, célèbre, chacun choisira le mot en fonction de sa religion et soi-même, et n’a pas forcément besoin de lieu de rassemblement où on ferait courir un risque à l’ensemble de la communauté religieuse. »

Christophe Castaner s’imagine ici qu’une personne religieuse peut ainsi être indifféremment statique ou itinérante, que la notion de lieu consacré relève du moyen-âge, que le principe communautaire – une clef du succès religieux – n’a aucun sens pour les gens.

Il prouve ici une méconnaissance de la question assez impressionnante (et cela d’autant plus qu’en tant que ministre de l’Intérieur, il est aussi ministre des cultes). Surtout que la France a comme principale religion le catholicisme romain. Or, dans cette religion, Dieu est vraiment présent le dimanche dans la cérémonie religieuse, ce n’est pas symbolique comme chez les protestants. Naturellement Dieu n’est pas du tout présent, puisqu’il n’existe pas, mais pour les croyants il y a une alliance entre Dieu et le monde par ce qu’on appelle l’eucharistie. Sans eucharistie, le monde est entièrement perdu.

Citons ici Matthieu, qui raconte ce passage célèbre :

« Pendant qu’ils mangeaient, Jésus prit du pain; et, après avoir rendu grâces, il le rompit, et le donna aux disciples, en disant: Prenez, mangez, ceci est mon corps. 27Il prit ensuite une coupe; et, après avoir rendu grâces, il la leur donna, en disant: Buvez-en tous; 28car ceci est mon sang, le sang de l’alliance, qui est répandu pour plusieurs, pour la rémission des péchés. 29Je vous le dis, je ne boirai plus désormais de ce fruit de la vigne, jusqu’au jour où j’en boirai du nouveau avec vous dans le royaume de mon Père. »

Les protestants répètent cet épisode symboliquement, la prohibition de l’alcool chez eux, très présente culturellement historiquement, s’appuie sur le dernier propos de la citation. Pour les catholiques par contre, quel que soit leur courant de rattachement, tout cela reprend réellement forme dans l’Église chaque dimanche.

C’est par l’eucharistie que dans le monde, les Hommes sont frères. S’il n’y a plus d’eucharistie, tout est perdu.

> Lire également : Un exemple de croyance religieuse en le monde

Bien entendu, on n’a pas à y croire. Mais comment ne pas voir l’immense dignité qu’il y a dans une telle vision des choses ? Des figures sociales du catholicisme ont en ce sens publié une tribune au titre ironique, « Rouvrir les églises, pour quoi faire ?», sur le site du journal La Croix, qui n’est pas accessible gratuitement, par manque de charité chrétienne. On y lit notamment :

« Se retrouver en communauté est constitutif de la foi ? Mais pour rendre quel culte, à quel Dieu ? Dans l’eucharistie, les chrétiens font mémoire de la mort et de la résurrection du Christ. Et du don de sa vie. Dans un même élan, ils s’engagent à donner la priorité absolue au service du frère. Il s’agit de conjuguer « intériorité et engagement »,« lutte et contemplation »… »

Cela est tout à fait juste : dans une crise sanitaire, qui apporte la mort, il faut croire en la vie. Il y a beaucoup de dignité dans tout cela et le balayer d’un revers de la main, comme le fait le gouvernement, est la négation de tout un sentiment populaire, humain par excellence.

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Benoît XVI sur l’Église catholique et la dégénérescence du monde moderne

Le pape « retraité » Benoît XVI a fait une longue lettre publiée au sein de l’Église catholique. Il y explique que celle-ci connaît une attaque venant de ceux qui veulent la moderniser, l’adapter à des mœurs qu’ils considère somme toute comme dégénérées. C’est toute la logique mystique d’une « révolte contre le monde moderne ».

La Gauche historique a un grand point commun avec le catholicisme, et cela la distingue de la gauche post-moderne, post-industrielle. Ce point commun, c’est l’affirmation d’une morale et de valeurs bien déterminées, d’une éthique du quotidien. Ni la Gauche historique, ni le catholicisme ne professent le libéralisme. Ni l’une, ni l’autre n’acceptent le discours libéral-libertaire de déconstruction des normes et des valeurs.

Naturellement, la Gauche historique et le catholicisme ont des visions du monde bien différentes. Mais les deux ont des valeurs et en cela, ils sont opposés à une « modernité » capitaliste faisant de l’individu, de ses caprices, de ses « choix », l’alpha et l’oméga du sens de la vie. C’est pour cette raison que l’Église catholique, comme elle professe un mysticisme, est catégoriquement contre le mariage des prêtres. On ne peut être marié qu’à l’Église comme intermédiaire avec le divin.

Cela semble incompréhensible pour une écrasante majorité de Français, catholiques ou pas. Car les Français sont libéraux et ne comprennent pas que tout ne soit pas relatif. Ils ont accepté les règles culturelles du capitalisme comme quoi tout se vaut. Or, les religions ne sont pas relatives, elles viennent de Dieu, si on accepte leur discours.

Évidemment, il n’y a pas de Dieu, donc ce qui est dit est relatif, car le produit de l’Histoire. Le christianisme a joué un rôle progressiste, le catholicisme d’abord, le protestantisme ensuite. Mais c’est du passé et aujourd’hui on n’en a plus besoin. Beaucoup de gens l’ont compris, même de ceux qui croient en les religions ! Et cette incohérence est un problème, car les religions, de leur côté, maintiennent forcément leur discours.

Pour le pape Benoît XVI, donc, la religion n’est du passé, mais un présent ininterrompu, celui de la révélation, et dans un long texte, il défend le caractère sacré des institutions religieuses. Il formule cela avec lyrisme, refusant toute modification, toute « innovation » comme le disent les musulmans :

« L’idée d’une meilleure Église, créée par nous-mêmes, est en fait une proposition du Diable, par laquelle il veut nous éloigner du Dieu vivant, à travers une logique trompeuse par laquelle nous sommes trop facilement dupés. »

Tout cela ne peut évidemment que perturber les catholiques français. « Abus sexuels, un texte troublant de Benoît XVI », dit d’ailleurs le titre d’un article à ce sujet dans La Croix, le quotidien catholique. Le sous-titre de l’article tente de désamorcer l’affaire :

« Analyse Une revue allemande a publié un texte de Benoît XVI dans lequel le pape émérite semble prendre le contre-pied du pape François sur la question des abus sexuels. »

La Croix ment ici et cherche à masquer le problème en tordant les faits. Ce n’est en effet pas une revue allemande, mais la revue du clergé catholique de Bavière et du Palatinat rhénan. Il y a donc une dimension tout à fait légale à ce texte, publié dans un cadre relevant directement de l’Église catholique romaine.

À cela s’ajoute que le texte est d’un pape « retraité », une sommité théologique. Et il a été bien précisé lors de la parution de l’article qu’il y avait l’accord du pape François pour sa sortie. Les derniers mots du texte sont d’ailleurs :

« À la fin de mes réflexions, j’aimerais remercier le pape François pour tout ce qu’il fait afin de nous montrer, de manière toujours renouvelée, la lumière de Dieu, qui encore aujourd’hui n’a pas disparu. Merci, Saint Père ! »

Il est vrai que le texte fait mal à tous ceux qui tentent de réinterpréter le catholicisme de manière libérale ; le quotidien italien le Corriere della Sera parle d’ailleurs d’un « véritable coup de poing dans l’estomac ». La Croix est même obligé de conclure l’article par un autre pieux mensonge :

« Certains vont toutefois jusqu’à mettre en doute la paternité d’un texte dans lequel ils ne reconnaissent pas la plume habituelle de l’ancien pape qui, à 92 ans la semaine prochaine, leur apparaît plus que jamais sous la coupe de son entourage. »

De tels propos sont risibles pour qui sait que Benoît XVI est l’un des plus grands théologiens catholiques de la seconde moitié du 20e siècle et qu’il a toujours défendu les mêmes positions.

Que dit-il, d’ailleurs, dans le texte, ou plutôt que rappelle-t-il ? Que les affaires de pédophilie qui ont récemment fait scandale dans l’Église romaine, où l’on s’aperçoit toujours plus que c’est une forme de violence s’exprimant de manière récurrente dans le clergé, auraient des sources extérieures à l’Église. Il ne va pas dire le contraire, puisque pour lui tous les problèmes viennent du monde matériel et toutes les solutions du monde spirituel. L’Église étant une forme spirituelle, elle est donc intouchable.

Tous les problèmes sont attribués par Benoît XVI à une dégénérescence, le monde moderne en étant son expression la plus complète. C’est pour cela qu’il faut rétablir la Gauche historique et dénoncer la décadence. Il n’y a que trois interprétations : le « monde moderne » est bien car libéral, le « monde moderne » est mauvais car dégénéré, ou bien la société capitaliste est décadente. Le libéralisme et le conservatisme sont d’ailleurs une image inversée l’un de l’autre ; seule la vision socialiste dépasse réellement le capitalisme.

Et, donc, Benoît XVI attaque la dégénérescence. D’où ses dénonciations de la « révolution sexuelle » apparue dans les années 1960, l’hypersexualisation mercantile qui s’est développée, jusqu’à la pornographie, et qui aurait contaminé des pans entiers de l’Église, dans la mesure où il y aurait des propositions de « s’adapter » au monde moderne.

Un exemple notamment mentionnée est le manifeste de Cologne de 1989, signé par des centaines de théologiens allemands, autrichiens, suisses et néerlandais. Un autre est la formation, qui n’est nullement un secret, de clubs homosexuels à l’intérieur de l’Église, menant une très importante guerre d’influence. Le pape François en a également parlé.

C’est que le conservatisme ne peut pas tenir face au libéralisme, effectivement. La religion catholique étant un mysticisme avec un clergé censé être « pur », il y a forcément une contamination par la décadence. Et effectivement, s’il y a davantage de pédophilie dans une société capitaliste en pleine décadence, alors cela se reflète d’autant plus dans une structure comme le clergé catholique avec ses mœurs anti-naturelles.

En fait, Benoît XVI a raison, sauf qu’il croit voir une dégénérescence alors que c’est une décadence, et il croit voir en l’Église quelque chose de pur qui pourrait tenir le choc, alors qu’en réalité c’est une relique du passé, condamnée à être balayée. En ce sens, l’anticléricalisme primaire résumant la pédophilie à l’Église est fondamentalement erroné. Il faut dénoncer la pédophilie en général, et bien voir qu’elle s’étend dans l’Église en particulier, de par ses mœurs mystiques par définition délirantes.

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L’impossible mariage des prêtres catholiques

Les catholiques français sont très réceptifs à la possibilité pour les prêtres de se marier. Or, c’est une impossibilité théologique fondamentale, comme le pape vient de le rappeler. Ce qui se révèle ici, c’est un souhait permanent de chercher à moderniser la religion catholique afin de la maintenir, sous une forme ou sous une autre : elle n’est ainsi qu’une idéologie.

Lourdes

L’Église catholique romaine, afin de ne pas perdre ses positions en France alors que le protestantisme s’élançait (avec Hus, Calvin, Luther), a fait de ce pays sa fille aînée. Plus simplement, il a été dit à François Ier qu’il jouerait un rôle central dans la nomination de la direction catholique, en échange de quoi il ne touchait pas aux privilèges matériels du catholicisme, ni à ses importantes propriétés. Cet accord a permis l’avènement sans encombre de la monarchie absolue.

Cela a amené le catholicisme français à connaître un chemin qui lui est propre. Déjà qu’au-delà de la fiction universelle du Vatican, le catholicisme est relativement différent dans chaque pays, le catholicisme français est qui plus est très autonome. Ses positions très libérales-sociales se sont d’autant plus renforcées qu’il fallait faire face non seulement à la « modernité », mais à une offensive anticléricale, anti-religieuse. Cela amène les prêtres français à tenir un discours démagogique extrêmement ouvert, très accueillant, très universaliste, etc.

Cela fait que les catholiques français ne savent même plus que si l’on n’est pas catholique, alors une fois mort on va en enfer ; ils ne connaissent rien à la théologie, aux grands principes de leur propre religion. D’où inversement les réactions ultras de minorités catholiques, qui attribuent cette situation en réalité très française au concile dit Vatican II. Les Français sont tout simplement pétris de libéralisme et par conséquent, quand ils sont catholiques, ils ont une lecture libérale de leur religion, voilà tout.

Le même phénomène existe d’ailleurs chez les juifs, les protestants et les musulmans. La grande majorité des gens se reconnaissant dans ces religions n’en connaissent pratiquement rien dans le domaine théologique, à part donc pareillement des petites minorités ultras. La religion est une forme relevant de l’antiquité, du moyen-âge ; elle ne peut pas exister ni dans une société libérale, ni dans une société où les gens sont raisonnables, autonomes sur le plan de la pensée (il y a bien lieu de distinguer ces deux sociétés !).

Si elle se maintient, c’est qu’elle est idéologie, bien plus qu’un questionnement métaphysique, chose qu’on ne retrouve que chez les intellectuels, avec parfois une vraie interrogation de type cosmologiste ou bien sur la nature de l’humanité. Les catholiques français expriment, au moyen de leur religion, un conservatisme bienveillant, dont les scouts sont finalement les meilleurs représentants. Seulement voilà on ne fait pas une religion qu’avec des scouts. Il faut un clergé.

Et étant libéraux, les catholiques français n’ont rien contre le mariage des prêtres. D’abord, parce que chacun fait ce qu’il veut, ensuite, parce que cela permettrait d’en avoir plus, d’être plus proches également du mode de vie moderne. Seulement voilà, le catholicisme est un mysticisme qui, dans la lignée d’un (saint) Augustin, d’un (saint) Thomas, (pseudo) Denys l’Aréopagite, n’en a rien à faire du monde moderne, ni même du monde matériel. Il faut aller dans le sens de la pureté divine, pas de la matière. Le mariage des prêtres est donc impossible.

Le pape était il y a peu au Panama, à l’occasion de la journée mondiale de la Jeunesse (catholique romaine), et dans l’avion qui l’a ramené à Rome, il a tenu une conférence de presse, comme il en a l’habitude. On lui a parlé du thème du mariage des prêtres, et ce pape « moderne » a été très clair :

« Personnellement je pense que le célibat est un don pour l’Église »

« Je ne le ferai pas [=autoriser le mariage des prêtres], que cela reste clair. Je peux sembler peut-être fermé là-dessus mais je ne me sens pas de me présenter devant Dieu avec cette décision. »

C’est tout à fait logique, puisque cela correspond à la base théologique du catholicisme. Le pape François a même cité (saint) Paul VI:

« Je préfère donner ma vie que de changer la loi du célibat. »

Après, il a raconté que de son point de vue on pouvait former des quarts de prêtres pour célébrer la messe dans des « endroits très éloignés », mentionnant les îles du Pacifique ou encore l’Amazonie. Mais même cela sera théologiquement très difficile à mettre en place, de par la nature « mystique » du prêtre.

Car le prêtre doit être pur, il est en liaison direct avec le divin. Il n’est pas sur le même plan que les gens qui ne font pas partie du clergé ! D’ailleurs, dans l’Église catholique orthodoxe, le clergé fait encore sa cérémonie mystique en étant masqué des présents dans l’église, car ceux-ci ne sont pas dignes d’y assister. On ne plaisante pas avec l’eucharistie chez les catholiques : le vin est vraiment considéré comme le sang de Jésus, chaque dimanche, et le pain est vraiment censé être son corps.

On boit et on mange le Christ, le dimanche à la messe. C’est évidemment difficile à avaler au 21e siècle, aussi les catholiques libéraux aimeraient bien quelques améliorations, afin de conserver leur joujou conservateur. Mais ils rentrent là en conflit avec la dimension théologique de la religion, qui en fait d’ailleurs son intérêt historique, sur le plan de l’humanisme. Un Dieu qui se fait homme, c’est le début d’une révolution intellectuelle et conceptuelle, un basculement en faveur de l’humanité. Cela mène finalement droit à l’athéisme, pour qui a une lecture humaniste et naturaliste de cette question.

Le catholicisme romain n’évitera donc pas une crise en France, de par les exigences de son public libéral ayant abandonné toute dimension théologique, et le maintien des fondamentaux…

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Johnny Hallyday : l’homélie de Monseigneur de Sinety

Voici le texte de l’homélie faite lors de « l’hommage populaire » à Johnny Hallyday, par le vicaire général de l’archidiocèse de Paris, le père Benoist de Sinety.

«Avec une seule poignée de terre, Il a créé le monde

Et quand Il eut créé la Terre, tout en faisant sa ronde

Le Seigneur jugeant en somme qu’il manquait le minimum

Il créa la femme et l’amour qu’elle a donné aux hommes.»

En ce jour où une foule immense communie à la même tristesse, autour de vous Laeticia, Jade et Joy, autour de vous David et Laura, autour de vous leurs mamans, voici que ce refrain chanté par un jeune homme au début des années 60, peut retentir de nouveau.

Ces paroles résonnent comme en écho à celles que nous venons d’entendre, paroles initiales du Livre de la Vie: «La vie s’est manifestée!». L’Apôtre Jean pousse ce cri de joie en écrivant aux premières communautés chrétiennes: oui la vie s’est manifestée et elle se manifeste encore, jour après jour, comme un don inestimable qui nous est confié en partage, à nous, hommes de toutes conditions, de tous peuples et de toutes cultures.

En entendant la nouvelle de sa mort, beaucoup ont été saisis de chagrin, d’angoisse, de détresse: ainsi celui qui avait accompagné tant de moments heureux ou douloureux de nos existences ne chanterait plus, sa voix s’est éteinte…

Même si chacun au plus intime de lui-même se reconnaît finalement mortel, on en vient à rêver que ceux que nous aimons et que nous admirons, ne connaissent jamais de fin. Et lorsque les ténèbres du deuil paraissent, un froid glacial saisit nos cœurs et nos esprits.

Il y a deux mille ans, un homme naquit. Il se manifesta à ceux qui attendaient du Ciel un Envoyé, comme le Messie, le Christ. Ceux qui le reconnurent comme tel, le suivirent, pensant qu’Il leur donnerait de voir un royaume humain inédit, que rien ni personne ne pourrait détruire. Ils le suivirent sur les chemins de Judée et de Galilée, de Samarie et jusqu’au Temple de Jérusalem.

En l’écoutant parler, en le regardant guérir l’aveugle de ses obscurités, purifier le lépreux des rejets qu’il inspire, relever la femme que tous veulent lapider, accueillir l’étranger que nul ne veut recevoir, relever ceux qui étaient morts, ceux qui le suivent apprennent à comprendre qu’en ce Jésus se révèle le visage de Dieu.

Et pourtant, un jour, celui qu’ils pensaient être roi sur terre, fut suspendu à la croix d’infamie. Les ténèbres semblaient devoir tout recouvrir: qu’espérer alors et qui croire? A cette question, le matin de Pâques apporte une réponse éclatante.

Celui qui était mort est vivant, le Christ est ressuscité. Désormais, tout homme peut entendre de ses oreilles une Espérance nouvelle: l’Amour est incorruptible. Ce que nos rêves osaient à peine envisager est bien la réalité: la mort n’est pas le dernier mot de nos histoires. S’il n’est pas roi sur la terre, le Christ est bien le Roi de cette terre nouvelle vers laquelle nous marchons, cahin-caha, où la mort disparaît!

«Recherchez avec ardeur les dons les plus grands», je vais vous en indiquer le chemin par excellence écrit Paul aux chrétiens de Corinthe. A ceux qui vivent dans cette cité antique où les plaisirs et les richesses coulent à flots, quel autre chemin vers le bonheur donner que de profiter de tout cela sans vergogne?

Que sont, pourtant, nos vies sans l’Amour? Non pas l’amour éphémère d’une passion aussi intense que fugace, non pas l’amour égoïste et narcissique, mais l’Amour véritable qui nous fait reconnaître dans l’autre un frère à aimer, l’amour exigeant qui nous invite à aimer comme Jésus lui-même a aimé.

Lequel d’entre nous ne mesure l’infini vide que procurent, au bout du compte, les objets de ce monde pour lesquels nous déployons pourtant tant d’efforts et d’énergie?

Qui n’a jamais ressenti, enfant, la déception devant le jouet tant espéré qui, sitôt obtenu, devient moins séduisant, moins excitant? Rien ne peut combler le cœur de l’homme sinon l’Amour. C’est cet Amour qui nous rend capables de sortir de nous-mêmes, de croire que nous valons plus que nous n’osons l’envisager, de comprendre que nous sommes appelés à l’immortalité.

À la différence de beaucoup d’entre nous, Jean-Philippe Smet n’a peut-être pas reçu dans les premiers instants de son existence cet Amour qui est dû pourtant à toute vie naissante. Ces regards absents, sans doute, les a-t-il guettés tout au long de sa vie et s’est-il profondément réjoui de les trouver auprès de ceux qui l’ont aimé du plus proche au plus lointain.

Mais il avait, un jour de son enfance, entendu retentir au plus secret de son être ces mots prononcés de la bouche même de Dieu: au jour de son baptême ces paroles ont été déposées en lui «Tu es mon enfant bien-aimé, en toi je mets toute ma joie».

«On peut me faire ce qu’on voudra, je resterai chrétien. Je suis sûr que Jésus, lui, ne m’en veut pas» dira-t-il plus tard alors que des journalistes l’interrogent sur sa foi.

À sa manière, tout au long de sa vie, il a cherché l’Amour et il a compris que le moyen le plus certain d’y parvenir était d’aimer, d’aimer sans compter, d’aimer toujours.

C’est pour cela que nous sommes là, parce que nous avons un jour compris, à travers ses chansons, sa générosité et sa disponibilité, que nous étions aimés de lui. Si la voix du chanteur et ses mélodies touchent en nous l’intime c’est qu’elles nous révèlent son désir et que ce désir nous bouleverse parfois.

Toute vie est mortelle mais ce qui ne meurt jamais c’est l’Amour: l’amour dont nous avons été aimés et l’amour dont nous aimons: ces liens tissent en chacun de nous un être spirituel immortel, éternel. Ces liens nous mettent dans une communion de plus en plus intime avec Dieu même ; ils nous divinisent.

La vie de Johnny Hallyday, parce qu’elle a manifesté l’Amour, y compris dans ses pauvretés et dans ses manques, nous invite à lever les yeux vers Celui qui en est la source et l’accomplissement.

Celui dont il nous dit, en reprenant l’image biblique, qu’avec «une poignée de terre il a créé le monde» afin d’y faire vivre l’Amour.

Oui, à chacun de vous cette promesse est renouvelée aujourd’hui: votre vie est précieuse, tellement précieuse. Ensemble, nous sommes invités à cheminer en ce monde, frères et sœurs, en laissant l’amour accomplir en nous le don de nous-mêmes.

Chacun d’entre vous est infiniment aimé de Celui qui ne cesse de nous créer et qui nous appelle le jour venu à le contempler face à face. Quels que soient votre existence, ses doutes, ses hontes, ses renoncements, ses blessures, cet Amour dont Dieu vous aime ne passera jamais. Il est le seul bien, la seule promesse que rien ni personne ne pourra jamais nous enlever, nous arracher.

«Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés» dit Jésus à ceux qui cherchent le chemin de la Vie.

Comme Jean-Philippe, devenu Johnny Hallyday, nous sommes tous appelés à laisser percer en nous cette lumière divine qui fait de nous des icônes de l’Amour de Dieu plutôt que des idoles dont la vie s’épuise.

Entre dans la Lumière Johnny Hallyday, une Lumière, un Feu qui ne s’éteint jamais. Te voilà accueilli par un Père qui ouvre les bras à l’enfant tant aimé, toi qui as tant cherché et tant donné aussi.

Avec toi, nous l’entendons te dire pour toujours ces paroles qui viennent en écho jusqu’à nous car elles nous sont aussi adressées, sans aucun doute possible: «Que je t’aime, que je t’aime…» Amen.