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Légalisation du MMA : non !

Le côté positif de le la présidence d’Emmanuel Macron est que le libéralisme est de plus en plus franc et assumé. Le libéralisme serait devenu le véritable progrès et compte bien ajuster la société à ses besoins : après la question de la libéralisation du cannabis, voici celle du MMA (Mixed Martial Arts).

mma ufcLe MMA est un sport de combat qui se veut complet puisqu’il comporte des frappes, des projections au sol, des étranglements, etc. En clair : très peu de règles, et beaucoup de coups sont permis. Notamment frapper un adversaire au sol. A cela s’ajoute le peu de protections…

Aujourd’hui les compétitions sont interdites en France, mais de plus en plus de clubs proposent des entraînements. Et le nombre de pratiquant et de combattants augment de même. Les combattants français se retrouvent dans cette position étrange où ils peuvent s’entraîner dans leurs clubs, en France, mais sont obligés d’aller à l’étranger pour participer à des rencontres amateurs ou professionnelles.

La pression est donc de plus en plus forte pour légaliser cette pratique. Surtout que certaines français se sont faits ou se font un nom dans la discipline. Comme Cyrille Diabaté, ancien champion de boxe thaï et de kick boxing, qui participera assez tardivement (à plus de 35 ans) à des combats de l’UFC (Ultimate Fighting Championship, plus importe ligue mondiale de MMA). Ou encore le lensois Tom Duquesnoy qui a commencé à combattre à l’UFC en 2017 à tout juste 23 ans.

Mais les choses pourraient bien changer si l’on en croit les acteurs français de la discipline : un rapport serait prévu pour septembre ou octobre afin de structurer, et donc légaliser petit à petit le MMA en France. Surtout que l’actuelle ministre des sports, Laura Flessel, défend la pratique…

« Il y a plus en plus de pratiquants, il faut encadrer pour le bien de tous »

De même que le cannabis devrait être légalisé pour le bien des consommateurs, le MMA devrait l’être aussi afin de garantir des entraîneurs compétents et de garantir l’intégrité physique des combattants lors de rencontres.

MMA combattant au solAu lieu de dire « on n’arrête cette fuite en avant » et de recadrer toutes les disciplines, quitte à en interdire, nous devrions accepter de voir le principe même de civilisation reculer petit à petit. Le libéralisme voudrait tout faire accepter : s’il y a une demande, il faut une offre en conséquence. Pourquoi se priver d’un nouveau marché ?

On nous parlera de responsabilité individuelle, d’information, de choix, etc. Mais de tels arguments n’ont rien de social-démocrates, ils n’ont rien à voir avec le mouvement ouvrier. Il y a des principes et une morale à appliquer dans tous les aspects de la vie, et le sport doit en faire partie intégrante.

Une discipline pas si violente que ça ?

mma ufcUn des principaux arguments anti-MMA est sa violence : combat dans une cage, coups au sol autorisés, peu de protections… En réponse, les pro-MMA répondent que les diversité des techniques autorisées et la plus courte durée des combats font que le MMA est moins violent et risqué qu’un combat professionnel de boxe anglaise. Partant de là, si la boxe anglaise est autorisée pourquoi pas le MMA ?

Parce qu’en 2018, une discipline qui autorise des frappes au sol et des étranglements est une discipline barbare, point. Parce que la recherche du sensationnel, du KO, de la vitesse et de l’esprit de guerrier qui ont pris place dans d’autres disciplines ne doit pas être une prétexte pour continuer à s’enfoncer toujours plus dans le glauque !

N’importe quelle personne un minimum progressiste et qui n’a pas été broyée par la culture dominante ne peut qu’être horrifiée à l’idée d’envoyer des personnes s’affronter de la sorte dans une cage fermée. Nous ne pouvons accepter une sorte de combat de gladiateurs des temps modernes.

mma, octogone

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Société

Le “football moderne” ne sanctionne pas Sergio Ramos pour son agression sur Mohamed Salah

Le football est un sport extrêmement populaire. Cela signifie qu’il est considéré de manière très sérieuse par une grande partie de la population, particulièrement chez les hommes d’origine ouvrière.

C’est ainsi que la blessure de Mohamed Salah, attaquant égyptien du Liverpool FC, provoquée par le capitaine du Real de Madrid, Sergio Ramos en finale de la Ligue des Champions de l’UEFA 2018, a suscité beaucoup d’indignation.

Lors d’un contact physique pendant une phase de jeu, le défenseur espagnol a en effet volontairement accroché le bras du numéro 11 de Liverpool pour le faire tomber de manière violente. Une pétition qui recueille à l’heure actuelle plus de 500 000 signatures réclame que l’UEFA s’appuie sur l’enregistrement vidéo pour le sanctionner a posteri.

Au vue des images, l’intention de faire mal est évidente.

Cela a d’ailleurs été souligné par un “tweet” de la fédération européenne de judo qui explique que cette technique est tellement dangereuse qu’elle est interdite dans leur sport !

Cela n’a pas manqué, Mohamed Salah a dû quitter le terrain quelques minutes après pour se rendre en urgence à l’hôpital. Il manquera très probablement le premier match de la Coupe du Monde avec la sélection égyptienne, dont il est la figure de proue.

Quand bien même le football n’est qu’un jeu, il représente quelque chose d’immense sur le plan culturel. Doit-il alors véhiculer des valeurs positives et morales, à travers le respect du jeu et de l’engagement ? Ou bien n’est-il, finalement, qu’un divertissement reflétant la société capitaliste, c’est-à-dire la concurrence exacerbée, la promotion du cynisme le plus vil pour arriver à ses fins ?

Manifestement, le football à notre époque correspond bien plus à la seconde description qu’à la première. C’est ce qui est désigné de manière critique comme étant le “football moderne”, ou le “football business”.

La faute de Sergio Ramos contre Mohamed Salah donne lieu à une confrontation typique entre les partisans du football tel qu’il existe actuellement, et ceux qui critiquent le “football moderne”.

Christophe Dugarry a défendu de manière on ne peut plus claire ce “football moderne” dans l’une des émissions de football les plus suivie en France :

“C’est un génie absolu, Ramos ! C’est le défenseur qui te fait gagner des titres, qui te fait gagner les compétitions. Ok, il est malin, il est vicieux. Mais tu ne dois avoir aucune retenue sur l’engagement ! »

Dans un autre genre se voulant plus intellectuel, mais tout aussi cynique et bourgeois, il y a eu un article du journal “Le Monde” qui affirme que Sergio Ramos est indispensable au football, expliquant que :

“il réalise une redoutable synthèse de vice et de brutalité”.

Au contraire, il y a eu toute une vague de colère face à ce geste, réclamant des sanctions. Cela d’autant plus que Sergio Ramos est connu pour avoir souvent une telle attitude immorale.

Rien que durant ce match, il a simulé une faute de manière odieuse face à Sadio Mané (ce qui a donné lieu à un carton jaune à son adversaire innocent) et a donné discrètement un coup de coude au gardien de but adverse Loris Karius (ce qui a probablement contribué à le déstabiliser puisqu’il commet juste après une bourde monumentale lui coûtant un but).

Le sentiment pour beaucoup d’amateurs de football est que la victoire du Real de Madrid est entachée par ces faits ayant empêché le Liverpool FC de s’exprimer réellement sur le plan sportif.

Cela n’est pas nécessairement vrai, ou du moins cela ne l’est qu’en partie puisqu’il faut considérer aussi que l’équipe anglaise ne peut pas ignorer la réalité du football à notre époque. Elle a donc failli par manque d’expérience, ce qui d’ailleurs se reflètent dans son jeu puisque Liverpool a littéralement foncé tête baissé dès le début du match, se jetant corps et âme dans la partie, “au talent”, en relativisant des considérations tactiques plus élaborées.

Toujours est-il que l’attitude de Sergio Ramos est injustifiable et qu’il devrait être sanctionné pour cela. La pétition réclamant une sanction par l’UEFA représente une exigence morale indéniable, une volonté de justice populaire positive.

Ajoutons également que la popularité de Mohamed Salah a largement contribué à déchaîner les passions. Ce joueurs s’est révélé durant cette saison, remportant les titres de meilleur buteur et de meilleur joueur de Premier League, le championnat anglais. Il est cependant une figure nationale en Égypte et dans le monde arabe depuis déjà quelques années. Il était déjà un joueur réputé lorsqu’il évoluait au FC Bâle puis à l’AS Roma, en passant par Chelsea FC et l’AC Fiorentina.

Le chef de l’Etat égyptien Abdel Fattah al-Sissi l’a qualifié de “symbole de l’Égypte ». Le mot clef “Ramos le chien” ( راموس_الكلب# ) – une insulte absurde pour les chiens – s’est répandue de manière virale sur Twitter, avec de multiples réactions sur différents médias.

Mohamed Salah représente en effet une certaine fierté dans le monde arabe. C’est un symbole de réussite, mais aussi une figure morale (largement liée à l’Islam) différente des autres stars du “football moderne”. L’Égyptien ne fait jamais parler de lui dans la presse, son attitude est toujours pudique et respectueuse, voire affectueuse notamment avec les jeunes. Il finance de nombreux projets dans son village natale, n’expose pas outrageusement ses richesses, signe toujours avec plaisir les autographes, accepte les selfies, ne célèbre pas ses buts contre ses anciennes équipes, etc.

Il est également très apprécié par la base des supporters de Liverpool, dont la ferveur populaire, voire ouvertement ouvrière, est connu mondialement. “The Egyptian King” dispose déjà de plusieurs chants, dont un qui dit, de manière affectueuse et subtile au vue de la situation politique anglaise :

Mohamed Sa-la-la-la-lah, Mohamed Sa-la-la-la-lah,
s’il est assez bon pour toi, il est assez bon pour moi,
s’il en marque quelques autres, alors je serai musulman aussi.

s’il est assez bon pour toi, il est assez bon pour moi,
Assis dans une mosquée, voilà où je veux être !

Voici la traduction du texte de la pétition appelant à sanctionner Sergio Ramos :

L’UEFA et la FIFA devraient punir Sergio Ramos pour avoir blessé intentionnellement Mohamed Salah

Sergio Ramos a intentionnellement gardé le bras de Mohamed Salah sous son aisselle, provoquant une luxation de son épaule. Non seulement il a manqué le reste du match, mais il manquera aussi la Coupe du Monde de la FIFA 2018.

En outre, il a continué à agir de manière à ce que les joueurs de Liverpool commettent des fautes, ce qui a amené l’arbitre à donner à Mané un carton jaune qu’il ne méritait pas.

Sergio Ramos représente un exemple terrible pour les futures générations de footballeurs. Au lieu de gagner des matchs équitablement, il utilise des tours qui défient l’esprit du jeu et le fair-play.

L’UEFA et la FIFA devraient prendre des mesures contre Ramos et des joueurs similaires, en utilisant les enregistrements vidéo des matches pour garder l’esprit du match.

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Société

Le ski alpin aujourd’hui en France

Le ski alpin est de moins en moins un sport, c’est-à-dire avec des entraînements réguliers, encadrés et planifiés en vu de compétitions. Il est surtout un loisir et une activité de détente peu structurée.

Bien que la France connaisse encore des champions de niveau international tels Tessa Worley ou Alexis Pinturault, les compétitions de ski sont rares et globalement réservées aux jeunes locaux.

Le modèle de l’École du Ski Français (de loin la plus grande école de ski au monde) reste néanmoins d’inspiration largement sportive. Celle-ci dispose d’un quasi-monopole sur l’enseignement du ski en France.

Son activité est organisée autour d’épreuves à passer en fonction d’un temps de référence établie par un moniteur, les fameux « flèche », « chamois » et « fusée ». Pour les débutants il existe également des items techniques à valider, les étoiles pour les enfants et les degrés pour les adultes.

De plus en plus cependant les stations de ski développent des activités annexes au ski alpin. Il y a par exemple des « snow-park », des coussins d’air géants pour faire des sauts sans prendre la peine d’apprendre à réceptionner correctement, des DJ organisent des « soirées » alcoolisées en pleine journée au milieu des pistes et certaines stations valorisent officiellement la pratique du hors-piste!

Souvent le sport n’est plus la raison première des séjours. Le ski devient de plus en plus un à côté servant de prétexte à des séjours de débauche valorisant des pratiques décadentes et la recherche de « sensations fortes » (c’est-à-dire des sensations contre-nature).

Les animations dans les bars la nuit sont sur-abondantes. Les séjours à des prix spéciaux pour des groupes d’étudiants sont récurrents : les corporations étudiantes possèdent ici une grande tradition dans ce domaine.

Les domaines skiables les plus imposants ne cessent de s’agrandir et de développer de la neige artificielle, ce qui est par ailleurs extrêmement néfaste sur le plan environnemental. Certaines stations font même parvenir de la neige par camion ou hélicoptères.

Ces grands domaines monopolisent la clientèle malgré des tarifs toujours plus élevées et inaccessibles même pour les masses les moins défavorisées, et alors que beaucoup de petites stations ferment ou peinent à équilibrer leurs comptes.

La France est la première destination mondiale pour le ski avec le plus grand nombre de kilomètres de piste, le plus grand nombre de remontées mécaniques, etc.

Ce secteur est d’ailleurs extrêmement concentré avec deux monopoles se partageant la fabrication des équipements : Doppelmayr – Garaventa (d’origine autrichienne et Suisse) et Poma – Leitner (d’origine française et italienne).

De son côté, la grande bourgeoisie sombre elle aussi dans la décadence et ne s’intéresse plus depuis longtemps à la montagne ni même véritablement au ski. Ses stations ne servent que de décor à un entre-soi ultra élitiste et cosmopolite, avec des logements toujours plus démesurés, des galeries d’art contemporain, de la prostitution de luxe imposée par de riches oligarques russes, ou même un aéroport sur les pistes comme à Courchevel.

Aucune société réellement démocratique ne pourrait tolérer une telle insulte à la morale et à l’idée même de civilisation que sont ces stations de ski huppées, bien loin de l’esprit initiale ayant conduit la bourgeoisie à inventer le ski alpin.

> Lire également : Le développement du ski alpin en France

Il en est de même des autres grandes stations de ski qui sont surtout des « usines » à loisirs extrêmement polluantes et dramatiques d’un point de vue culturel.

Le recul du ski alpin en tant que sport et l’accroissement sans précédent de la taille des domaines skiables de moins en moins accessibles aux masses populaires est une manifestation de la décadence de notre société.

C’est le produit de la pression toujours plus grande que font subir les plus riches, les monopoles à la société tout entière ainsi qu’aux derniers espaces naturels relativement préservés en France.

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Politique

Le cycliste Romain Bardet à propos du sport sur France Inter

Le coureur cycliste Romain Bardet était l’invité de l’émission Par Jupiter sur France Inter jeudi dernier. C’est une émission satirique mais néanmoins sérieuse, typique de l’esprit de la gauche française.

Voici une retranscription d’un échange intéressant concernant certaines pratiques liées au sport.

On peut l’écouter à partir de 44min 30 secondes sur ce lien.

« Charline Vanhoenacker : Voici un sujet sur le sport extrême où les gens veulent se surpasser.

Il y a de plus en plus de salles et d’adeptes de cross-fit, de sports inspirés des méthodes de l’armée américaine et aussi beaucoup de vélo en salle où les gens cherchent à flirter avec le rouge.

Quasiment parfois à la suffocation, certains rendent sur le parquet après le sport. Est-ce que vous comprenez cette démarche de vouloir se surpasser ?

Romain Bardet : Non j’ai un peu de mal je vous avoue. Cela m’est un peu étranger, ce n’est pas la conception que j’ai originel du sport. C’est vrai que le sport m’a été inculqué par mes parents, c’était les grandes randonnées le dimanche à vélo, finir le col avec mon père, profiter des paysages, faire un pic-nique dans l’herbe tout simplement.

C’est découvrir des lieux, être au grand air et pour moi les séances, voilà quand faut rester à l’intérieur, c’est de la véritable torture mentale, parce que ce n’est pas la conception que j’en ai.

On a la chance d’avoir une grosse diversité des paysages en France et pleins de choses à découvrir et je pense que le sport amène aussi ce lâcher prise, quand on va dans des grandes étendues, des grands espaces, les montagnes, moi les volcans en Auvergne, justement propice à découvrir des choses et être en communion avec la nature.

Et voilà vous en parliez c’est vrai qu’il y a une grosse tendance pour ces sports un petit peu extrêmes où les gens dans un temps imparti doivent faire le maximum, un peu à l’image de la société dans laquelle on vit, dans la vie de tous les jours…

Charline Vanhoenacker : c’est vrai dans l’instantané, peu de temps pour le faire…

Romain Bardet : mais aussi il y a un vrai tendance retour à la nature avec le phénomène trail qui se développe énormément où des gens aussi ont besoin de rechercher une certaine quiétude que la nature peut apporter. »

Ceci est très intéressant. D’abord à propos de la nature, mais aussi à propos du sport. À la base du sport, il y a le plaisir et le jeu.

Les sportifs, notamment les cyclistes mais c’est aussi le cas des footballeurs, insistent très souvent dans les interviews sur le fait que cela soit une passion pour eux.

La souffrance n’est pas le but. Ce qui est valorisé par contre est l’effort, la rigueur pour arriver à ses buts. Mais toujours avec à l’esprit le plaisir.

Le plaisir est d’ailleurs collectif, y compris dans l’adversité, puisque l’adversaire dans la grande majorité des cas est respecté et salué pour ses performances, que l’on soit gagnant ou perdant.

Au contraire, les pratiques dénoncées dans l’émissions et qui sont à la mode à Paris et dans les grandes villes françaises sont typiques de la décadence de notre société.

Cela n’a aucun sens et reflète un grand malaise chez les personnes riches et branchées qui vivent dans ces grandes villes.

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Société

Le développement du ski alpin en France

Le ski alpin est traditionnellement un sport pratiqué par la bourgeoisie intellectuelle des grandes villes, notamment celle des professions libérales médicales (médecins, pharmaciens, kinésithérapeutes, etc.). Ce sont ces personnes, souvent jeunes, françaises ou anglaises, qui l’ont introduit au début du XXe siècle.

C’était un prolongement de l’activité des clubs alpins (qui ont inventé l’alpinisme), au moment de l’avènement du tourisme et du sport.

L’attrait pour la montagne exprimait le besoin de se tourner vers la nature alors que les villes étaient déjà saturées et les campagnes largement façonnées par l’agriculture et considérées comme seulement arriérées culturellement. Le Club Alpin français a par la suite largement contribué à la création de parcs nationaux sur les grands massifs de montagne, les plus connus étant ceux de la Vanoise (créé en 1963) et des Écrins (crée en 1973).

Encore aujourd’hui, les massifs montagneux sont très peu façonnés par l’humanité. La neige, la végétation, la hauteur des sommets et la rudesse des pentes, la vivacité des cours d’eau, fascinaient et fascinent largement.

La question de l’eau est d’ailleurs primordiale. Le tourisme est d’abord parvenu dans les massifs montagneux via les stations thermales (avec une fascination parfois irrationnelle pour les eaux minérales et leurs propriétés curatives prétendues). La neige est elle-même une forme particulière d’organisation de l’eau.

Le ski alpin est directement le produit de cet engouement pour la montagne par la bourgeoisie intellectuelle des grandes villes voulant se tourner vers la nature et les sensations.

C’est une manifestation évidente de la contradiction ville-campagne, mais aussi de la contradiction entre le travail intellectuel et le travail manuel : les travailleurs intellectuels voulant avoir une activité manuelle, utiliser et maîtriser leur corps, mais de manière agréable.

Tant la neige que la forte inclinaison des pentes attenantes à certaines stations thermales étaient justement propices à l’expression de sensations et à la maîtrise de son corps dans des conditions particulières que permet le ski alpin. L’attrait étant bien sûr renforcé par le plaisir d’être au « grand-air » dans un environnement inhabituel, grandiose, etc.

La naissance du ski alpin n’a été possible bien sûr qu’avec l’appuie des masses les plus avancées des populations locales connaissant la montagne et ses dangers. Elles y voyaient la possibilité d’un développement économique et culturel.

Nombres de jeunes se sont rapidement intéressé eux-mêmes au ski – la plupart des champions de ski étant par la suite essentiellement des locaux. Pour autant, c’est d’abord et surtout avec des codes culturels bourgeois et un style urbain, voir même parisien, que s’est développé le ski.

Le premier concours international de ski alpin eu lieu à Chamonix en 1907, organisé par le Club Alpin Français. La seconde édition en 1908 attira largement le « Tout-Paris » pour qui le sport était depuis plusieurs dizaines d’années une mondanité incontournable, et même un style de vie pour les éléments aristocratiques ayant une bonne condition physique et s’impliquant dans le sport.

La ville de Chamonix n’est ainsi pas tant une ville savoyarde qu’une sorte de prolongement de Paris et des grandes villes françaises, avec une architecture de type haussmannienne pour de nombreux bâtiments. C’est le cas également pour la ville de Cauterets dans les Pyrénées, autre berceau du ski en France où furent organisés les championnats de France en 1910.

Durant les années 1920 et 1930, les concours de ski étaient nombreux. Les premiers Jeux Olympiques d’hiver organisés en 1924 à Chamonix (avec 300 coureurs issus de 16 nations) eurent un retentissement considérable. La France était au cœur d’un mouvement culturel et sportif de développement des sports d’hiver, à tel point que fut développé dans les années 1930 un style proprement français : une méthode de ski français.

Cette technique de ski était d’abord une recherche d’efficacité qui permit à son initiateur Émile Allais de devenir un des plus grands champions de sa génération. Il est né à Megève en 1912, c’est-à-dire avant même que le village devienne une station de ski. Ses parents y tenaient une boulangerie et lui-même était porteur de bagages à ski pour les premiers touristes dans sa jeunesse.

Sa méthode sera ensuite popularisée avec l’appuie de la fédération française de ski et la publication d’un livre, puis d’un livre illustré. L’École Nationale du Ski Français qui a vu le jour à la même époque sous l’impulsion de Léo Lagrange, ministre du Front Populaire des Loisirs et des Sports, reprendra directement cette méthode française. Elle sera ensuite diffusée après la guerre via les moniteurs de l’ESF (Ecole de Ski Français), connus pour leurs « pulls rouges ».

S’est alors développée une attitude autour du ski, non forcément liée à la compétition mais en tout cas avec la volonté d’avoir une technique maîtrisée et efficace, en plus d’un style sophistiqué, élégant « à la française », urbain.

Nul hasard au fait que cette méthode française trouve son origine à Megève puisqu’il s’agit là d’une station créée de toutes pièces autour du village initial par la famille Rothschild avec l’ambition d’en faire une station française.

Il lui fallait les codes culturels de l’aristocratie et de la haute-bourgeoisie française qui ne souhaitait pas être mélangée avec l’aristocratie allemande dans les stations suisses. On a là la rencontre entre les masses habiles et connaissant la montagne et les hautes sphères de la société française véhiculant un style français qu’elle appelle « art de vivre à la française ».

A partir des années 1950/1960 le ski et les stations de sport d’hiver se sont largement développées en France, sous l’impulsion de l’État qui a mis en place un « plan-neige » à partir de 1964 jusqu’à la fin des années 1970. Émile Allais a d’ailleurs beaucoup œuvré pour cela. Via des classes de neiges, des colonies de vacances, des possibilités par les comités d’entreprises, une partie des masses a alors eu accès au ski, ne serait-ce que sporadiquement.

Durant les années 1970, les vacances en famille au ski sont devenues accessibles pour la petite-bourgeoisie et les parties les moins pauvres des masses populaires. Cela a largement contribué à faire des vacances au ski non pas un plaisir sportif en tant que tel mais surtout un faire-valoir, une sorte de « must have » petit-bourgeois afin de s’imaginer riche, de s’imaginer appartenir à la bourgeoisie.

Ce genre d’attitude est très bien illustrée dans le film Les Bronzés font du Ski de 1979. Les médias avec leurs reportages redondants chaque année lors des vacances d’hiver relaient largement cet état d’esprit aisément détestable de par sa dimension régressive.

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Les footballs et la nécessité de l’esprit du jeu

Le football et le rugby sont d’après les historiens des variations de la soule (ou choule), un jeu de balle assez brutal. Une certaine forme de ce jeu serait toujours pratiquée traditionnellement dans certaines régions en France.

Depuis 1850 environ, les institutions sportives ont fait beaucoup d’efforts pour séparer football et rugby de la soule d’une part, et pour les distinguer l’un de l’autre d’autre part, par le développement de règlements spécifiques.

Le règlement officiel du football (Laws of the Game en anglais) comprend dix-sept règles écrites augmentées de quelques annexes. Néanmoins, il est dit de manière très officielle qu’une Law 18, la dix-huitième règle, supplante toutes les autres.

Selon cette règle non-écrite, le bon sens doit être de mise dans l’interprétation des règles du jeu afin de ne jamais aller contre l’esprit du jeu. Ce « Spirit Of The Game » constitue donc l’essence du football.

D’après les commentateurs, l’esprit du jeu réside dans une certaine justice naturelle, une fluidité dans la partie et dans le fait que l’issue du match doit être le produit de l’action des joueurs. Il semble donc que pour les juristes du football, l’essentiel réside dans la satisfaction qu’éprouve les joueurs à disputer une partie entre eux.

Jouer collectivement avec un ballon est une activité sportive très populaire. On se retrouve entre amis, entre deux cours, après l’école ou le travail, pour jouer.

Dans la pratique, on s’écarte des règlements du sport tel qu’il est imposé dans les stades. Entre plaisir et contraintes matérielles, les joueurs créent de nouveaux jeux. C’est ainsi que les fédérations sportives courent après les sports « de rue » pour tenter de référencer et de fixer ces jeux populaires : five-a-side football et « rugby à toucher » sont des exemples.

Les équipes mixtes de 5 ou 6 joueurs se rencontrent dans des lieux du quotidien, sur des terrains plus ou moins improvisés. Même si chacun cherche à faire triompher son équipe, pas besoin d’arbitre et encore moins d’arbitrage-vidéo. Il s’agit d’interpréter les règles afin que tous s’accordent au final sur le fait que la justice règne durant la partie.

Ignorant le conservatisme des institutions sportives, les joueurs et les joueuses ont ainsi pu imposer la mixité dans leur pratique du football et du rugby. L’interdiction des placages, des tacles et de tout contact violent, la réduction de la durée des parties et la simplification des règles permettent un jeu fluide et rapide.

Dans ces football populaires, c’est bien l’esprit du jeu qui domine.