La bourgeoisie récupère ses profits.
L’inflation n’avait pas jusqu’à présent été aussi élevée en France que dans la plupart des autres pays européens. Cette fois, c’en est bien fini. Si les prix des produits de grande consommation vendus dans la grande distribution (les hypermarchés et les supermarchés) n’avaient pris que 0,3% d’inflation au moins de septembre, en octobre cela a été de 1,5%.
Sur un an, cela donne 10,6% d’inflation. Pour les prix hors grande distribution (supérettes et épicerie du coin), l’inflation est la même, après avoir pris 1,3% au mois d’octobre.
L’inflation est naturellement très inégale selon les produits. Il est intéressant ici de voir que l’un des fameux arguments contre le véganisme comme quoi cela coûte cher tombe totalement à l’eau, puisque c’est la viande qui voit ses prix exploser.
Cela étant, c’est vrai également des produits simili-carnés, une bonne occasion donc de quitter les produits d’alimentation transformés pour retourner aux mélanges céréales – légumineuses historiquement développés par les peuples (pain et lentilles, semoule et pois chiches, maïs et haricots rouges, sésame et pois chiches, etc.).
Car l’inflation touche en fait tous les produits transformés industriellement. Plus le produit est transformé, plus il va coûter cher. La faute en est d’une part à la pénurie provoquée dans de nombreux domaines par la pandémie, d’autre part par la crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine…
Ces deux aspects en formant un troisième, par synthèse : la bourgeoisie compte rattraper ses profits aux dépens des travailleurs consommateurs.
Si au 19e siècle en effet, la base consommatrice était étroite, ce n’est pas le cas au début du 21e siècle. Au 19e siècle, le bourgeois était gros, les travailleurs minces ou maigres. Au début du 21e siècle, c’est le contraire. Au bourgeois les produits de qualité, aux travailleurs la quantité médiocre. Le bobo va de temps en temps au resto, le travailleur tout le temps au McDo ou au kebab.
L’élévation des prix permet ainsi un rattrapage des profits par la consommation. Naturellement, la perte de valeurs de l’argent joue également pour ceux qui en ont beaucoup. Sauf que ceux qui ont beaucoup d’argent en font quelque chose, alors que ceux qui en ont peu ne le peuvent pas.
On notera d’ailleurs ici un aspect important qu’il reste à étudier. Il y a la légende selon laquelle acheter un logement coûte moins cher, à terme, que payer un loyer. Cela est entièrement faux. Les études économiques à ce sujet sont formelles. Elles ne sont évidemment pas étalées dans la presse ni les médias, et pour cause ! Le logement est en fait un vecteur de consommation capitaliste et de sens de la propriété absolument essentiel au capitalisme moderne.
Cette légende profite en réalité de la constatation de l’élévation massive des prix des logements depuis une quinzaine d’années. Mais outre que c’est une période particulière qu’on ne peut pas généraliser, cela profite concrètement aux propriétaires de dizaines, de centaines, de milliers de logements, pas au propriétaire individuel. Ce dernier voit son logement prendre de la valeur, mais s’il le revend et qu’il veut en prendre un autre, c’est le serpent qui se mord la queue.
De plus, les gens oublient systématiquement l’apport financier massif de papa-maman dans l’opération d’achat du logement. Et ils sont également contents d’être propriétaire, au point d’oublier psychologiquement les frais divers et variés.
Il y a là un aspect important de la question de l’inflation, parce que les « classes moyennes » vont payer plein pot dans la période actuelle, l’inflation visant à les appauvrir pour rattraper les profits capitalistes perdus avec la crise ouverte en 2020.
L’inflation correspond à la polarisation de la société entre bourgeoisie et prolétaires, avec la prolétarisation de la petite-bourgeoisie si massive encore en France. On n’en est qu’au début du processus. Les faits sont là toutefois : ce processus est enclenché.